Proullaud296

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Second bureau

 

 

"Ce que je vois" ? C'est, nécessairement, mon bureau. Je ne note plus en plein air devant Dieu sait quel paysage. Le bureau subit de légères modifications. La description glissera vers la droite, évitant l'écran, déjà traité. À droite de l'écran, même et surtout si cela n'intéresse personne, se trouve un téléphone fixe, de Télécom, type "Rondo" : pourpre foncé, avec le nom en blanc d'une belle écriture, et quinze touches (3x5) aux chiffres et lettres blancs, de 1 à 9, puis : étoile, zéro, dièze, enfin "R." (pour "répéter" ?), haut-parleur sous-titré "ampli", et "Bis". Chaque touche est donc surlignée par un tout petit rectangle allongé portant des lettres, sauf "R." (Register ?) et "Bis", qui permet de réitérer l'appel dans un délai de quelques minutes.

 

C'est un vieil appareil, selon nos critères actuels. Son écouteur se repose dans une fosse rectangulaire verticale aux angles arrondis, il tient bien dans la main, sa texture est soyeuse. En haut à droite, un grillage oblique permet d'écouter la voix de l'interlocuteur. Je me serrs de ce poste fixe bien plus volontiers que du poste mobile, parce que j'ai toujours l'impression que c'est meilleur marché. De plus, j'ai perdu le code "PIN" du portable, sans réfléchir que c'était, puisqu'il est neuf, quatre fois 0. Le fil teléphonique est à l'antique, frisé, élastique, à multiples boucles serrées. Par-dessous ce petit câble en court un autre tout noir, tout discret, celui du clavier qui me permet de vous écrire.

 

Je dis "vous", parce que ces descriptions évacuent en général tout interlocuteur. Elles sont monnaie courante quand on n'a rien à dire, si, en plus, elles ne vous sont pas adressées, nous sommes en pleine barbarie. Si nos yeux, donc, se déplacent un tantinet vers la droite, ils verront, sur un port multiple, avec un "t" bien sûr, une enveloppe rembourrée de 28 sur 30 cm plus ou moins (je vérifie de mon empan : ma main en fait 24 du pouce au petit doigt). Le destinataire en est David Bequet, prononcez "békè", mon petit-fils, ayant commandé en notre nom du matériel de non-fumeur. Il s'agit de ces fameuses "vapoteuses" qui supplanteront croit-on le tabac. Il a payé, je l'ai remboursé. Anne elle-même.JPG

 

En haut à droite, écrite à la main, la référence du site internet où l'on se procure dans les plus brefs délais ce matériel : cela provient d'Andorre, et ne peut se commander jusqu'ici que de façon électronique. En dessous une vaste étiquette Colissimo, que nous ne détaillerons pas : destinataire, mention "port payé", tour de taille et pointure de la grand-mère, le tout de la plus extrême importance. Et dans le coin gauche inférieur, une autre étiquette kaki pâle, formulaire CN 22, mentionnant, pour la douane, le contenu : cigarettes électroniques. Nous avons réitéré notre achat : ainsi ma femme, Anne-Marie, peut-elle fumer sans interruption, branchant sa seconde batterie dès que la première est déchargée, ce qui advient très vite. En même temps, elle ne rejette plus que de la vapeur d'eau, tout en n'ingérant plus que 12mg de nicotine (par cartouche, je suppose ; une cartouche équivaut à 22 cigarettes environ). Quel soulagement pour sa santé et nos odorats ! Fini les puanteurs qui donnent l'impresssion, quand on entre dans le lit conjugal, qu'il va falloir se baiser un cendrier refroidi !

 

Tout ceci est bien humoristique. Mais nous aviosn parlé de "port multiple" : c'est un carré de couleur chrome, creusé sur ses quatre faces par une douce dépression où se logent quatre prises mi-mâles mi-femelles, afin que s'y emboîtent d'autres prises androgynes à saillies inversées. Là-dessus se branchent : la clef USB consacrée à des cours oraux de philosophie, par Michel Onfray ; la prise de l'appareil photo électronique. Une autre clé USB pour les voyages ou déplacements ; et enfin, inamovible, le raccord à la véritable prise centrale, sous la table. Et voilà !

 

 

 

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