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  • Fêtes chrétiennes : Noël

     

    BERNARD COLLIGNON FETES RELIGIEUSES aux éditions du Bord de l'Eau 33 Lormont

     

     

     

    GENERALITES

     

     

     

     

     

    Les fêtes chrétiennes, de façon plus visible peut-être que les fêtes juives, s'inscrivent dans un cycle annuel indéfiniment renouvelé, mais qui retrace, cette fois, les évènements de la vie du Christ. Cela commence avec Noël, natalis dies ou jour de la Nativité de Jésus, pour s'achever à Pâques, où il est ressuscité.

     

     

    1. Les chrétiens ont fait feu de tout bois comme dirait l'Inquisition pour assimiler tous les cultes qui les ont précédés, depuis les statues de la Vierge érigées au sommet des menhirs, et la tolérance de coutumes celtiques dans le voisinage immédiat des célébrations chrétiennes, telles le sapin de Noël (venu d'Allemagne) ou les œufs de Pâques – jusqu'au détournement des fêtes juives de Pessah, devenue Pâques, ou de Chavouoth, rebaptisée Penteôte. Ce génie du syncrétisme suscita même la désapprobation papale aux Indes et en Chine où les convertisseurs jésuites avaient trop habilement réinterprété les philosophies, rites et croyances asiatiques (une bulle papale de Benoît XIV intervint pour interdire définitivement ces tentatives en 1742, mais les Chinois avaient pour leur part expulsé les chrétiens dix ans plut tôt).

     

    Le film Mission a retracé les tragiques rivalités des missionnaires du Paraguay vis-à-vis du Saint-Siège au XVIIe siècle. Mais de nos jours encore en Amérique latine, il est bien difficile de ne pas reconnaître, derrière les honneurs rendus au Christ-Roi, la persistance millénaire des cultes indiens du Soleil !

     

    Or, c'est précisément ce génie de l'acculturation qui a permis une telle extension, à l'heure actuelle, de la religion chrétienne, catholique ou protestante. Les protestants ne célèbrent pas les fêtes qui ne figurent pas dans l'Evangile, à l'exception de l'Epiphanie, qui a trait à la personne du Christ. Mais depuis le XIX siècle, on commémore au temple, le dernier dimanche d'octobre, la fête de la Réformation, en honneur de Luther qui afficha ses 95 thèses à l'église de Wittenberg en 1517.

     

     

     

     

     

    NOËL

     

     

     

    Généralités et dates

     

    “Noël” vient du latin “natalis dies”, jour de la naissance du Sauveur, Jésus-Christ. Ce mot n'apparaît pas en français avant le XIIIe siècle. Noël se fête, en Occident, le 25 décembre. Certains affirment que cette date aurait été choisie en fonction de la position des étoiles dans le ciel : entre les constellations de l'Âne et du Bœuf se situerait précisément un vide que l'on appelle, depuis les Assyriens, la Crèche... (consulter les textes de Franz Cumont).

     

    Auparavant, cette célébration variait entre le 19 avril et le 26 mai, les Evangiles ne parlant d'aucune date précise. Certains exégètes pencheraient pour le mois d'éthanim (septembre/octobre). Mais à Rome, dans l'Antiquité, les fêtes de Saturne ou Saturnales (fêtes des semailles) se célébraient du 19 ou 26 décembre. César instaura, lors de sa réforme du calendrier (“calendrier julien”) une Fête du Soleil invaincu (c'était lui...) ; or ses astrologies fixèrent par erreur la date du solstice au 25 décembre. Et c'est à cette date que se célébrait également le dieu Mithra, particulièrement en honneur chez les militaires. En 274, l'empereur Aurélien décréta le culte du Soleil Invaincu “religion d'Etat”. La date du 25 décembre fut maintenue. Constantin (306-334) fit du christianisme la religion officielle, quoique minoritaire : Jésus, ”Soleil de Justice”, acquit ainsi sa date de naissance officielle, confirmée par le pape Libère en 354. dont la première célébration officielle date de l'an 330.

     

    Et certains d'estimer que si l'Evangile ne mentionne pas la date exacte de la naissance de Jésus, c'est parce qu'il coexiste avec Dieu le Père, « dans les siècles des siècles » ! Il n'a donc ni commencement ni fin : « Je suis l'Alpha et l'Oméga... »

     

    Observons d'ailleurs que la date de naissance du Prophète, chez les musulmans, historiquement connue et indiscutable, ne fait l'objet d'aucune célébration particulière.

     

    D'autre part, le moine Denys le Petit (ou le Scythe) s'est trompé sur l'année dans ses calculs, effectués en 532 : le Christ est né, en réalité, en 6 avant Jésus-Christ ; mais pourrait-on parler de la guerre 20-24 ? Quant aux juifs, ils interprètent l'abréviation historique “è.c” (“ère chrétienne”) comme “ère commune”...

     

  • Pourim, à contretemps

    CHANA TOVA A TOUS !!!

     

    POURIM - GENERALITES (oui je sais, ce n'est pas le jour)

     

    Cette désignation commémore le lancer de dés qu'effectua Haman, afin de connaître la date la plus favorable à l'extermination des Juifs de Perse. Il descendait de la tribu d’Amalek, réputée pour son hostilité aux juifs. Le premier, il médita une “solution finale” : une extermination. Et pour que cela ne lui portât pas malchance, il tira au(x) sort(s) (“Pourim”) le jour le plus favorable : ce fut le 13 Adar. Or Esther convainquit le roi Assuérus de bannir son mauvais conseiller. Comme Hanouccah, la fête de Pourim est classée parmi les moins importantes de celles qui sont prévues dans la Torah. Mais elle demeure très populaire.

     

     

     

    DATES La princesse encadrée.JPG

     

     

     

    La célébration annuelle de la fête par les juifs, “jour du festoiement et de la joie”, a lieu le 14 ou le 15 adar du calendrier hébraïque (février ou mars selon les années)

     

     

     

    HISTOIRE

     

    Cyrus autorisa les juifs à retourner à Jérusalem. Il restait cependant une forte population juive en Perse, en particulier à Suse, la capitale. Or Assuérus (485 à 465 avant l'ère courante), petit-fils de Cyrus, répudie son épouse Vashti. Ce souverain est identifié à Xerxès Ier, le "grand Roi" de Perse. Pourim fête la victoire d'Esther (“la Secrète”) sur la cruauté du souverain. Haman, mauvais et puissant conseiller, intervint auprès de lui pour faire massacrer tous les Juifs de Perse, afin de se venger d'un certain Mardochée C'était un important serviteur du palais, qui avait révélé un complot d'eunuques visant à assassiner le roi. Or la cousine de ce Mardochée, Hadassah “Esther”, devait épouser Assuérus, qui avait répudié sa femme précédente (Bat Avigaïl) en découvrant son origine juive. Mordékhaï (Mardochée) persuade Esther de parler au roi sans qu'il le lui ait demandé, crime de lèse-majesté puni de mort ; Esther pria et jeûna trois journées, en demandant aux Juifs de l'imiter. Pendant ce temps, Mardochée parcourt la capitale, Suse, couvert de cendres, afin d'avertir le peuple élu de sa dispatition prochaine et de l'inciter à la révolte.

     

    Esther ne fut pas exécutée, mais c'est Haman qui sera pendu à la potence originellement préparée pour Mardochée...

     

     

     

    RITE ET LITURGIE

     

     

    1. Il n'est pas obligatoire, mais simplement recommandé de ne pas travailler à l'occasion de cette fête. Le rite le plus intangible consiste à lire ce jour-là le Livre d'Esther en entier : on déroule la méguillah (le rouleau) qui y correspond. L'assemblée récite à haute voix, avec le lecteur, l'origine et l'ascension de Mardochée. Les femmes entendent obligatoirement cette lecture parce qu'« elles aussi furent impliquées dans ce miracle. » Mais la plupart des communautés orthodoxes, y compris orthodoxes modernes, n'autorisent cependant pas les femmes à lire la Meguila, sauf cas rares : devant des femmes.

     

    Ces prières ont lieu dans une atmosphère de grande liesse. L'assistance à la synagogue en effet ne reste pas nécessairement silencieuse et recueillie. Il est même courant que tous agitent d'énormes crécelles et poussent des huées sitôt qu'on entend le nom de Haman, le mauvais ministre. Ce jour-làon se déguise, mais il ne faut pas pour autant négliger la vénération dont on entoure l'héroïne du jour, Esther : un jeûne est recommandé la veille, en souvenir de celui qu'avaient observé Esther, avant de se présenter devant le roi, .et ses servantes, ainsi que tout le peuple juif. Mais sans téchouva, sans “retour à Dieu”, le jeûne est évidemment absurde.

     

    Pourim est enfin à l'origine de beaucoup de compositions religieuses, dont certaines ont été incorporées à la liturgie, ainsi que d'un grand nombre d'hymnes chantés durant le service public.

     

    COUTUMES ET TRADITIONS

     

        1. Le Livre d'Esther recommande “l'envoi de cadeaux les uns aux autres, et de dons aux pauvres”. Les juifs doivent envoyer des cadeaux comestibles à au moins trois amis. A la synagogue, on fait des quêtes pour les nécessiteux, même les non-juifs. Au repas, on prépare des gâteaux de formes spéciales ; ainsi les juifs d'Allemagne mangent des “Hamantaschen” et des “Hamanohren” (“poches” et “oreilles” de Haman) (en Italie, “orecchi d'Aman”), etc. Le Talmud invite à boire pendant Pourim jusqu'à ce qu'on ne puisse plus distinguer “maudit soit Haman” de “béni soit Mardochée” (“Arour Haman”, “Baroukh Mordekhaï”) ; “il ne s'agit pas de rouler sous la table, mais d'atteindre un niveau qui fait comprendre des notions au-delà de leur simple énonciation” - bénie soit la souplesse de la casuistique !

          En Italie, les enfants se battaient en se lançant des noix, Dès le cinquième siècle on brûlait sur l'échafaud un pantin à l'effigie d'Haman, en sonnant de la trompette. D'où la colère des chrétiens, qui voyaient là une façon détournée de ridiculiser Jésus et la croix. Les rabbins essayèrent d'abolir ces coutumes, sans grand succès, même avec le concours des autorités locales, à Londres, en 1783...

    Au XIIe siècle, on écrivit les noms de Haman et de son ancêtre Amaleq sur deux pierres, afin de frotter ces dernières l'une contre l'autre jusqu'à effacement des deux noms maudits.

     

    Comme nous le disions plus haut, des drames, des jeux (“Purimspiele”) furent composés, représentés au cours des siècles, en hébreu et en d'autres langues, avec le dessein d'édifier par le rire. Mais ce ne fut bientôt qu'un prétexte, et donna plus tard naissance à la comédie yiddische. Ces satires étaient jugées inappropriées pour les synagogues. Cependant les hassidim de Bobov n'ont jamais cessé de jouer leurs Pourimspieln, tous les ans, à minuit, dans les synagogues de Brooklyn.

     

     

     

    LE DEGUISEMENT

     

    “Pendant Pourim tout est permis”. Cependant on évitera les blagues salaces, afin de respecter la “tsénioute” (“la pudeur”) ; de même, “une femme ne portera pas d'habillements d'hommes, et un homme ne mettra point de vêtements de femmes ; car quiconque fait ces choses est en abomination à l'Eternel, ton Dieu” - or le travestissement est attesté à Venise en 1508, et il existait sans doute quelque temps auparavant. Pourquoi ces déguisements ? ...les méprises et quiproquos ont joué un grand rôle dans le Livre d'Esther : Esther cache au roi, elle aussi, ses origines judéennes; Mardochée connaît en secret certaines langues étrangères, comprenant ainsi Bigtan et Teresh évoquant ouvertement leur complot. Enfin, Haman suggère au roi comment rendre gloire à la personne que le roi veut honorer… il pense à lui-même, et ce fut Mardochée que l'on honora, Haman que l'on pendit... : "venahafo’h hou", “et le contraire se passa”...

     

    Cependant, en Orient, on ne se déguise pas. De nos jours, les villes israéliennes organisent des défilés de Pourim.

    VOIR DE BERNARD KOHN-LILIOM DIT COLLIGNON "LE PETIT LIVRE DES GRANDES FETES RELIGIEUSES" aux éditions du Bord de l'Eau (33 Lormont)

     

  • C'est la guerre

     

    Si d'aventure la guerre s'achève, je me marierai. Voici le parc d'Ifîmil, je ne sais pas qui peut encore s'y aventurer, je m'effondre sur un banc, j'éprouve les mêmes sensations que pendant ma dernière ivresse (il y a si longtemps), la pierre sous mes fesses est ébréchée mais tient bon ; devant moi les troncs d'arbres brisés devant moi font de l'allée centrale un véritable parcours du combattant, personne ne prend garde à moi, Motché compte encore hélas six cent mille habitants. Avec ma femme (si j'en réchappais) j'échangerais des phrases sur le temps, sur la poésie de Nudjaym – un tract à mes pieds, coincé dans les rameaux, parle justement de “la renaissance des poètes”, alors que se déclenche une offensive là bas en bordure.

     

    Je gagne la sortie nord où le chien m'a précédé, j'atteins une terrasse intacte où je commande un gâteau, du champagne : “C'est gratuit, on se casse !” - une trentaine d'intellectuels hommes et femmes devisent verre en main, confrontent leurs traductions ; je suis agrippé par un vieillard à la braguette douteuse qui me déclame du latin, du grec et du syriaque, m'emmène chez lui dans une longue voiture de luxe en fin de course, me montre des rayonnages entiers d'antiquités védiques et juives, il me fait boire, en vrai, avec de l'alcool. Nous lisons face à face en hébreu, les lignes dansent et nos mains frémissent, nous ne parvenons pas à nous accorder sur une définition de la poésie.

     

    La proximité de la mort le rend éloquent. La mort fausse tout. Je le quitte sans avoir lu la carte qu'il m'a glissée dans la main, et, dans la rue, me fais presque faucher par un tir de roquette qui pulvérise un banc public en bois. Je sens à présent que mon but est de boire. Je retourne frapper chez l'Italien marchand de grains. C'est un Noir qui me montre du pouce un écriteau, en arabe et en italien : “Chiuso la domenica”. “Prends la rue, première impasse, dernière maison. Deux issues.” Il me dit encore que je suis célèbre, non pour mes qualités guerrières, mais pour ma manie de tirer dans les murs pour éviter de faire mon devoir. “Aucun devoir” lui dis-je. “Ton amitié avec Paziols” dit-il “a fait le tour des cours de casernes. Tu es célèbre ! Un peu. Parfois.” Je fais observer que pour le moment personne ne nous tire dessus. “Les Blancs peuvent bien ne pas tirer!” Il se met à pleuvoir.Passage.JPG

     

    Je dis : “Les Blancs ?” Je le regarde de travers et nous nous taisons. “Ils ont relâché les enfants des écoles pour la pluie ? - Les enfants des écoles ?” A son tour de me regarder de travers. Et puis, sous la pluie, nous entendons une clameur. Cela prend dans toute la ville, c'est immense, c'est dans notre dos. Nous nous mettons à courir, la pluie détrempe nos vêtements. Très vite, passées les rues désertes près du rempart, nous débouchons sur une vaste artère où défilent des

     

    automitrailleuses. Une foule très dense applaudit sur les trottoirs, devant les ruines d'immeubles. Ils scandent : “Ot-gom ! Ot-gom !” - Dinzeb'bouk, dis-je au Nègre, “je l'aurais parié : les Yahouds envahissent MOTCHE. - Interviennent rectifie le Noir qui me crie dans l'oreille en contournant une rangée de vieilles grasses. Les véhicules tournent au bout de l'avenue. On tire en l'air. Le drapeau jusqu'ici tant maudit flotte sur tout ce qui peut le porter. Alors, la Conférence de Paix est sans objet...! - à moins qu'elle n'ait atteint son but, et que l'occupation des Yahouds n'en soit une des clauses.

     

    A la télévision dans un café, j'apprends qu'il n'y a rien de plus exact ; Otgom annexe tout le sud du pays. La paix s'est abattue comme un faucon. Des manifestants crient leur joie en courant, doigts en V – que savent-ils de l'alphabet latin ces culs-terreux ? Une rafale en couche trois, d'autres s'enfuient en glapissant. Il y a même des avions – des avions ! - qui tracent dans le ciel couvert une belle étoile à six branches. Hadjian saute en marche d'une automitrailleuse retardataire et me serre dans ses bras. Je ne le reconnais pas, il a des cicatrices autour des yeux. Il serre la main du Noir, se présente, la foule se disperse lentement.

     

    Nous remontons tous les trois l'avenue à contre-courant sous les troncs de palmiers décapités. Les deux hommes discutent, je reste en arrière, des magasins rouvrent, le temps passe à grande vitesse, les Pompes Funèbres demeurent fermées. Plus haut quatre paras de la Ligue des Frères (?) bâtissent mollement un semblant de barricade en pierres encore humides. Je reconnais mon fils sous l'uniforme, à l'extrême droite du groupe, les trois autres ont disparu, je veux rester près de mon fils : “As-tu fait tes devoirs ?” Il comprend mal la plaisanterie, me braque, puis baisse son arme : “C'est la guerre.” Je reconnais bien là ce sens héréditaire de la formule.

     

    Je me suis assis sur une chaise en pleine rue, les dernières gouttes ne mouillent pas. Je fais remarquer à tout hasard qu'il n'est plus vraiment temps d'ériger même un embryon de barricade. “Et alors ?” gueule mon fils. Je lui dis “mettons que je n'aie rien dit.” Des rafales éclatent encore en ville basse. Une musique passe par d'improbables haut-parleurs, on scande “paix” en arabe, Salam, Salam, les noms des dirigeants aussi, de tous bords. “Pour qui te bats-tu à présent ? - Je n'ai jamais varié, Papa.” Hadjian et le Nègre sont revenus de la boutique italienne, couverts jusqu'aux épaules de chapelets de saucisse de porc : “Pour une fois !” bégaie Hadjian. “Pour une fois !” Le Noir a chipé un énorme transistor : “Les membres de la Conférence Internationale viennent de se voir signifier leur congé ; ils seront réexpédiés sur Mësëlë par le prochain avion militaire” - des “avions militaires”, il n'en est jamais autant passé sur nos têtes. Ciel changeant, carillons catholiques, un muezzin se fait descendre à trois maisons de nous du haut de son minaret. “Où est la bibliothèque ? - Elle a brûlé Papa, vraiment brûlé ! Où t'enfuis-tu ? - Je vais retrouver Paziols, ma caserne jaune, tout ça ! - Tout ça ?” Je lui réponds je ne sais quoi dans l'explosion d'une porte – je me suis jeté par terre, puis relevé à la course vers les rues du centre que je devine à cette heure congestionné d'humains.

     

    Plus on en tue plus il en reste. J'espère de tout cœur que l'armée des Yahouds va se lancer à la conquête pour que je puisse piller les caves.

     

  • Sue, et tonne

     

    Certains livres antiques sont sacrifiés : une lecture par an, ce qui ôte tout le charme. Actuellement, je lis des songes concernant la vie d’Auguste. Quelqu’un en songe a touché ses lèvres  de ses doigts, et les a reportées sur ses lèvres à lui. On tenait compte alors de ces sottises. Les songes ne me semblent plus avoir pour signification que l’imaginaire, la beauté ou la monotonie de la chose. Je vis alors enfin dans un monde où l’action est possible, où le voyage existe en permanence. J’ai si peu vécu comme j’aurais souhaité : loin de tous, dans un hôtel. M. Ciceron, en accompagnant au Capitole C. César – et de tels hommes ont existé ! que dirait-on, comment ne poufferait-on pas, en parlant d’un Jack Lang, ce bouffon, accompagnant  Mitterrand  à Notre-Dame ?

     

    Mitterrand, bien plus moine que César… - racontait à ses amis ce songe de sa nuit dernière : qu’y a-t-il de plus fastidieux que ces songes que m’inflige régulièrement ma femme au petit-déjeuner… Du coup je lui inflige les miens ; c’est en imitation de ces peuplades où chacun se raconte ses rêves au réveil, dans les hautes montagnes du Yunnan, je pense… Je suis le seul à pouvoir interpréter mes songes. Ils sont très sombres, avec maints couloirs, souterrains. …il avait vu un enfant aux traits nobles – je pars de tout, me disperse, en véritable sous-Montaigne, admirant la richesse de visage de ces petits rats de l’Opéra, de huit à douze ans, si murs déjà, si émouvants, au-delà de tout caressisme, capable de si bien s’exprimer, pris par la caméra, n’y songeant plus, pas cabots, si immensément attachants, garçons compris… « Il n’y en a que pour le foot ! » disait l’un d’eux à propos des cours de récréation…

     

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    Ô la brutalité des connards de base… descendre du ciel suspendu à une chaîne d’or… C’est ce qu’ils semblent toujours faire, tant on leur apprend à se sentir artistes, brillants, généreux, jamais prétentieux car conscients de tant de fatigues… Cet instant prodigieux où ils ne sont pas encore atteints des stigmates vicieux de l’adolescence, déjà aimant, pas encore humides et branlants… Ici un instant de rêverie… Je ne dois pas renier les sécrétions glandulaires… Tout sera détruit par le prochain assaut des barbaries… s’arrêter devant les portes du Capiole – dans sa grande sagesse, mon ordinateur, mes doigts,avaient écrit « Capotile » : on rirait bien du Capotile… Ces songes reconstitués après coup ! et la société en ces temps si lointains, si entachés de superstitions, fonctionnait tout de même… N’était-ce pas dangereux de traîner son existence parmi ces fanatiques susceptibles de basculer dans la panique au moindre faux présage ? Il était bien plus périlleux de se mouvoir parmi ces hommes-là qu’à l’heure actuelle. Il n’y avait ni police, ni administration dignes de ce nom, ll ne fallait que se débrouiller et surtout, surtout, s’être parfaitement intégré à un groupe.

     

    Que se passa-t-il ? J’ignore les relations de Suétone avec le pouvoir.  S’il rapportait cela pour flatter, ou avec l’indifférence d’un simple rapporteur. « Suétone, penseur ? » est un titre de paragraphe ; visiblement l’auteur en doutait. Hérodote croyait en des comptes de bonne femme de bien pire acabit. …et là recevoir un fouet des mains de Jupiter… Voilà qui est original. Pour une fois. J’expliquai à Scherer ce qu’était le verbe « fustiger ». Cela vous a un petit air biblique, ou pharaonique. Le droit de fouetter. La symbolique fécondante du fouet. L’orbe décrit par la mèche. Or, un moment après, voyant soudain Auguste – qui n’était qu’Octave, boiteux de 18 ans – je suppose qu’il reconnut l’enfant, que la plupart ne connaissaient pas encore, je pressens la suite dans toute son consternant conformisme.

     

    Jamais je n’ai reconnu quelqu’un que j’aurais vu précédemment en rêve. Des lieux, si. Des ambiances de lieux : souterrains à franchir, chambres défaites, et parfois au réveil ce sont d’autres lieux, très proches, qui viennent compléter ceux-là… Mais d’humains, jamais. Surtout des « femmes de mes rêves ». Les femmes s’éloignent, je n’en vois plus. Elles me sont désormais devenues totalement invisibles, inaccessibles. Claire Sarpande, qui m’eût plu, habite à Metz. La Gière, avec notre coup de foudre réciproque, est venue, m’a cru attaché à ma femme et s’est enfuie. Pourtant nous riions d’aise en nous adressant l’un à l’autre. Tout pouvait parfaitement s’adapter, hormis l’emploi du temps… et que son oncle César avait fait venir au sacrifice – à titre de camillus, je suppose, qui est une espèce d’enfant de chœur, hâtons-nous vers la fin de cette phrase prétexte comme une robe, il affirma que c’était précisément lui qu’il avait vu apparaître durant son sommeil. On les voit venir de loin, vos chutes, auteurs anciens. Nulle trace de ce songe dans les écrits sur Cicéron. Mon Grimal me rase considérablement, tout de Grimal qu’il soit, tout souligné artificiellement par moi qu’il soit…

     

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    Près de 7 ans se sont écoulés. Suétone se lit aussi en édition bilingue. Nous en sommes à l'épouvantable et monotone énumération des crimes de Caligula. Nous ignorons la cause de tant de cruautés. « Il obligeait les père (parentes) à contempler l'exécution de leurs fils. » Nous frémissons sans oser nous représenter nos ravages, si nous devions nous trouver en de telles circonstances. Nous deviendrions fous à tout jamais, car même la vengeance à son tour le plus atroce ne nous rassasierait pas. « Comme l'un d'eux alléguait qu'il était malade, il lui envoya sa litière ». C'eût été une insulte supplémentaire de refuser la propre litière de l'empereur. Le père de famille risquait non seulement son propre supplice, mais l'aggravation de ceux de son fils. « Au retour même de l'exécution, il en invita un autre à sa table et déploya toute sa bonne humeur pour le faire rire et plaisanter ».

     

  • Râlades et vie de famille

     19 août 2045

     

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    Nous venons Arielle et moi de changer de place une table, rapporter des tréteaux dans la pièce qu'il est convenu d'appeler "le cellier", je méprise profondément ce remue-ménage. Arielle se met depuis son retour d'hôpital à tout transformer, à tout nettoyer : il y avait ici des nids à poussière dit-elle qui prenaient des odeurs de chez sa mère.

     

    Ces symptômes sont ceux d'une mort prochaine ; mettre tout en ordre pour recommencer, mais "sitôt la maison terminée" dit le proverbe "la mort y entre" : maître Rézac n'a pas tenu quatre ans dans son nouvel appartement briqué. Arielle hausse les épaules.

     

    J'ai pourtant bien lu dans Moravia que Marcello, in extremis veut devenir un opposant à feu Mussolini, mais qu'une bombe tombe sur sa voiture en fuite, réduisant sa famille en bouillie. Je sais bien qu'il ne s'agit que d'un roman, mais tout de même. Céline dit que l'on cherche le plus grand chagrin, pour devenir enfin soi-même, et "l'avorton Tartre" épingle les intellos qui ne savent jamais vraiment souffrir, développant juste leur beau discours sur la souffrance.

     

    Odile enceinte accouche en janvier. Malgré mon opposition à toute reproduction, me voici toute réjouissance parce que visiblement ce fut fait exprès ! ...pari stupide... déjà la grossesse d'Arielle n'a pu nous faire envisager un seul instant de tricher : "On n'avorte pas".

     

    Sans enfant peut-être qu'on devient un vieux con... Les Mortimer cependant sont devenus nettement plus cons depuis qu'ils en ont fabriqué deux coup sur coup -quelle idée ! Ils s'en sont occupés en dépit du bon sens, tolérant que leur aînée exigeât un nombre illimité d'histoires avant de s'endormir, et cédant à ses moindres caprices ! Alors maintenant Mademoiselle est devenue un monument d'insolence, disant à ma femme qu'elle est grosse - merci du renseignement.

     

    Et si elle était noire, qu'est-ce qu'elle dirait ? et arabe ? je lui dis que "je vais bien" se dit en turc "iyiyim", elle me dit qu'elle ne parle pas une langue de bébé ! quelle connasse, elle n'est pas prête de s'amuser dans la vie. Ce qui me fais chier est qu'il va falloir occuper toute cette sainte famille dans notre petit appartement sombre, où il n'y a strictement rien pour amuser un gosse.

     

    Je les entends déjà, ces deux connasses - car la petite marche sur les traces de la grande, répétant déjà "Je te tue" et "Quand est-ce qu'on s'en va ?" Enfin moi je ne sais plus où j'en suis avec les contacts humains, je trouve cela dans l'ensemble assez éprouvant et ultra-chiant. Dodone est arrivée de sa banlieue, habitant et se branlant toujours chez son père.

     

    Le drame est qu'elle s'habille comme un sac, avec un short bermuda affreux qui lui sépare les deux fesses et lui souligne la chougne de façon véritablement pire qu'obscène : disgracieuse... Et puis elle est toujours aussi con, c'est-à-dire timide. Mais je ne sais pas voir la valeur des gens. Et puisqu'aujourd'hui, "cher journal", je suis parti pour râler, autant signaler la terreur que m'inspire mon rôle énorme à apprendre, soixante pages par coeur bien tassées, "Le Banquier anarchiste" de Pessôa.

     

    Je ne sais pas ce qu'ils ont eu dans la tête,pour me choisir, il paraît qu'ils m'ont vu faire mon émission avec les autres, "Humeur cérébrale", qu'ils m'ont enregistré pour "le Quatorze-Juillet", un petit numéro à moi sur une de mes conneries à Paris (j'avais assisté aux cérémonies avec des Martiniquais géants et blasés). Bref, comment vais-je m'en tirer ? Moi qui avais juré mes grands dieux que jamais je ne remettrais les pieds sur une scène !

     

    Alors je dois apprendre par coeur jusqu'à la page 46, sur 91 ! et si je me plante ! et si je cafouille en direct ! j'ai assisté à une de leur pièce, "La Leçon" de Ionesco, ils n'étaient pas contents parce que l'acteur avait oublié des passages entiers, effectivement nous étions sortis à dix heures dix au lieu de dix heures et demie, enfin le public ne s'est rendu compte de rien.

     

    Il faudra que je dise qu'ils prévoient quand même un filet, tel que reprise d'une ancienne pièce à la place de la mienne. Et le trac que je ne vais pas avoir ! et mon débordement de temps quand j'aurai les premières littéraires ! Bref, râler, râler, râler... Vincent vient de s'assoir dans le fauteuil vert en face de moi, il ne sait pas bien sûr que je tape à la machine sur lui, il couche avec Dodone dans une chambre commune mais sans plus, j'y suis allé, Robert dormait encore dans la pièce à côté, il fallait le réveiller, il a des horaires variables extrêmement fatigants.

     

    Vincent doit penser que je tape extrêmement vite. Il fait chaud. Si je m'arrête, il va me demander pourquoi je m'arrête. A part râler sur le fait qu'il fait chaud, maintenant, je ne vois plus très bien. J'ai chaud et c'est chiant. Schelten me montrait de pleins placards de journaux intimes où il se laissait aller à gémir, et il me disait qu'il aurait honte de les publier. Je devais râler encore sur Lazare, tiens, tant que j'y suis. La raison en effet pour laquelle je me rue ainsi sur ce théâtre hasardeux, c'est qu'il ne me reste rien à perdre, rien à espérer de la part de l'éditeur.Lazare est naïf, finalement : il s'imagine encore être capable de découvrir des talents - pas du tout ! il édite qui lui plaît, tel est le critère ! et je ne lui plais plus, ou il me faut le reconquérir ! Il me fait rédiger des lettres de refus : il ne se rend pas compte qu'en me faisant faire cela, je me rends parfaitement compte que n'importe quel texte, fût-il de Dante ou Hugo, mérite d'être refusé !

     

    Il ne veut pas comprendre que les gens ne lisent plus parce qu'ils en ont marre de lire le livre du copain du copain, infect dans sa première mouture, et retravaillé maintes fois par des "rewriters" ! Je dis moi qu'il faut que l'éditeur se livre au commerce des frites, et fasse les livres qui lui plaisent avec l'argent des frites... Amen... disgracieuses...

     

     

  • Vous avez les mêmes à la maison...

     

    53 04 04

    Fosse à munitions.JPG


     

    J'ai rêvé :

     

        1. que des enfants m'aspergeaient de merde dans des chiottes publiques ; j'en sortais pour le leur rendre (chiottes en bois mal fermées, une petite fille plonge sa sandale dans la merde qui a envahi la cabine et m'en asperge, donc, puis un petit garçon fait de même).

     

        1. que Sonia, en grande robe blanche, se convertissait au judaïsme.

        2. qu'Arielle se suicidait du haut d'un escalier dans une petite ville au bord de la Seine : nous descendions le versant d'une vallée urbaine (petits pavillons), et elle avait préféré prendre l'escalier au lieu de faire le tour par le haut. Elle est tombée d'une masse , sans crier. Les gens ont commencé à crier. Je me suis réveillé.

     

    53 04 29

     

     

     

    Je chemine souterrainement, longtemps. D'autres me précèdent (Annie, et une autre femme). J'en croise d'autres, une grand-mère et sa petite-fille, qui sont propriétaires de caves, me montrant une poupée à magnifique chevelure, et voulant me la vendre. Les autres me distancent. Je ne retrouve pas au retour l'itinéraire de l'aller. Je monte des volées d'escalier, des ferrailles agressives m'interdisent une porte que j'ouvre quand même. Me voici dans le soubassement d'un autel, une foule endimanchée se disperse après une grande cérémonie. Dehors, je demande où je suis, déclarant devant l'étonnement goguenard que je viens du souterrain, mais que j'ai laissé ouvert, disons accessible, une porte qui peut être dangereuse si l'on se renfonce dans les boyaux.

     

    Des personnes quittent alors mon entourage pour remédier à cela. J'apprends enfin que je suis au Fieu (= Le Fils) en Gironde. Très beau paysge, église très pointue (cf. Cuzorn). Avec uen carte Michelin (« Ça peut aller quand on est à pied », dis-je aux autres ironiques), j'essaie de trouver un itinéraire vers le N.E., mais tout semble sans grande issue. Je veux passer par un autre sanctuaire, mais c'est très loin, disent les gens. Descendant une côte tortueuse, j'arrive à une autre partie de l'agglomération où une jeune femme dynamique tient une sorte d'auberge-exposition permanente d'artisanat, avec d'autres hommes jeunes.

     

    53 04 30

     

    Manque un rêve, sur papier libre.

     

     

     

    53 05 03

     

    Alors que pris enfin d'une forte envie de chier je me dirige vers les WC, un brouhaha me fait sortir sur le palier. Des voisins me ramènent Annie qui est tombée dans la rue, en robe de chambre. Elle sanglote, elle doit aller aux toilettes à ma place immédiatement. Je l'avais envoyée se promener, devant le faire moi-même juste après pour que nous prenions un peu de distance. J'y vais tout de même, dans une descente longeant des prairies avec des barbelés, où paissent les vaches. Je surprend une conversation entre Tastet et un autre à propos d'un mercenaire qui avait perdu ses papiers en Afrique Noire puis en avait retrouvé d'autres au nom de Binda, et s'était ainsi débrouillé, en rentrant par l'Afrique du Nord.

     

    Je décide de revenir pour prendre des nouvelles d'Annie qui m'inquiète beaucoup. Je me suis réveillé avec uen envie dingue d'aller aux gogues...

     

     

     

    53 05 10

     

    A Marseille dans un appartement clair mais vétuste, des hommes viennent malgré moi boire au pastis de bienvenue. Je leur dis que je suis venu de Bordeaux pour échapper au grappin que ma mère voulait encore me mettre dessus à près de 50 ans (je me rajeunis). Ils ont l'air plus ou moins débilos. Je me demande comment loger Sonia et David, c'est petit. Leur accent était fort, ils étaient dépenaillés, envahissants, excessivement familiers. Je prenais leur accent, je surveillais leurs frôlements, tout était bien écaillé, bien miséreux, bien lumineux mais minuscule, vétuste et crasseux. Dans mon esprit, Sonia et David étaient encore jeunes, mes parents et beaux-parents vivaient encore.

     

     

     

    53 05 11

     

    Grand bureau très clair en verrières de dernier étage, Lazare, Ivanov et moi prenant congé d'une magnifique stagiaire brune très consciente de sa beauté. Comme nous ne nous reverrons plus elle refuse de donner son adresse. Par dépit je lui dis que puisqu'on va crever, je ne lui adresse plus la parole ni ne prends garde à elle. Les deux autres continuent à blaguer avec cette fille, une autre se penche vers moi pour signer un document de départ, elle est moins attirante, un peu de lie-de-vin sur une joue, mais très aimable, je la prie de m'excuser de n'avoir pas fait attention à elle