Olivier de Magny
Et notre Olivier de Magny de poursuivre :
VI Tandis du chef ainsi trenché
Estant freschement arraché,
Distiloit du sang goute à goute :
Qui soudain qu'en terre il estoit,
Des fleurs vermeilles enfantoit,
Qui changeoir la campagne toute,
Non en serpent, non en ruisseau,
Non en loup, et non en oiseau,
En pucelle, Satire ou Cyne :”
Non plus qu'en fer à repasser ni en bite de bouc,
« Mais bien en pierre : faisant voir
Par un admirable pouvoir
La vertu de leur origine. »
Et c'est aussi pourquoi je crois, (strophe VIII sur XXVIII, on s'arrête à la XVIII)
Que fendant l'air en mile endrois
Sur mile estrangeres campagnes,
A la fin en France il vola,
Ou du chef hideux s'escoula
Quelque sang entre ces montagnes (entre les Alpes et le Beaujolais, la fameuse ville de Lyon) :
Mesmement aupres de ce pont
Opposé viz à viz du mont,
Du mont orguilleus de Forviere (célèbre colline de Lyon) :
En cet endroit où je te vois
Egaier meinte et meintefois
Entre l'une et l'autre riviere (ici la note 1, pour la vile tourbe ignorante, précise que ce sont la Saône et le Rhône, qui se rejoignent à Lyon).
Car deslors que fatalement
J'en aprochay premierement,
Je vis des la premiere approche (tu te répètes, Olivier de Magny, magne-toi)
Je ne say quelle belle fleur :
Qui soudein m'esclavant le cœur
Le fit changer en une roche – eh, Magny, ce n'est pas le cœur qui doit durcir, là...
Strophe XI ! Amis de la platitude, bonjour :
Je viz encor tout à lentour
Mile petits freres d'Amour,
Qui menoient mile douce guerres,
Et mile creintifs amoureus
Qui tous comme moi langoureus
Avoient leurs cœurs changés en pierres.
C'est pas bien de se moquer ; la langue française venait de naître, tout de même. - Ta gueule. Strophe XII :
Depuis, estant ainsi rocher,
Je viz pres de moy aprocher
Une Meduse plus accorte (“plus agréable”, Louise Labé a dû se sentir flattée)
Que celle dont s'arme Pallas
Qui changea jadis cet Atlas
Qui le Ciel sur l'eschine porte.
J'apprends ici, vil ignare, que Pallas-Athéna, offensée par Méduse, donna à celle-ci le pouvoir de pétrifier. Je rappelle à la tourbe vulgaire que ledit Atlas fut condamné par Jupiter à soutenir le ciel de ses épaules. Pas de poésie, au XVIe siècle, sans mythologie.
Car elle, ayant moins de beautez, e-z,
De ses cheveux enserpentez
Faisoit ces changemens estranges :
Mais cetteci, d'un seul regard
De son œil doucement hagard
Fait mile plus heureux eschanges.
Athéna avait change les beaux cheveux de Méduse en serpents ; mais cette Méduse-ci, Louise Labé, ne transforme que les cœurs en pierre... Putain le poète! Ouah con !
Commentaires
Olivier de Magny? Du Bellay? :)
le dernier est récité par Louise..
http://m.youtube.com/playlist?list=PLw_bOW3oZG0EMmUnEx5Qxa3d5BVyu_4oj
Merci pour cette vidéo "reconstituant" la voix de Joachim ! très bon !