Proullaud296

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der grüne Affe - Page 174

  • Démolition de Sterne

     

    Bonjour tout le monde. Les insignifiances se suivent et ne se ressemblent pas. Après “Concert baroque” d'Alejo Carpentier”, “Le Voyage sentimental” de Sterne. Il est con, Sterne. Il est terne. Il est Anglais, et du XVIIIe siècle, c'est l'auteur de “Tristram Shandy”, il a influencé Rousseau e tutti quanti, mais cette œuvre-ci, peut-être parce qu'elle est de vieillesse, bat tous les records de lavassonnerie serpillassère, et ne donne guère envie, hélas, d'aller voir plus haut. Il s'agit d'un lord assez fortuné pour venir voyager en France, de Calais à Moulins ; il rencontre maints Français, des Françaises, se montre fort aimable, prévenant, galant, trouve tout le monde gentil, aimable, prévenant, fait assauts de politesse, de galanterie, de modestie, et goûte les joies de l'analyse psychologique d'après les faits.

     

    Le tout en s'excusant de s'excuser, en se répandant en émerveillement sur sa propre sensibilité : mon Dieu que je suis sensible, mon Dieu que je suis modeste, que ces gens sont bons et ces jambons. Ni suc, ni vertèbres ni viande : du verbiage, le sourire en coin de celui qui va en dire une bien bonne et qui ne dévide que des platitudes à la mélasse. Sans les notes en bas de page indiquant les endroits où il faut rire, où il faut s'émouvoir (parce que, n'est-ce pas, cela rappelle tel autre passage de telle autre œuvre où il fallait déjà rire, folio 21 de 1739), eh bien on poserait ça là. Voilà ce qui arrive aux ignorants de la littérature anglaise quand ils s'avisent d'y faire un plongeon sans préparation universitaire. C'est comme pour Henry James : après “Le Dessin dans le tapis”, où je me suis demandé pendant 150 pages de quoi l'auteur pouvait bien vouloir parler : on ne me reprendra plus à Henry James. Ça doit être anglais. Celui-ci cependant, Sterne, comme l'oiseau, se promène en France. L'on voit minauder les servantes, gronder les marquis et quêter les moines. Mais franchement, ça dégouline de partout ; les bons sentiments, les attendrissements niais sur une boucle ou un orteil, ces perpétuels “mon Dieu que j'ai tort et que je vous admire” portent véritablement sur les nerfs.

     

     

     

    /Lecture de la p. 47/

     

     

     

    Voilà un exemple typique de ce galimatias. Que l'on m'explique sil 'on veut dans cet embrouillamini ce que Sterne veut bien dire ? Des tortillons, des tortillons, l'air toujours d'être au bord d'un fin mot, l'air de faire allusion à quelque coquinerie plus ou moins grivoise, et puis rien, rien, rien, le plat le plus désespérant. L'équivalent, tenez, de Sévigné : des lettres de trois pages où ne se lit que le plaisir qu'on a d'écrire. Et ce petit sourire en coin, de l'homme qui veut absolument qu'on pense qu'il a de l'esprit, tout en jouant les faux modestes. Ce qu'on appelle uen tête à claques, qui est souvent la mienne.

     

     

     

    Le rideau de ma porte-fenêtre.JPG

    / Lecture de la p. 141 /

     

     

     

    Voilà ce que j'ai raté : la sensibilité à fleur de peau, le moindre incident monté en épingle pour s'achever en invocation, en apothéose. Devant des êtres si brûlants d'émotion, l'on comprend les excès de la Terreur. Il nous faut admirer cela, sans doute, et le replacer dans le contexte larmoyant du siècle, et plus précisément de 1768. Ce livre fut publié en février, Sterne mourut en mars. Paix à son âme sensible.

     

     

     

    / Lecture de la p. 188 /

     

     

     

    Qu'il est bon qu'il est doux d'aimer, fût-ce son valet. Qu'il est chiant pour autrui d'être de si bonne humeur.

     

     

     

    / Lecture de la p. 235 /

     

     

     

    Là ma foi l'on tombe sur la table des matières, les derniers chapitres, qui manquent être fripons ; figurez-vous qu'à l'auberge il ne reste plus que deux lits, l'un pour une femme, l'autre pour un homme. Ils se couchent et ne se parlent pas, mais se parlent pour se dire qu'ils ne se parlent pas. Survient la servante pour veiller à l'honneur de sa maîtresse, et dans le noir, Sterne touche la servante et la phrase s'interrompt et c'est la fin du livre, eh ben bon vent, voilà longtemps que je voulais le donner ce sera chose faite, la prochaine fois, Maxime Du Camp. A ciao !

     

  • T'as raison, Carpenntière...

     

    Lecture de la p. 47, rencontre inestimable avec Vivaldi, qui tirera de la Conquête du Mexique le sujet d'un opéra. Et tous de se rencontrer entre joyeux ivrognes, dont G.F. Haendel, pour faire de la musique. Au diable la vraisemblance : c'est Carnaval, fouchtra, et Vivaldi se sert dans son vivier de musiciennes ! Dans le convenu, c'est excellent. Ce livre ne veut peut-être pas se présenter autrement que comme une pochade. Et tout le monde gueule, fait la farandole. On ne sait plus s'amuser. Les critiques sont des grognons. Ils ne veulent plus admettre qu'on rigole. Plus un gueuleton sur la tombe de Stravinsky, au diable la chronologie.

     

    Créait-on donc dans une pagaïe pareille ? Nous connaissions surtout Carpentier moraliste, dans “Le Royaume de ce monde” ; mélancolique, dans “La Harpe et l'Ombre” ; nous ne le savions pas capable de se divertir. Et voilà quelqu'un qui assume pour lui, pour son pays, la charge de l'exotisme. Il reprend à son compte le regard des Européens sur l'Amérique Latine, il déverse le Mexique et Cuba sur Venise, avec bonne dose de jazz à la fin. Bien sûr notre descendant de Montezuma trouve l'opéra tiré du Mexique parfaitement absurde : “Voilà donc comment on nous voit à Venise !” ...Avec des éléphants, un général historique devenant femme sur la scène de l'opéra.

     

    Grande discussion entre le Mexicain et l'inventeur de toutes ces aventures de théâtre. Il nous répond à tous, Alejo Carpentier : "J'ai voulu me fendre la gueule, et ceux qui n'y entendent rien sont des pisse-froid.”

     

    Lecture des pages 94 et suivante.

    Le pignon de mairie annexe.JPG

  • Indignations puceautières

     

     

     

    ...(la plus friponne et la plus scélérate, au point de jouer les libéraux, les démocrates ; les bureaux d'accueil. Alors que le dernier des ploucs de Follainville-Dennemont ou même tenez de St-Cyr-en-Arthies saura parfaitement, dès atteint l'âge de propreté sur soi, que nul n'entrera ici d'un quart de ligne qu'il ne soit l'ami d'enfance de ces snobinards prétentieux. Jamais on n'aura poussé si loin l'aveuglement – car hélas, nos fils de bonne famille ne sont pas même conscients de leur sottise. Il leur serait pardonné s'ils montraient leur cynisme, tel ce directeur de théâtre qui rigolait en 65 à la télé : "Allez-y les jeunes auteurs ! Envoyez vos manuscrits ! On a justement un vieux piano qui boite !" Là, même pas : ces braves andouilles de Mantes ne se sont pas aperçus de la gifle, du mollard, de la diarrhée qu'ils projetaient à la face de tous ceux qui mijotent dans l'ombre, de tous les asociaux, de tous les aigris qui ne savent pas sourire dans les salons, ignorent l'art de pérorer à vide en tournant son verre dans les doigts comme un héros de Sagan.

     

    Ils ignorent aussi l'art de flagorner l'auteur qui vient "faire une signature" tout en empêchant les timides d'approcher ("Il est à nous l'auteur, il est à nous ; vade retro, loqueteux ! même pas de veston" – j'ai pas dit "cravetouze, on n'en porte plus, j'ai dit "veston"). Moi je ne sais pas vendre les bouquins. Je ne sais pas me montrer tellement accueillant que ça vous donne envie de fuir, vermisseau que vous êtes, sans entregent, timide, ouh ! qui marche le dos courbé, ouh ! le pauvre type qui n'a pas encore son imprimante, ouh ! le taré qui ne s'est pas encore fait publier, ouh ! qui ne se fera pas publier chez nous parce qu'on ne fréquente pas le même milieu !

     

    Le Chœur :

     

    "Des-noms ! Des noms !" Mairie vue de loin, avec automobile.JPG

     

  • Massacre

     

    ...Déjà, le fascitrouducule est en mauvais étapette. Non par longue fréquentation, mais par long abandon. Pour l'avoir feuilleté, je sais qu'il s'agit d'un recouil de poèmes, avec beaucoup de blancs “pour l'âme” et une infinité de platitudes – ce genre de vent que s'obstinent à vesser depuis trente ans uen génération d'anémiques. Mais que vois-je ? Une préface ! Sans doute quelque éloge abscons et di tire-en-bique – ouah le beau papier d'impression ! Les beaux cahiers non-reliés, toujours plus brut, toujours plus authentiques ! Hmmm, Danone... Exergue de Kenneth White, ben mon cochon...

     

    L'auteur est donc censé, avec ses “Runes”, surenchérir sur la puissance des dieux. Ça ronfle la préface, coco, dès les premiers mots, ça te renforce déjà l'antipathie, par cette grossière approximation sottement revendiquée de l'écriture aux sciences physique et mathématique. Encore un poseur d'équation. Et de s'interroger : “Est-ce de la poésie, une forme de poésie ? Une poésie formelle ? Ou formellement la poétique ?” - mon pied au cul, est-ce un pied sur un cul, un cul frappé d'un pied, un pied augmenté d'un cul, ou deux fesses exprimées par le pied ? Moi-même et Dieu merci, la page 8 épuise la préface : “L'évidence scientifique peut-elle rejoindre l'évidence poétique ?”

     

    Grand Un, Attila, toute la page. Suivante, blanche, fin du premier cahier, ô grandiose pensée, allez ! On s'y plonge :

     

    La mairie de Bordeaux-Bastide.JPG“Naître dans le noir” (là dis donc)

     

    du vivant des caresses”

     

    (interligne)

     

    “en vouloir à la nuit”

     

    (interligne) (très important les interlignes)

     

    “gagner à s'y perdre”

     

    Traduction (? ) : “Mes parents ont baisé dans le noir (là dis donc) (oui, bon...) - ces salauds, et j'ai peur du noir, ce qui ne m'empêche pas de m'enfoncer dans un vagin”.

     

    N'est-ce pas profond ? C'est fort variable ma foi, et les femmes se le mesurent au doigt tant qu'elles peuvent. La page douze est encore plus succincte. Ayant lu les “Runes”, peut-être en ferai-je cadeau – page 13 : “La parole futile

     

    une douleur qui se tue au silence

     

    ce besoin de rien

     

     

     

    que la faim assouvit”

     

      • autrement dit, “quand j'ai le bourdon, je la ferme, mais je la rouvre, je bouffe un Mars, et ça repart”.

     

    Que de Béotie dans l'âme du critique... Il suffirait sans doute d'un ton pénétré ? Je crains que ma conviction première ne se mue en grosse indulgence de poisson noyé. Qurtout n'attendons rien de neuf : Monsieur Poète pense :

     

    “Captif des vertiges

     

    sur la terre à bâtir

     

    son mal en patience

     

    pour y dormir au bord”.

     

     

     

    Celui-ci me plaît : c'est bien par la faute de ma femme que je ne peux voyager : GNAGNAGNOUEEEERE !

     

    ...Ah, enfin ! Ce vers nul ! Ce vers parfaitement nul !

     

    “Les dents cariées par le sucre du silence” - ça c'est du symbolique mon pote ! “le sucre du silence”, apposition indirecte. “Les prés de mon âme”, “le pneu de mon amour”, “la braguette de mon tambour”, ça c'est de la poésie coco ! T'as pas deux briques que je te ficelle un bouquin à la con ? Page 16 ! Juste avant, “II”, au début d'un feuillet : nous retombons sur nos pieds. Ce doit être cela, le mathématisme de la poésie :

     

    “Les récoltes engrangées

     

    l'ivraie se récolte

     

    pour la beauté” - penseur ! Et qu'y a-t-il derrière ce “grand II” ? Une page blanche. Tant le poème précédent tant à penser laisse...

     

     

     

    “Femmes” (attendons-nosu au pire) (mais non, pas parce que c'est des femmes, abruti !) - “Femmes

     

    moissons oubliées

     

    sous la pluie des regards

     

    elles donnent faim”

     

    - je vous fais grâce des interlignes.

     

    Après l'ennui, l'amour ! Ah nom de Dieu ! Le “grand III”, c'est le sexe : sûr ! Les femmes, les moissons ! Quel être singulier, ce Latire ! Quelle puissance !

     

    “Un sourire,

     

    un champ givré à perdre haleine

     

    la plaie qui se rouvre

     

    quand le lière fuit !

     

    Quand on débande, la vulve bée, puis en redemande !

     

    Moi aussi je manie le symbole. Mais je perds le souffle. Il arriv eun moment où plus rien n'est à dire. Çase surpasse pp. 22/23. Plus que deux vers. Sûr que ça gagne en intensité :

     

    “Quand on caresse l'arbre,

     

    on met la main au feu”

     

    “Arbre, il brûle de le savoir.”

     

     

     

    Je sens venir, parole ! Une page avec une lettre ! Ou blanche, non plus au revers d'un chapitre, mais en plein milieu !

     

     

     

    “Sur le chemin du retour

     

    la pluie

     

    allume la lumière” - j'ai gagné ! La page d'en face est blanche.

     

    De la poésie mathématique on vous dit ! Plus subtile encore : la page n'est pas numérotée ! Ni la suivante, blanche aussi ! Il faut tourner une page entre 24 et 25 ! ô piètre âme, ô pieds au cul, pieds découragez qui restez mous dans vos pantoufles !

     

     

     

    “La pluie

     

    ses cheveux brûlent

     

    sur terre” - lecteurs, vous avez vu l'opposition ? La pluie qui brûle ! Vous avez remarqué les éléments ? L'au, le feu, la terre ! L'air, c'était le vide des pages. A présent chiche qu'il nous entretient vde vent, de brebis ou de roc... Encore gagné ! C'est la neige, le diamant, “les facettes égrisées par une bise” - je n'aurai pas perdu mon temps : j'aurai appris un mot. Mais j'ai la flemme vraiment d'aller chercher dans le dictionnaire. Allez, un petit coup de Bon Dieu, un petit coup de Mort pour finir, ça ne fait pas de mal ! C'est joli les majuscules. Un peu de montagne, un peu de roc, ça manquait, ah ! La ville. M. Latire touche à tout. J'accélère : “La ville

     

    elle porte des bas

     

    à demeure”.

     

     

     

    C'est joli la polysémie. Soudain, page 35, je tressaille un peu, à peine :

     

     

     

    “Noyés au-delà de la force

     

    cherchant dans l'eau

     

    ce qui dénoue

     

    ils en prennent encore la peine”.

     

     

     

    Et je le noterai.

     

    La moindre chaise au désert devient cathédrale.

     

    Mais la chaise s'effondre page 36. Chapitre IV !

     

    A chaque nombre je scrute en vain l'arrivée de la mathématique :

     

     

     

    “Une grappe de folie fait un repas au solitaire” : il a pensé. Il a poété. Peut-être ce Monsieur gagne-t-il à être connu. Mais voilà : il croit écrire.

     

    “La peur aime à cacher ce que la solitude invente”, et je dirai même plus : “La peur aime à inventer...”

     

    Ce n'est pas fini

     

    “Avec l'âge, la beauté se protège” !

     

    Ici, deux réactions : ou bien s'acheter un kilo de Nivéa, ou bien relire “Les Vieilles” de Baudelaire.

     

    Ah ben merde alors ! C'est fini ! “Il a été imprimé 500 Runes ... Pas de prix... Quelques lignes ua dos, reprises de la Préface, pour rappeler n'est-ce pas, mais ça ne me rappelle rien du tout – mais alors, mais alors, il va falloir que je me cherche un autre livre, moi !

     

  • N'habitez jamais votre lieu de travail

     

    Magdalena tente une autre approche : “Nous ne voyons jamais personne.” Il faut dire que la Cité du Purgatoire (leur domicile) se prête peu aux fréquentations, voire aux voisinages : des immeubles bas, allongés dans leurs briques rouges sur un terrain boueux, venteux... “Quittons ce désert”, dit Magdalena. Quittez ces bois, vous ferez bien [“Le Loup et le Chien”]- à vrai dire chacun d'eux vit sous un véritable déluge de contacts sociaux : patients de psy, potaches de prof. Un trop plein. Une hémorragie. Une diarrhée. Un déluge de diarrhée. De retour du travail il leur faut s'isoler, s'allonger, se reprendre – quant à recevoir... à être reçus... à écouter, parler, répondre - ils étouffent, certes ! Au cœur du Dédale Rouge alias Cité du Purgatoire (pour mémoire) – ce sont les lieux mêmes qui suintent d'inquiétude dit Térence (trop d'élèves habitent la cité, déversant leurs sarcasmes anonymes par les fenêtres ouvertes sauf l'hiver, le bienfaisant hiver.

     

    C'est pourquoi aussi contre toute logique il veut rester ; Magdalena ne jurant plus que par B., port du Midi, où résident famille, amis - je préfère souffrir ici, seul, dignement. dit Térence qui se revoit, jadis, étudiant, à B., au Fac Mother où il reviendrait boire du lait fraise (je suis abstinent). “Je peux” dit Magdalena “rouvrir un cabinet rue J. [quartier des médecins] ; mon père médecin fournira l'argent.” Près de Paris, Cité du Purgatoire, Térence descend la pente et prend le train de banlieue, puis marche dans la Capitale (je prends mon exercice) “Tu ne visites même pas” dit “les expos” mais Térence affectionne Pari où l'air est plus vif dit-il, où j'ai l'impression qu'un jour il se passera quelque chose un peu comme un tirage de loto en province même pas de loto.

     

    “Tu es un provincial” dit-elle. Arrive un jour de brouillard Cité du P. Les immeubles flottent, les angles s'adoucissent, la vue blanche porte à trois mètres. Térence marche avec soulagement : ni vu ni reconnu. Par temps clair je ne peux sortir de chez moi. Térence croit fermement que sous les fronts de quinze ans ne clapote que du fiel. Il est dur d'être enfant Cité du Purgatoire. Des cons formant barrage devant le bureau de poste. Jadis il était jeune. Peureux. Pas accepté dans les bandes. Il restait seul. A l'instant il voudrait leur casser la gueule. Baisser les épaules marcher droit ! mais il baisse la tête, il lève les pieds.

     

    Scarabée rhinocéros.JPGCe sont les autres qui se tournent, qui sont gênés. Le pain. Les cigarettes. Les vélomoteurs au point mort. Doux bruissement. Juste de l'embarras, ce n'est rien, l'épaule au niveau de l'oreille, l'émotion sans doute, la baguette au-dessus du cabas. Térence trébuche il est mal habillé. Une pièce tinte sur le trottoir : Goo-oo-ood morning, Mister Elliott ! Dès qu'il a tourné le dos la Nuée glapit ! s'il se retourne il est foutu... Il se redresse. Démarche im-pec-cable. Tous les trois jours goo-oo-ood morning goo-oo-ood evening de très loin, de très haut – béni brouillard, béni brouillard.

     

    Il ne faut pas frapper les enfants. Ça ferait du bien. Puis les hyènes. Ça recommencerait, plus haut, plus fort – je ne tremble plus – je respire à fond. Une fois tout de même l'un d'eux s'est pris toute la largeur d'un bouquin sur la gueule – c'est pas moi – qu'y gueulait – moi non plus – j'ai répondu. Pour se valoriser Térence a rédigé une Thèse sur Shelley (Percy Bysshe), correspond avec Oxford, Boston (Mass.), avec un tarif, un pèse-lettre (pas de queue au bureau de poste) ; la boîte aux lettres d'ici s'encastre dans un renfoncement. Terence prend les petits pas chinois dans l'herbe et dépose à l'abri son courrier dans une autre boîte lointaine ; le long du chemin les vitres renvoient son image droite et digne.

     

    Ce lundi la poste a muré le renfoncement, les jeunes sont partis.

     

  • Caetera desunt

     

    CHAPITRE CINQ Le Père Duguay prˆtre … Chƒteauneuf, 
    espion auriculaire

     déjà connu, obéit aux injonctions de François Nau,
     demi-frère du Docteur en m‚decine ;
    il est en relations avec Annemarie Mertzm?ller,
     strip-teaseuse au grand c?ur qui se fait troncher … l'hôtel,
     mais offre en scŠne son corps … Dieu. Il connaŒt
     ‚galement

    le Kader ben Zaf … la Teste, prŠs d'Arcachon.
    Tous deux sont des demi-r“les. Ils doivent cor
    rompre,
    chacun … leur maniŠre, les deux maŒtresses
     des demi-frères, Pascal Matz et le marchand
     de chaussures. Comment s'y prendront-ils ?

    Le poteau, l'arc-en-ciel.JPG

     Le prêtre doit s'aider de toute sa casuistique, 
    afin de paralyser

     petit à petit la strip-teaseuse,
    l'enserrant dans le filet du péché,

     auquel il ne croit pas. Il espère
     la revoir en train de baiser,

    au lieu de se masturber bêtement
     de l'autre côté d'une cloison

     de chambre d'hôtel, au-dessus du bidet
    (pas de taches, évacuation

    immédiate). ...Après son exploration donc
    des couloirs de l'hôtel,

     le Père Duguay ne s'en tient pas là.
    Rappelons ceci :

     vous connaissez de ces petits abbés
    chafouins, cafards, tout noirs ;

    ou de ces gros abbés ventrus. Duguay n'est
     ni grand ni petit,

     ni blond ni brun, ni..., ni. C'est déjà beaucoup,
     c'est trop

     qu'il soit ecclésiastique - vous en connaissez
    beaucoup,

     vous, des ecclésiastiques ? suffisamment
     pour

    qu'on puisse en établir une, voire des typologies ?
     L'église de Châteauneuf est noire, son porche

    en lave s'ouvre en biais face au
    bistrot-cartes-postales ,

    et la ruelle qui les sépare fomente de foutus
     courants d'air.

     L'abb‚ Duguay rase les murs ; il ne se sent chez lui
    que dans son église, multiplie les signes de croix,
    redonne l'argent maigrelet de ses quêtes
     dans les troncs,

    … saint Antoine, … sainte Th‚rèse (qui a vraiment
    une gueule de paysanne born‚e, obtuse
     comme c'est pas permis, pas ‚tonnant
     qu'elle ait vu un grand mur gris devant
     ses yeux

     au moment de mourir au lieu du Christ -
    "Le Christ est peut-être un grand mur gris",
     bave une notice ‚difiante. Duguay prie, bras en croix, à genoux
    ou de tout son long