Proullaud296

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Isocrate, etc.

 

Il « obtint ce prix quand il était jeune, et accomplit le reste quand il fut plus âgé. » Les verbes grecs impliquent une chance dans le premier cas, puisque d'autres auraient aussi bien pu obtenir ce prix de bravoure, mais une acton personnelle dans le second cas : cet homme a donc su cultiver ses talents : que de couronnes ! Puis il épousa « ma mère », qui fut également une récompense, un « prix de la valeur ». Elle épousait un héros de guerre. Tout sourit au jeune couple. Le beau-père s'appelle Hipponikos, ce qui sonne plus grec que nature : « par sa richesse, ploutô mèn, le plus grand des Grecs, prôtos ôn tôn hellènôn. La richesse indique la faveur des dieux, qui cette fois ne se sont pas trompés. Hpponikos était passé en proverbe. Seulement, le mèn, « d'une part », appelle un « dé », d'autre part : vantons nos père et beau-père, cela fait belle impression devant le tribunal : des honneurs publics sont contestés devant le plaideur, ce dernier doit montrer que ses parents et beaux-parents appartiennent aux meilleurs familles de la cité. Rien ne doit fissurer le mur de la famille, il est impossible, impie même, d'y supposer le moindre comportement suspect, la moindre brebis galeuse : ici, le « d'autre part », un simple delta appostrophe, rappelle qu'à la richesse honnêtement gagnée s'attelle l'honneur d'une admirable ascendance : les Athéniens honoraient et admiraient ce beau-père « plus qu'aucun de ses contemporains ».

 

Le plaideur, fils de héros, descend lui aussi des illustres familless, ainsi que ses beaux-parents. Rien de plus communs entre les Eupatrides, liés entre eux depuis des générations, sans oublier « une dot très grande », proïkos dé pleïstès, et bien sûr « une réputation très belle » accompagnant cette jeune épousée. De nos jours nous feignons de ne plus tenir compte, dans notre justice, uguale per tutti, de ces circonstances sociales extérieures ; mais pourquoi les grands ne sont-ils jamais en prison ferme ? Pourquoi les fils de hauts gradés échappent-ils aux barreaux du barreau, même après un viol odieux ? L'Antiquité est plus franche : elle en tire argument, notre XIXe siècle en fit de même : « tous souhaitaient cette union, les plus grands s'en jugeaient dignes ; c'est mon père qu'il choisit paarmi tus et désira unir à sa famille. » C'était le temps où « les grands » accordaient leur conduite à leur condition.

 

Le père du plaideur, en outre (en peau de chèvre), possédait une valeur militaire. Aujourd'hui, tous les riches sont des voleurs, et les militaires des brutes sanguinaires : cela peut se démontrer. Nous sommes une époque petite et morale. Tout aussi pleine de rites et de superstittions que la leur. Nos éditions ne sont plus imprimées à la six-quatre-deux, mais s'accompagnent, en bas de page, de notes érudites que seules consultent les philologues ; on appelle ces notes « l'apparat critique », le harnachement, l'outil indispensable aux chercheurs, à ceux qui établissent le texte. Les variantes sont classées par chapitres : ici, le 28, que nous avions lu précédemment. Ce serait plutôt un paragraphe.

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Il a commencé à la page précédente de cette édition. Mais pour se repérer d'une édition à l'autre, l'on convient de conserver toujours les mêmes nombres aux mêmes emplacements, ce qui facilite grandement la recherche. De même, la ligne sera toujours la ligne , quel que soit l'éditeur. Ici, les variantes concernent le nom grec de « Coronée » : les Athéniens y furent vaincus par les Béotiens (les vrais, pas les imbéciles) en – 447. Un certain professeur Auger a rétabli la véritable orthographe : « Koroneïa » ; aucun manuscrit ne l'avait retranscrit correctement : « Khéroneïa », dit le manuscrit Gamma ; « Khéronia », prétend le Lambda 1 ; « Chaïroneïa », répètent les autres manuscrits, cett. codd., « ceteri codices ». L'abréviation, « cet. cod. » au singulier, redouble sa dernière consonne au pluriel.

 

C'est ainsi qu'en français, vous aurez peut-être lu des « pp. » devant des numéros de pages : p. 58, mais « pp. 58-59 ». Cela fait érudit, snob et chic. Les éditions ordinaires n'utilisent pas ces artifices... d'apparat. Avant de passer à la ligne 6 de notre texte grec, il est de coutume d'employer une séparation, une sorte de signe « égale » vertical : la forme adoptée par l'éditeur figure en tête ; homologhèséïan, « ils le reconnaîtraient », « ils l'avoueraient » (que Périklès fut « le plus modéré, le plus juste et le plus habile des citoyens »)... Nous n'en disconviendrons donc pas...

 

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