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  • Saint-Sernin

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    Toulouse n'est pas tout à fait illuminée : juste la Cathédrale St-Sernin, « avec effet de lune derrière le Clocher » me précise-t-on, avec majuscule à « clocher ». Sacrée Toulouse... C'est niais. La cathédrale manque de grandeur, je vais me faire assassiner. Il s'agit d'une carte-postale dans le goût années 80, avec effets de lumière partout, et traînées de feux de voiture par exposition prolongée. Le genre de truc qui correspond à mon goût de chiotte, de « chromo ». La cathédrale marque huit heures moins vingt. Elle est bistre et ocre, avec sa façade ultra-irrégulière. Le porche au tympan lisse, la rosace décalée par la perspective, sous uen autre ogive, et surtout ce toit incliné farfelu comme un béret sur l'oreille, qui tangente presque la retombée droite de l'ogive.

     

    Et un beffroi de brique se demandant ce qu'il fout là, des mâchicoulis sous l'horloge ronde (« 8 h moins 20 »), l'ombre portée d'un contrefort sur la façade, et à gauche, en retrait et en étagements, les contreforts de la nef s'enfonçant dans l'obscurité comme un défilé de fuyards. Au-dessus, un ciel artificiel de gaz moutarde, du vert, du bleu, du malsain, de la profondeur sous-marine, stade du glauque. A droite, un obélisque lumineux, des jets d'eau qui montent l'arroser, cela va du translucide au bistre, avec des barres plus sombres pour découper le tout. Plus haut vers la droite, dans une obscurité pour une fois naturelle, ce qui émouvrait le plus le cas échéant, ces deux fenêtres jumelles comme des yeux, derrière lesquelles un archevêque écoute la télévision.PARADE www.anne-jalevski.com

     

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    Tout de guingois, un porche illuminé surmonté d'un drapeau français pendouillant. La mairie. Au sol, parcouru de la double traînée des voitures dans l'un et l'autre sens, du brun où pas un ne circule, j'entends à pied, un panneau « parking » blanc sur fond bleu à peine distinct, une atmosphère de printemps chaud. En été, à cette heure-ci, il ferait encore jour. C'est accueillant, cela manque d'unité, c'est la province, étrange, villageoise, secrète, énigmatique : que fait ce bâtiment médiéval au sein de cet espace contemporain, ces petits véhicules dans l'ombre... Et l'opérateur qui a éprouvé le besoin de trafiquer absolument tout, à moins que ce ne soit l'éclairagiste de Toulouse lui-même, pour complaire au mauvais goût du touriste.

     

    Après l'impression d'ensemble, je reviens sur les détails, espérant être interrompu par mon horaire, qui Dieu merci m'empêche de m'attarder sur quoi que ce soit. Le porche, donc. Une double porte de part et d'autre d'une pilier dont j'ai oublié le nom technique. On distingue les cinq ais verticaux, ce sont des planches, bande de cons. Le jeu d'ombres fait croire que les portes en questions, jumelles, sont entrebaîllées, mas pas d'office nocturne ce soir-là. Au-dessus, le tympan est parfaitement vide, pur comme un front de pucelle, aplani ma parole au badigeon, serti de trois voûssures superposées, la troisième se surmontant d'un gâble bien pointu, aux excroissances statuaires et végétales.

     

    Tout cela jaune doré. Le porche et ses trois voûssures s'encadre dans un rectangle plus haut que large, à l'appareillage régulier, cerné de deux pylônes terminés en pointe, sommé d'une espèce d'architrave percée de trous-trous. La rosace est ronde comme uen rosace, iln'y a rien à en dire, l'éclairage lui est défavorable, ces choses-là sont faites pour être contemplées de l'intérieur, le verre vu de dehors donnant 'limpression d'un envers d'aile de papillon ou de tain de glace. Un porchounet à gauche, un porchounet à droite. Sous celui de gauche, un grand qui descend, plat comme un emplacement de placards municipaux, un autre au niveau du sol avec un oculus, et le panneau de parking plutôt bien dissimulé : on n'y pense plus.

     

    L'ensemble de la rosace et des porches qui le flanquent, trois superposés à gauche, un à droite, s'encadre à son tour de deux verticales. A droite, c'est uen cheminée droite avec alternance de pierres claires, une longue, une courte, comme un angle de maison ordinaire. A gauche, même disposition éminemment banale et laïque. Et de l'un à l'autre de ces piliers incongrus, l'envolée d'une arche mi-romane mi-gothique, dont la voûte se prolonge directement, à droite, dans le pilier, tandis qu'à gauche l'on a eu visiblement besoin d'un raccord, d'un vaste emplâtrement permettant tant bien que mal le passage d'un arrondi à une verticale.

     

    Tout cela sent fortement le rafistolage d'éléments disparates au cours des siècles, et je vais me faire empaler par les Toulousains, qui aiment leur St-Seernin, si original, si pied-de-nez au classique, si typique du Languedoc d'ici...

     

  • Métaphysique et Camorra

     C'est alors tout le mystère de la morale : d'où nous vient cette prescience, cette science du bien et du mal ? Nous ne pouvons aboutir qu'à une douloureuse et insoluble rêverie, avec des larmes plein les yeux et la prière éperdue au fond du cœur pour ceux qui savent prier. Il faudrait par conséquent que le bien et le mal s'équivalussent barbarismatiquement, et nous voici replongés non pas dans Hitler mais dans Dieu et sa nature. C'est irrespirable, à la fois par puanteur et par manque d'oxygène. Si nous en revenions aux faits, bien terrestres ? À ce jeune garçon qui fait descendre une cousine de son étage et s'en va, tandis qu'elle se prendune balle dans la tête, juste pour causer du chagrin à son fils ? Car on se venge sur la parenté. Rien n'est résolu non plus : Roberto Saviano s'étend sur la camorra elle-même, ses ramifications internationales (nous allons même parler de l'Ecosse), ses impitoyables succès, mais nous parle peu des moyens déployés contre elle : car c'est une hydre, qui renaît toujours de ses décapitations. En effet, personne jamais n'a pu éradiquer ces associations, n'a pu leur couper toutes les têtes à la fois d'un seul revers de yatagan. Personne ne peut éliminer tout le mal de la planète. Peut-on lutter contre les mafieux sans en devenir un soi-même ? Mais c'est assez se heurter aux portes. Explorons quelques pages, que votre serviteur aura tenté de traduire en français.

     

    Auparavant, quelques mots sur le film Gomorra, qui ne traite que l'épisode de Roméo et Ernesto, 14 et 15 ans, qui voulaient imiter la mafia, semaient la zone dans leur quartier, giflant les marchands de fruits, pissant dans les réservoirs de moto, emmerdant puissamment les vrais camorristes, et qui se sont fait liquider par les narco-trafiquants amis de l'ordre, car il faut bien que le commerce du crime prospère. Le film ne traite que d'un vingtième de l'ouvrage auquel il emprunte son nom, qui n'a rien à voir avec Sodome et Gomorrhe. Il en fait tout un scénario, tout un cinéma. La mise à mort s'effectue dans un guet-apens, mais dans la réalité, ces deux garçons n'ont jamais fait l'objet d'une ruse : on ne leur a pas donné quelqu'un à tuer pour faire leurs preuves, comme on le leur fait croire dans le scénario, mais on les a convoqués dans un endroit sordide, pour les battre jusqu'à ce qu'ils crèvent, abandonnés à même le sable aux chiens errants.

     

    Amis, partons pour l'aventure du texte : Una volta Matteo,une fois Matthieu" – c'est presque "il était une fois", c'era una volta, "un ami à moi, avait décidé de nous le prouver : il allait se tirer une fois pour toutes." Echapper à ce triangle de la mort, qui doit compter plus d'assassinats que la Corse, à mon humble avis. "Il avait mis des sous de côté, décroché un bac (ou un doctorat, una laurea) avec mention, et il en avait eu marre de bosser de stages en chantiers pour simplement survivre. Il avait obtenu le nom d'un type qui pourrait le faire partir pour l'Angleterre, et une fois là-bas, il aurait eu la possibilité de se présenter à divers entrtetiens d'embauche. Je l'ai accompagné", dit le narrateur. "Nous avons attendu des heures sur le rivage, où ce contact nous avait donné rendez-vous. C'était l'été. Les plages de Mondragone sont assaillies de vacanciers de toute la Campanie, ceux qui ne peuvent pas se permettre la côte amalfitaine, ceux qui ne peuvent pas louer une maison en bord de mer pour l'été, et font donc la navette entre la côte et l'intérieur. Jusqu'au milieu des années 80, on vendait la mozzarella dans des petites boîtes en bois (astucci di legno) pleines de lait de bufflesses bouillant. Les baigneurs la mangeaient avec les doigts en se tachant avec le lait, et les gosses, avant de donner le premier coup de dent à la pâte blanche se passaient la langue sur la main, assaisonnée par le sel. Puis, personne n'a plus vendu de mozzarella, et sont arrivés les biscuits salés (itaralli) et les copeaux de noix de coco. Ce jour-là notre contact eut deux heures de retard" (revenons aux choses sérieuses) "Quand il nous eut finalement rejoints, il se présenta tout bronzévêtu seulement d'un petit maillot moulant ("costume étriqué" ne semble pas convenir pour strilminzito costume) ; il nous expliqua qu'il avait déjeuné en retard, donc s'était baigné en retard et s'était séché en retard. Telle fut son excuse, la faute du soleil en somme." Et si t'es pas content c'est deux balles dans la gueule. "Notre contact nous emmena à une agence de tourisme. Tou tprès d'ici. Nous pensions être reçus par qui sait quel médiateur, alors qu'il suffisait d'être présenté à une agence pas même particulièrement élégante. Ce n'en était pas une avec des centaines de dépliants, mais un bouiboui quelconque (bugigattolo qualsiasi). Mais on pouvait accéder à ses services si l'on si l'on était présenté par un contact de Mondragone. S'il entrait une personne quelconque, elle aurait fourni les services de n'importe quelle agence touristique. Une très jeune fille demanda à Matteo son "curriculum" et nous indiqua le premier vol disponible. Aberdeen était la ville où on l'aurait envoyé. On lui donna un prospectus avec la liste des établissements à qui il aurait pu s'adresser pour un entretien d'embauche. Bien plus, l'agence elle-même, pour une somme modique, a pris rendez-vous avec les secrétariats des préposés à la sélection du personnel. Jamais une agence intérimaire n'avait été aussi efficace.

    VENT D'AUBE www.anne-jalevski.com

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    Nous partîmes pour l'Ecosse deux jours plus tard, un voyage plus rapide et plus économique pour celui qui venait de Mondragone.

     

    "A Aberdeen c'était encore l'air du pays. Pourtant il n'existait pas de ville plus éloignée de Mondragone que celle d'Aberdeen. La troisième agglomération d'Ecosse, une cité obscure, grisâtre, même s'il ne pleuvait pas aussi souvent qu'à Londres. Avant l'arrivée des clans italiens, la ville ne savait pas valoriser les ressources de temps libre et de tourisme, et tout ce qui concernait les restaurants, les hôtels et la vie sociale était organisé tristement, à l'anglaise. Des habitudes identiques, des locaux bourrés de gens tout autour sur des banquettes une fois par semaine. Selon les enquêtes du Parquet antimafia de Naples, c'est Antonio La Torre, frère du grand boss Augusto, qui a lancé en Ecosse une série d'activités commerciales en mesure, après quelques années, de s'imposer comme une fleur à la boutonnière de l'entreprenariat écossais, come fiore all'occhiello dell'imprenditoria scozzese." Et roulez jeunesse ! La camorra pique même l'argent des Ecossais ! Tirons nos chapeaux, retirons nos kilts !

     

    Et 'noubliez pas : si vous évitez la camorra, elle vous tuera comme indifférent ; si vous prenez parti, si vous changez de parti, vous serez tué par les deux, ou par l'adversaire juste en face. L'auteur vit sous protection rapprochée, comme sous une fatwa. Gomorra, de Roberto Saviano, c'est traduit. Ciao tutti !

     

  • L'Espagne ? on s'y fait très bien

     Route d'Alicante. Puerto de la Carrasqueta. Heure de la pause. Derniers soubresauts de lacets descendants. Je m'arrête sur une vire, à l'ombre de justesse. Photos sans pellicule encore. Cette fois-ci, le bar est silencieux. Devant le seuil un distributeur de batatas fritas, le sachet se bloque, la patronne et sa fille rajoutent deux pièces, tout dégringole, un bon goût naturel d'épluchures, je ne bois rien. Descente des derniers zigzags, asphalte et soleil, maisons éparses ordinaires, à une près, vaguement mudejar. Soixante secondes d'arrêt, je ramasse au sol des cartes routières – batatas : une langue d'enfants. Je veux éviter Alicante, car j'y suis déjà passé voici trente ans ; je ne me rappelle que la silhouette du fort, au-dessus d'un jardin au fond duquel gisait un grand-père :

     

     

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    "Laissez-le. Il est fou. Il est tuberculeux."

     

    Il est vieux.

     

    El señorito Cuesta, élève de mon père, passait là ses vacances en famille : "A l'escale, venez nous voir." Je m'étais copieusement emmerdé entre père et mère, à 17 ans, el señorito 13 : à cet âge, un abîme. En ville ma mère ne cesse de râler, mais quand cessa-t-elle ? mon père s'est retourné d'une pièce sur un infirme en fauteuil roulant, comme sur une curiosité naturelle. Un nabot boiteux m'exhibe son doigt tiré de sa braguette, tel père tel fils. Un grand nombre de Pieds-Noirs se sont installés ici, dont trois menottés naguère en terrasse pour avoir parlé mal de Franco : beaucoup de flics parfaitement franco...phones. J'entends parler ma langue encore autant que l'espagnol. Epuisé, dans des rues rebattues. Sur une place en contrebas deux punks flamboyantes boivent à la canette en plein cagnard, si je les photographie elles vont m'engueuler ou exiger du fric – je leur attribue d'emblée conformisme, solitude et branlette - quel touriste a jamais guéri de sa connerie ? À pied vers le paseo de playa. Palmiers, marchands de glaces (¡ helados !) et petits vieux sur les bancs. Trottoir en mosaïques trompe-l'œil figurant des vagues miroitant à donner le vertige. Plage comble, du rivage au parapet, en pleine ville, c'est ce que j'ai vu de plus beau, de plus terne, de moins local - ¿ qué quiere decir Vd ? - et ce quartier remontant contre le fort, cette ruelle barrée de chaises à vieilles - ¿ Avenida Castañero ? je retrouve mon coche et je roule vers Elche (¡ Elx !) hurlant de chaleur au volant, de joie et de douleur de vivre, dans le soir qui tombe, poussant des cris de femme, voyant filer dans mon rétroviseur la vie si forte et belle et ceux qui me croisent se mettent à rire, l'espace s'emplit, j'arrive à Elche où trône au centre d'un rond-point cent fois grossie la fameuse Dame à l'extraordinaire coiffure puis me gare en quelque rue écartée. À vingt heures plein jour et chaleur atroce, tandis qu'à ma rencontre sur le trottoir même descendent les familles endimanchées, les fillettes exhibées dans leurs froufrous de bonbons : en bas de la rue commence une fête scolaire, du fond d'un cul-de-sac chaulé j'entends roucouler un ténor d'opérette, nul n'applaudit malgré les sollicitations d'une présentatrice à voix de loukoum, tandis que les petites filles en hâte traînent sur les trottoirs les parents qui trébuchent dans leurs beaux habits. Un chœur d'écolières se met à chanter de loin, applaudies cette fois par les familles soigneusement lavées et parfumées.

     

    J'entends claquer des portières et craquer les pierres brûlantes, seul désaxé qui trace de sa main des paragraphes sous sa tôle aux vitres baissées, suivant des yeux les couples enlacés – l'homme trop grand se déhanchant contre les fesses de la femme. La recherche du camping prend des allures de jeu de piste : ¡ Huerto del Cura ! le Jardin du Curé ! me répètent-ils, et la fête envahit la ville : foule et flics, rues barrées, marchands de confits. "Première à droite au fond, tournez" me disent près d'un terrain vague deux filles de treize ans, le short à ras du poil, protégées qu'elles sont par l'inconscience et ma panique, tendant la main pour me guider tout en riant – les yeux, c'est tout ce qui me reste – je tourne en rond, me fais indiquer le haut puis le bas de la ville.

     

    La police embarque un clochard à l'arrière d'un break, matraque souple et bien solide sur le crâne, menottes et injures du mec très rouge, barbe de cinq jours, voix pâteuse et dents gâtées. Ses yeux sont bouffis comme sous une aspersion d'insecticide et l'ambiance est à la fête, ici bientôt des émeutes feront quarante-et-un blessés. Voici enfin la palmeraie d'Elche aux murets blancs très ronds avec au pied des arbres un paillasson constant d'aiguilles mortes, comme des chiens très roux perdant leurs poils. Puis le camping, de luxe, bien vide avec ses bornes électriques. Le tenancier m'accueille à bras ouverts au tarif minimum. Je téléphone en France, longuement, précipitamment. Terrasse de cafeteria la nuit tombée. Trente minutes avant d'obtenir la commande. Lecture de Monsieur de Phocas, par Jean Lorrain : quintessences d'âme suivies d'un bel assasssinat quintessencié, contrastant avec la touffeur d'ici et la douleur constante de fixer les yeux sur la page alors qu'il suffirait de se faire envahir de vase. Alors éclate une bestiale échauffourée entre queutiers de billards qui se roulent à terre en grappes. À côté de moi sur leurs sièges quatre Franco-Français avec leur chien chow-chow lèvent soudain le nez de leurs messes basses : "Fais quelque chose !" dit une femme qu'est-ce que tu veux que j'aille foutre murmure l'homme tu ne vois pas combien déjà ils sont à se taper dessus car les joueurs bien bourrés se collètent comme on s'encule et se crochètent par le cou pour se fracasser le crâne contre les vitres et on se recasse la gueule jusque avec les garçons de café Ça me fout des frissons de voir ça – y a pas assez de guerres faut encore qu'ils se cognent comme des branques – baisables et connes les Françaises - les branleurs se repointent bras dessus bras dessous Tu vois ce que tu m'as fait je saigne cara de coño "Alors !" triomphe l'employé françai (à mi-voix) "c'était bien la peine que j'aille me faire démolir !"

  • Souccoth

     

    SOUCCOT (ou Fêtes des cabanes (des tabernacles)(tentes), “fête des fruits”, “fête de la moisson “ (dans “L'Exode”) ; “époque du réjouissement” (dans les prières)

     

     

     

     

    TOMBEE DU CIEL www.anne-jalevski.comTombée du ciel.JPG

    HISTORIQUE

     

    Cette fête commémore les quarante années d'errance où le peuple d'Israël, échappé d'Egypte, dut se préparer, dans le désert, à entrer en Terre Sainte : “Vous habiterez dans des cabanes pendant sept jours, afin que toutes vos générations sachent que J'ai fait habiter dans les cabanes les fils d'Israël, quand Je les ai faits sortir d'Egypte” (Lévitique, 32, 42-43). Souccot signifie donc “les cabanes”, ou “les tabernacles” (ce sont des sanctuaires itinérants). Mais nous pouvons nous reporter aussi à ce passage de la Bible, relative à la réconciliation d'Esaü et de Jacob : Genèse (33;12) : « Il [Esaü] dit: "Partons et marchons ensemble; je me conformerai à ton pas." Il [Jacob] lui répondit: "Mon seigneur sait que ces enfants sont délicats, que ce menu et ce gros bétail qui allaitent exigent mes soins; si on les surmène un seul jour, tout le jeune bétail périra. Que mon seigneur veuille passer devant son serviteur; moi, je cheminerai à ma commodité, selon le pas de la suite qui m'accompagne et selon le pas des enfants, jusqu'à ce que je rejoigne mon seigneur à Séir." Ésaü dit: "Je veux alors te faire escorter par une partie de mes hommes." II répondit: "A quoi bon? Je voudrais trouver grâce aux yeux de mon seigneur!" Ce jour même, Ésaü reprit le chemin de Séir. Quant à Jacob, il se dirigea vers Soukkoth; il s'y bâtit une demeure et pour son bétail il fit des enclos: c'est pourquoi l'on appela cet endroit Soukkoth. » C'est la fête la plus fréquemment évoquée dans la Bible.

     

     

     

    DATE

     

    Cette fête se déroule le 15 du mois de tichri, mais un huitième jour (“chmini atsérèt” ou “jour de conclusion”) et un neuvième (“la joie de la Torah”) prolongent les festivités – en Israël, ils se fondent en une seule journée. Le premier et le huitième jour de cette fête sont fériés, les autres “mi-fériés”, c'est-à-dire qu'il est préférable de ne pas s'y livrer à des activités trop prenantes.

     

    Le 7e jour est appelé “Hochana Raba” (ce qui signifie à peu près “de grâce sauve-nous”) à cause des nombreuses et longues prières que chacun récite pour son salut : c'est le jour du retour vers Dieu où ce dernier vous “scelle dans le livre de la vie” ; avec Roch Hachana et Yom Kippour, c'est le jour où “Dieu est le plus proche du peuple d'Israël”.

     

    BERNARD COLLIGNON FETES RELIGIEUSES 19

     

    LES FETES JUIVES

     

     

     

     

     

     

     

    Chmini atsérèt”, le 8e jour, Dieu “retient” les fidèles un jour de plus, à l'occasion du pèlerinage à Jérusalem ; mais le soir, les fidèles rentrent chez eux.

     

    Le lendemain, Sim'hat Torah, est la fête de la “Joie de la Torah”.

     

     

     

    • 2010 : du jeudi 23 septembre au vendredi 1 octobre.

    • 2011 : du jeudi 13 au vendredi 21 octobre.

    • 2012 : du lundi 1 au mardi 9 octobre.

    • 2013 : du jeudi 19 au vendredi 27 septembre.

    • 2014 : du jeudi 9 au vendredi 17 octobre.

    • 2015 : du lundi 28 septembre au mardi 6 octobre.

     

     

     

     

     

     

     

    RITES

     

    LA CABANE

     

    Pendant huit jours, il faut prendre ses repas dans une cabane (la soucca) construite dans le jardin ou sur le balcon. Sa construction s'est faite dès la fin de Yom Kippour ; ainsi l'expiation est-elle immédiatement suivie d'une obligation (“mitsva”). La cabane en question doit conserver un aspect de provisoire et de fragile. Son toit, en particulier, doit être garni de feuillages. Trois parois en présenteront une certaine solidité – quoiqu'il soit obligatoire de tout reconstruire chaque année. Les branches, le bambou sous toutes ses formes, et les palmes, sont les matériaux les plus utilisés. Il doit s'y trouver plus d'ombre que de lumière, et l'on doit pouvoir apercevoir quelques étoiles, afin de rester sous le regard de Dieu. Pourtant certains tolèrent qu'une simple caravane tienne lieu de Soukka.

     

    On prend ses repas dans la cabane, et, théoriquement, on y dort (ou on y somnole...) Mais les hassidim, traditionalistes, même s'ils les y prennent parfois, n'auraient garde d'y dormir, crainte, disent-ils, de “porter attteinte à la sainteté du lieu”. Au moins, dire le kidoush (la bénédiction) et manger un petit peu du repas du premier soir de la fête dans la soukka est obligatoire. Le fidèle y passera le plus de temps possible, comme dans sa propre maison, y compris avec des meubles. Et l'on y étudie la Torah.

     

    BERNARD COLLIGNON FETES RELIGIEUSES 20

     

    LES FETES JUIVES

     

     

     

     

     

     

     

    S'il pleut ou s'il fait trop froid, mieux vaudra toujours sacrifier le rituel aux obligations de santé ; ce qui est toujours le cas dans la religion juive : les malades sont dispensés de dormir dans la soucca. Inutile d'ailleurs de s'y forcer : Dieu ne nous en aura aucune reconnaisance supplémentaire !

     

  • Tous les noms zontété changés

     

    Brunettes

     

    Il n'y a pas d'évolution. Nous sommes à Bronville, en l'an de Préhistoire 2012. La fille Fantôme recopiait sagement son manuel sous la dictée sans s'en rendre compte : je n'avais jamais fait de cours d'histoire de ma vie. Pour moi, c'était m'assurer qu'au moins ils auraient lu le livre. Désormais plus de 53 ans, une vie, des enfants, se souvient à peine de moi, comme moi d'elle. Plus tard Bataillon, Thérèse, à qui Moil'Nœud, l'année précédente, avait claqué les fesses au tableau, avec laquelle je corresponds encore (« Bath-Haillons », appelée « des Guenilles », ou “La Marseillaise » (« Formez, vos...”), deux gosses, prof d'arts plastique. Elle se plaint de la sottise agressive de ses élèves. « A quoi ça sert le dessin ?

     

    - Pourquoi ne demandes-tu pas ça à ton prof de maths ? » Si liée à Ferencza, revues au café très longtemps après, en plein été. J'ai multiplié les gaffes, renversant la carafe sur les genoux de Ferencza : j'avais fait de cette fille l'héroïne pubère de mon roman méconnu « Omma », (« Île maudite »). Elles s'indignaient toutes deux de ce que les hommes de leur âge, 30 ans, racontaient sur les femme : « Pourtant s'ils savaient à quel point on les aime ; ils font tout pour que l'on devienne lesbiennes – le nombre de pédés qu'il y a parmi eux ! Nous avons bien envie d'en faire autant... » Que Dieu prenne en pitié la guerre des sexes... Les trentenaires et quadragénaires s'imaginent que les femmes n'ont plus besoin d'eux ; se sont-elles assez vantées de leur autonomie, de leur « libération » !

     

    Les hommes les traitent donc de la façon dont ils se croient traités : à la cavalière, assez fortes n'est-ce pas pour se ressaisir ; souffrant de la perte de leur bienfaisante minorité juridique et de la protection qu'elle impliquait : tout ce que l'on a imaginé pour libérer la femme, c'est de travailler comme l'homme : cherchez l'erreur. Thérèse et Ferencza désormais ne se voient plus, ne s'écrivent plus. Ferencza, également plasticienne, vit en recluse, sous ses lunettes noires, sa porte anonyme ne s'ouvre plus. Elle a perdu son frère en 76, devenu “Marèk », l'Homme- Cheval, dans mon roman Omma, le meilleur de moi : je l'y appelle « Ferencza », elle se fait jouir sous mes yeux extasiés.

     

    Ferencza (je ne pouvais pas saquer feu son frère) m'a foutu la main au cul dans le couloir puis s'est enfuie en courant. Ferencza, la vraie, fit courir le bruit, que j'étais mort sur l'autoroute... Je suis allé dîner, quelques années plus tard, chez Fontanet - la mère tous bijoux dehors, seins et bagouses en bataille, fils aîné journaliste mort à trente ans. Le cadet prit un jour mon parti devant la classe, alors que je me vantais d'avoir corrigé des copies jusqu'à onze heures du soir (une fois dans ma vie). S'étant tourné vers eux, il s'exclama : «  Vous voyez ! » (« ...vous qui vous imaginez qu'un prof ne fait jamais grand chose... »)

     

     

     

    Filles disgraciées un peu aigries Tag oblique.JPG

     

    Tangnier, à prononcer “Tanier”, en dépit des observations désobligeantes d'une collègue. Je me souviens aussi, en passant, de la petite fille araignée reluquée à Beauregard : une foutue colonie de vacances, garçons d'un côté, filles de l'autre. La monitrice de seize ans me fit monter dans sa chambre, pour me demander si je savais ce que c'était qu'une « poule » (je répétais sans cesse trou du cul de poule) - pour moi, simple volatile de basse-cour. Elle se fardait en me tournant le dos. Puis me renvoya : bien lui en prit. J'aurais tout cafté. Brisé sa vie. N'avais-je pas lu dans l'Histoire sainte du père Toinon qu'un enfant ne disant pas tout à ses parents n'était qu'un misérable méritant la damnation.

     

    Vingt-quatre ans plus tard : Laparade, rousse, fille de flic ; ne peut fréquenter l'école des justiciables... Je lui révèle que son ancêtre est cité dans Saint-Simon, négligeant son régiment, perdant son temps à Versailles. Ma foi, elle n'en était pas peu fière. J'apprends voici peu qu'il était homosexuel, ce que le Roi-Soleil abhorrait par-dessus tout : peut-être l'a-t-elle su. Il lui reprocha publiquement de négliger ses devoirs envers son régiment, préférant traîner à Versailles. Je la trouvais laide et con, et la flattais de toutes mes forces, ne voulant rien laisser paraître. Elle s'est transformée sans doute en grande rousse éblouissante. Jovanić, prononcée par moi Yovanitch, à la serbe, pour faire mon malin), son rire désagréable exprès ; se fait prononcer “Jovanik ». Véritable mystère pour moi que ces internats de filles, aux relents bizarres.

     

    Je les voyais se consoler, se passer des mains sur les épaules. J'imaginais des tas de choses sales et vraies. J'ai même révé à deux d'entre elles, à Beauvoisy, qu'il existait des produits de propreté appelés « savonnettes ».

     

     

     

    Filles dont je fus réellement amoureux

     

    A Saint-Léon, les sœurs Lampin, très vite confondues (d'abord la cadette, puis l'aînée prise pour l'autre) (6e et 5e), l'une d'elles retrouvée au bac : frisée, avenante, quelconque. Sûre d'elle. J'aime les filles tourmentées ; les femmes chancelantes, devant qui baisser la tête et demander pardon. La beauté pour seul rempart. Nul n'oserait en vérité leur adresser la parole. A quoi pourrais-je leur servir, éclatante, heureuse de vivre ? qu'elles aillent se branler. Ce qu'elles font. Llégas, brunette insolente au teint bilieux, dont la mère se paye ma tête dans le train en me qualifiant d' “excellent professeur” ; du coup, dans les cahots, je gagne les chiottes en tortillant du cul comme un mannequin. Un fou. J'étais, vraiment, un fou. Je le suis toujours.

     

  • Olivier de Magny

     

    Et notre Olivier de Magny de poursuivre :

     

    VI Tandis du chef ainsi trenché

     

    Estant freschement arraché,

     

    Distiloit du sang goute à goute :

     

    Qui soudain qu'en terre il estoit,

     

    Des fleurs vermeilles enfantoit,Tableau en cours.JPG

     

    Qui changeoir la campagne toute,

     

     

     

    Non en serpent, non en ruisseau,

     

    Non en loup, et non en oiseau,

     

    En pucelle, Satire ou Cyne :”

     

    Non plus qu'en fer à repasser ni en bite de bouc,

     

    « Mais bien en pierre : faisant voir

     

    Par un admirable pouvoir

     

    La vertu de leur origine. »

     

     

     

    Et c'est aussi pourquoi je crois, (strophe VIII sur XXVIII, on s'arrête à la XVIII)

     

    Que fendant l'air en mile endrois

     

    Sur mile estrangeres campagnes,

     

    A la fin en France il vola,

     

    Ou du chef hideux s'escoula

     

    Quelque sang entre ces montagnes (entre les Alpes et le Beaujolais, la fameuse ville de Lyon) :

     

     

     

    Mesmement aupres de ce pont

     

    Opposé viz à viz du mont,

     

    Du mont orguilleus de Forviere (célèbre colline de Lyon) :

     

    En cet endroit où je te vois

     

    Egaier meinte et meintefois

     

    Entre l'une et l'autre riviere (ici la note 1, pour la vile tourbe ignorante, précise que ce sont la Saône et le Rhône, qui se rejoignent à Lyon).

     

     

     

    Car deslors que fatalement

     

    J'en aprochay premierement,

     

    Je vis des la premiere approche (tu te répètes, Olivier de Magny, magne-toi)

     

    Je ne say quelle belle fleur :

     

    Qui soudein m'esclavant le cœur

     

    Le fit changer en une roche – eh, Magny, ce n'est pas le cœur qui doit durcir, là...

     

     

     

    Strophe XI ! Amis de la platitude, bonjour :

     

    Je viz encor tout à lentour

     

    Mile petits freres d'Amour,

     

    Qui menoient mile douce guerres,

     

    Et mile creintifs amoureus

     

    Qui tous comme moi langoureus

     

    Avoient leurs cœurs changés en pierres.

     

     

     

    C'est pas bien de se moquer ; la langue française venait de naître, tout de même. - Ta gueule. Strophe XII :

     

     

     

    Depuis, estant ainsi rocher,

     

    Je viz pres de moy aprocher

     

    Une Meduse plus accorte (“plus agréable”, Louise Labé a dû se sentir flattée)

     

    Que celle dont s'arme Pallas

     

    Qui changea jadis cet Atlas

     

    Qui le Ciel sur l'eschine porte.

     

    J'apprends ici, vil ignare, que Pallas-Athéna, offensée par Méduse, donna à celle-ci le pouvoir de pétrifier. Je rappelle à la tourbe vulgaire que ledit Atlas fut condamné par Jupiter à soutenir le ciel de ses épaules. Pas de poésie, au XVIe siècle, sans mythologie.

     

     

     

    Car elle, ayant moins de beautez, e-z,

     

    De ses cheveux enserpentez

     

    Faisoit ces changemens estranges :

     

    Mais cetteci, d'un seul regard

     

    De son œil doucement hagard

     

    Fait mile plus heureux eschanges.

     

    Athéna avait change les beaux cheveux de Méduse en serpents ; mais cette Méduse-ci, Louise Labé, ne transforme que les cœurs en pierre... Putain le poète! Ouah con !