Proullaud296

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  • Après l'enfant

    Après

    1. Comment survivre à la mort de son enfant ? leur décès inverse le sens de la vie.. Le soleil recule dans le ciel. cours du soleil s'inverse. La mort de l'enfant est un évènement contre-nature. Vous même, vous allez vivre comme avec un tombeau sur la tête. "Et vous vous demandez comment vous allez parvenir à la fin de la journée". Or le premier soin, même si cela vous semble atroce et bassement utilitaire, est de "surmonter cette épreuve". Que vous soyez croyant ou non, le devoir de vivre est sacré. Revivre n'est pas oublier, personne ne vous le demandera. Louis Trintignant, bien que sa fille fût adulte, et bien d'autres avant et après lui, sont restés longtemps complètement prostrés, envahis par la mort, l'absurde, le néant. Avec des accès de colère : car les autres parents conservent leur enfant.

    La culpabilité vous envahit pourtant. Suicide, accident (le sentiment parfois que c'est l'autre parent qui est responsable de ce décès, remords de ne pas avoir su protéger votre enfant, alors que c'est la définition même du rôle de parent) ; les survivants pensent qu'ils n'ont pas le droit de cesser de souffrir. Or il n'est rien de plus néfaste que de s'obstiner dans le renfermement.

    D'abord on revient sur la tombe, parfois seul, car le conjoint n'en a pas la force. On serre dans ses bras le nounours de l'enfant, on parle à son enfant, de l'intérieur. Un quadruple travail se fait à votre insu : avec vous-même, avec votre enfant, votre conjoint, les personnes extérieures.

    Vert et bistre.JPGNous nous sommes permis de citer ces témoignages.

    Les survivants

    Ne pensez pas que deux fois sur trois le couple se trouve brisé : la femme tendrait à s'exprime, l'homme chercherait des solutions ? Ne vous enfermez pas dans les clichés : cette situation est incommunicable. Chaque membre du couple a une réaction différente ; èchec et impuissance, révolte, haine de ceux qui sont encore heureux ; fuite auprès d'un autre partenaire moins lourd à porter) cela crée de sourdes ou violentes tensions.

    Le couple peut les surmonter, après reconstruction sur d'autres bases, et envisager, peut-être, l'arrivée d'un nouvel enfant. Surtout, toujours tout se dire sans perdre pied. Ecouter, parler, respecter aussi les silences et la solitude ; vos humeurs concorderont rarement, vos évolutions aussi. Demandez à l'autre où il en est, suggérez-lui où vous en êtes : vous éviterez peut-être de rejeter votre culpabilité sur l'autre, d'anciens grefs peuvent ressurgir, les ruptures se produire.

    Mais si l'on capte le moment

     

    , chacun peut demander à l'autre où il en est. Même sans faire l'amour, le contact physique ne devrait pas se rompre. Certains couples poursuivent les rapports sexuels pendant le processus de deuil, non sans culpabilité parfois. L'essentiel semble de respecter les modulations différentes des partenaires, son besoin de solitude, mais de savoir aussi recourir à l'autre, même si c'est pour ressasser les mêmes choses.

    La survivance

    . Les enfants morts en bas âge, comme en témoignent les pierres tombales, sont souvent imaginés sous la forme de petits anges protecteurs. Et l'enfant continue à vivre après sa mort, chacun de ses anniversaires est célébré. Que serait-il devenu ? Quelle vie aurait-il eue ? et comment désormais nous prolonger, nous -mêmes, dans l'avenir ? Car il faut évoluer, ne pas garder son chagrin vint ans durant, alors que les enfants, même dans leurs souffrances, même en comprenant qu'ils vont mourir, peuvent faire comprendre qu'ils souhaitent notre survie, sans vous entraîner dans leur mort. Maintenez le contact avec votre enfant, jusqu'au bout. Après lui, il faudra sortir de la répétition obsédante, fascinante, des derniers instants de l'enfant, se souvenir aussi des moments qui furent heureux. Tout s'apaise malgré tout. Les parents, qui se sont sentis annihilés en tant que parents, qui se sont même parfois détournés des enfants qui leur restaient (surtout ne pas leur dire à quel point le disparu était meilleur qu'eux !) , auront trouvé d'autres sujets de pensée ou de discussion, sans avor le sentiment de trahir.

    Les secours

    Utiliser des lieux communs n'a jamais consolé personne ("c'est comme ça", "Dieu a donné, Dieu a repris"), moins encore les tentatives (vaines) de chasser les souvenirs.

    Le plus difficile sera de trouver la bonne personne (psychiatre, prêtre, amis) à qui se confier, car votre deuil fait peur aux autres, qui s'écartent sous prétexte que vous auriez besoin d'être seuls. Car vous faites peur à certains. Ils détourneront la tête, ne sauront plus comment vous regarder ni vous aborder. Trouver d'autres personnes ayant subi le même sort devient souvent indispensable. Mais il faut en parler, à son conjoint, aux personnes aimantes ou compétentes.

    Certaines associations, où participent souvent des médecins, proposent un site consacré aux causes du décès, soit avant l'accouchement, soit plus tard. Mais la cause du décès, souvent, ne peut être précisée, lorsqu'il s'agit de maladies nosocomiales, de négligences - ou de respect excessif, au contraire, des procédures. Les réponses n'adoptent jamais de ton péremptoire, ni larmoyant. "Je ne peux que te dire que tu n'es pas seule... c'est si peu..."

    Quelque forme qu'adoptent ces réunions, il n'y a plus de masque, juste un immense besoin de communiquer. Ceux qui ont supporté une telle douleur sont les seuls à pouvoir échanger avec des survivants errants et désespérés :de soi. "Je n'arrive pas à parler. j'ai vu une psychologue penant un mois mais cela me faisais plus de mal que de bien. Car celle ci n'a pas vécu ce que moi j'ai vécu. Alors les mots qu'elle pouvait me dire ne me faisait aucun bien. Elle ne pouvait pas comprendre ce que j'avais vécu".

    Nous avons été bouleversé par les témoignages où la maladresse accentue l'impression d'immense détresse. Cette future maman sait que son bébé, malformé, mourra juste après la naissance. Elle a refusé l'IVG ; sitôt l'accouchement il lui faudra affronter des obsèques. Nus nous permettons de citer ces autres témoignages :

    "Je ne sais pas trop comment on fait un deuil parental, pour être honnête, ce n'est juste pas possible à mon avis. On survit, on essaie de ne pas partir aussi, on essaie de ne pas faire le vide autour."

    Même l'envie de mourir soi-même est normale. Cependant "gardez votre maison, gardez votre travail, gardez vos amis". Et que personne ne vous considère comme un pestiféré; Tout a son propre rythme, parlez aux personnes de confiance, et le temps fera son office, et de cela non plus vous ne devez pas vous sentir coupables.

  • L'inspection infernale

    Mon père avait quitté la pièce. Je savais qu'il s'occupait d'enfants comme Jean-Christophe et moi. Il suffisait de cinq élèves de quinze ans, insolents tous les cinq, pour transformer le cours en véritable enfer. Mon père

    l'instituteur s'y connaissait : il savait prendre les choses avec diplomatie, laissait la fille Brebsi défiler ses sottises, et prenait avec humour ses réflexions humiliante. Il s'en montrait, même, amusé. S'il eût été précepteur, au XVIe

    siècle, d'une noble et conne pucelle, il se fût retrouvé tout en pourpoint et fraise précipité dans les douves boueuses d'un château.

    Il aurait eu pied, mais tout son habit de précepteur se fût irrémédiablement gâté. Alors il appelait à l'aide, mon père, au comble de l'humiliation, et bien mal récompensé de sa patience. Les petits nobles, se risquant sur la berge

    raide... lui tendirent des mains, des bras, des branches et des chapeaux. Ils le tirèrent de là non sans mal, obtinrent le remplacement des habits souillés, se montrèrent ensuite avec lui d'une parfaite déférence, sans que mon père

    eût jamais su s'ils s'étaient repentis d'eux-mêmes ou si leurs parents les avaient préalablement bien morigénés...

    Les temps avaient apparemment bien changés. La Révolution française était passée par là. Il suffisait à présent de tenir une classe de rejetons nuls, agitée, fatigante. Le cours pouvait avoir fait son effet, mais quel est "l'effet"

    d'un cours ? Peut-il se mesurer ? Quelle note aurait eue Socrate ? Avant ou après enculage ? Si c'est votre propre père qui vous inspecte, quelle note vous accorde-t-il ? Si votre père est plus jeune, plus entreprenant, plus Moutons de couleur.JPGdynamique, alors que vous ramez dans vos habits trop larges d'éternel débutant, comment réagirez-vous ? "C'est bien", lui dites-vous. C'est vous-même, l'inspecté, qui attribuez une note, une appréciation, à l'examen de votre

    père.

    Mais cela signifie, en réalité, "assez ; n'insiste plus ; suffit" - les inspections précédentes se sont prolongées au-delà du supportable : "nul ne peut contenter tout le monde et son père". Et puis, se fait-on encore inspecter à

    quelques mois de la retraite !

    ravalement... Ravalant justement son indignation, l'enseignant, avec son très vieux père se dirigèrent par un couloir vers une cantine, l'éternelle cantine qui ne connaît que quatre goûts : salé, sucré, amer, et fade ; chaud, froid,

    tiède, ce qui fait douze nuances. Et les serveuses, celles qui balancent leurs louches dans les assiettes de plastique, manquent de la plus élémentaire amabilité - elles se font tellement chier...

    L'inspecté rentre chez lui, le cauchemar est terminé. C'est une villa d'Algérie, du moins à la mode algérienne, claire sous le haut plafond. Ambiance bruyante, vu la circulation extérieure, et le peu de meubles encore installés :

    une résonance de pièce vide. Personne. L'épouse et la fille sont encore en courses. Elles ne sauraient tarder, quoiqu'elles ne connaissent pas très bien encore cette ville nouvelle. En attendant, il fait défiler des photos sur un écran

    : voici Te-Anaa, magnifique Maorie, amante et amie de toujours, souriante, épanouie. Pourvu que sa femme ne s'en aperçoive pas ! Il ne peut se résoudre à l'effacer, non plus qu'à jeter la cassette entière…

  • Boum

    Boum ta-tsoin, boum-ta tsoin ! J'ai perdu mon Jésus en revenant d'la fouèèèère, en rev'nant, de la fouère, j'ai perdu mon Jésus. Pon, pon, tagada tchîponnn pom pom Quannd'jo to fous la man'al coulo (tgada chupon, pon pon) eres de verdad formidable pom-pom, pom pon; Zip bboum . C'est la gross'tringle à Duduuuuleu quelle joie kifasse chô nom de d'là délire ! des marks ! des gueulasses ! Aux aaaar- tichauts nouveaux, Secouez / mon gros poireau, boïng boïng boïng Quand le pe'tit père gaulois n'avait plus d'intrument il avait découvert un petit truc marrant / Quand il n'a plus d'luth il exécutt cutt cutt un air de flût' flut' avec le trou d'son Cunégonde veux-tu du fromâââââge - Oui maman avec du suk dessus - Non, ma fille, ça n'est pas l'usââââge - Eh ben tu peux te l' foutr' au - Cunégonde veux-tu du fromâââge Constantin avait le bras si long que sous la taable que sous la tââââble Constantin avait le bras si long que sous la têble il lui tâtait le Constantin bon j'arrête, parce que je sens que je VAIS dire des conneries HI GUYS ! Bounty dans la boîte F.JPG

  • Trou du cul

    Voilà un titre comme on n'en fait plus. Je n'ai jamais vu e trou du cul plus proche que celui du lavement. Une simili opération aquatique, se soldant par des traces de merde non nettoyée dans un hôpital dont je tairai le nom. Gentillesse extraordinaire du personnel, et corbeilles débordantes de bouteilles en plastique. Cet hôpital se situe en Chine. Fatigue d'une journée passée à ne rien faire, confusion des sentiments aboutissant à une déambulation exhibitionniste, celle d'un fou qui parle haut plusieurs langues fausses. Pas d'autre perspective que celle d'une vieille qui meurt de déshydratation à travers son masque à oxygène. Une toubibe sexy aux chaussons bariolés. Le sentiment de solitude qui s'accentue, sans rien de menaçant, la banalisation du rien, les plaisanteries cons, la télé déversant son stade et ses médailles, et pour finir une peur immense de la sieste, semblable au froid des endormissements par -50° qui mène à la mort. Il faut lutter en hurlant de l'intérieur, car tout, tout autour de toi, t'entraîne vers le  bas. 

    Terrasse en plongée.JPG

  • Plus j'éclaircis, plus c'est confus

     De pères différents, Pascal et François dit Frank Nau, ne se sont véritablement connus que vers
    leur vingtième année,
    s'étant bornés à quelques cartes de vœux. Leur mère s'était remariée . Elle
    tomba dans le travers d'exalter le premier fils, celui d'un avocat, aux dépens du cadet, fils de
    médecin, futur marchand de chaussures : « Tu te rends compte ? pour un fils de médecin ?
    - Oui maman ! » Quant à l'autre géniteur, celui de Pascal Maatz, il
    était resté seul, ombrageux.
    Il avait livré son fils à de sombres études de médecine, ayant pour sa part préféré le droit.
    L
    orsque le fils eut enquillé avec succès ses trois années de DFG, il éprouva le besoin de
    connaître son demi-frère
    François dit Frank. La première entrevue manqua de chaleur : le futur docteur Pascal, outre une sacrée
    bougonnerie, manifeste déjà les
    inquiétants symptômes d'une bigoterie de fraîche date :
    « Bigot, bougon - bien la peine de faire des études », lui
    reprocha François dit Frank.
    Lequel courait marchés et foires, du Maine-et-Loire jusqu'au fond du Tarn,
    s'approvisionnant si nécessaire en cuir
    car il cordouanait lui-même à l'occasion, « pour
    ne pas perdre la main » ;
    il possédait la faconde des vendeurs publics, ne la quittant
    que pour sa compagne,
    envers laquelle il se montrait, de façon très inattendue, plus
    réservé. Il arrivait même qu'il la corrigeât, deva
    nt son propre frère. Il reçut de ce dernier
    une lettre particulièrement mortifiante : « Tes plaisanteries » écrivait Pascal, « atteignent
    un niveau de platitude jamais égalé. Tu manques de la plus élémentaire ambition .»
    François dit Frank, malgré son prénom, restait mou.
    Passé six mois de bouderie,  la correspondance reprit, mollement : santé, comptes
    commerciaux,
    ou bien, côté médecine élitiste, fastidieuses évocations de paysages.
    Soudain tous deux
    se découvrirent, au hasard de ces confidences écrites fomentées par
    l'indifférence,
    un goût de possession, d'emprise, de dictature, sur leurs femmes
    respectives, « à
    moins qu'elles ne les possédassent eux-mêmes ». La seule idée d'une
    telle inversion les jetait dans un accès de fou-rire.
    Leur mère ayant sur ces entrefaites
    convolé en secondes noces aux bras d'un amant bolivien, les demi-frères se revirent
    à Fougères, puis à Moncap, où Pascal exerçait obscurément,
    puis à Châteauneuf-en-Bousse,
    en Lozère, où survinrent les premières copulations plus ou moins ratées, mais plus
    simultanées que les deux hommes l'auraient imaginé : cela faisait longtemps que les deux
    maîtresses se consolaient l'une sur l'autre.

    Route et pont.JPG

    
    	Les deux frères se découvrirent aussi, ou se forgèrent, un goût commun pour la chasse
    et l'ennui. Ils décidèrent, à huis clos, de casser
    une fois pour toutes leurs femelles, par
    désappointement de les faire mal jouir. « N'en disons rien », chuchotèrent-ils, « car la vie de
    province est dure » -
    les deux fils, orphelins de pères, délaissés de mère, devaient prendre
    leur revanche. La terne pu
    te repentie Héléna Bost serait promue grande artiste de Gironde
    par un Marocain sans scrupule. Et l'autre, l'étincelante, die prinkelnde Annemarie
    Mertzmüller,
    offrant sur scène un corps savamment dévoilé, apprendrait d'un curé
    haut-languedocien, le Père François,
    voyeur, l'ineptie, l'hérésie de ses porte-jarretelles et
    autres ornements
    , et la supériorité autrement gratifiante de la prière.
  • Meméia la Brésilienne

    Les femmes restent , vivent, font de vieux os, se battent contre l'injustice intérieure que leur infligent d'autres femmes, elles aussi prisonnières de l'étouffement et de la peur. La femme est la porte, l'homme est la clé, l'amour libère, engendre la justice et le moineau bleu, O pardal azul. À présent, dernières pages : Première vision d'Uzerche.JPG

    « Il y a ceux qui sont morts assassinés par les tueurs à gages, ceux qui furent expulsés de leurs terres, ceux qui furent castrés au fer rouge. João, avec un seul de ses cheveux, pourra retirer l'argent et les placements que la famille a dans les banques, dans les mains des usuriers. Et quand il ne restera plus rien de ce patrimoine odieux, j'irai personnellement jeter tous les autres biens par la fenêtre : argenterie et chandeliers, bibelots et tapisseries. Les cristaux tchèques et allemands feront un son merveilleux quand ils se briseront dans la rue et tous les gamins pourront prendre ces morceaux rutilants pour jouer à attraper des morceaux de lumière. Les pendentifs du plus grand chandelier du salon révéleront à la bande d'enfants toutes les couleurs de l'arc-en-ciel. » Le grand soir ou plutôt le grand matin, en toute poésie flamboyante. « Je jetterai par la fenêtre même le linge de maison, tout ce lin amidonné, toutes ces nappes brodées où les dentellières misérables se sont brûlé les yeux.

    « De la fortune des Carvalhais Medeiro il ne rester plus rien et ils devront tous gagner leur vie, eux qui ont toujours vécu du travail des autres. Maman – qui a quitté ses robes sombres et qui est légèrement maquillée – sera gouvernante dans la maison d'un nouveau riche. Une gouvernante qui parle français et qui joue du piano du bout des doigts, n'est-ce pas ce qu'ils veulent ?

    « Dalva ira dans le quartier des femmes de mauvaise vie, sur la plage, elle aura seulement le droit de se rendre en ville le lundi, et les yeux baissés ». Où nous voyons que les illusions révolutionnaires trouvent rapidement leurs limites. L'oiseau quittera sa petite cage pour une plus grande. Dalva porte le prénom d'une héroïne de Jim Harrison ? Meméia est une servante qui lit en cachette. « Une femme est vierge, mariée, veuve ou pute. Rien d'autre ». Poursuivons cette vision d'avenir plus ou moins radieux, plus ou moins semblable au passé : « Les familles n'admettrons pas qu'elle croise des femmes honnêtes dans les boutiques de tissus et les merceries.

    « Grand-mère Menina sera accueillie dans un asile de vieux – où est le problème ? N'a-t-elle pas enfermé Guiomar et tante Nini dans un couvent ? Nous la confierons à la charité des petites sœurs, elle verra comme elles sont bonnes et douces avec les faibles.

    « Je reviens à mon lit et aspire quelques bouffées de cigarette de tauari. Je me déferai de ce patrimoine maudit jusqu'à la dernière miette. » Le tauari produit des feuilles où l'on roule le tabac, ça monte vite à la tête disent les chamans.

    « Avec effort, je m'assois au bord du lit. C'est important que je ne regarde pas par la fenêtre, car une nuée de perruches peuvent toujours arriver. Et alors je serai comme la vieille Belinha, à appeler : « João, oh, João ! »

    « Le tabac m'emporte loin et j'arrive au quartier des femmes faciles, sur la plage. Là, on parle – entre des verres de bière – du centenaire de la grand-mère Menina. Une fête grandiose. Elles en attendent un préjudice, les bordels seront vides. » Ce qui s'appelle voir les choses avec le petit bout de la lorgnette. A noter que l'autrice ne s'est rendue là que dans son imagination. « Embrassant mes genoux, je chante pour moi le cantique de Meméia, le refrain de sa croyance :

    Mon saint Benoît, ouvre-moi les chemins,

    Mon saint Benoît, ouvre-moi les chemins.

    Le cantique de Meméia, litanie du catimbó, m'engourdit. Les chemins se sont ouverts avec la clé magique du royaume de Vajucá. Si je faisais un effort, je pourrais même comprendre quelle était cette cause obscure, cette cause de pauvres qui a tué João. Si je levais les yeux, je pourrais même voir sa mort. Je pourrais même voir le moment où il ne put plus retenir la vie dans son corps et rendit l'âme ; il eut un spasme semblable à celui qu'il avait eu en moi. » Vague espoir en un paradis sur terre donc, et non pas corps de doctrine marxiste ou autre soigneusement élaboré dans la logique. Le catimbò est un mélange, pour faire vite, de religion catholique et de culte de la nature inspiré des Amérindiens.

    Pour le « royaume de Vajucá », rien trouvé, Google a ses limites.

    « Pourquoi ne me suis-ne pas rappelé, sérieusement, de faire fermer le corps de João ? Meméia dit que ce ne sont pas des superstitions, c'est pure vérité.

    « J'inhale encore une bouffée de cigarette. Maintenant, la chambre a perdu toutes ses couleurs et tout est devenu blanc. Dalva allongée sur son lit est aussi une forme blanche, en polystyrène. » La voilà qui sombre dans les visions d'avenir. Ce n'est pas plus bête que de prier saint Benoît, ou de prendre sa carte du parti. On peut faire les trois. « Je suis comme du coton. Je ne sens plus ni la douleur ni la peur.

    « C'est la peur qui fit s'écraser la sauterelle contre le mur, le jour où Pablo arriva ; et qui tua après le canari, les papillons de nuit, le chat Catolé. Pablo fut le premier contamine. Il transmettait continuellement son microbe, pendant tout le temps où il resta avec nous. » Il s'est enfui du Paraguay, s'est réfugié chez la tribu de Menina la vieille bourrelle, puis fut exfiltré vers Paris juste avant que la police ne vienne perquisitionner au Brésil. « Il a contaminé tante Nini, a infecté grand-mère Menina.

    «Il avait suffi de quelques feuilles de tabac de tauari pour que je comprenne cela. Je m'appuie sur le dossier du lit, puis je perds le contrôle de mes jambes. Elles me paraissent très loin de moi, séparées et indépendantes du reste de mon corps. Je n'ai plus peur de regarder par la fenêtre. » Conclusion traditionnelle du style Unamuno, tout est dans tout, retour à la nature, au grand rythme cosmique, aux magies plus convaincantes que nos religions éthérées. «Je suis légère et lucide, presque joyeuse. Folle ? Je lève les yeux et elle est là, la raison pour laquelle João vécut et mourut : un moineau bleu posé sur le rebord de la fenêtre. » A chacun son Eldorado, à chacun son infini.

    Mais il ne semble pas pertinent de chercher un véritable message dans ce « cantique de Meméia ». Aucune « solution » n'est proposée. Juste un tableau du Brésil éternel, une confiance désabusée placée dans le rite et le grandiose. «Ainsi », dit la dernière phrase, un explicit et non pas un excipit bande de grammairiens connards, « tout était vrai : le moineau est un oiseau bleu. »