Proullaud296

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Le dernier des vampires

 

" Suzanne le dévisage, le souffle court. Il n'ose s'avancer vers elle. La crainte le paralyse.

 

 

La chemise du pianiste.JPG

" - Au point où nous en sommes, je crois qu'il est temps d'ouvrir une bouteille de cet excellent petrus, propose-t-elle." Pour les connaisseurs, c'est un Pomerol. Pour les psychologues, vous venez d'assister à la naissance typique d'un syndrome de Stockholm chez cette charmante et complètement conne victime du vampire séquestrateur. Et vous abordez en ce moment le chapitre 10 : c'est marqué en haut, sur la page. Nous changeons alors de scène, de lieu et de personnages, comme il convient dans un roman construit selon les règles de l'art. Seulement, "Amaury de la Faille" ne me dit plus rien du tout : symptôme de littérature Kleenex ? Notre Amaury "emprunte" donc "la rue Pascale", mais il la rendra tout à lheure, et coupe brusquement les gaz en apercevant deux femmes assises autour d'un brasero sous le porche de l'hôpital Broca. Sur le sol, devant elles, une toile cirée où s'empilent des bouquets d'anémones défraîchies, des sachets de pistaches, des bijoux en toc et des ours en peluche, tout un bric-à-brac misérable sur lequel les rares visiteurs qui sortent de l'établissement, après avoir emmené un malade aux urgences, jettent un coup d'œil furtif. Le lieutenant relève la visière de son casque et, d'une voix atone, bredouille par-dessus son épaule :

 

" - Une dernière tentative avant d'aller dormir ?" (d'abord on ne dit pas une tante hâtive, mais un homosexuel pressé).

 

"Christine louche vers sa montre" – c'est peut-être la compagne de la métisse enlevée par le vampire. "...il est plus de minuit, largement l'heure de s'accorder un peu de repos après avoir passé les trois quarts de la journée à sillonner les rues entre la rive gauche de la Seine et les boulevards des Maréchaux.

 

" - Je reste près de ta bécane, acquiesce-t-elle. Seul, tu feras un tabac auprès de ces dames.

 

" Sur une grimace ulcérée, La Faille se dirige vers les vendeuses à la sauvette qui escamotent prestement leur foutoir. Amaury s'adresse à la plus âgée, une gitane originaire de Roumanie, et lui dit qu'il l'a vue glisser dans l'un de ses cabas un portefeuille qui ressemblait étrangement à celui

 

FAIVRE D'ARCIER(JEANNE) "LE DERNIER DES VAMPIRES" 60 03 24 12

 

d'une femme portée disparue depuis une dizaine de jours.

 

"La Rom laisse filtrer un regard insolent sous ses lourdes paupières. Un flot de diphtongues criardes jaillit de sa bouche où subsistent quelques chicots branlants. Elle darde un ongle sale vers Christine. Une longue enfant aux yeux battus déplie ses membres grêles et tend sa menotte brune au jeune lieutenant :

 

" - L'argent d'abord. Et mamie veut voir la chef.

 

" La rumeur que deux flics quadrillent la ville à moto s'est répandue comme une traînée de poude" (nous n'en sommes plus à un cliché près) dans la société parallèle des sans-abris. La Faille, qui soupçonne la petite et son aïeule de monnayer du vent, fait sauter quelques pièces dans le creux de sa paume.

 

" - Plus, exige l'enfant ; elle frotte son pouce contre son index.

 

" - Cinq euros et basta, marchande La Faille." - et une incise superflue, une ; on le voit bien, qu'il marchande.

 

" Les deux complices se murent dans un silence outré et remballent leurs paquetages. La Faille menace d'appeler un fourgon qui les enverra au bloc", évidemment, pas à l'Arc de Triomphe.

 

" - On sera au chaud, rétorque la petite avec un fort accent.

 

" La Faille lui tend un billet de 10 euros. Elle le froisse dans son poing refermé. Sa grand-mère invite Christine à traverser la rue d'un geste autoritaire tout en baragouinant des insultes contre La Faille, qu'elle accuse, dans un méli-mélo de roumain et de franglais, d'intimider de pauvres femmes sans défense parce qu'il est furieux de cavaler en plein hiver au lieu de se pelotonner dans un bon lit douillet.

 

" Christine s'empresse de doubler le bakchich, geste qui endigue instantanément le courroux de la mégère. Elle montre ensuite une photo de Suzanne aux réfugiées. Celles-ci se consultent du regard avant que la vieille se décide à tâter le terrain :

 

" - Jolie dame étrangère...

 

" - Oui et non... Son père était de Madagascar...

 

" La Roumaine traduit son scepticisme d'un claquement de langue : elle a peine à croire que deux flics se démènent pour porter secours à une clandestine quand la majorité de leurs collègues arrête des gosses à la sortie de la maternelle et les enfournent comme du bétail dans des avions-cargos qui les vomissent dans des pays dont ils ignorent à peu près tout." C'est vrai ça, l'autre jour j'en ai vu un cortège de 50 attachés par les pieds deux par deux, l'avion était pour Auschwitz. Salauds de Français. Le dernier des vampires, de Jeanne Favre d'Arcier, qui ne serait pas très contente de m'avoir entendu, aux éditions de Bragelonne.

 

Commentaires

  • Le match mollasson : "Tiens, v'là la balle, tu m'la rendra tout à l'heure."

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