Proullaud296

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Souvenirs et pensées à deux balles

 

Elle m'avait confirmé que l'on pouvait dire, éventuellement, en allemand « es wird gekommen ». Simplement à prendre sans énervement. Il m'aurait suffi de si peu d'autorité. De distance. De calme. East-Side, nasillarde, que j'essayais de persuader qu'il n'y aurait pas toujours des guerres. J'étais exaspéré. Mais elle avait raison. Abrusović me disant “Vous n'êtes même pas capable de faire taire une bande de gamins”. Du coup je l'avais puni, lui, pour lui montrer, justement... Abrusović : “Je sais que vous me prenez pour un abbruttitch”. Il tenait absolument à la bonne prononciation de son nom : Abrouzovitch... Devenu écologiste.

 

.

 

Filles silhouettes

 

Beretti paraît-il, « Sheila », quoique je ne m'en souvienne que très vaguement. Ou plus exactement je crois m'en souvenir. Nous ne nous sommes pas « impressionnés » en ce temps-là, malgré nos prétentions respectives à l'extrême originalité. Jaunet (qui a dit « Mais tu es folle» à une camarde qui se prenait une baffe de ma part pour avoir raillé mon pantalon rouge) ; je servais ainsi caricaturé de cible dans un lancer style « jeu de massacre ». Les ballons à crever étaient arrivés avec un retard énorme, juste avant la séance. J'étais bourré comme un coing, et des parents auraient dit « Ce sera ça, ton prof ? » La fille Guinche, ou Guiselli, qui refusait d'avoir du poil et se le coupait. Monde et Toulemonde : “Tout le monde m'emmerde !

 

- Mais Monsieur, je n'ai rien fait !” J'ai eu quelqu'un d'autre qui s'appelait Toutlemonde, à Grénolas - brune et maigre, peut-être ? ...même famille ? - qu'est-ce que j'essaie de rattraper, comme de l'eau entre les doigts ? jamais je n'aurais voulu avoir vécu cela. Je ne reconnais plus le paysage. Tous mes grands sages ou singes allant répétant : « C'est toi qui as choisi, tu devais bien trouver ton avantage à mener ta vie de la sorte. » Assurément, ô Grands Hommes. Simples perroquets de la doxa du moment, qui paraîtra si étrange à nos archéologues. Mais ce choix, voyez-vous, personne ne s'en rend compte. Et lorsqu'on s'en avise, il est infiniment trop tard. Se dire que l'on a choisi sa destinée, jusqu'en ses détails fâcheux et humiliants, c'est une pure et simple vue de l'esprit.

 

Une grosse ficelle. Je dirais même que c'est de la philosophie de comptoir en zinc ; nous sommes tous désespérés de devoir mourir. Alors, pour ne pas sombrer dans le désespoir, nous inventons que nous avons voulu tout cela. Et nous nous glorifions de nos moindres bourdes. Rien à voir avec la noble stature d'un Nietzsche et de l'Absurde Eternel Retour – tout juste de la petite monnaie petite-bourgeoise. J'avais même un jour en classe outrageusement célébré les cimetières : « Au moins, tout est en ordre. Pas d'astuces tortillées. Pas de justification de la vie, tout le monde à la même enseigne, une dalle, deux dates, bien carrées, bien alignées. Comme ça au moins on le sait, comment ça se termine. Ah, le désir d'être aimé, je t'en foutrais, de l'amour, allez tous au trou, que ce soit bien net. Et la vie n'est que de la merde ». Etc, etc... L'un de mes élèves alors de murmurer : « Si c'est pas malheureux d'entendre ça... » Les jeunes gens se suicident volontiers ; je n'aurais pas dû me laisser aller - memento mori. Rien ne tient devant cela.

 

Nos penseurs à deux balles s'arrêtent juste à tant, à la couche de vérité qui les arrange - sociologie, politique, psychanalyse – c'est plus commode. A moins que ce ne soit la mort, le néant, la solution de commodité. Mais ils deviendraient fous, mes semi-sociologues, autant que moi si je me détournais de ma commode fascination, si j'entrais dans l'incommensurable jungle du relatif et de l'actif. La vie de tout le monde. Sans oublier – soupapes ou coups de sonde ? - les excursions vers Dieu, qui est l'incommensurable folie par excellence – juste par bouffées - « j'ai choisi ce que je suis » dit Porcher- tronche blême de bonne sœur du Vide... Alors j'émiette mon passé, qui est tout ce que j'ai, complaisamment. Suant de narcissisme n'est-ce pas. Je me souviens de l'Eurasien Tran-Anh, buvant mes commentaires sur Malraux, prenant des notes jusque pendant cet oral même du bac.

 

 

Flanc de nef.JPG

Sa beauté, son intelligence, avaient dû m'exalter. Encore une drague inconsciente et risible ; tel collègue et moi n'en sommes-nous pas venu à nous étreindre par les doigts lors d'une conversation exaltée dans la salle des profs ? N'avait-t-il pas pourtant voulu me présenter le grand écrivain Jean Brenaud : « C'est un homosexuel » - EN-CORE ! ai-je hurlé – cri du cœur. Aussitôt de baisser la voix, comprenant que sa vocation (« J'aime présenter les gens les uns aux autres » - ne réussirait pas son coup avec moi.

 

 

 

X

 

Je me rappelle dans ce même oral du bac ces imbéciles à têtes de garçons qui ne voyaient rien de musical dans Baudelaire ou Apollinaire. « La musique ? » répétaient-ils d'un air bovin. « La musique ? » En vérité, un nombre immense de professeurs de lettres ne connaissent pas leur métier. Forcément : ils se conforment en tout point aux instructions du ministère...

 

 

 

X

 

Commentaires

  • "Le pantalon rouge, Messieurs, c'est la France !" A cause de ce député à la con, des dizaines de soldats sont morts avant qu'on ne remplace le rouge par le bleu, pendant la guerre 14.

Les commentaires sont fermés.