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der grüne Affe - Page 112

  • Délire, salon

     

    SI JE DOIS

     

    S'il faut écrire ainsi devant je me livre au massacreet tel déferlement de haine ignominie pour tout ce qui m'entoure que j'entre en autohaine, en meurtre et de moi-même et cela restera comme on a dit aux grimaciers Tu seras défiguré pour toujours. Après quoi, ivresses de larmes et d'épuisement, portails de Grande Dépression, commencement de vivre – je ne remonte pas – c'est trop de prix – au fond de moi gît la mort. La Mort honteuse.

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    MON SALON 20 10 2052

     

    Z. tricote devant moi. Je ne la voyais pas devenir comme ça. Mince, tout en vert, de longs cheveux de chaque côté. Je lui parle. Elle fait des progrès au violon. Elle incline la tête et me parle de violon. Je ne savais pas qu'elle deviendrait une vraie femme. On ne décrit pas sa fille. C'est inconvenant. Elle est issue du temps ; étrange, médiévale, ou 1925, avec son pantalon collant et son « haut » flottant, vert pâle sur canapé vert foncé. Anne sort de son lit, j'ai prié pour elle cette nuit ; elles partent toutes les deux, je n'ai plus que la télé, que je comptais décrire, qui est bien commode car éloignée de toute psychologie. Sonia revient s'assoir. On dirait un profil de grande maigre, au nez long et droit, légèrement oblique.

     

    Je ne la connaîtrai que jusqu'à 52 ans, l'âge de la mort de la Vierge Marie – pardon, sa dormition. Paupières baissées sur le tricot, une longue aiguille horizontale. Et la télé, vaste fenêtre carrée vert-noir où se reflètent la lueur et le petit-bois de la baie derrière moi. Des cassettes audio empilées flanquent la télé sur la droite avec leurs titres, qu'on ne repasse jamais. Et trois appareils mystérieux sur sa tête : un magnétoscope, gras d'inutilisation, un lecteur de DVD brillant, plat, perfide, et un « Ciné-Cinémas » que je ne puis désigner autrement, indiquant 15 h 23, avec un petit point rouge. Plus haut quatre télécommandes dont deux seulement sont utilisées. La télé flanquée donc et surmontée de trucs inutiles.

     

    Des tableaux non moins inutiles peints par mon épouse allongée, sur lequel j'ai appelé des bénédictions pour qu'elle maigrisse. Je décris ces tableaux en d'autres lieux, destinés à d'autres tiroirs. Le tout sur un mur crépi paille propre, à droite, sale et foncé à gauche. Il faut mentionner (dans mon inventaire) le dessin encadré d'une femme au profil enfoui dans les bras qu'elle tend devant elle, dégageant le sein ; des poches en plastique et deux registres, vert et violet (le premier tenu par des sangles obliques, l'autre barré sur son dos d'une longue étiquette blanche et vierge). Un tabouret soutient tout cela, sans autre utilité. Tous les objets de chez moi regorgent d'inutilité, je m'y sens moi-même un peu perdu et gratuit.

     

    Ce que contient « le meuble de télévision », rescapé de déménagements et d'héritages, est également inutile : le tiroir blond foncé, avec deux poignées, regorge de jeux de cartes et de croquis de branchements, de notices en tous genres. Et au-dessous, derrière une porte aux moulures sans style, d'autres films jalousement gardés : dramatiques, ballets, jamais revus, car mieux vaut toujours

     

    pour moi se retremper aux actualités que de ravasser de vieilles lunes filmées, fussent-elles chefs-d'œuvre. Mon œil descend : il y a sous le meuble aux moulures inférieures vaguement festonnées une prise multiple et blanche, des serpentements de branchements électriques mous et sales, une boîte dont je ne vois que la tranche, ou un carton vide (j'irai vérifier). Sur le sol, à droite, un écorché de plâtre lève au-dessus de ses yeux, comme pour se protéger du soleil ou parer un coup, un coude d'écorché. On lorgne à l'endroit des couilles, et on les aperçoit, pitoyables, entre les deux cuisses dont l'écorchure dégage une abondante et tendineuse musculature. Cette statue sert ou pourrait servir de modèle, rien ne servant ici-bas, ni dans une autre vie.

     

    L'écorché tourne le cul à une pile de livres, en bois, œuvre d'art de toute beauté, qui m'a tapé dans l'œil et désormais se couvre de poussière à l'angle de l'âtre ; je ne vois ce dernier que par-dessous une table brun doré. Ainsi qu'une statue allongée : deux corps enlacés nus et debout, plus devinés qu'à vraiment décrire, formant chenet. Nous n'avons jamais allumé le feu dans cet âtre, pour ne rien détériorer de ces œuvres oubliées. Je vois une chaise paillée, sagement rangée sous la table. Ses pieds droits posent sur le pavé : diverses plaques rectangulaires, en angles droits. Amen.

     

  • Henri III repasse les plats

     

    Parlons donc d'Henri III, dernier des Valois, roi de France, 1574-1589. Et mettons tout de suite les choses au point : il ne faut pas en rester, et jusqu'à quand resterons-nous à cette image du roi pédé ? "Allô Henri III ? - C'est elle-même !" Il y a tromperie sur la marchandise : Jacqueline Boucher, autrice de l'ouvrage éponyme, reprend la thèse de Philippe Erlanger dans sa grosse biographie : n'en déplaise à certains petits messieurs qui aimeraient bien l'introduire dans leur cercle, Henri III ne fut pas homosexuel, en tout cas moins que Louis XIII. Henri fut couvert de boue par les braves catholiques de l'époque, plus calomnié encore que Louis XVI. Nous avons surtout conservé les aspects folkloriques de ce grand roi qui essaya le plus possible de maintenir l'unité d'un royaume déchiré par les guerres civiles.

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    Ainsi de ce fameux symbole du bilboquet : sa vogue n'a duré que quelques semaines à la cour – sur quinze ans de règne, c'est peu. Sa femme Louise de Lorraine fut profondément amoureuse de lui, et ne se remit jamais de son assassinat. Pourtant il posséda, roi de France oblige, nombre de maîtresses qu'il s'efforça de lui cacher. On lui attribua même un enfant caché. "Mais les mignons ?" direz-vous – car vous n'êtes pas près de lâcher prise, "il n'y a pas de fumée sans feu". Là encore, détrompez-vous: sous Henri IV aussi nous trouvons des mignons, sans que le Vert Galant ait jamais été susceptible de pédérastie. "Mignon" signifiait tout bonnement "favori". Les satiriques ont parlé de "visage fardé" : mais l'expression signifie aussi bien "empreint de dissimulation", "masquant ses sentiments".

     

    Qu'on l'ait vu travesti au Bal des Amazones ne prouve rien de plus : tous les gentilshommes s'étaient pareillement mêlés à ce bal, et les femmes y parurent travesties en hommes. Nous avons vu de tels amusements au carnaval de Vatan dans l'Indre ; cela ne peut prouver l'homosexualité de toute une population ! En revanche, le cadet du roi, duc d'Alençon, était, lui, complètement homosexuel ; mais comme il penchait du côté des catholiques, pas un pamphlet, on disait un pasquil, ne l'atteignit, lui, cible facile et autrement scandaleuse ! N'oublions pas que l'homosexualité en ce temps-là était passible du bûcher ; que si Henri III en avait tâté, on en retrouverait la trace dans maints écrits, en maintes allusions.

     

    Or il se trouve que nous en sommes toujours réduits aux mêmes sources, les pamphlétaires extrémistes, qui finiront par le faire assassiner sur sa chaise percée en 1589, parce qu'il voulait laisser le trône à son lointain cousin Henri de Bourbon, de religion réformée... Le souverain pressentait le drame de sa succession et fit de nombreux et ardents pélerinages avec son épouse pour obtenir la grâce d'avoir un enfant. Si j'ai attaqué bille en tête sur ce point, c'est parce qu'il me semble capital de détruire une légende confortable autant que calomnieuse. L'autrice d'ailleurs ne traite ce thème qu'incidemment, à sa place, à l'intérieur de l'ouvrage, et sans lui accorder plus d'impportance qu'il n'en mérite, avec un certain dédain, usant des arguments que je viens de vous présenter. Les chapitres envisagés dans le livre traitent de choses beaucoup plus sérieuses : le cérémonial de cour, ses fastes, la façon de gouverner, l'esprit baroque, l'atmosphère intellectuelle et l'italianisation de la cour.

     

    Il ne s'agit pas d'une étude chronologique mais d'une étude par thèmes, par tranches, comme vous l'avez vu par la disposition des chapitres. Le lecteur navigue ainsi du début à la fin du règne, et si l'on n'est pas au fait des évènements, c'est un peu désorientant. C'est ainsi que l'on fait plusieurs fois allusion au "fameux duel des mignons", sans nous dire jamais ce qui l'a provoqué, ni quels en furent les protagonistes. Cependant nous sont présentés des tableaux fort convainquants fixés dans nos mémoires, comme celui de ce faste puissamment déployé. Comme il n'existe pas d'administration à l'échelle nationale, le Roi doit s'assurer la fidélité de ses vassaux en les comblant de cadeaux et de privilèges.

     

    Puis, après avoir fait leur "quartier de cour", c'est-à-dire un quart d'année, un trimestre, obligatoire afin de rester dans les faveurs du roi, les seigneurs s'en retournent dans leurs provinces pour y faire appliquer la loi royale. Comment se logeait la cour ? Versailles n'étant pas construit, c'est au Louvre qu'il faut être, et c'est à Paris que l'on cherche à loger.

     

     

     

    / Lecture de la p. 47 /

     

     

     

    Nous le voyons, Jacqueline Boucher n'avance rien qui ne soit prouvé par documents, datés et localisés. Rien de plus sérieux, de plus scientifique, de plus historique, pour autant que l'histoire soit une science. C'est ce qui donne à cet ouvrage cette physionomie sérieuse mais accessible, sans érudition épouvantail. Nous abordons un autre domaine, à savoir l'influence du roi sur les mariages de cour. Louis XIV, plus tard, l'exercera ; mais laissera en fait ses courtisans, en général, fort libres de convoler en justes noces.

     

     

     

    / Lecture des pages 94 et 141, du quatrain de cette dernière en particulier /

     

     

     

    L'ouvrage s'achève par une déclaration de reconnaissance inattendue de la grande piété du roi. Mais quoi qu'il fît, on l'attaqua : s'il eût été libertin, on l'eût sali, mais fondant un ordre ou érigeant une chapelle, à quoi se reconnaissait en ce temps la plus profonde religiosité, on l'accusa de jouer la comédie. À la fin, comme chacun sait, il fut assassiné par Jacques Clément, moine, alors qu'il assiégeait sa propre capitale. Henri IV lui succéda, Paris vaut bien une messe, mais nul n'accède au plus profond des êtres...

     

    / Lecture de la p. 188 /

     

    Le livre de Jacqueline Boucher remet en place, c'est-à-dire au placard, bien des idées toutes faites sur la dissipation de la cour, qui fut bien plus d'argent que de débauche. Toutes les cours procèdent de même... Le plus spécifique d'Henri III sera peut-être cette riche et brillante italianisation, toute relative d'ailleurs, puisqu'il s'agit d'Italiens de la deuxième ou troisième génération, installés à Lyon par exemple pour le commerce de la soie. Un ouvrage très documenté, à tous les amoureux de l'histoire exacte : Jacqueline Boucher, Henri III.

     

  • Montesquieu l'érudit

     

    Après bien des notules érudites, après tant de poussières soulevées, nous en sommes à présent à celles de Louis, dit le Débonnaire, fils de Charlemagne. Auguste avait fait ouvrir, nous dit Montesquieu, le tombeau d'Alexandre. Interrogé si l'on devait ouvrir ceux des Ptolémées, il répondit : “Je suis venu voir le Roi, non les morts”. Le baron de Labrède interroge les successeurs de Karolus Magnus : ce sont là des morts. Louis fait crever les yeux de son neveu, multiplie les inimitiés : “violents”, “irrécociliables”, “ardents à l'offenser”. Il confond les vengeances personnelles avec les affaires de l'Etat. Est-ce donc par antiphrase qu'il fut nommé le Débonnaire ? Ennemis “insolents”, “déterminés à le perdre”. Charlemagne épuisait sa noblesse à le suivre de campagnes en campagnes ; celui-là répand ses cruautés absurdes. “Et” ses ennemis “l'eussent perdu deux fois sans retour, si ses enfants, dans le fond plus honnêtes qu'eux, eussent pu suivre un projet, et convenir de quelque chose.” Ce qui laisse entendre que les fils de Louis le Débonnaire ne parvinrent pas à s'entendre avec ses ennemis, par esprit brouillon, et dépourvu de revanchardise. Il me semble qu'ils étaient trois, et se partagèrent l'empire. Montesquieu continue “le même sujet”, afin de ne pas lasser le lecteur par de trop longs chapitres : “La force que Charlemagne avoit mise dans la nation subsista assez sous Louis le Débonnaire, pour que l'Etat pût se maintenir dans sa grandeur, et être respectée des étrangers.” Que pouvons-nous ajouter. Commode après Marc-Aurèle commença tout de suite à tout ruiner.

     

    Les fils bien souvent sont plus cons que leurs pères. “Le prince avoit l'esprit foible ; maisla nation étoit guerrière.” Ce qui semblerait risible aujourd'hui. Mais conserver son esprit d'aujourd'hui dans les faits historiques est la ruine même de la notion d'histoire. Nous lisons en même temps des élucubrations déclinistes. Pourtant elles se confirment chaque jour davantage. Être guerrier est devenu le pire des péchés. Même se défendre est sévèrement puni. Mêler ici nos préoccupations contemporaines semble dérisoire. “L'autorité se perdoit au dedans, sans que la puissance parût diminuer au dehors.” C'étaient des temps tribaux. Il y avait le pays, et l'extérieur du pays. Les déplacements étaient aventureux.

     

    Le cheval régnait. Qui peut imaginer cela ? Dieu imprégnait tout. Il était pris au sérieux. “Charles Martel, Pépin et Charlemagne gouvernèrent l'un après l'autre la monarchie”. Charles Martel était maire du palais, élu. Il devint roi. La seconde race, des carolingiens, succédait à la première, mérovingienne. On se battait à coups de masse. Les Arabes ou Sarrasins se faisaient repousser sans que cela fît tant d'histoires. Charles Martel est pris pour un fasciste, dans une perspective de sottise absolue. Pépin reste oublié : “Monté sur un lion, je suis aussi grand qu'un autre”. Charlemagne sera bientôt pris pour un roi décapité. Je ne connais plus rien que l'ancien. Il faut des gardiens de mémoire. “Le premier flatta l'avarice des gens de guerre”, entendez leur cupidité.”Donne aux soldats, et néglige tout le reste” : derniers mots d'un empereur romain. “Les deux autres, celle du clergé”.

     

    Le clergé régnait sur tous, comme aujourd'hui les économistes. On ajoutait foi aux fables des uns comme on vénérera les autres, alors qu'ils ne sont tous en fait que des astrologues. Et le clergé leva la dîme pour sa subsistance, obtint l'équivalent de fiefs. On se lavait à l'eau froide. La vie était saine. On mourait jeune. Les curés, les évêques, plus longtemps. “Louis le Débonnaire mécontenta tous les deux”. L'épée, le goupillon. Mon père disait que c'était un bon roi, vu son surnom sans doute. Dans la première édition de L'Esprit des lois, Montesquieu dit que c'était ses enfants. Il a rectifié. Louis le Germanique, Lothaire, Charles le Chauve. Dis-moi si je me trompe. Je ne sais pas à qui je m'adresse. “Dans la constitution françoise, le roi, la noblesse et le clergé avoient dans leurs mains toute la puissance de l'Etat”. Cela plaisait à Montesquieu. Il ignorait qu'on le classerait à tort parmi les précurseurs d'une certaine “Révolution française”, que personne n'a comprise, puisque je ne l'ai pas comprise.

     

    Dont “les trois quarts et demi du monde ignore qu'elle a eu lieu”. Montesquieu veut établir les droits sacrés, inamovibles, de la noblesse, dont il fait partie. Noblesse de robe je crois. De Secondat de Labrède, ignorant que les têtes prolétaires en grand nombre tomberaient sous l'impulsions de génie fanatiques. Aller-retours d'un temps à l'autre, comme Chateaubriand, comme moi comme moi comme moi. “Charles Martel, Pépin et Charlemagne se joignirent quelquefois d'intérêts avec l'une des deux parties pour contenir l'autre, et presque toujours avec toutes les deux.” Du paysan, il n'est pas question. Les hommes ont une histoire. Les animaux n'en ont pas. Les hommes répètent sans cesse le même cercle.

     

    Les Chinois disaient : “Nous avons eu Dieu sait combien de ces fameuses “Communes” dont vous nous bassinez. Nous avons vécu tout ce que l'Occident vit.” Les humains se répètent. Rentrons la tête dans le sable et naviguons à vue de grains. “...mais Louis le Débonnaire détacha loin de lui l'un et l'autre de ces corps.” Ne reste que l'éloignement, le froid aux pieds et l'envie de lire, de poursuivre sans fin sa lecture tant qu'elle est bonne et instructive. Il est bon de lire, afin de répéter. D'aligner des plaisanteries comme des bidasses au mur. “Le reste du chapitre est une addition de 1758” - mais il était mort depuis trois ans, votre auteur : l'a-t-on restitué d'après ses notes ?

    Le vieux Bordeaux.JPG

     

     

    Qui a rédigé cette fin ? A-t-on repris une édition antérieure ? “Il indisposa les évêques par des règlements qui leur parurent rigides, parce qu'il alloit plus loin qu'ils ne vouloient aller eux-mêmes” : des règlements progressistes, alors ? Le Débonnaire, progressiste ? C'et le même que Louis le Pieux. Je viens de le vérifier. Mon père me l'avait appris, nous reprenions toute l'Histoire de France au début de chaque année. Jamais nous ne dépassions Waterloo. L'histoire pour mon père s'arrêtait à Waterloo. Louis le Pieux Débonnaire mourut en 840. Ses enfants se révoltèrent contre lui. “Il y a de très bonnes lois faites mal à propos”. Dans la bouche de Montesquieu c'est un blâme de poids. Comment peut-il y avoir des lois “mal à propos” ? Est-ce parce qu'il fallait consolider l'Empire à la mort de Charlemagne ? Jouer le grand rassembleur ? Les évêques, accoutumés dans ces temps-là à aller à la guerre contre les Sarrasins et les Saxons, étoient bien éloignés de l'esprit monastique”. Voir en effet la Chanson de Roland. Ils ne répandaient pas le sang, et pour cela ne tuaient qu'à la masse... 

     

  • La machine à rêves

     

    52 03 19

     

    Le roi mon père est désolé : quelqu'un a tailladé le flanc de ses chevaux, acte de cruauté. C'est moi qui l'ai fait. J'espère qu'il oubliera, je me cache dans le palais, mais il revient de ses occupations, me prend par les épaules et me fait part de sa colère et de son chagrin. La fin vient de m'échapper. Je me réveille dans une grande culpabilité : j'ai tué un cheval, les deux, car ils ont fini par mourir. Quel cheval ai-je tué, très jeune ? Le “Ça” ? ...Toutes les conversations ont eu lieu en russe, mon père étant “roi de Russie” - mais pas “le Tsar”.

     

     

    52 03 25

     

    (...) l'imagination scripturaire. Je saute sur des icebergs d'île Flottante, à Khartoum, tandis qu'Annie téléphone 25 mn à Jean V. Elle est très joyeuse, et moi je ne m'en tire pas trop mal, en dépit du caractère spongieux de ces grosses masses jaunâtres. Ce n'est que la fin d'un rêve.

     

    52 03 28

     

    Balustres roses.JPGFin du deuxième cauchemar de la nuit. Salle des profs d'Andernos. Corinne dit qu'elle m'a rendu une valise contenant je ne sais quoi. Je lui ai fourni des éléments pour éditer quelque chose sur l'ordinateur, mais il manque un élément. “Est-ce que c'est en D.L. ou pas ?” Je lui réponds que cela ne veut rien dire pour moi. Elle pleure en prenant les autres à témoins : je devrais savoir depuis le temps certains éléments évidents d'informatique. Elle est très fatiguée, une de ses collègues doit sans cesse monter et redescendre 8 chaises de sa salle de classe après chaque demi-journée de cours.

     

     

     

    52 03 29

     

    A. - Vois Troppstein à l'hôtel avant d'aller à l'enterrement de son père. Elle est malgré tout joyeuse de me voir. Elle m'accompagne à Bordeaux-Benauge, me place sur un socle de ciment et m'étreint en riant. Je ne peux finalement aller à l'enterrement car il est trop tard. Je reviens par le Pont de Pierre où se déroule une manifestation de femmes arabes voilées ou non prônant la fraternité. Je passe le pont suspendu en me retenant au-dessus de l'eau, tâtant les aspérités du parapet et disant des formules sans signification. Parvenu dans un bus avec d'autres dont une bonne sœur, je dis “Heureusement qu'ils ne se sont pas aperçus que c'était de l'hébreu, autrement je me faisais écharper. “Ma sœur, je m'accuse d'avoir menti.

     

      • Ça ne fait rien, me dit-elle en souriant.

     

     

     

    B. - Avec le juge Jean-Pierre à l'hôtel, je dispose ses bagages sur des sièges de hall, il va aux WC, arrivent des sportifs qui s'assoient parmi l'encombrement. Ils s'aperçoivent je ne sais comment que les toilettes sont occupées par Jean-Pierre et chantent une chanson anti-pédés contre les “divanisés”. Je cherche une cabine téléphonique pour avertir mes parents que je serai, et puis j'ai 45 ans tout de même. Je pars seul les rejoindre...

     

     

     

    52 04 03

     

    Je suis arrivé à bicyclette dans un village, suivi par des observateurs, traînant un immense polochon blanc. Tournant à gauche, je monte vers une église que des touristes visitent. Mais il n'y a pas d'issue, je redescends. Le polochon s'est enroulé autour du monument aux morts de l'église sur sa butte, et d'une maison en construction dont les ouvriers se trouvent gênés. Enfin, d'une secousse, tout se dégage. Dans une rue étroite et peuplée d'élèves, le polochon se fait tirer, plier : j'explique qu'il faut le replier au lieu de jouer avec lui, une structure raide analogue à une longue table de ping-pong y aide, tous les adolescents rigolent.

     

    Je suis déçu que le polochon soit resté humide. Je reviens à pied sur les lieux, des visites se passent encore, un concierge dit que des gens sont en train de prendre leurs tickets (il va être 13 h, c'est la dernière visite). Annie et moi nous hâtons vers une représentation scolaire (les tréteaux étendus sur es tables et des chaises d'école) : deux professeurs jouent deux personnages tragiques habillés l'un de noir et blanc, l'autre de bleu et brun, patauds, burlesques, à rayures. Leur rôle consiste pour le premier à déplorer sa vie ratée, pour le second à déplorer que l'un d'eux ait empêché l'autre de se réaliser.

     

  • Matrice

     

    52 02 25

     

    A. Je suis prisonnier, on m'emmène dehors en promenade. Je m'enfuis vers l'intérieur, profitant d'un moment d'inattention de la bonne sœur petite et boulotte qui me sert de gardienne. Des doubles portes s'ouvrent, il s'agit d'un appartement bourgeois ordinaire à l'ancienne. Ma course est comme ralentie, mais je me dis que la bonne sœur sera également ralentie. A un moment donné, les doubles portes ne s'ouvrent plus. Forte angoisse.

     

    B. Chez nous, au sommet d'un bâtiment. Annie ramène une consœur spécialisée dans l'artisanat. Je suis tout fier qu'un Courrier des Lecteurs de Télérama mentionne et cite mon Singe Vert : une phrase emphatique sur ma lutte pour plus de justice. Le lecteur conclut : “On verra bien”. Un autre journal me mentionne également. Seulement les deux femmes sont plutôt pressées de faire le repas avec des provisions d'été qu'elles ont rapportées. L'autre dit son prénom, je me plonge dans une revue d'artisanat, sans aider. Les articles que je mentionne ensuite à table sont accueillis avec une indifférence polie. Là encore, angoisse.

     

     

     

    52 03 03

     

    (...) grâce à la voiture de son frère (j'apprends ainsi son existence). Elle est un peu plus jeune (80 au lieu de 90) et les os de son visage se marquent plus (il s'agit de Mme N.). Je réponds que je préfère utiliser ma voiture, pour être plus libre. Elle me l'a demandé deux fois – la deuxième fois, elle me dit que ma femme leur avait laissé une liste de courses à faire et me la rend par la fenêtre, or il s'agit plutôt d'une facture d'achats déjà effectués, au supermarché. Flash et moirures.JPG

     

    Putain le rêve mystique...

     

     

     

    52 03 05 Rêve se terminant par la vision d'un tennisman immobile, rattrapant et renvoyant infailliblement les balles, en faisant des mimiques supplémentaires, comme semblant de téléphoner, d'esquisser des gestes, avec l'aisance impassible et ironique d'un petit bonhomme brun de Gottlib aux bras multiples.

     

     

    52 03 10

     

    Touriste au Portugal, je suis logé dans ce qui s'appelle “chambre appartement” extrêmement fruste – avec un jeune Indien foncé souriant, qui fait une vague vaisselle sur une pierre à eau ou évier. Je découvre donc que le matin je devrai moi aussi me laver à l'eau froide, et me nettoie la figure avec un gant usé. Quant à lui, qui travaille et se lève tôt, il se propose de me faire chauffer une bouillotte. Arrive le propriétaire, grand rouquin, qui me reparle du prix et veut y ajouter 200 euros pour un professeur de médecine dans le besoin, épuisé par sa nombreuse clientèle. Je le laisse parler, feignant de ne pas comprendre, d'ailleurs son portugais est à peu près incompréhensible, le mien aussi, celui de l'Indien aussi. Je lui dis qu'il devrait l'écrire. Finalement nous réglons cette histoire de location à de grands guichets de marbre, sorte de banque ; il ne me reparle plus du professeur. Pour revenir, j'emprunte une plate-forme de train surchargée, de laquelle j'aperçois un avion flambant neuf et au design Twingo. Il hésite dans un ciel de banlieue, se disloque et tombe sous les commentaires apitoyés de tous. La plate-forme passe près des débris qui occupent un espace assez restreint, je vois des rangées de sièges inoccupés, de la partie arrière, espérant qu'il n'y a pas eu trop de victimes.

     

    C'était la ligne Dakar-Lisbonne. La plate-forme continue son chemin, je dois lever la jambe pour ne pas me la faire happer par les rails...

     

     

     

    52 03 14

     

    A. Dans une ville d'Amérique du Sud où règne un vice-roi, tout le monde vit dans le luxe, avec des vêtements tout brodés d'or, dans un raffinement extrême. Chacun passe son temps à se parer, à se laver, en vue d'une magnifique représentation théâtrale. Je me nettoie successivement les deux bras avec solennité. Tout le monde se reçoit, parade dans les rues. Je rencontre un énorme gouverneur auprès de qui je dois m'excuser de mon attitude jadis avec Chimène. Donc, je suis le Cid. Le tout se passe dans la plus extrême dignité, au cours d'une réception.

     

     

     

    B. Annie part huit jours à Paris, sans regret. Je reste seul avec Lazare, amant délaissé par Marie-Christine, et qui doit lui aussi partir bientôt. Sous son nez je la pelote (sa tête est dissimulée sous un foulard) et elle va m'escalader en accélérant son rythme respiratoire. Il ne se rend compte de rien ou ne veut pas s'en rendre compte. Je reste avec elle contre une vitrine d'épicerie-librairie. Le gérant sort pour nous dire de ne pas nous appuyer. Nous suivons des yeux une demi-dousaine d'hommes emportant une espèce de caisse ongue et lourde recouverte de tissu bleu pâle. Ces deux rêves se déroulent dans une atmosphère de richesse et de plénitude.

     

  • L'Hégire

     

    1. FETES RELIGIEUSES MUSULMANES

    2. H E G I R E (« Ras el 'Am », Jour de l'an)

    3. GENERALITES

    4.  

    5.  

      Le tapis de feuilles mortes.JPG

      Premier de l'an musulman, commémorant le fait que Mahomet ait quitté La Mecque, où il se sentait menacé, pour parvenir à Yathrib (qui devint Médina an-Nabi, « la Ville du Prophète »). C'est la naissance de l'Oumma (communauté musulmane) : cette date, et non pas celle de la naissance ou de la mort du Prophète, fut fixée par le calife Omar, second calife des musulmans, après Abou Bakr. Le jour de l'Hégire, quoique souvent férié, ne correspond à aucune fête particulière dans la communauté musulmane. Son nom dérive de « hijra », « émigration », « exil ». Avant cela, les années se comptaient en fonction de la montée sur le trône de tel ou tel monarque, par exemple. Les musulmans appellent cette époque de confusion chronologique la ,djahiliyya : le "-temps de fureur".

    6.  

    7. DATE

    8. Le départ de Mahomet, à l'âge de 52 ans, se situerait historiquement le 9 ou le 22 septembre 622, mais la tradition préfère la date du 16 (ou du 15) juillet, pour qu'il coïncide, justement, avec le nouvel an lunaire. Bien entendu, il ne suffit pas de retrancher 622 à la date commune pour obtenir la date musulmane ; l'année lunaire s'écoule, en quelque sorte « plus vite » : le calendrier précédent comportait des mois intercalaires, que le Coran interdit à partir de la neuvième année de l'Hégire. Les deux années, courantes et musulmanes, coïncideront en 20 874... Les deux calendriers coexistent : celui de la communauté internationale pour la vie courante, le musulman pour la vie religieuse (ce dernier reste seul valable en Arabie séoudite). Un consensus se dégage pour que les dates du calendrier soient unifiées dans le monde musulman tout entier.

    9. Certaines sources historiques parlent d'une offensive victorieuse de l'empereur grec Héraclius en 622. Mahomet, allié des Perses, se serait replié avec ses armées, et non pas avec 70 convertis désarmés devant la colère des marchands de la Mecque redoutant de perdre leurs bénéfices (les païens honoraient les idoles au sanctuaire préislamique de la Kaaba). La tradition rapporte que peu de temps avant le départ de Mahomet, il fut averti par l'ange Gabriel (Djibril) que son parent Quraysh (« Petit requin »), de La Mecque, avait comploté pour l'assassiner pendant son sommeil. « La nuit où l'assassinat devait avoir lieu, son cousin Ali Ibn Abî Tâlib se coucha dans le lit du Prophète, tandis que celui-ci se réfugiait avec son compagnon Abû Bakr dans une caverne au sud de La Mecque, à l'opposé de la direction de Médine. Heureusement pour Ali, les meurtriers découvrirent son visage,et ils ne le poignardèrent pas. »

    10. Mahomet et Abû Bakr se cachèrent quant à eux trois jours dans une grotte. Or leurs ennemis se tenaient un certain jour à quelque distance d'eux, à l'extérieur de la grotte, mais Allah les protégea : « Une araignée venait en effet de tisser sa toile à l'entrée de la caverne ; de plus, des colombes y avaient fait leur nid et pondu leurs œufs. Les poursuivants se dirent : «Nul n'a pu pénétrer dans cette caverne récemment ! » et ils ne la fouillèrent pas.

    11. Les deux compagnons, conduits alors par un guide païen, empruntèrent une route côtière. Lorsqu'ils furent arrivés à Médine, Mahomet lâcha les rênes de sa chamelle jusqu'à ce qu'elle se posât. Il acheta la terre où la chamelle s'était arrêtée pour y construire plus tard la première mosquée. Il fut accueilli par des partisans, les « Ansars » (« ceux qui ont aidé »)

    12. LA FONDATION DE L'ISLAM

    13. La plupart des premier compagnons de Mahomet étaient esclaves et se faisaient maltraiter, voire torturer. Il leur avait donc fallu fuir. Enfin ils posséderaient un lieu où pratiquer en paix leur religion monothéiste. Telle fut la naissance de l'Etat islamique. Jusqu'ici, les révélations de l'archange Djibril traitaient essentiellement de la relation individuelle de l'homme avec Allah. Mais une dimension sociale (politique, économique) se fit jour dans les sourates ultérieurement communiquées. Cela commença modestement, par une transformation de la ville de Médine. La ville, d'abord très sale, fut nettoyée de fond en comble : « Nous arrivâmes à Médine alors que c'était la terre de Dieu la plus polluée. L'eau qui s'y trouvait était nauséabonde. » Le Prophète demanda aux Compagnons de creuser des puits (plus de 50) en divers endroit de Médine. La culture de la terre fut encouragée : quiconque apporterait ses soins à une terre inculte la possèderait. Bientôt, la nourriture suffit à toute la ville ; l'indigence disparut.