Couverture des "Malavoglia"
Les Malavoglia. La terre tremble de Visconti. "Per il nostro mato padre" – "Peril mio caro marito". Placards de deuil siciliens. La mère et la fille, la première à cauche, voilée de noir, le mouchoir sur la bouche, les yeux perdus de regard ibtérieur. Derrière elle, poing serré comme pour la frapper, la fille, visage dur, fermé, sourcils froncés de colère contre la mort, contre la mère, une expression farouche et résolue sur le visage, mais résolue à quoi ? Que peut-on contre la mort, du marin en mer, contre le destin, qui s'acharne sur – encore ! - la famille Toscano surnommée "Tire-au-Flanc" par antiphrase, qui avait toujours "des barques sur la mer et des tuiles au soleil". Tous périront, finiront mal. Ce n'est qu'une prise de vue à commenter.
La tentation est grande de s'apitoyer. De considérer mon père disparu dans sa flemme et dans les douleurs, avec son injonction : "N'abandonne jamais, disait-il, jamais rien, ou tu deviendras petit vieux en moins de temps qu'il ne faut pour le dire." La veuve, c'est la Grande, la Longa. Toute petite, grandie par la contreplongée. Sa main sort d'une manche noire, indistincte, d'une cape ensevelissante et couvrant tout le dessus de tête, ses yeux sont élimés de larmes. Existe-t-il un maquillage qui sèche les paupières et ravage les cils, ou bien cette actrice a-t-elle pleuré à s'en brûler l'œil ? Ses traits sont prématurément vieillis. Toutes ces pauvres gens se sont usés dans la misère.
Le mur et les planches disjointes sont parsemés d'ombres de feuilles et de lumière, en noir-et-blanc. Les affiches de deuil, allongées, de biais et parallèles, portent les inscriptions susdites, clouées ou punaisées (vérifier la date d'invention des punaises : 1902/1903 , cloués donc, l'histoire se déroulant vers 1865). La placard de la fille à son père s'est froissé sur la disjointure importante des planches verticales. Tout est rafistolé, c'est la douleur qui donne tant de rage à ce visage de la fille. Elle ne se mariera pas. Ses seins proéminent. La rage l'embellit, ses longs cheveux nours tombent le long de son visage ovale, aux fortes pommettes : "Je ferai... Je ferai..." Que feras-tu, Destin tracé ? Contre qui crisperas-tu ton poing serré sun un tissu noir ? Tu veux te battre ? On se cabre contre la mort. Corsage gris, tissu modeste, grandeur du malheur, étouffantes destinées de bourgade, séisme en 1818, éruption de l'Etna en 65 détruisant des quartiers, l'homme ne peut que serrer les poings sur le vide. Toute une famille s'effondrera, ce qui est très souvent le thème des romans. "Ntonio cadet sombrera dans l'alcool, et portera le poignard sur la police. On ne devrait rien savoir de l'histoire quand on décrit la couverture d'un livre. Je pensais, moi, que la fille haïssait la mère, de n'avoir pas toujours fait ce qu'il fallait pour l'amour de son père, toutes les filles sur ce point sont des Antigones. En vérité sous ces sourcils rejoints nous voyons Erynis.
Commentaires
Vive Brassens, qui serait mis en prison tous les jours pour ses chansons. Et mort aux hypocrites vertueux et autres cagots.