Proullaud296

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  • Marseille-Bordeaux

     

    Comment puis-je longtemps demeurer immobile. Inactif. Comment ne pas rendre hommage à cette lecture si facile et si douce, si longue et maladroite d'un grand curé devant l'Eternel, Daniel-Rops si gauche et si sacristain, sans moisi toutefois – par simples allusions. Comme il serait malvenu d'ajouter des notes à des mots, en ce long cercueil de fer roulant, vivant, garni d'êtres chers. Les personnes me hantent. Les hautes femmes brunes enfardées, leur odeur surfaite et leurs ongles vernis, tout écaillés – ces dignités qui n'en sont plus, ces mystères dégradés tout grisés d'égalités paritaires. Le canal du Midi qui borde les voies. Sincérités vagues, souffrances évanescentes, deux lignes d'eau, deux lignes vertes, un embarcadère, juste vivre et deviner ce qui stagne.

     

    Superflu de l'épilogue – foi chrétienne plaquée, paysages trop vus d'où l'on se détourne. Votre sourire vaut tous les paysages – c'était à Saint-Bertrand de Comminges. L'Allemagne dans mon dos, la Gascogne arabe devant, de longues jambes noires et maigres sous un cul sans moulage, des yeux curieux prêts à se courroucer – rester intéressant. Non pour les femmes mais pour le dieu, dans l'allégeance à soi. Une autre femme parle fort au téléphone, personne auprès d'elle et pour cause. De grands champs détrempés par sillons. Tu me fais chier dans tout le train. Le moindre mouvement des femmes comme une invraisemblance, le mouvement des statues – les femmes sont des statues qui bougent et ressentent – que c'est bizarre.

     

    A table.JPGAbsurde. Incongru. Frémissant d'absolu. Un roulement retentit par derrière : Restauration, dernier passage, ce soir mon ventre au poulet destiné ; que venez-vous nous encombrer de vos conneries molles ? Laissez-moi donc tranquille manger ma banane sur la plage ! Peupliers nains et grêles entre la voie et l'eau, guérets bruns sous le soleil couchant – la femme s'est remise à gueuler, son gros cul, sa tête anxieuxse et fière - qui donc leur enseigne de tout se permettre ? Voici la Garonne, plaques brunes mouvantes d'argile s'échouant à flanc de rive ? Gare à grande vitesse. Madame, auriez-vous des biscuits ? Le train secoue ; à l'aller un Gitan s'était jeté dessous. Les rails grondent.

     

    Ces abandons ne valent rien : la menace s'efface – tout ralentit – AGEN. Où je bouffais de la purée face à l'antisémite : Ce n'est qu'une opinion ! Pas après Izieu. J'ai vécu ici-même dans une autre ère. D'autres avenir nous attendaient. Ce n'est plus croyable. On ne peut y ajouter foi ; nous nous pensions pleins de passé, avec des quantités d'années devant : merde à la modestie, qui nous a fait tant de mal ! Un bassin de femme me frôle, maintenu par-dessus les sièges en instable équilibre, sans le moindre parfum signal sous mes coups de narines. Nous sommes des millions à écrie dans l'ombre, descendants saccadés ces longs degrés qui mènent au tombeau ; tous le stylo entre les dents; ainsi parlait Colaux le Belge. Des hommes au cul mince, pantalons tombants, nuques rasées.

     

    Le coup de fouet du train qui nous croise. Nostalgie du corps qui se dissout dans l'herbe et la rosée. Garonne. Personne ne te lit ni moi non plus. Couchant magnificent sur les plastiques protecteurs. Plus qu'une heure et vingt minutes. Arbustes sans feuilles alignés dans le rose et le roux, fleuve bienveillant grossi, panneaux de gares flagellant la vitre illisible, terrains et toits plats et blancs qui s'allongent dans l'ombre, routes grises et je dors comme une pierre, il y a plus à l'intérieur de mon bocal bercé que là dehors, où gisent les champs indéfinissables.

     

    Manque d'air. Pommettes chaudes. Et repartir demain. Ces hautes perches sont des plantations de tabac. Marcher ne suffirait plus mais fondre dans l'humus. Traits de visage ou contours animaux si souvent reproduits dans les roches, Christ ou Macchu-Picchu, talus obscurs jamais je ne rêve aussi vite Sylvie veut me voir si rayonnant dit-elle

     

  • Noémi

     

    Noémi est une peluche. Son prénom biblique apparut dans un conte de la Rostopchine, mêlé à une histoire de marée montante surprenant un groupe d'enfants. Je m'étais étonné qu'un prénom de fille ne se terminât pas par un "e". "C'est parce que c'est comem ça", m'avait dit ma mère, sans me convaincre. Celle-ci est un singe, en l'occurrence une guenon. Elle est à contre-jour parce qu'une mains l'a posée au sommet de mon moniteur, au-dessus de l'écran : je ne peux la voir qu'en m'éblouissant, et la lumière de la fenêtre, en arrière et sur la droite, n'améliore pas la vision. Ce singe ne respecte pas les proportions de la vraie vie : ce n'est qu'une peluche, schématique, à caresser.

     

    Voiture.JPG

    Elle occupe un triangle aux pattes écartées, la tête un peu déviée par rapport à la hauteur. Les pattes sont droites, courtes et veloutées. Par-dessous l'on aperçoit la surface plus claire du moniteur. Tout se concentre dans la tête : deux petits yeux luisants, un mufle de singe bien saillant particulièrement appétissant, attendrissant aussi. Cela donne envie de se frotter, museau contre museau. L'ensemble des yeux, du nez qui surgit justa au-dessus et du mufle rond forme donc une demi-sphère au tissu ras, couleur bistre clair, surmontée par deux cercles incomplets contenant les yeux, grands ouverts et bien écartés. Enserrant tout cela comme une fourrure de capuche, une enveloppe de poils blancs, rétrécie en pointe juste sous les yeux, qui marque la taille du visage.

     

    Englobant encore le tout, un capuchon brun sombre, suite de la robe uniforme du singe, lui donne l'allure d'un esquimau à cheveux blancs, coiffé d'une cagoule de scaphandrier en peau de phoque, mais noire. Les quatre pattes écartées suggèrent que la petite guenon s'est raplatie en grand écart sur la glace, maladroite. Le contre-jour auréole sa silhouette d'une fine pellicule à peine luisante. Pour compléter, nous devrions aussi mentionner la souplesse de l'animal, son velouté, son élasticité, sa capacité à supporter toutes les caresses et à les rendre, et la profonde gentillesse,la générosité qui se dégage de ses courbes harmonieuses et sensuelles, s'il faut employer les clichés. Au début nous faisions peu de cas de cette silhouette moricaude et rudimentaire, puis son apparente patauderie, son prénom de fille, nous ont séduits. Noémi, toute petite, tient à présent toute sa place.

     

     

     

     

     

  • Le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire

     

    La cage d'escalier triangulaire.JPG

    Jonas Jonasson, « Jonas fils de Jonas » écrivit dans la première décennie de notre millénaire un conte philosophique de haute volée, intitulé Le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire, nous dirons même son centenaire. La couverture présente un très vieil homme très droit et revêche, dans un grotesque Babygros de couleur rose, avec la tête de porc en acrylique à ses pieds, plus, on ne le remarque pas d'abord, un bâton de dynamite bien méché dépassant d'une pochette côté droit. D'où l'on conclut provisoirement que ce vieillard ridicule possède de quoi surprendre, voire se défendre. Vous ne vous êtes pas trompé : cet homme, que les infirmiers de l'asile ont ainsi affublé, veut échapper à la célébration dérisoire qu'il pressent, avec discours, fanfares et beuveries au yaourt fraise.

     

    Comme un vulgaire pape interprété par Piccoli, notre centenaire se défile et prend la route, non pour assister aux cérémonies du débarquement, mais pour quitter cet établissement bien intentionné qui l'a confit dans la guimauve. S'en suivront deux fils d'aventures parallèles, celles des diverses rencontres peu recommandables qu'il a faites après son évasion comme dans Le lièvre de Vatanen et autres Petits suicides entre amis, de Paasilinna, et celles qu'il a connues dans son passé mouvementé : l'homme, prénommé Allan, s'est en effet toujours trouvé là aux bons moments de l'histoire. Sans se faire remarquer, muni simplement d'un sens aigu de l'observation et de l'opportunité, il a sauvé la vie de Franco, participé à l'invention de la bombe atomique, à la victoire de Mao-tsétoung, toujours l'homme qu'il faut là où il faut, the right man in the right place. Et puisque nous en sommes aux références, mentionnons aussi Le brave soldat Chvéik et La vingt-cinquième heure de Virgil Ghiorgiu, bien que notre héros ici suédois sache toujours, quant à lui, se sortir des situation les plus périlleuses par des entourloupettes plus explosives les unes que les autres.

     

    Nous oublions encore ce film où, grâce à d'astucieux montages, tel héros apparemment peu doué du cerveau se trouve en contact avec tous les grands personnages de l'histoire du siècle, par ordre chronologique ; c'est donc bien à partir de la littérature existante, mais sans le faire exprès, là est le génie, que l'on parvient à composer une histoire pleine d'humour et d'imprévus : Allan possède de sérieux atouts : un manque total de préjugés moraux ; une confiance non moins totale en son simple bon sens et en son intérêt immédiat, advienne que pourra pour les autres. Une fausse naïveté qui inspire confiance, sous une apparente balourdise. Un véritable don pour assimiler des rudiments de toute langue étrangère, et attirer la sympathie en offrant ou en recevant des pots fortement alcoolisés qui l'ont maintenu en forme jusqu'à son centenaire. La vraisemblance gâcherait tout. Ce doit être rocambolesque, le monde doit être parcouru, en avion, en bateau, à dos de chameau de la Chine à l'Afghanistan. En des chapitres alternés, notre bonhomme contemporain déjoue toutes les tentatives de la police suédoise pour remettre la main dessus, afin de le réincarcérer dans son asile de vieux avec les meilleures intentions lénifiantes du monde. Hélas ! Les bourrins de Suède sont aussi sots que les bourrins de n'importe où, et se farcissent un écheveau de déductions absurdes, c'est-à-dire bien trop logiques pour l'imagination délirante de notre auteur. Allan se trouve mêlé à toutes sortes d'histoires de gangsters, de fugitifs, de cadavres découpés dans des valises, d'explosifs bien sûr, d'une éléphante de cirque prénommés Sonia qui défèque sur la gueule d'un homme armé qui glisse et se fait assoir dessus dans la merde, ce qui ne laisse pas beaucoup de restes. A chaque fois, Jonas Jonasson prend bien soin de souligner que le héros n'a jamais fait exprès, n'a jamais eu en vue que son intérêt ou son amusement le plus naïf, provoquant d'immenses évènements de la façon la plus disproportionnée, sans jamais revenir s'enfermer dans une institution bêtifiante représentant le conformisme le plus étroitement suédois disons occidental.

     

    Jamais plus vous ne traiterez un homme âgé de Papy après avoir vu de quoi se montre vaiment capable un centenaire dépourvu de muscles. Un film en fut tiré : ne le manquez pas, et prêtez l'oreille à ce qui va suivre. Fin du chapitre 11, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, et début du chapitre 12, en 2005, en Scandinavie. Prêts ? Partez : « Finalement, les trois révolutionnaires avaient renoncé à rallier Allan à leur cause et s'étaient résignés à le considérer comme un bon camarade, pas du genre à pleurnicher pour un petit flocon de neige. Il monta encore dans leur estime » (n'oubliez pas qu'il n'est alors que quadragénaire) « quand il mit à profit une période d'oisiveté due à l'attente de meilleures conditions climatiques pour fabriquer de l'alcool à partir de lait de chèvre. Les trois révolutionnaires ne comprirent jamais comment il s'y était pris, mais le lait se transforma en eau-de-vie bien corsée, grâce à laquelle le temps parut moins long et ils eurent moins froid.

     

    « Au printemps 1947, ils étaient enfin arrivés sur le versant sud de la plus haute chaîne de montagnes du monde. Plus ils approchaient de la frontière iranienne, » celle de leur patrie, « plus nos trois compagnons s'enthousiasmaient en parlant des desseins merveilleux qu'ils avaient pour leur pays. Leur était venue de chasser tous les étrangers de la terre iranienne. Les Britanniques avaient soutenu pendant des années le shah corrompu et c'était impardonnable. Mais quand le shah en avait eu assez d'être sous leur coupe et avait commencé à se révolter, les Anglais l'avaient tout simplement destitué et avaient mis son fils à sa place. Cette situation rappela à Allan Song Meiling et son mari Tchang Kaï-Tchek et il se dit que les grands de ce monde avaient une drôle de conception de la famille. » - quant à la politique, notre antihéros l'a définitivement foutue aux oubliettes, avec tout ce qui se termine par « -isme » ou « -iste ».

     

  • Mazarine Pingeot

     

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    Les vociférations, à la lettre, hystériques, de Mazarine Pingeot face à Zemmour déshonorent non pas son père, ni même l'image de la femme, ce qui n'a rien à voir ici, mais la notion de débat elle-même. Inonder son adversaire d'insultes à pleins tombereaux sans même lui laisser l'occasion de proférer une syllabe ravale cette hyène aux pires débordements du cerveau reptilien et laisse présager, dans un avenir très proche, une époque où l'on égorgera, en France, les gens, juste en fonction des opinions non pas même qu'ils professent, mais qu'on leur suppose au milieu des hurlements de haine. C'est là une ignominieuse confusion avec la furie des pitres, sur scène et obscène. Le comportement indigne et déshonorant de Mazarine laisse hélas prévoir le retour des épisodes les plus sanglants de nos Guerres de religion, où chacun prônait la fraternité chrétienne et l'ouverture aux aûûtres, pourvu qu'ils fussent très exactement du même avis que soi. Il devrait lui valoir un bannissement perpétuel du moindre plateau télévisé. Dans la même foulée, je propose aussi l'éviction polie mais irréversible du prétendu meneur de débat, qui se réjouit de déverser sur les ondes le puant fumier de ce qu'il ose nous présenter comme un débat démocratique. Quant au coup de pied de l'âne Cohn-Bendit, qui ose établir un parallèle entre le succès de Zemmour et celui de Mein Kampf, il ne mérite même pas le mépris, mais le plus profond silence - pour le coup, nuit et brouillard. Le seul à conserver sa dignité, dans cette affligeante exhibition, c'est encore Eric Zemmour, dont je suis loin de partager toutes les opinions, mais à qui je tiens à témoigner ici mon plus profond respect.


     

     

     

     

     

     

  • La chambre de Véra et les gros chats d'Athènes

     

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    Redescendons de la chambre de Véra au deuxième étage de la rue Leupold, elle vient d'accoucher. Nous fait promettre d'adopter son chat, noir et blanc, cf. publicité « Félix ». Nous devons nous rendre à un récital de poésies organisé par des profs, dans notre petite auto noire. Annie conduit, l'auto se renverse, je m'affole et dis vouloir m'y rendre à pied car nous bloquons toute la situation. Enfin tout se remet vertical et notre ami l'électricien peut tourner à gauche avec sa camionnette. Nous parvenons à un théâtre de quartier. Je m'égare dans une impasse construite, me mets à y hurler de désespoir. Deux chiots féroces me poursuivent, le propriétaire a bien du mal à les rappeler.

     

    Il y a queue pour le récital ; je reconnais Rinder, une élève de Vienne ; je me suis mis, dans la chambre de Véra, une kippa qui dépasse sous un chapeau haut-de-forme ; le préposé aux billets, chauve, en porte une aussi ; j'effleure des lèvres sa calvitie, nous échangeons un chalom bien que nous soyons le soir. Annie a du mal à retrouver son billet. À l'intérieur, le parterre est vide mais le balcon rempli. Un premier chanteur arrive (melon et papillotes) ; la musique couvre sa voix : il se rapproche de la rampe et fait ses efforts, les sons qu'il émet deviennent plus graves. Le texte est de Jacques Brel : Quand on n'a que l'amour... Mais le récital s'interrompt tout de suite : déjà l'entracte ? Je cherche évidemment un endroit pour pisser, d'abord dans la rue Leupold, mais tout a été repeint par le propriétaire, et l'appartement demeure inaccessible. Je trouve alors une salle de bain abandonnée (mais je n'ai pas d'appareil photo...) figure une vasque où je dois pisser en évitant de me faire surprendre.

     

     

     

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    Mon père m'emmène à scooter voir une maison qu'il m'a achetée sur un terrain extrêmement pentu à la sortie de Montauban, avec traces de vigne. Le terrain est très allongé, ancienne voie de chemin de fer. Je me retrouve dans un train qui fonce, mais qui finit par s'arrêter. Dans la maison une débauche plus ou moins homo : un type s'envoie une chaise, BHL pérore, je me retrouve au lit avec trois gouines, c'est très étroit, je me suis couché sur l'une d'elle. Elles nous donnent (à tous?) des sacs à provisions. Je m'habille, en essayant de renfiler mon pantalon sans exhibitionnisme. On peut accéder à la maison par en haut, à partir d'un pont routier urbain.

     

     

     

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    Anne et moi devons loger chez un couple de jeunes instituteurs savoyards. Ils habitent au sommet d'un village en côte, déjà vu dans un autre rêve. Ils ont une charmante petite fille avec laquelle je converse. Le mari me ferme mon téléphone portable. Anen regagne notre chambre, je redescends. La femme corrige des cahiers. L'homme a laissé un texte en prose travaillée, où peu à peu le sujet devient financier. Il a emprunté chez Bouygues, qui lui dit que c'est bien beau de prendre, mais qu'il faut aussi se disposer à rendre. Le téléphone, que je récupère, délivre un message oral semblable au texte que j'avais lu, tandis que la femme, aux longs cheveux blonds, se pressait un peu contre moi, assis, en train de lire.

     

    À ce moment, je ne sais quel véhicule interne m'amène vers le bus du village, lequel se prolonge plus que je n'aurais cru. La porte de l'église déserte est grande ouverte. En remontant la pente, je lis à terre une rédaction sur cahier, d'une petite fille qui raconte ses rêves de voyage. J'en découpe deux pages que je rapporte chez mes logeurs, puis le redescends avec des plantes séchées entre les pages pour que l'autrice de ces lignes les retrouve ; ce n'est pas la fille de mes hôtes. Le soir, dans le noir, sur l'herbe et les feuilles mouillées, je pisse sans être vu, rue Romain Rolland.

     

     

     

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    J'étais à Athènes, en groupe. Nous montions une ruelle en impasse, au bas de laquelle se trouvait une cour. Anne et moi sommes restés en derniers, les autres ont rejoint en barque une frégate invisible pour continuer leur voyage. Une partie du mur s'effondrait. Je la repousse pour la remettre en place. De là-haut, par une lucarne, le paysage est splendide. Pas moyen de redescendre sur les rochers en contrebas. Une fille se faufile par un trou dans la pierre, remonte dans les sous-bois clairs, revient nous rejoindre. D'un autre trou sur ma gauche montent les accents d'un bouzouki. Toute une famille vit à côté, elle nous invite par leur fenêtre ouverte, tous s'installent à côté de nous sur le balcon qu'envahit la marée.

     

    Musique constante. La vieille mère voit deux billets de 20€ qui dépassent de mon foutoir de revues. Je ne veux ni vin ni fromage. Mon français maladroit n'est pas toujours compris. S'il y a un tremblement de terre, un touriste, resté avec nous, affirme que nous serions tous écrasés. Il se dégage une paix profonde ; partout des enfants, des gros chats.

     

  • Fantômes, Arudy

     

    FANTÔMES 52 05 16

     

    De nouveau seul, hurlant, secret, rempli, vide, évanescent.

     

    Ombre humaines (...) avec nous vivez

     

    Venus, issus de l'ombre, à l'ombre allés, procession, loin de moi, près de moi

     

    Lire la suite, échevelée lyrique. Hibiscus et carrelage.JPG

     

    Jolies Ténèbres, fille décomposée gagnée par l'hyperesthésie qui mange ma vie sépulcrale

     

    Je fais tout ce matin

     

    ARUDY 07 08 2052

     

    Ce que j'ai devant les yeux participe à la fois du charme et de la hideur banale : il faut bien que les villageots vivent, se développent : « Parking du foirail », « espace vert »(chiens interdits) où je me suis posé sur une table en bois. Mais les alentours en entier sont un espace vert... D'où mes « états d'âme à deux balles » (bon titre...) - exemple : une planche de ma table porte l'inscription suivante au marqueur « Ce que je pense d'une certaine bande de filles qui traînent à Arudy : censuré-censuré », etc. (sur tout lepourtour de la planche de tablier). Encore un souffrant de quinze ans qui s'aperçoit avec douleur que d'être une fille, ou un garçon, ne se vit pas du tout de façon semblable...

     

    ...Et que cela fait tant de mal aux uns comme aux autres. J'ai donc en face de moi, bien en vue à gauche d'un portail de bois, une poubellette en plastoque vert et blanc, où figure dans un rond une silhouette noire indiquant le geste à faire : jeter ses déchets dans ladite poubelle, en abyme. Le portail est orné d'un panneau dont je vois l'envers, précisant une interdiction aux chiens. Je l'ai poussé en arrivant, tout en disant : « ...pas aux juifs, je peux entrer ». Il suffit d'émettre à haute voix une énorme sottise, dans l'espoir qu'un habitant d'ici l'ouïra, pour s'en marrer, ou s'en scandaliser. C'est cela, les états d'âme à deux balles... De l'autre côté de ce portail s'étend un petit parking de 30 places au tiers garni.

     

    Voici un chien qui tourne autour de moi, bravant les interdits. Il ne porte pas d'étoile jaune et gratte le sol dans mon dos. Un congénère aboie derrière moi. Ma foi je conserve mes madeleines pour ne pas l'encourager. Le voilà reparti en tenant un vieil os. Le portail s'est refermé derrière lui ; qui a dit que j'étais inapte aux rencontres ? L'herbe est bien verte, bien entretenue, des pâquerettes retardataires la parsèment ainsi qu'un papier de bonbon contemporain. Plus 2 mégots à main droite. Ce qui heurte à présent la vue, quinze mètres devant moi et « à deux heures » comme disent les aviateurs, c'est une petite tortue de bois découpée, sur le dos, montée sur ressort. J'imagine d'ineffables gargouillis puérils.

     

    Derrière moi à 17h un système de toboggans et d'agrès. Toujours à droite deux bancs verts, que j'ai successivement essayés, supputant les éventualités de l'ombre (le ciel est couvert), avant de venir m'étaler ici : paquet de madeleines, bouteille et sac en plastique. A ma gauche une borne-fontaine verte au robinet de cuivre d'où je ferai couler de l'eau pour nettoyer mes grolles. Le vent se lève, il faut tenter de... rattraper mes feuilles, et tout autour règne une clôture. J'entends et je voisdéfiler sur le trottoir une vingtaine d'enfants de maternelle qui se tiennent par la main. Leurs maîtresses (pas d'hommes pour les enfants ! tous des pédophiles (les hommes...) !) les font entrer dans des bâtiments scolaires jaune pâle. Dieu merci ils ne sont pas venus ici. Trois filles de treize ans poussent la porte : la « bande de filles » des inscriptions ? Elles passent près de moi dans la plus bienfaisante indifférence, parlant d'argent de poche et de grands-mères. J'écris comme Chateaubriand, disait Mme de Staël (je crois) sur mon île déserte, en plein milieu de tout Paris (d'Arudy).

     

    Elles se sont assises « à 6h », sur un banc choisi sec. Je crois qu'elles essayent plus ou moins les toboggans (« Je suis un peu grande, non ? »). Le long de la clôture, à l'intérieur, une succession d'arbres de tailles et d'espèces diverses : un conifère à aiguilles blanchâtres et dégoulinantes, un arbuste mal défini et mal taillé. La poubellette donc, le portail, un bouleau (à ce qu'il semble) auprès duquel trône l'envers d'une stèle vaguement commémorative de je ne sais quel club sportif, la tortue jaune à carapace verte sur son ressort, un autre conifère (...ou un prunus ?), et le deuxième banc vert. C'est tout. De quoi se taper une petite Nausée à deux balles.