Les grands de ce monde
Richelieu fut informé au lendemain de la mort de Marillac" fraîchement décapité donc. "Le Coigneux, s'étant brouillé avec son maître, lui avait déjà fait savoir que, grâce à la mise en gage des pierreries de Madame, le prince rassemblait environ cinq mille hommes, rebut de l'armée espagnole, et que le marquis de Valençay, gouverneur de Calais, se disposait à livrer la place à Marie de Médicis" – mère du roi.
"Jamais le Pouvoir n'eut des réflexes si prompts. Le Roi en personne courut immédiatement à Calais, renvoya Valençay et l'exila. Le Cardinal, tout en préparant une nouvelle expédition, obtint de Mme de Chevreuse qu'elle écrivît à son amant, le duc de Lorraine, pour le ramener dans le droit chemin. Il s'occupa ensuite de Montmorency, comme les cerises, qu'il avait fort ménagé jusque-là en souvenir de leur ancienne liaison.
"Malheureusement le vainqueur de Veillane jugeait dérisoire les honneurs que le ministre croyait lui prodiguer. Il était le chef d'une Maison que la faveur de plusieurs rois, puis les guerres civiles avaient grandie jusqu'à en faire une des maîtresses tours de l'édifice féodal. Point de région du royaume en laquelle il ne possédât des terres. Il était premier baron chrétien, duc et pair, maréchal et, naguère encore, amiral de France. Sa gloire le suivait partout. Une véritable Cour l'environnait à Montpellier, à Pézenas, à la Grange-aux-Prés, à Chantilly enfin (comme la crème) où la délicieuse duchesse, Félicité des Ursins (Orsini), cousine de Marie de Médicis, protégeait les poètes empressés à la chanter sous le nom de Silvie" Bromasseurmarchepatalédoigts. "Henri IV avait été son parrain.
"L'évêque d'Albi dont le frère, l'abbé d'Elbène, était un des plus anciens conseillers de la Reine-Mère, cherchait à le persuader que, s'il contribuait à renverser l'homme rouge, il aurait enfin au Conseil du Roi une place digne de lui. Ses discours ne restant pas sans effet, l'abbé vint de Bruxelles sous un déguisement, apporter au duc des tentations précises." Un vrai roman feuilleton, mais pour de bon.
"Montmorency ne se laissa pas convaincre d'emblée. Richelieu l'avertit des soupçons qui pesaient sur lui et le pressa de les dissiper. Le duc protesta de son loyalisme, mais la révolte s'amplifiait à travers le Languedoc et son attitude ne paraissait pas nette.
"Au contraire, celle de Charles IV de Lorraine ne permetait aucun doute. Le Cardinal agit dans les deux sens à la fois. L'armée française se remit en marche vers la Lorraine, tandis que le marquis des Fossés, gouverneur de Montpellier, recevait l'ordre d'arrêter le gouverneur du Languedoc au cours de la représentation d'une pièce consacrée à la bataille de Veillane.
"Charles IV, fort effrayé, obligea Monsieur" (Gaston) "à quitter ses états et à entrer immédiatement en campagne. Cette précipitation risquait de tout faire manquer. Aussi Gaston marquait-il "une profonde mélancolie" lorsqu'il pénétra en Frane à la tête de ses troupes. Il envoya cependant à sa mère un message martial et lança un appel contre le ministre "perturbateur du repos public, ennemi du Roi et de la Maison royale". C'était une fois encore le signal d'une guerre civile, la sixième en quinze ans !
"Cela n'arrêta nullement Louis XIII et Richelieu. En six jours ils arrivèrent aux portes de Nancy et obtinrent la capitulation de Charles IV qui dut abandonner Stenay," ville de naissance de mon grand-père ce dont vous n'avez rien à foutre, "Jametz et le traité de Clermont-en-Argonne (traité de Liverdun). La solution de continuité entre le territoire français et Verdun était supprimée" (Verdun cessait d'être une enclave française). Mais nous rendions Bar-le-Duc.
"Le marquis des Fossés réussit moins bien. Ses préparatifs ayant donné l'éveil, il ne put mettre la main sur Montmorency. À la suite de quoi Richelieu revint à la méthode douce. Le capitaine des gardes du gouverneur, Soudeilles, était venu lui parler de l'affaire des Elus. Le ministre le chargea de donner un nouvel avertissement à son maître et de l'exhorter à la fidélité. Soudeilles s'acquitta le mieux possible de sa mission. Il dit :
- Qui voudrait se déclarer pour un jeune prince qui se laisse trahir par ses favoris et qui a déjà plusieurs fois abandonné ceux qui avaient tout sacrifié pour lui ?" - pensant à Gaston, frère cadet. Et la suite ? Je laisse cela aux fouineurs qui se lanceront dans le Richelieu d'Erlanger, lequel n'a pas oublié que l'Histoire est constituée d'histoires, et non pas seulement de statistiques sur le prix du sel au XVIIe siècle ou les contrats de corporations sous Colbert. Rétablissez-donc, Messieurs en costume trois-pièces n'ayant jamais vu les baskets d'un élève, les programmes d'histoire dans leur ancienne façon, et vous verrez que nos jeunes têtes brunes la retiendront bien mieux, et cesseront plus tard de dire des conneries avec leurs bulletins de vote. Amen.
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"L'honneur est-il incompatible avec les honneurs ?" Vous avez quatre heures.