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Plotin - Plotant

 

 

Plotin est à proprement parler intolérable. Il s'obsède sur des histoires d'unités et de multiplicités, s'embrouille dans les subdivisions de ses subdivisions, entre ce qui relève de l'âme, de l'idée, de l'intelligible et de l'Intellect, en faisant bien sonner le « c » et le « t »... Aux dernières nouvelles, dans ses péinbles contorsions, il tente une distinction entre ce qui est un et ce qui, tout en restant un, se révèle multiple (comme le corps, je suppose)/ Mais c'est insupportable. « Comment donc voit-il, et que voit-il ? » - l'Intellect, je suppose. Au moins, Plotin ne possède que le prétendu esprit de Socrate. Il pose des questions, sans rccourir à ces exquises formules de politesse qui font grincer des dents chez Platon : « Et comment, tout compte fait, est-il venu à l'existence et comment est-il né de l'Un, pour être en mesure de voir ? » Passionnant en vérité...

 

Il est bien parlé d'existence, comme pour une pomme. Encore ne sommes-nous pas eunuqués par des notions chrétiennes, donc dogmatiques et absurdissimes... L'Un se scinde en deux pour se voir, poursuivons : « Car maintenant l'Âme comprend qu'il est nécessaire que ces choses existent, mais elle désire trouver la réponse au problème suivant, si rebattu chez les anciens penseurs : » (j'allais le dire) «comment de l'Un, s'il est tel que nous le disons, peut venir à l'existence une réalité quelconque, qu'il s'agisse d'une multiplicité, d'une dyade ou d'un nombre ? » Autrement dit, comment Dieu a-t-il pu créer en dehors de lui-même, sans rupture ? La Cabale parle du tsimtsoum, Wealshey de l'expérience concrète sans laquelle la toute-puissance ne peut s'exercer, mais il rese à savoir comment il a pu exister un «avant » et un « après ».

 

Le tsimtsoum semble bien plus rationnel, même s'il est fantastique, tandis que l'expansion par l'expérience introduirait une imperfection originelle. Quand je pense à mon catéchisme : « Pourquoi Dieu nous a-t-il créés ? » Réponse : « Pour que nous lui rendions grâce » - il avait donc bien besoin de cela, le pauvre ? « Pour s'éprouver lui-même » - inutile, s'il est déjà lui-même une Trinité. Ce qu'il faudrait d'abord, comme pour les cours d'instruction civique, ce serait un tableau où figureraient les fonctions et attributions de chaque élément de ce Meccano théologique en souhaitant qu'il n'y ait ni chevauchements ni enclaves... « Comment se fait-il en effet que l'Un au contraire ne soit pas resté en lui-même et qu'une si grande multiplicité soit sortie de lui, cette multiplicité que l'on voit dans les choses qui sont et que nous avons raison, pensons-nous, de ramener à lui ? » Notre Plotin deviendrait plus clair, apparemment.          POUPEE JAUNE, ANNE JALEVSKI, GRANDE ARTISTE

 

Poupée jaune.jpgLà encore, il sera permis de préférer la Cabale, qui parle d'un explosion où les fragments conservent une fraction d'étincelle aussi efficace que l'embrasement ontologique du Divin... 

 

Pour la troisième fois (me semble-t-il) Plotin échappe à mon recensement. Je l'ai tant haï en marge, multipliant les commentaires rageurs et ignorants, qu'il est incroyable de ne l'avoir jamais commenté pour de vrai. Les références, dans le répertoire, existent – mais impossibles à vérifier matériellement. Or pour une fois (ces lignes mêmes vont-elles disparaître ? car nous avons subi une panne d'électricité, alors que la survie de notre civilisation dépend de cette sourde d'énergie). Toujours est-il qu'après des considérations fumeuses (pour un profane) sur les rapports entre l'Unité et le Divin, notre penseur s'attache à nous expliquer les mécanismes de l'astrologie et de la magie : tout est lié dans l'univers comme dans un organisme, et selon des règles logiques.

 

Donc en invoquant les astres (ou les saints, pour les chrétiens) nos pourrions attirer sur nous les énergies desdits astres (les grâces des saints), sans que ces astres en eussent conscience (mais les saints, pour leur part, intercèdent). Et si Jupiter ou Saturne annoncent les évènements, ce n'est pas qu'ils doivent immanquablement se produire, mais que de telles causes résultent tels ou tels effets ; si cela ce se produit pas automatiquement, c'est que chacun de nous, d'une part possède sa nature propre (son "substrat"), réceptif ou non à ces ondes émises d'en haut, d'autre part est pourvu de liberté individuelle, car astrologie ne signifie pas déterminisme. Nous reconnaissons ici plus ou moins l'application de la "pensée sauvage" explorée par Lévi-Strauss. "On classe n'importe comment, mais on classe".

 

L'inconvénient de ces théories tout à fait rationnelles, c'est qu'elles ne fonctionnent point, et les décoctions ou fumigations amazoniennes cèdent aux soins de la médecine occidentale et scientifique. A moins qu'une foi puissante ne produise des miracles. Je serais curieux de savoir à quels moments la pensée magique, analogique, a pu se muer, ou muter, en pensée logique et scientifique. Nous sommes passés du chromatique au diatonique, par un saut d'audace. Par sauts, et non par contacts. L'univers comporte des sauts et des espaces, du risque. L'électricité un jour sera derrière nous. Plus convaincantes sont les considérations sur le rationnel et le passionnel : la colère ne provient pas du rationnel, "et il en va de même pour [les actions pratiques] qui sont déclenchées par les convoitises". "Qui sont" figure vraisemblablement dans l'original grec : doit-on reproduire les laideurs d'un texte dans une traduction ?

 

Ainsi donc nous aurions nos caractères propres, sur lesquels cependant nous n'aurions aucun pouvoir de volonté. Nous avons été créés tels ou tels, et nous y pouvons très peu ; "le désir de s'occuper des choses politiques et celui d'être magistrats sont déclenchés par l'amour du pouvoir qui est en nous". "Magistrat" vaut ici pour "consuls" ou "archontes". Nous aimerions tous le pouvoir. Militaire ou psychologique. Cela me plairait, à condition de n'avoir pas de responsabilité. Ce qui est illogique, et manque de l'éthique élémentaire. A quels moments donc, à l'intérieur de nous, passons-nous de la pensée magique (je suis tel que je suis) à la pensée dialectique ? ("je suis en partie ce que je veux être" ?) "Les actions qui sont" – décidément... - "entreprises pour éviter de souffrir ont la peur pour origine" – il va les énumérer toutes. Peur de quoi ? De la souffrance – ou de la responsabilité. "Qu'on me foute la paix".

 

Non la peur de la souffrance, mais celle du courant d'air, de l'espace, du risque de se tromper. Je parle ce ce cas particulier – "tandis que celles qui sont entreprises pour posséder plus ont la convoitise pour origine." Ce sont là des traits communs à tous les hommes. Plus ou moins accentués. On dirait une dissertation de bac d, chez l'auteur de ces lignes... "Enfin celles qui sont entreprises pour des raisons d'utilité, puisqu'elles cherchent manifestement à combler un manque qui frappe notre nature, ont leur point de départ dans cette force de la nature qui nous impose de nous soucier de nous en nous maintenant en vie." Il n'est question ici que des besoins matériels, nourriture, abri, feu.

 

Le pouvoir, les bijoux, ne sont pas vitaux, ne procèdent pas du substrat de survie. De quoi sommes-nous responsables ? Pourquoi y a-t-il tant de personnes et d'animaux, pour quoi Plusieurs plutôt que l'Un ? Pourquoi l'Un s'est-il différencié ? Pourquoi est-on passé à l'Un ? Plotin poursuit son projet. " - Mais que répondre si l'on objecte que les actions, quand elles sont belles, restent étrangères aux influences magiques, et que, si tel n'est pas le cas, il faut admettre que la contemplation qui porte sur des choses belles sera elle aussi sujette aux influences magiques ?" Noter que plus haut nous avons souligné que la contemplation revenait en fait à celle de soi-même, en tant que reflet de la perfection de l'univers.

 

Faut-il faire une distinction entre "influences magiques" et "collusions inévitables avec le Grand Tout Cohérent" ? Nous devrons, mais nos ne pouvons. Wir können nicht. Mais le maître va répondre. Parcourant la suite, où la raison procède lentement, nous nous apercevons que Plotin accorde à l'un et à l'autre, conformément à son esprit subdiviseur (un schéma serait nécessaire, et je comprendrais).

 

Commentaires

  • La multiplicité anarchique des cellules engendre le cancer.

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