On efface tout et on recommence
Sidoine, dernier Romain. Lorsque croula l'Empire, il comptait cinquante-six ans : c'était alors (476) la fin d'une vie. Pourtant trônait une statue de lui en or, dans le vestibulum du Sénat ; mais l'esprit filandreux de Sidoine sombrait dans la plus niaise bondieuserie : cinq années plus tôt, notre poète avait été élu à l'épiscopat de Clermont, alors même que les Skyres envahissaient l'Auvergne... Il avait épousé pourtant, vingt ans plus tôt, la fille du premier Gaulois qui revêtirait la pourpre impériale, Esychius Avitus ; puis les assassinats se succédant, Sidoine détala, noblesse en sautoir ; ceux de sa classe lui confièrent alors les vers dédiés par tradition au successeur et assassin de son impérial beau-père : cet exercice s'appelait le Panégyrique – un long discours fleuri de louanges, lors de l'investiture du Sénat.
Ce que nous pourrions appeler « sacre civil »... Nous reviendrons sur cette ébauche biographique (naissance, statue ; mariage et décadence ; panégyriques, évêché). Nous traiterons plus volontiers de tout ce qui fascine. Siècle des invasions (comme une terre prenant l'eau, par-dessous, avant la vague) – et certes, le Barbare à la fin paraît-il finit toujours par vaincre, mais tôt ou tard les hommes toujours tôt ou tard s'entretuent et le guerrier se cviilise. Assurémént l'histoire d'à présent montre bien moins son visage - inculture pharamineuse de nos politiciens, leur incapacité congénitale de parti à remonter avant l'an 1900 - les plus hardis s'aventurant jusqu'à la Révolution – d'où il font commencer la sortie de la préhistoire – l'Empire Romain ? connais pas – ça ne sert à rien. Or devant le soldat, ferions-nous mieux que Rome ? qui déjà produisait nos collabos, nos résignés, nos chantres du métissage – fin définitive de ces fameuses différences, rebrassage gigantesques des conformismes, sous le vernis du sang neuf...
Notre Occident assurément ne périrait pas, mais déformé, cabossé, méconnaissable : Wisigoths et Burgondes perpétuant le droit romain ; Clovis embrassant le cul-te de Clotilde, celui de Jésus-Christ – qui verrions-nous de cette trempe, susceptible avec son épouse d'infléchir la trajectoire de nos nation au prix d'une conversion ? Sans compter le massacre de sa famille... Non que j'éprouve la moindre nostalgie du temps des assassins – mais je ne vois en terre contemporaine que boutiquiers cramponnés à leur calculette, ou peintres affairés à raccorder de toute urgence la rambarde du Titanic. Je ne connaîtrai pas la fin de l'histoire - fin de moi difficile... Sidoine en son temps reste incernable, indéfinissable, éponge pathétique de tout ce qui traînait alors.