Proullaud296

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der grüne Affe - Page 89

  • Le prêtre et les bistrots

    Depuis, il se cloîtrait dans son presbytère. Une église déserte Dieu merci : le loquet qu'on tire,
    la génuflexion, la sacristie, et son chez soi par un petit passage intérieur. Parfois il saluait l'autel à
    la nazie, en claquant des talons. Jamais l'évêque n'avait vent de lui ni de sa paroisse. L'invention
    que Francis Duguay appréciait le plus, c'était le téléphone, qui sans posséder encore les avantages
    de l'électronique, permettait du moins de réduire les relations au simple son de la voix : il obtenait
    instantanément, dans la discrétion la plus totale, cet Arabe du Bassin d'Arcachon qu'il avait connu
    jadis, désormais démesurément grossi, patron de bistrot. Tous deux, Kader Ben Zaf, gros
    musulman, et lui, chrétien banal, obéissaient aux deux frères : Pascal Maatz, médecin, et Frank
    Nau Frank Nau, vendeur de chaussures.
    Ben Zaf se chargeait de l'ancienne prostituée Héléna Bost, et l'hébergeait pour rien
    dans sa soupente, lui proposant stage sur stage, car Maatz l'avait persuadée de se sculpter
    sculptrice locale, faisant miroiter les prestigieux débouchés d'un café-galerie. Depuis, elle
    retournait sans cesse au Bassin d'Arcachon, statue de terre après statue de terre. Et comme
    elle était terne, cela lui convenait.

    La Corrèze, à Tulle.JPG

    Son amie, la Mertzmüller, s'effeuille dans toutes les boîtes et casinos de troisième ordre,
    de Tarbes à Montluçon, et croit en Dieu : c'est faire œuvre pie de que montrer son cul,
    merveille de la création. Elle estime avoir préservé à elle seule plus de cent trente
    pédophiles (et plus) du passage à l'acte – à moins qu'elle ne les y ait au contraire
    incités, car après tout, il est formellement interdit aux effeuilleuse de se prostituer
    sous peine de renvoi immédiat. Anne-Marie apprécie grandement l'acte de chair :
    à chaque bourrade du marchand de chaussures, elle émet un grand cri consciencieux
    , y compris à l'hôtel de Châteauneuf où le curé apprécia
    de manu son art du cantabilé.
    Les instructions de François dit Frank Nau à ce dernier restaient confuses ; à moins
    de faire toucher du doigt la séparation de l'âme et du corps, conception qui révulsait
    le Père Duguay. Parfois, il se prenait à détester l’Église.

    Et tandis que son commanditaire, François dit Frank Nau, se ruine à suivre son effeuilleuse
    de Forges-les-Eaux à Néris-les-Bains, le curé Duguay, pour sa part, s'est bien juré de
    ne plus voyager : plus question de passer, fût-ce à son corps défendant, pour un pédé
    landais… Les deux frères souhaitaient ardemment transformer leurs maîtresses respectives,
    autrement dit, leur faire tout le mal possible. Il faut en vérité que ces hommes soient
    bien dés
    œuvrés. Leurs activités professionnelles en effet retombent en loques.

    Leurs deux maîtresses ne les voient guère que de loin en loin, uniquement pour tirer
    un coup. Les dialogues sont brefs, autant que les actes indûment prolongés. Ces attitudes
    jumelles seraient-elles justement, très exactement, concoctées dans le dessein de
    déstabiliser, de démolir l'une et l'autre ? Ils auraient dans ce cas le plaisir bien abstrait...

    Leurs acolytes, Père Duguay et Fat Kader, devaient nécessairement échouer. Sinon,

    c'est à désespérer de la morale. Rappelons que les deux supposées victimes se

    consultaient régulièrement, non seulement ici, à Châteauneuf-en-Beauves,

    comme il est normal entre belles-sœurs de la main gauche (ayant fini par l'apprendre), mais aussi, ce que les hommes ignoraient, dans ce fameux café vieillot, religieusement conservé,

    de la zone piétonnière d'Saintes.

  • d'Ormesson

    Flaubert voulait écrire sur le rien : d'Ormesson l'a fait. Il parle de la lumière, qui transporte du passé, puisque les étoiles nous parviennent telles qu'elles étaient voici des millions d'années. Il parle du temps et de sa cruauté, qui finira bien par s'abîmer dans le néant comme le reste. Il évoque les chefs-d'œuvre qui dépassent l'homme, tels que l'Iliade et l'Odyssée, ou les portes du baptistère de Florence par Ghiberti. Il existerait selon lui tant de preuves du Grand Mystère ! D'ailleurs, Dieu s'appelle « x » ou « le mystère ». Ainsi le mot de « Dieu » se trouve évacué, ce qui soulage les non-croyants. Mais l'élimination d'un mot n'élimine pas l'abîme. Nous avons tous l'impression, la sensation d'un abîme. Et, tous, nous désirons faire quelque chose de cette immensité minuscule de la vie. Nous appelons cela notre responsabilité. Et par nos actions, nous complétons le monde, nous contribuons, nous continuons à le créer. Si nous croyons, nous sommes les co-créateurs, avec Dieu. Si nous ne croyons pas, il nous est difficile de penser que cela ne « sert à rien », autrement, pourquoi le ferions-nous. Rien de tout cela n'est propre à Jean d'Ormesson, descendant d'une illustre famille.

    Etagements.JPGMais il nous le présente avec une telle gentillesse, une telle virtuosité, un tel sens de la conviction, une telle Grâce, avec ou sans majuscule, que l'espace de sa lecture, nous croyons en Dieu ou nous l'imaginons rien que pour faire plaisir à notre auteur. Nous avons été apaisés pour un temps. Reconnaissance à lui. Cultivons notre jardin. Relisons cette fameuse feuille abandonnée sur un banc d'église à Baltimore en 1692, année aussi du procès des sorcières de Salem, ô contradiction. Et si nous ne pouvons pas nous empêcher de haïr, ou de désespérer (c'est la même chose) disons-le à notre prêtre ou à notre psy (c'est la même chose), mais ailleurs, au moins, ne nuisons pas, et fermons nos gueules.

    C'est trop court, nous disent nos deux auditeurs et demi. Mais gargarisons-nous de cette excellente dissertation pour terminales intitulée Comme un chant d'espérance par Jean d'Ormesson.

    Car les sarcasmes pourraient pleuvoir, mais ils sont si tristes et si fréquents que nous avons voulu nous nettoyer quelque peu. Voici quelques évidences, quelques truismes peut-être bien, mais qu'il serait si utile de répéter à tous les illuminés : soyons humbles. Chapitre VIII, « Il est impossible aux habitants de ce monde de se faire la moindre idée du néant, de l'infini et de Dieu » - car Dieu est aussi le Grand Néant (d'Erthal). « La tâche inverse d'inventer un monde à partir du rien et de son éternité peut paraître, à première vue, aussi désespérée ».

    La découvert du « mur de Plancke » en effet montre qu'il y a eu un « avant » et qu'il y aura un « après », autrement dit, une Histoire. « Les galaxies, le système solaire, la vie, l'histoire, la pensée étaient aussi invraisemblables aux yeux du vide et de l'Eternel (neutre) que Dieu aux yeux du monde et du temps. Il y a pourtant un abîme entre les deux regards. D'un côté, les hommes, minuscules insectes perdus dans l'immensité, sont incapables de se représenter Dieu ; de l'autre, Dieu tout-puissant » (le mystère tout-puissant), sans le moindre effort, sans la moindre hésitation, voit se dérouler dans sa totalité et dans ses moindres détails l'histoire de ce monde qui n'a pas toujours existé » - comme le pensaient et le pensent encore nombre de philosophes et de savants. Et le chapitre, tout petit, s'achève ainsi. Car d'Ormesson procède par petits éclairs, coups d'épingle, coups de sonde. Il met en relief des évidences, des impuissances évidentes. Ne pensez pas aux cours de catéchisme, ce n'est absolument pas cela. Il ne pérore pas. Il passe au chapitre IX :

    « La tradition, la légende, le redoutable sens commun toujours impatient de se tromper » - j'adore cette expression, « le redoutable sens commun toujours impatient de se tromper » - imaginent souvent Dieu sur le point de prendre la décision de créer le monde. Ils le présentent même parfois en train d'hésiter. Aurait-il pu créer un autre univers que le nôtre ? » - certains pensent qu'il en existe plusieurs : non plus « l'uni-vers » mais le « multi-vers »… « A-t-il pesé le pour et le contre avant de passer à l'action ? Aurait-il pu choisir de ne rien faire jaillir du néant infini ? Toutes ces interrogations n'ont naturellement aucun sens. » Dieu ou le mystère ne peuvent évidemment pas penser comme un homme.

    L'anthropomorphisme serait ici mathématiquement, et ontologiquement, déplacé.

    « Dieu ne pouvait pas hésiter, délibérer, choisir entre plusieurs solutions. Non pas seulement parce qu'il est » (il serait) « tout puissant et que l'hésitation n'est pas dans son caractère ni l'incertitude dans son tempérament » - ironie. « Mais d'abord et surtout parce que toute hésitation, tout choix, toute délibération ne peut se dérouler que dans le temps.Tout ce qui relève d'une démarche intellectuelle, du désir, de l'histoire est lié au temps. Le temps ne coule pas dans l'éternité. Il est impossible de se représenter Dieu en train d'hésiter entre plusieurs modèles du monde à la façon d'un acheteur qui hésite longuement entre deux modèles de voiture ou d'équipement électroménager.

    « Il faut aller plus loin. Dieu n'a pas pu décider de créer l'univers. Aucune succession d'instants, aucun cortège de possibles n'est concevable hors du temps. Ni aucune décision. » Quand je vous aurai dit que le Big Bang s'est peut-être produit en raison du choc d'une paire de multivers, et que la création aurait manqué à la perfection de Dieu en tant qu'accomplissement, donc lui est consubstantielle, donc est éternelle comme lui du début jusqu'à la fin des siècles des siècles ce qui revient à dire qu'il n'y a pas eu de création, vous aurez tout compris et vous n'aurez bien compris, car tout est dans tout et réciproquement. Sur quoi vous vous précipitez en vitesse sur le « roman » de Jean d'Ormesson, Comme un chant d'espérance. ÂÂÂÂmèèèèèènn.

  • Les égarements du coeur et de l'esprit

    C'est donc l'histoire d'un jeune homme beau, intelligent, vierge, qui vouvoie Madame sa mère et s'avise qu'il pourrait bien aller plus loin avec l'amie de sa mère, laquelle n'est pas insensible aux charmes verts du jeune homme, mais se ferait hacher plutôt que de l'avouer. Escalier de Tulle.JPG

    Il lui faut de l'amour. Les femmes encore de nos jours ne peuvent disent-elles baiser que si elles éprouvent de l'amour. Elles se croiraient déshonorées de parler de désir : passons. Le jeune homme et la femme déjà mûre se livrent à des conversations subtiles sur le sentiment amoureux, feignant de parler d'autres personnes tout en parlant d'eux-mêmes comme il se doit.

    Le jeune homme se montre d'une timidité insigne, croyant que les femmes se sentent offensées par le moindre désir quand il s'agit de le mener à bien au lieu de faire ça proprement chacun dans son coin. Elles sont d'ailleurs restées comme ça. Mais c'est un homme qui écrit, il faut bien faire croire que les femmes ont des désirs, sinon les mecs vont se suicider ou aller aux putes. Moi je dis heureusement qu'il y a les putes et le mariage.

    A propos de putes, survient une quinquagénaire qui veut s'envoyer le jeune homme. C'est un homme qui écrit, où va-t-il chercher tout ça, certainement pas dans la réalité, passons. A propos de femmes froides, le jeune homme, Meilcourt, s'entiche d'une jeune personne qui en aime un autre. Tout est clair !

    Il lâche la proie pour l'ombre, offense tout le monde par ses maladresses ( ces dames ont un rang à tenir, il ne faut pas que certaines choses se sachent, or la pute ( entendez par-là la quinquagénaire replâtrée ) fera un tel étalage avec sa laison juvénile que le Monsieur en sera définitivement ridiculisé.

    Quiproquos, analyses subtiles (elles le sont toutes), imparfaits du subjonctifs, ronds-de-jambe et formules de politesses alambiquées plairont aux inconditionnels du grand style et du dix-huitième siècle. Les méandres de l'intrigue suivront un schéma rigoureux, les rebondissements s'enchaîneront avec implacabilité, avec qui couchera-t-il, et d'abord, couchera-t-il ?

    Comme disait l'autre, "sans l'adultère, que seraient nos littératures" ? Mais ces dames sont toutes libres, ou se comportent comme si elles l'étaient. Qu'on se rassure, la mère vouvoyée du jeune Meilcourt demeure chaste, la morale est sauve d'un bout à l'autre, la subtilité des sentiments ne va pas sans grandeur et sens du sacrifice et de la catastrophe, et finalement, un organe pénètre bien dans un autre, mais c'est absolument imprévisible;

    Que dire ? Mesdames, ne résistez pas trop, même si le jeune monsieur ne se montre pas trop délicat, sinon il ira dans les bras de celles qui collectionnent les hommes ; en effet, passé la première étreinte sans satisfaction, il sera toujours temps d'entreprendre l'éducation de votre jeune balourd, car un homme revient toujours sur les lieux de son crime. Mais si vous commettez la faute de faire des manières de noble avant la première fois, il y a tout lieu de penser que le jeune homme se découragera et cherchera la solution de facilité.

    J'ai toujours pensé d'ailleurs que la prostitution avait pour cause essentielle les refus maniérés et circonstanciés de toutes celles qui veulent passer pour vertueuses, sauf seules sous les draps bien entendu. Les putes ont donc encore de beaux jours devant elles.

    Mais en littérature, l'amour, c'est noble, c'est subtil, c'est déchirant, c'est scrupuleux, les femmes disent oui rarement mais enfin elles le disent, du bout des lèvres mais enfin elles le disent, et "les Egarements du coeur et de l'esprit" réussissent à articuler la peinture de la réalité la plus exaspérante avec les rêves les plus éthérés et les plus chauds de la littérature écrite par les hommes.

    Ce qui m'a le plus emballé, à part les imparfaits du subjonctifs, c'est la merveilleuse leçon de cynisme donnée par un roué, un débauché nommé Versac.

    Il apprend à notre naïf comment il faut se comporter, le plus faussement possible, afin de dominer les femmes en leur faisant croire qu'elles dominent, parler de soi sans cesse et avec la meilleure opinion possible, prendre le contrepied exact de toutes les leçons de modestie et de bon ton social : car un original est toujours remarqué, alors qu'un honnête d'homme se fond dans la masse grise.

    Tout cela est rigoureusement inapplicable, car qui l'appliquerait serait déjà un roué qui n'aurait pas besoin de leçon, et pourquoi alors en prendre quand on en a l'instinct. Je ne sais quelle mouche me pique aujourd'hui de vouloir que la littérature se transforme en manuel de conduite applicable : comment draguer efficacement, comment se faire bien voir, etc, etc... Oh ! tu cherches un manuel, présentateur ? Réveille-toi, tu te fais des aigreurs d'estomac !

    Je vais vous passer quelques extraits à la moulinette :

    "Madame de Meilcour, qui, à ce que l'on m'a dit, n'avait point été coquette dans sa jeunesse, et que je n'ai pas vue galante sur son retour, y trouva moins de difficultés que toute autre personne de son rang n'aurait fait.

    "Chose rare ! on me donna une éducation modeste. J'étais naturellement porté à m'estimer autant que je valais ; et il est ordinaire, lorsqu'on pense ainsi, de s'estimer plus qu'on ne vaut."

    Commentaire : on vouvoie madame sa mère ; la langue coule avec une fluidité un peu superflue, mais enchanteresse ; le sentiment est juste, lucide et sans complaisance.

    "Le premier soin que je retrouvai à mon réveil fut celui d'aller chez Germeuil. Je m'étais arangé sur ce que j'avais à lui dire, et m'étais préparé à le tromper autant que si, sur une question aussi simple que celle que j'avais à lui faire, il eût dû deviner le trouble secret de mon coeur. Je croyais ne pouvoir jamais me déguiser assez bien à ses yeux ; et par une sottise ordinaire aux jeunes gens, j'imaginais qu'en me regardant seulement, les personnes les plus indifférentes sur ma situation l'auraient pénétrée."

  • Redeker, lis-moi, stp

    Chercher "pilée » p. 39 63 07 22

    PEGUY FILS DE COMMUNARD

    A inclure ce qui suit :

    Economie :

    Chez lui, la vision ne s’embarrasse guère de conditions historiques et autre rapports de production, et mise avant tout sur la réforme morale et les liens coopératifs. Surtout, elle entretient une méfiance instinctive, quasi anarchisante, avec le pouvoir et la politique –dont les noces avec le socialisme sont susceptibles selon lui de conduire à des postures démagogiques, et notamment à la pire d'entre elles, la «démagogie intellectuelle». Buste du Docteur Chammard ancien maire à Tulle P.JPG

     

    A placer en un passage où l'on parle de Patrie :

    Des Grecs aux Latin, aux chevaliers médiévaux ; jusqu'à Jeanne d'Arc, aux Rois de France, à la Révolution française (qui fut un retour à l'ancien ordre de Fidélité : Louis XVI trahissait ses pères ; nous sommes de la génération des petits-fils qui se révoltèrent contre leur propre père, en faveur de leurs grands-pères) ; jusqu'à la République, inclusivement : un seul et même fil conducteur, nulle contradiction, le seul et même chemin d'honneur et de vertu – ce qui ne signifie pas, non plus, que Péguy eût été un petit saint. Pas même laïc.

    ...où l'on parle de religion :

    Nous ne voulons pas de ce Péguy bonne sœur, sulpicien, suintant d'eau bénite

     

     

    Je ne veux pas qu'on me défende. Je n'ai pas besoin d'être défendu. Je ne suis accusé de rien.

    “Je ne redoute rien tant que ceci : qu'on me défende.”

    Charles Péguy, Notre Jeunesse

     

    ...Et cependant voici cent ans et plus que l'on défend, que l'on pourfend Péguy, tiré, tiraillé, annexé, à gauche, à droite, depuis sa vie, depuis sa mort le 5 Septembre 1914 ; cent ans et plus qu'il s'enfonce des portes ouvertes. La chose est entendue. Les portes ouvertes sont celles qui ont les plus solides chambranles. Défendons Péguy. Et attaquons Péguy ; pour la bonne mesure. Indéfendable. Trop de partisans prônent le seul Péguy saint, le Péguy de sacristie tout enfumé d'encens. Trop d'opposants évaporés font de lui le chaînon manquant de Maurras à Hitler. Carrément. Nous avons tous tué Péguy.

    Péguy nous parle. Puis s'éloigne. Nous ne le comprenons plus – puis il nous revient, en pleine face. Je ne détiens pas de clef, je ne déroule aucun arcane ; au sein d'une immense clarté levons notre torche hasardeuse – superflue peut-être. Le monde s'effondre, Péguy brûle encore.

  • Pas grand-chose

    Pas grand-chose, à part ceci : ne lisez pas in extenso une revue du genre Valeurs actuelles. C'est tellement univoque, râleur, désespéré, hargneux, que vous ressortez de là tout hébété, avec une seule idée en tête : en découdre, à tout pris.? En découdre avec qui, peu importe, mais de toute façon en découdre. Alors il faut respirer, râler sur les réseaux sociaux, mais s'interrompre, garder l'humour surtout,le plus important, çök önemli, et la distance. Et se dire qu'en écoutant les informations qui nous sont fourguées on en risque pas de s'ennuyer en insultant grossièrement tous ceux qui nous enfument le cul. Et n'oubliez pas : si vous ne changez rien à vos habitudes, vous êtes héroïques, dites-donc, l'héroïsme au prix d'un pastis en terrasse, vous n'allez pas rater ça ! Allez, je vous quitte. Un bon western spaghetti, et au lit !

  • Bouvard : "Les morts..."

    "Des cruautés contraires aux bons sentiments me restent sur un cœur qui ne bat plus : ces guerres de religion, ces génocides, ces massacres organisés en l'honneur d'un Dieu qui, s'il existe, ne doit pas en demander tant. Quant aux lavages de cerveaux qu'on appelle évangélisations, ils ont longtemps contraint des peuples, hâtivement qualifiés de sauvages, d'adopter la religion de plus forts qu'eux.

    "Enfin, je m'interroge sur les effets des hommages rendus à certaines célébrités le jour anniversaire de leur disparition. Est-ce que les vivants ne dérangent pas les morts en les distrayant de leurs méditations ou de leurs nouvelles occupations lorsqu'ils parlent d'eux ?

    "André Malraux n'a-t-il pas troublé la vie de Jean Moulin lorsque, dans l'envolée d'un discours tonitruant, il l'a accueilli aux portes du Panthéon ?" Ces façons de parler cachent une grande amertume, et du pessimisme. Des lettres bien senties circulent sur internet, envoyées à des sommités politiques, attribuées à Philippe Bouvard. On ne peut tout de même pas dire que le personnage soit de goche. "Moi qui vous parle, sans aucune certtude d'être entendu, puisqu'il n'y a pas de sondages d'audience dans l'au-delà, je dois peut-être mes sursauts de conscience à un badaud qui, chez un bouquiniste des bords de la Seine, feuillette l'un de mes bouquins défraîchis.

    "Le pape, la curie et tout le saint-frusquin - Dans le fonctionnement de la sainte Eglise catholique et romaine, j'ai cherché en vain le divin. Au sommet, on place un pontife dont les ennemis de l'idolâtrie, pratique condamnable des anciens Barbares, font une idole. La mise en scène est tellement bien étudiée que des centaines de millions de braves gens, appelés fidèles, s'y laissent prendre. D'abord, la désignation lors d'un conclave organisé en vase très clos ; l'élection, pour succéder à saint Pierre, d'un cardinal auquel la tradition interdit d'être candidat ; le scrutin à peine terminé, l'essayage d'une des trois soutanes (aussi blanches que la fumée venant de s'échapper du toit de la chapelle Sixtine) susceptibles d'enrober des morphologies différentes. Je passe sur le bene pendentes ritualisé depuis la supercherie de la papesse Jeanne. Bénédiction générale." Renseignez-vous, ô Bouvard, digne descendant de Voltaire : il n'y a jamais eu de papesse Jeanne, mais une succession de papes travestis, qui avaient vers l'an 980 transformé le Vatican en véritable bordel homo.

    Belle pine d'ardoises à Tulle.JPG

    Les grandes folles ne sont pas des femmes, mais bel et bien des hommes. "Concert des cloches qui rassemblent les ouailles et font fuir les corbeaux."

    Bouvard est attachant. Son livre est rigolo, sur un sujet triste, l'auteur se montre tel qu'en lui-même, sans cabotinage, en 2014, étant de 1929, soit 85 ans d'âge. Bravo, chapeau, longue vie, ici-bas et dans l'au-delà, et si ça ne vous amuse pas, lisez la Bible. Amen.