C O L L I GN ON
B L A T T E S , B L A T T E S
LES FILMS DE MERDE
PITCH
Deux couples rivaux aménagent une ancienne boucherie en lieu de vente pour travaux de peinture sur soie. L’ambiance tendue, l’isolation du lieu choisi, la sottise humaine généralisée, le manque de motivation, présentent une image déprimante de toute entreprise humaine.
THÈME
Tout est vain, le monde est con, toute entreprise est vouée à l’échec, se lamenter est le but ultime.
LE HÉROS
1.QUI EST-IL ?
Un homme de 48 ans, professeur profondément pessimiste, dont le seul but est de caricaturer tous ceux qu’il voit. Il déteste toute action et cultive l’inaction, l’imagination languissante.
2. QUE FAIT-IL ?
Il accompagne sa femme et l’amie de celle-ci dans une tentative de se faire reconnaître dans leur activité artisanale. Ses cours n’interviennent pas ici.
3. D’OÙ VIENT-IL ?
De Bordeaux, à 100km. Son activité consiste à transformer ses cours en perpétuel ricanement. Il n’est venu que pour suivre mollement le projet de sa femme, sans s’impliquer réellement, car il ne croit à rien, sauf au caractère victimaire de sa précieuse et inutile personne.
4.OÙ VA-T-IL ?
Absolument nulle part, où le vent le pousse. Sa femme et l’amie de cette dernière lui demandent de transporter su matériel à Fort-St-Jacques, alors il le fait.
5. POURQUOI Y VA-T-IL ?
Parce que sa femme Arielle le lui a demandé, sinon il s’en fiche. Il pense que les femmes ont toujours raison, ce qui est une excellente raison pour ne jamais prendre la moindre initiative. Simplement, par la seule force de son observation ironique et morne, il créera des mots et des images à peine moins chiantes que la réalité, qui n’est qu’une toile de fond de sa douleur mineure et narcissique.
(« ETC. » : rien de plus. Un vrai sous-Houellebecq, une loque informe et vénéneuse)
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CARTON
Tout être qui se sent persécuté
est réellement persécuté.
MONTHERLANT
Le cardinal d’Espagne
SEQUENCE 1
INT. JOUR
OFF
Les blattes sont de petits insectes dégueulasses,
hétérométaboles et dictyoptères. Ils trottent dans
les lieux obscurs en faisant cra-cra-cra
et se nourrissent de débris variés/
1. GP Blattes : longues et brunes
au plafond
2. GP - sur les murs
3. 4. 5. GP Blattes longues et brunes en positions différentes.
6. INSERT : une ampoules à cent watts, éblouissante
7. GP : Blattes aplaties éblouies qui font les mortes
8. GP : Certaines contractent d’un coup leurs six pattes sur le ventre
et se laissent tomber au sol.
9. GP : Blattent qui filent sur le carrelage.
10. GP : Pantoufle rageuse écrasant les blattes
à même les parois et le plafond nus.
11. Quatre pantoufles enfilées par des mains
12. GP Blattes qui tombent.
OFF
« La mort la plus simple pour l’organisme le plus simple.
Un petit rectangle simple, qui craque à peine.
13. GP Cadavre écrasé contre le mur, raclé pour le faire tomber.
BRUITAGE TRES ACCENTUÉ PDT TOUTE LA SÉQUENCE
14. PLONG. SUR LES QUATRE BABOUCHES
15. PM Carnage sur le carrelage, en perspective cavalière.
16. GP sur les rescapées se cachant dans des fissures.
17. PA. Deux humains, mâle et femelle au crâne rasé, roux pour la femme.
Baladeurs sur les oreilles.
La femme en tablier bleu.
Ils comptent les cadavres en se courbant.
PASCAL SCHONGAUER dit PAPIER
Vingt-cinq.
MARQUISE DE SCHONGAU
Quarante-quatre.
PASCAL
Soixante-neuf. Quelle coïncidence.
MARQUISE
Va chercher un balai.
TRAV. AV. PASCAL de dos cherche un balai dans un placard très sale
ZOOM AV. Toiles d’araignées, très luisantes.
TRAV. AR. PASCAL charrie les blattes sur la pelle.
18. GP visage de la Marquise, surimpression STOCK : pelleteuses charriant des cadavres à
Auschwitz.
19. PA Ils enlèvent leurs écouteurs et coupent la musique.
MARQUISE JEANNE
C’était quoi pour toi ?
Elle écarte les bords d’un grand sac en plastique.
PASCAL
Schubert comme d’habitude.
COLLIGNON «BLATTES, BLATTES » SCÉNARIO 6
PASCAL PAPIER est tout pâle. Il jette les cadavres à la pelle dans le grand sac.
SEQUENCE 2
EXT. JOUR
Dans une voiture. PASCAL et MARQUISE JEANNE de SCHONGAU côte à côte
MARQUISE JEANNE
Maintenant on peut y aller.
PASCAL
...avec le kilo de poudre qu’on leur a foutu dans le coquetier, les blattes…
MARQUISE JEANNE
...elles peuvent crever.
Un temps.
Tu n’as pas oublié les tréteaux ?
PASCAL
Pas de danger.
JEANNE
Tu les as bien calées, mes toiles ? Ventre à ventre, ou dos à dos.
PASCAL, bat :
Tout baigne…
SÉQUENCE 3
EXT. JOUR
1. PG Voiture, de dos, débouchant dans une rue étroite.
2. CONT.PLONG. Panonceau défraîchi «BOUCHERIE »
3. PM PASCAL et JEANNE, écouteurs à l’oreille, font plusieurs aller-retours de la voiture à la boucherie, transportant des paquets encombrants (tréteaux, toiles par deux).
4. GP sur des barreaux de vitrine, verticaux, très serrés, à l’ancienne.
5. TGP Intérieur des cannelures des barreaux, maculé de taches brunes indélébiles.
6. GP Visage de PASCAL reniflant.
PASCAL
Ça sent le vieux sang. Séché.
Il mâche dans le vide bouche ouverte, d’un air dégoûté.
7. PG TRAV. GD Arrière-boutique.
TRAV .AV. Cuisine en boyau.
GP Un réchaud vétuste, un tuyau à gaz à date périmée.
8. PM JEANNE de dos ouvrant une fenêtre crasseuse qui donne sur une ruelle à ras de caniveau, eaux sales. TRAV. BH Une fenêtre juste en face, rideaux bonne femme et cul de télévision 1992.
9. P.G. PASCAL Schongauer et JEANNE Schongau installant toue sorte de paquets, tréteaux, tableaux, premiers rangements et dispositions.
OFF :
« ...soit pour les époux Schongau-Schongauer en location indivise un bâtiment sis six de la rue des Puniques, sur trois niveaux dont une boucherie désaffectée au rez-de-chaussée plus arrière-boutique attenante, chambre et dégagement plus point d’eau et toilette au premier étage plus chambres et toilettes au deuxième et combles, le tout constituant immeuble de rapport ou hôtel déclassé pour insalubrité (arrêté préfectoral du 20 juillet 1983), chaque chambre pourvue d’une literie, d’un mobilier d’hôtellerie adéquat et de tous tuyaux, robinetterie, lavabo et bidet en bon état de marche, à charge éventuelle pour les époux Schongau-Schongauer de réaménager à leur gré exclusif tout ou partie, intérieur ou extérieur, du bâtiment décrit susdit... »
10. P.E. PASCAL et JEANNE remettant une forte liasse de billets entre les mains de LA FEMME AUBERGISTE (MAUD)
11. P.E. PASCAL et JEANNE main dans la main, écouteurs pendants, s’engage dans le grand raide escalier de bois noir qui monte à l’étage.
INT. JOUR.
12. P.M. PASCAL SCHONGAUER s’arrête net :
« Douze vingtièmes de ma vie ; quatre ans par marche : 48 ans sur 80 ».
Ils se tiennent par les épaules.
13. P.M. Ils débouchent sur le grand palier qui comprend : une pierre à eau, un coin douche. Armoires, coffres, poussière.
14. P.M. TRAV. AV.
Couloir tordu ; au bout à droite une chambre en état d’abandon ;
LA FEMME AUBERGISTE (MAUD) par derrière. L’HOMME AUBERGISTE. Tous deux très corpulents, l’homme très grand, de type alsacien.
L’HOMME, qui les a suivis :
« C’est la plus belle ».
PASCAL
« Sûr ! »
15. PANORAMIQUE GD
Une cheminée sous la poussière gluante. Une table de nuit. Lit. Couvre-pied lourd.
16. P.M. JEANNE se tord les pieds sur les tomettes.
17.G.P. PASCAL SCHONGAUER : son visage exprime une grande satisfaction. Il se frotte les mains.
18. L’AUBERGISTE MÂLE
« Ça donne juste au-dessus de la porte aux bouchers. Ne vous penchez pas trop » (doctoral) Quatre mètres cinquante.
L’AUBERGISTE FEMELLE (MAUD)
« C’est mon mari qui a installé la pompe. Et des toilettes dans le boyau. V’z’avez pas vu les toilettes ?
JEANNE SCHONGAU
« Il y a des blattes.
MAUD
« Vos aurez du produit.
Les deux couples se comparent avec intérêt.
MÂLE
« On vous fait un prix parce que c’est insalubre.
FEMELLE
« Il faudrait des frais énormes.
PASCAL, s’esclaffant niaisement :
« Ha ha ! « Énormes ! »
JEANNE le fixe férocement. Il se tait.
19. P.M. Int. Jour
Vue sur une chambre désaffectée, volets mi-clos, matelas roulés.
AUBERGISTE FEMELLE, soufflant :
Juste au-dessus vous avez une autre chambre, qu’est pas mal non plus.
AUBERGISTE MÂLE
Bon, moi je r’tourne bricoler.
20. P.M. AUBERGISTE FEMELLE, guide les locataires
Là c’est les cabinets. (Elle tire la chasse)
Surtout vous n’en mettez pas trop. Pour le produit, vous passerez le prendre. On mange à sept heures.
21. Travelling avant dans l’escalier
PASCAL
Qu’est-ce qu’il y a sous ç’t’escalier ?
AUBERGISTE FEMELLE
Ben c’est un puits. (Elle dégage, en tirant une planche, un puits intérieur fermé par une grille)
À la fin de la guerre les Résistants ils ont balancé des miliciens. Alors ça remonte ! - moi je suis là que depuis trois ans.
SÉQUENCE 3
P.E. INT. JOUR
1. Intérieur d’auberge campagnarde. Six tables serrées, nappes « bonne femme ».
Représentants, camionneurs. Seule à une table, imposante, la MARQUISE DE BOUF ET BOILNŒUD. Grande, forte, blonde, 50 ans, se croit bon chic bon genre.
JEANNE SCHONGAU, de dos, attendant qu’on la serve.
PANORAMIQUE BAS DROIT vers HAUT GAUCHE
PASCAL sort des toilettes en haut de l’escalier en se rebraguettant et redescend s’assoir en face de JEANNE SCHONGAU.
OFF
JEANNE, à PASCAL
Je ne veux pas manger dans ce trou à rat.
PASCAL
C’est pour se faire bien voir.
JEANNE, sifflante :
Savonnette...
2. P.E.
L’AUBERGISTE FEMELLE (« MAUD »)
Vous prendrez bien l’apéro ? (elle fait signe à SA FILLE) Trois Marie Brizard !
LA FILLE s’éloigne, escortée par un PETIT AMI soumis aux cheveux d’oreilles d’épagneul.
« MAUD »
Il n’y a pas de clients ici. C’est pas des gens intéressants. Et puis avec tous ces putain d’impôts…
La MARQUISE DE BOUF ET BOILNŒUD tique…
3. INT. JOUR P.M.
LE PETIT AMI
Vous voulez de la musique ?
Il met en route un appareil à musique, constitué d’un corps de buffet et d’un cercle de métal blanc, sous vitre.Ce cercle présente une infinité d’aspérités correspondant au mécanisme d’une boîte à musique.
LE PETIT AMI glisse une pièce de cinq francs Napoléon III dans la fente, l’appareil se met en marche sous les yeux attentifs et dans le silence de tous ; il joue La marche des petits Pierrots.
SÉQUENCE 4
1. CUT – P. M.
CARLOS, SOPHIE LA BLATTE
Couples de touristes, lui : corpulent, type latino-américain, barbe de zapatero. Bagues, lunettes noires de comédie.
SOPHIE LA BLATTE en robe légère et très démodée.
CARLOS, sur le pas de la porte, écoutant :
C’est vraiment chouette !
SOPHIE, voix très aiguë :
Patronne ! Deux menus très simples…
MAUD
Ici Madame, y a que du très simple.
SOPHIE & CARLOS s’installent au milieu d’une attention respectueuse. Ils sont disposés de face avec PASCAL et JEANNE , légèrement décalés.
Musique. On voit CARLOS s’enfiler trois ou quatre apéritifs, faire rigoler toute l’assistance avec de grands gestes ;
2. GP visage de SOPHIE
3. P.M.
PASCAL SCHÖNGAUER - JEANNE SCHÖNGAU, CARLOS ET SOPHIE LA BLATTE parlent ensemble avec animation, la glace est rompue.
4. P.M.
JEANNE SCHÖNGAU, naïve, à CARLOS
Ah ? Ils ont aussi des néonazis en Norvège ?
SOPHIE LA BLATTE À JEANNE, pour changer de conversation :
Je fais de la peinture sur soie : signes du zodiaque, symboles maçonniques…
PASCAL, coupant maladroitement la parole à JEANNE /
Ma femme attent cent quatre-vingt six échantillons de parfums, par le prochain car de Bajac. Et sur les murs, nous exposerons des instruments en miniature.
JEANNE, qui peut enfin placer un mot :
...de musique.
CARLOS parle bas à l’oreille de PASCAL en étouffant un fou-rire gras.
Bitte…
PASCAL rit sans façons.
6. G.P.
CARLOS
Je suis un envoyé d’Oliver Blatt Blattstein - ne me regardez pas avec ces yeux-là.
7 P.M.
PASCAL se ressaisit.
Une crème brûlée !
CARLOS
Nous allons exposer ensemble tous les quatre.
JEANNE,à mi-voix :
Pas de police surtout , pas de police !
CARLOS
Patronne ! Trois cognacs !
JEANNE
Quatre !
CARLOS, à mi-voix
Tant que je suis là, rien à craindre.
SOPHIE tire d’un sac à main des reproductions, qu’elle fait admirer. Des représentants retournent bientôt ses photographies dans tous les coins gras du local
SÉQUENCE 5- INT. JOUR
Intérieur de l’ancienne boucherie aménagée en salle d’exposition.
CARLOS
Mesdames, Monsieur, nous voici tous en Mission d’Art, chargés…
JEANNE
...et très éméchés…
CARLOS lui jette un regard terrible
...chargés de faire luire en cette basse bourgade les Arts et leurs supports. La tâche sera malaisée, car nul ici à Fort-Saint-Jacques , ne voit l’intérêt d’acquérir un flacon de parfum, une clarinette miniature, que sais-je ; il faudra conquérir les populations.
PANORAMIQUE DR. G. sur la boutique
CARLOS
Répartissons les tâches : les Hintzelstein, ou aubergistes, fournissent lessive, peintures, brosses et seaux.
SOPHIE
Et les pinceaux…
CARLOS lui lance aussi un regard terrible.
2. INT. JOUR
CARLOS s’empare du meilleur pinceau, de la plus large cuvette ; on voit les autres, et spédialement PASCAL, se contenter de rogatons avcc des mines de dépit.
3. P. E.
Musique.
Tout le monde au boulot, gueulantes devinées de CARLOS en train de morigéner tout le monde, il n’y a que lui visiblement qui saurait bien mieux faire que tous les autres.
4. P. R. sur PASCAL
C O LL I GN ON
B L A T T E S , B L A T T E S
LES FILMS DE MERDE
PITCH
Deux couples rivaux aménagent une ancienne boucherie en lieu de vente pour travaux de peinture sur soie. L’ambiance tendue, l’isolation du lieu choisi, la sottise humaine généralisée, le manque de motivation, présentent une image déprimante de toute entreprise humaine.
THÈME
Tout est vain, le monde est con, toute entreprise est vouée à l’échec, se lamenter est le but ultime.
LE HÉROS
1.QUI EST-IL ?
Un homme de 48 ans, professeur profondément pessimiste, dont le seul but est de caricaturer tous ceux qu’il voit. Il déteste toute action et cultive l’inaction, l’imagination languissante.
2. QUE FAIT-IL ?
Il accompagne sa femme et l’amie de celle-ci dans une tentative de se faire reconnaître dans leur activité artisanale. Ses cours n’interviennent pas ici.
3. D’OÙ VIENT-IL ?
De Bordeaux, à 100km. Son activité consiste à transformer ses cours en perpétuel ricanement. Il n’est venu que pour suivre mollement le projet de sa femme, sans s’impliquer
réellement, car il ne croit à rien, sauf au caractère victimaire de sa précieuse et inutile personne.
4.OÙ VA-T-IL ?
Absolument nulle part, où le vent le pousse. Sa femme et l’amie de cette dernière lui demandent de transporter su matériel à Fort-St-Jacques, alors il le fait.
5. POURQUOI Y VA-T-IL ?
Parce que sa femme Arielle le lui a demandé, sinon il s’en fiche. Il pense que les femmes ont toujours raison, ce qui est une excellente raison pour ne jamais prendre la moindre initiative. Simplement, par la seule force de son observation ironique et morne, il créera des mots et des images à peine moins chiantes que la réalité, qui n’est qu’une toile de fond de sa douleur mineure et narcissique.
(« ETC. » : rien de plus. Un vrai sous-Houellebecq, une loque informe et vénéneuse)
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CARTON
Tout être qui se sent persécuté
est réellement persécuté.
MONTHERLANT
Le cardinal d’Espagne
SEQUENCE 1
INT. JOUR
OFF
Les blattes sont de petits insectes dégueulasses,
hétérométaboles et dictyoptères. Ils trottent dans
les lieux obscurs en faisant cra-cra-cra
et se nourrissent de débris variés/
1. GP Blattes : longues et brunes
au plafond
2. GP - sur les murs
3. 4. 5. GP Blattes longues et brunes en positions différentes.
6. INSERT : une ampoules à cent watts, éblouissante
7. GP : Blattes aplaties éblouies qui font les mortes
8. GP : Certaines contractent d’un coup leurs six pattes sur le ventre
et se laissent tomber au sol.
9. GP : Blattent qui filent sur le carrelage.
10. GP : Pantoufle rageuse écrasant les blattes
à même les parois et le plafond nus.
11. Quatre pantoufles enfilées par des mains
12. GP Blattes qui tombent.
OFF
« La mort la plus simple pour l’organisme le plus simple.
Un petit rectangle simple, qui craque à peine.
13. GP Cadavre écrasé contre le mur, raclé pour le faire tomber.
BRUITAGE TRES ACCENTUÉ PDT TOUTE LA SÉQUENCE
14. PLONG. SUR LES QUATRE BABOUCHES
15. PM Carnage sur le carrelage, en perspective cavalière.
16. GP sur les rescapées se cachant dans des fissures.
17. PA. Deux humains, mâle et femelle au crâne rasé, roux pour la femme.
Baladeurs sur les oreilles.
La femme en tablier bleu.
Ils comptent les cadavres en se courbant.
PASCAL SCHONGAUER dit PAPIER
Vingt-cinq.
MARQUISE DE SCHONGAU
Quarante-quatre.
PASCAL
Soixante-neuf. Quelle coïncidence.
MARQUISE
Va chercher un balai.
TRAV. AV. PASCAL de dos cherche un balai dans un placard très sale
ZOOM AV. Toiles d’araignées, très luisantes.
TRAV. AR. PASCAL charrie les blattes sur la pelle.
18. GP visage de la Marquise, surimpression STOCK : pelleteuses charriant des cadavres à
Auschwitz.
19. PA Ils enlèvent leurs écouteurs et coupent la musique.
MARQUISE JEANNE
C’était quoi pour toi ?
Elle écarte les bords d’un grand sac en plastique.
PASCAL
Schubert comme d’habitude.
COLLIGNON «BLATTES, BLATTES » SCÉNARIO 6
PASCAL PAPIER est tout pâle. Il jette les cadavres à la pelle dans le grand sac.
SEQUENCE 2
EXT. JOUR
Dans une voiture. PASCAL et MARQUISE JEANNE de SCHONGAU côte à côte
MARQUISE JEANNE
Maintenant on peut y aller.
PASCAL
...avec le kilo de poudre qu’on leur a foutu dans le coquetier, les blattes…
MARQUISE JEANNE
...elles peuvent crever.
Un temps.
Tu n’as pas oublié les tréteaux ?
PASCAL
Pas de danger.
JEANNE
Tu les as bien calées, mes toiles ? Ventre à ventre, ou dos à dos.
PASCAL, bat :
Tout baigne…
SÉQUENCE 3
EXT. JOUR
1. PG Voiture, de dos, débouchant dans une rue étroite.
2. CONT.PLONG. Panonceau défraîchi «BOUCHERIE »
3. PM PASCAL et JEANNE, écouteurs à l’oreille, font plusieurs aller-retours de la voiture à la boucherie, transportant des paquets encombrants (tréteaux, toiles par deux).
4. GP sur des barreaux de vitrine, verticaux, très serrés, à l’ancienne.
5. TGP Intérieur des cannelures des barreaux, maculé de taches brunes indélébiles.
6. GP Visage de PASCAL reniflant.
PASCAL
Ça sent le vieux sang. Séché.
Il mâche dans le vide bouche ouverte, d’un air dégoûté.
7. PG TRAV. GD Arrière-boutique.
TRAV .AV. Cuisine en boyau.
GP Un réchaud vétuste, un tuyau à gaz à date périmée.
8. PM JEANNE de dos ouvrant une fenêtre crasseuse qui donne sur une ruelle à ras de caniveau, eaux sales. TRAV. BH Une fenêtre juste en face, rideaux bonne femme et cul de télévision 1992.
9. P.G. PASCAL Schongauer et JEANNE Schongau installant toue sorte de paquets, tréteaux, tableaux, premiers rangements et dispositions.
OFF :
« ...soit pour les époux Schongau-Schongauer en location indivise un bâtiment sis six de la rue des Puniques, sur trois niveaux dont une boucherie désaffectée au rez-de-chaussée plus arrière-boutique attenante, chambre et dégagement plus point d’eau et toilette au premier étage plus chambres et toilettes au deuxième et combles, le tout constituant immeuble de rapport ou hôtel déclassé pour insalubrité (arrêté préfectoral du 20 juillet 1983), chaque chambre pourvue d’une literie, d’un mobilier d’hôtellerie adéquat et de tous tuyaux, robinetterie, lavabo et bidet en bon état de marche, à charge éventuelle pour les époux Schongau-Schongauer de réaménager à leur gré exclusif tout ou partie, intérieur ou extérieur, du bâtiment décrit susdit... »
10. P.E. PASCAL et JEANNE remettant une forte liasse de billets entre les mains de LA FEMME AUBERGISTE (MAUD)
11. P.E. PASCAL et JEANNE main dans la main, écouteurs pendants, s’engage dans le grand raide escalier de bois noir qui monte à l’étage.
INT. JOUR.
12. P.M. PASCAL SCHONGAUER s’arrête net :
« Douze vingtièmes de ma vie ; quatre ans par marche : 48 ans sur 80 ».
Ils se tiennent par les épaules.
13. P.M. Ils débouchent sur le grand palier qui comprend : une pierre à eau, un coin douche. Armoires, coffres, poussière.
14. P.M. TRAV. AV.
Couloir tordu ; au bout à droite une chambre en état d’abandon ;
LA FEMME AUBERGISTE (MAUD) par derrière. L’HOMME AUBERGISTE. Tous deux très corpulents, l’homme très grand, de type alsacien.
L’HOMME, qui les a suivis :
« C’est la plus belle ».
PASCAL
« Sûr ! »
15. PANORAMIQUE GD
Une cheminée sous la poussière gluante. Une table de nuit. Lit. Couvre-pied lourd.
16. P.M. JEANNE se tord les pieds sur les tomettes.
17.G.P. PASCAL SCHONGAUER : son visage exprime une grande satisfaction. Il se frotte les mains.
18. L’AUBERGISTE MÂLE
« Ça donne juste au-dessus de la porte aux bouchers. Ne vous penchez pas trop » (doctoral) Quatre mètres cinquante.
L’AUBERGISTE FEMELLE (MAUD)
« C’est mon mari qui a installé la pompe. Et des toilettes dans le boyau. V’z’avez pas vu les toilettes ?
JEANNE SCHONGAU
« Il y a des blattes.
MAUD
« Vos aurez du produit.
Les deux couples se comparent avec intérêt.
MÂLE
« On vous fait un prix parce que c’est insalubre.
FEMELLE
« Il faudrait des frais énormes.
PASCAL, s’esclaffant niaisement :
« Ha ha ! « Énormes ! »
JEANNE le fixe férocement. Il se tait.
19. P.M. Int. Jour
Vue sur une chambre désaffectée, volets mi-clos, matelas roulés.
AUBERGISTE FEMELLE, soufflant :
Juste au-dessus vous avez une autre chambre, qu’est pas mal non plus.
AUBERGISTE MÂLE
Bon, moi je r’tourne bricoler.
20. P.M. AUBERGISTE FEMELLE, guide les locataires
Là c’est les cabinets. (Elle tire la chasse)
Surtout vous n’en mettez pas trop. Pour le produit, vous passerez le prendre. On mange à sept heures.
21. Travelling avant dans l’escalier
PASCAL
Qu’est-ce qu’il y a sous ç’t’escalier ?
AUBERGISTE FEMELLE
Ben c’est un puits. (Elle dégage, en tirant une planche, un puits intérieur fermé par une grille)
À la fin de la guerre les Résistants ils ont balancé des miliciens. Alors ça remonte ! - moi je suis là que depuis trois ans.
SÉQUENCE 3
P.E. INT. JOUR
1. Intérieur d’auberge campagnarde. Six tables serrées, nappes « bonne femme ».
Représentants, camionneurs. Seule à une table, imposante, la MARQUISE DE BOUF ET BOILNŒUD. Grande, forte, blonde, 50 ans, se croit bon chic bon genre.
JEANNE SCHONGAU, de dos, attendant qu’on la serve.
PANORAMIQUE BAS DROIT vers HAUT GAUCHE
PASCAL sort des toilettes en haut de l’escalier en se rebraguettant et redescend s’assoir en face de JEANNE SCHONGAU.
OFF
JEANNE, à PASCAL
Je ne veux pas manger dans ce trou à rat.
PASCAL
C’est pour se faire bien voir.
JEANNE, sifflante :
Savonnette...
2. P.E.
L’AUBERGISTE FEMELLE (« MAUD »)
Vous prendrez bien l’apéro ? (elle fait signe à SA FILLE) Trois Marie Brizard !
LA FILLE s’éloigne, escortée par un PETIT AMI soumis aux cheveux d’oreilles d’épagneul.
« MAUD »
Il n’y a pas de clients ici. C’est pas des gens intéressants. Et puis avec tous ces putain d’impôts…
La MARQUISE DE BOUF ET BOILNŒUD tique…
3. INT. JOUR P.M.
LE PETIT AMI
Vous voulez de la musique ?
Il met en route un appareil à musique, constitué d’un corps de buffet et d’un cercle de métal blanc, sous vitre.Ce cercle présente une infinité d’aspérités correspondant au mécanisme d’une boîte à musique.
LE PETIT AMI glisse une pièce de cinq francs Napoléon III dans la fente, l’appareil se met en marche sous les yeux attentifs et dans le silence de tous ; il joue La marche des petits Pierrots.
SÉQUENCE 4
1. CUT – P. M.
CARLOS, SOPHIE LA BLATTE
Couples de touristes, lui : corpulent, type latino-américain, barbe de zapatero. Bagues, lunettes noires de comédie.
SOPHIE LA BLATTE en robe légère et très démodée.
CARLOS, sur le pas de la porte, écoutant :
C’est vraiment chouette !
SOPHIE, voix très aiguë :
Patronne ! Deux menus très simples…
MAUD
Ici Madame, y a que du très simple.
SOPHIE & CARLOS s’installent au milieu d’une attention respectueuse. Ils sont disposés de face avec PASCAL et JEANNE , légèrement décalés.
Musique. On voit CARLOS s’enfiler trois ou quatre apéritifs, faire rigoler toute l’assistance avec de grands gestes ;
2. GP visage de SOPHIE
3. P.M.
PASCAL SCHÖNGAUER - JEANNE SCHÖNGAU, CARLOS ET SOPHIE LA BLATTE parlent ensemble avec animation, la glace est rompue.
4. P.M.
JEANNE SCHÖNGAU, naïve, à CARLOS
Ah ? Ils ont aussi des néonazis en Norvège ?
SOPHIE LA BLATTE À JEANNE, pour changer de conversation :
Je fais de la peinture sur soie : signes du zodiaque, symboles maçonniques…
PASCAL, coupant maladroitement la parole à JEANNE /
Ma femme attend cent quatre-vingt six échantillons de parfums, par le prochain car de Bajac. Et sur les murs, nous exposerons des instruments en miniature.
JEANNE, qui peut enfin placer un mot :
...de musique.
CARLOS parle bas à l’oreille de PASCAL en étouffant un fou-rire gras.
Bitte…
PASCAL rit sans façons.
6. G.P.
CARLOS
Je suis un envoyé d’Oliver Blatt Blattstein - ne me regardez pas avec ces yeux-là.
7 P.M.
PASCAL se ressaisit.
Une crème brûlée !
CARLOS
Nous allons exposer ensemble tous les quatre.
JEANNE,à mi-voix :
Pas de police surtout , pas de police !
CARLOS
Patronne ! Trois cognacs !
JEANNE
Quatre !
CARLOS, à mi-voix
Tant que je suis là, rien à craindre.
SOPHIE tire d’un sac à main des reproductions, qu’elle fait admirer. Des représentants retournent bientôt ses photographies dans tous les coins gras du local
SÉQUENCE 5- INT. JOUR
Intérieur de l’ancienne boucherie aménagée en salle d’exposition.
CARLOS
Mesdames, Monsieur, nous voici tous en Mission d’Art, chargés…
JEANNE
...et très éméchés…
CARLOS lui jette un regard terrible
...chargés de faire luire en cette basse bourgade les Arts et leurs supports. La tâche sera malaisée, car nul ici à Fort-Saint-Jacques , ne voit l’intérêt d’acquérir un flacon de parfum, une clarinette miniature, que sais-je ; il faudra conquérir les populations.
PANORAMIQUE DR. G. sur la boutique
CARLOS
Répartissons les tâches : les Hintzelstein, ou aubergistes, fournissent lessive, peintures, brosses et seaux.
SOPHIE
Et les pinceaux…
CARLOS lui lance aussi un regard terrible.
2. INT. JOUR
CARLOS s’empare du meilleur pinceau, de la plus large cuvette ; on voit les autres, et spédialement PASCAL, se contenter de rogatons avcc des mines de dépit.
3. P. E.
Musique.
Tout le monde au boulot, gueulantes devinées de CARLOS en train de morigéner tout le monde, il n’y a que lui visiblement qui saurait bien mieux faire que tous les autres.
4. P. R. sur PASCAL
C O LL I GN ON
B L A T T E S , B L A T T E S
LES FILMS DE MERDE
PITCH
Deux couples rivaux aménagent une ancienne boucherie en lieu de vente pour travaux de peinture sur soie. L’ambiance tendue, l’isolation du lieu choisi, la sottise humaine généralisée, le manque de motivation, présentent une image déprimante de toute entreprise humaine.
THÈME
Tout est vain, le monde est con, toute entreprise est vouée à l’échec, se lamenter est le but ultime.
LE HÉROS
1.QUI EST-IL ?
Un homme de 48 ans, professeur profondément pessimiste, dont le seul but est de caricaturer tous ceux qu’il voit. Il déteste toute action et cultive l’inaction, l’imagination languissante.
2. QUE FAIT-IL ?
Il accompagne sa femme et l’amie de celle-ci dans une tentative de se faire reconnaître dans leur activité artisanale. Ses cours n’interviennent pas ici.
3. D’OÙ VIENT-IL ?
De Bordeaux, à 100km. Son activité consiste à transformer ses cours en perpétuel ricanement. Il n’est venu que pour suivre mollement le projet de sa femme, sans s’impliquer
réellement, car il ne croit à rien, sauf au caractère victimaire de sa précieuse et inutile personne.
4.OÙ VA-T-IL ?
Absolument nulle part, où le vent le pousse. Sa femme et l’amie de cette dernière lui demandent de transporter su matériel à Fort-St-Jacques, alors il le fait.
5. POURQUOI Y VA-T-IL ?
Parce que sa femme Arielle le lui a demandé, sinon il s’en fiche. Il pense que les femmes ont toujours raison, ce qui est une excellente raison pour ne jamais prendre la moindre initiative. Simplement, par la seule force de son observation ironique et morne, il créera des mots et des images à peine moins chiantes que la réalité, qui n’est qu’une toile de fond de sa douleur mineure et narcissique.
(« ETC. » : rien de plus. Un vrai sous-Houellebecq, une loque informe et vénéneuse)
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CARTON
Tout être qui se sent persécuté
est réellement persécuté.
MONTHERLANT
Le cardinal d’Espagne
SEQUENCE 1
INT. JOUR
OFF
Les blattes sont de petits insectes dégueulasses,
hétérométaboles et dictyoptères. Ils trottent dans
les lieux obscurs en faisant cra-cra-cra
et se nourrissent de débris variés/
1. GP Blattes : longues et brunes
au plafond
2. GP - sur les murs
3. 4. 5. GP Blattes longues et brunes en positions différentes.
6. INSERT : une ampoules à cent watts, éblouissante
7. GP : Blattes aplaties éblouies qui font les mortes
8. GP : Certaines contractent d’un coup leurs six pattes sur le ventre
et se laissent tomber au sol.
9. GP : Blattent qui filent sur le carrelage.
10. GP : Pantoufle rageuse écrasant les blattes
à même les parois et le plafond nus.
11. Quatre pantoufles enfilées par des mains
12. GP Blattes qui tombent.
OFF
« La mort la plus simple pour l’organisme le plus simple.
Un petit rectangle simple, qui craque à peine.
13. GP Cadavre écrasé contre le mur, raclé pour le faire tomber.
BRUITAGE TRES ACCENTUÉ PDT TOUTE LA SÉQUENCE
14. PLONG. SUR LES QUATRE BABOUCHES
15. PM Carnage sur le carrelage, en perspective cavalière.
16. GP sur les rescapées se cachant dans des fissures.
17. PA. Deux humains, mâle et femelle au crâne rasé, roux pour la femme.
Baladeurs sur les oreilles.
La femme en tablier bleu.
Ils comptent les cadavres en se courbant.
PASCAL SCHONGAUER dit PAPIER
Vingt-cinq.
MARQUISE DE SCHONGAU
Quarante-quatre.
PASCAL
Soixante-neuf. Quelle coïncidence.
MARQUISE
Va chercher un balai.
TRAV. AV. PASCAL de dos cherche un balai dans un placard très sale
ZOOM AV. Toiles d’araignées, très luisantes.
TRAV. AR. PASCAL charrie les blattes sur la pelle.
18. GP visage de la Marquise, surimpression STOCK : pelleteuses charriant des cadavres à
Auschwitz.
19. PA Ils enlèvent leurs écouteurs et coupent la musique.
MARQUISE JEANNE
C’était quoi pour toi ?
Elle écarte les bords d’un grand sac en plastique.
PASCAL
Schubert comme d’habitude.
COLLIGNON «BLATTES, BLATTES » SCÉNARIO 6
PASCAL PAPIER est tout pâle. Il jette les cadavres à la pelle dans le grand sac.
SEQUENCE 2
EXT. JOUR
Dans une voiture. PASCAL et MARQUISE JEANNE de SCHONGAU côte à côte
MARQUISE JEANNE
Maintenant on peut y aller.
PASCAL
...avec le kilo de poudre qu’on leur a foutu dans le coquetier, les blattes…
MARQUISE JEANNE
...elles peuvent crever.
Un temps.
Tu n’as pas oublié les tréteaux ?
PASCAL
Pas de danger.
JEANNE
Tu les as bien calées, mes toiles ? Ventre à ventre, ou dos à dos.
PASCAL, bat :
Tout baigne…
SÉQUENCE 3
EXT. JOUR
1. PG Voiture, de dos, débouchant dans une rue étroite.
2. CONT.PLONG. Panonceau défraîchi «BOUCHERIE »
3. PM PASCAL et JEANNE, écouteurs à l’oreille, font plusieurs aller-retours de la voiture à la boucherie, transportant des paquets encombrants (tréteaux, toiles par deux).
4. GP sur des barreaux de vitrine, verticaux, très serrés, à l’ancienne.
5. TGP Intérieur des cannelures des barreaux, maculé de taches brunes indélébiles.
6. GP Visage de PASCAL reniflant.
PASCAL
Ça sent le vieux sang. Séché.
Il mâche dans le vide bouche ouverte, d’un air dégoûté.
7. PG TRAV. GD Arrière-boutique.
TRAV .AV. Cuisine en boyau.
GP Un réchaud vétuste, un tuyau à gaz à date périmée.
8. PM JEANNE de dos ouvrant une fenêtre crasseuse qui donne sur une ruelle à ras de caniveau, eaux sales. TRAV. BH Une fenêtre juste en face, rideaux bonne femme et cul de télévision 1992.
9. P.G. PASCAL Schongauer et JEANNE Schongau installant toue sorte de paquets, tréteaux, tableaux, premiers rangements et dispositions.
OFF :
« ...soit pour les époux Schongau-Schongauer en location indivise un bâtiment sis six de la rue des Puniques, sur trois niveaux dont une boucherie désaffectée au rez-de-chaussée plus arrière-boutique attenante, chambre et dégagement plus point d’eau et toilette au premier étage plus chambres et toilettes au deuxième et combles, le tout constituant immeuble de rapport ou hôtel déclassé pour insalubrité (arrêté préfectoral du 20 juillet 1983), chaque chambre pourvue d’une literie, d’un mobilier d’hôtellerie adéquat et de tous tuyaux, robinetterie, lavabo et bidet en bon état de marche, à charge éventuelle pour les époux Schongau-Schongauer de réaménager à leur gré exclusif tout ou partie, intérieur ou extérieur, du bâtiment décrit susdit... »
10. P.E. PASCAL et JEANNE remettant une forte liasse de billets entre les mains de LA FEMME AUBERGISTE (MAUD)
11. P.E. PASCAL et JEANNE main dans la main, écouteurs pendants, s’engage dans le grand raide escalier de bois noir qui monte à l’étage.
INT. JOUR.
12. P.M. PASCAL SCHONGAUER s’arrête net :
« Douze vingtièmes de ma vie ; quatre ans par marche : 48 ans sur 80 ».
Ils se tiennent par les épaules.
13. P.M. Ils débouchent sur le grand palier qui comprend : une pierre à eau, un coin douche. Armoires, coffres, poussière.
14. P.M. TRAV. AV.
Couloir tordu ; au bout à droite une chambre en état d’abandon ;
LA FEMME AUBERGISTE (MAUD) par derrière. L’HOMME AUBERGISTE. Tous deux très corpulents, l’homme très grand, de type alsacien.
L’HOMME, qui les a suivis :
« C’est la plus belle ».
PASCAL
« Sûr ! »
15. PANORAMIQUE GD
Une cheminée sous la poussière gluante. Une table de nuit. Lit. Couvre-pied lourd.
16. P.M. JEANNE se tord les pieds sur les tomettes.
17.G.P. PASCAL SCHONGAUER : son visage exprime une grande satisfaction. Il se frotte les mains.
18. L’AUBERGISTE MÂLE
« Ça donne juste au-dessus de la porte aux bouchers. Ne vous penchez pas trop » (doctoral) Quatre mètres cinquante.
L’AUBERGISTE FEMELLE (MAUD)
« C’est mon mari qui a installé la pompe. Et des toilettes dans le boyau. V’z’avez pas vu les toilettes ?
JEANNE SCHONGAU
« Il y a des blattes.
MAUD
« Vos aurez du produit.
Les deux couples se comparent avec intérêt.
MÂLE
« On vous fait un prix parce que c’est insalubre.
FEMELLE
« Il faudrait des frais énormes.
PASCAL, s’esclaffant niaisement :
« Ha ha ! « Énormes ! »
JEANNE le fixe férocement. Il se tait.
19. P.M. Int. Jour
Vue sur une chambre désaffectée, volets mi-clos, matelas roulés.
AUBERGISTE FEMELLE, soufflant :
Juste au-dessus vous avez une autre chambre, qu’est pas mal non plus.
AUBERGISTE MÂLE
Bon, moi je r’tourne bricoler.
20. P.M. AUBERGISTE FEMELLE, guide les locataires
Là c’est les cabinets. (Elle tire la chasse)
Surtout vous n’en mettez pas trop. Pour le produit, vous passerez le prendre. On mange à sept heures.
21. Travelling avant dans l’escalier
PASCAL
Qu’est-ce qu’il y a sous ç’t’escalier ?
AUBERGISTE FEMELLE
Ben c’est un puits. (Elle dégage, en tirant une planche, un puits intérieur fermé par une grille)
À la fin de la guerre les Résistants ils ont balancé des miliciens. Alors ça remonte ! - moi je suis là que depuis trois ans.
SÉQUENCE 3
P.E. INT. JOUR
1. Intérieur d’auberge campagnarde. Six tables serrées, nappes « bonne femme ».
Représentants, camionneurs. Seule à une table, imposante, la MARQUISE DE BOUF ET BOILNŒUD. Grande, forte, blonde, 50 ans, se croit bon chic bon genre.
JEANNE SCHONGAU, de dos, attendant qu’on la serve.
PANORAMIQUE BAS DROIT vers HAUT GAUCHE
PASCAL sort des toilettes en haut de l’escalier en se rebraguettant et redescend s’assoir en face de JEANNE SCHONGAU.
OFF
JEANNE, à PASCAL
Je ne veux pas manger dans ce trou à rat.
PASCAL
C’est pour se faire bien voir.
JEANNE, sifflante :
Savonnette...
2. P.E.
L’AUBERGISTE FEMELLE (« MAUD »)
Vous prendrez bien l’apéro ? (elle fait signe à SA FILLE) Trois Marie Brizard !
LA FILLE s’éloigne, escortée par un PETIT AMI soumis aux cheveux d’oreilles d’épagneul.
« MAUD »
Il n’y a pas de clients ici. C’est pas des gens intéressants. Et puis avec tous ces putain d’impôts…
La MARQUISE DE BOUF ET BOILNŒUD tique…
3. INT. JOUR P.M.
LE PETIT AMI
Vous voulez de la musique ?
Il met en route un appareil à musique, constitué d’un corps de buffet et d’un cercle de métal blanc, sous vitre.Ce cercle présente une infinité d’aspérités correspondant au mécanisme d’une boîte à musique.
LE PETIT AMI glisse une pièce de cinq francs Napoléon III dans la fente, l’appareil se met en marche sous les yeux attentifs et dans le silence de tous ; il joue La marche des petits Pierrots.
SÉQUENCE 4
1. CUT – P. M.
CARLOS, SOPHIE LA BLATTE
Couples de touristes, lui : corpulent, type latino-américain, barbe de zapatero. Bagues, lunettes noires de comédie.
SOPHIE LA BLATTE en robe légère et très démodée.
CARLOS, sur le pas de la porte, écoutant :
C’est vraiment chouette !
SOPHIE, voix très aiguë :
Patronne ! Deux menus très simples…
MAUD
Ici Madame, y a que du très simple.
SOPHIE & CARLOS s’installent au milieu d’une attention respectueuse. Ils sont disposés de face avec PASCAL et JEANNE , légèrement décalés.
Musique. On voit CARLOS s’enfiler trois ou quatre apéritifs, faire rigoler toute l’assistance avec de grands gestes ;
2. GP visage de SOPHIE
3. P.M.
PASCAL SCHÖNGAUER - JEANNE SCHÖNGAU, CARLOS ET SOPHIE LA BLATTE parlent ensemble avec animation, la glace est rompue.
4. P.M.
JEANNE SCHÖNGAU, naïve, à CARLOS
Ah ? Ils ont aussi des néonazis en Norvège ?
SOPHIE LA BLATTE À JEANNE, pour changer de conversation :
Je fais de la peinture sur soie : signes du zodiaque, symboles maçonniques…
PASCAL, coupant maladroitement la parole à JEANNE /
Ma femme attent cent quatre-vingt six échantillons de parfums, par le prochain car de Bajac. Et sur les murs, nous exposerons des instruments en miniature.
JEANNE, qui peut enfin placer un mot :
...de musique.
CARLOS parle bas à l’oreille de PASCAL en étouffant un fou-rire gras.
Bitte…
PASCAL rit sans façons.
6. G.P.
CARLOS
Je suis un envoyé d’Oliver Blatt Blattstein - ne me regardez pas avec ces yeux-là.
7 P.M.
PASCAL se ressaisit.
Une crème brûlée !
CARLOS
Nous allons exposer ensemble tous les quatre.
JEANNE,à mi-voix :
Pas de police surtout , pas de police !
CARLOS
Patronne ! Trois cognacs !
JEANNE
Quatre !
CARLOS, à mi-voix
Tant que je suis là, rien à craindre.
SOPHIE tire d’un sac à main des reproductions, qu’elle fait admirer. Des représentants retournent bientôt ses photographies dans tous les coins gras du local
SÉQUENCE 5- INT. JOUR
Intérieur de l’ancienne boucherie aménagée en salle d’exposition.
CARLOS
Mesdames, Monsieur, nous voici tous en Mission d’Art, chargés…
JEANNE
...et très éméchés…
CARLOS lui jette un regard terrible
...chargés de faire luire en cette basse bourgade les Arts et leurs supports. La tâche sera malaisée, car nul ici à Fort-Saint-Jacques , ne voit l’intérêt d’acquérir un flacon de parfum, une clarinette miniature, que sais-je ; il faudra conquérir les populations.
PANORAMIQUE DR. G. sur la boutique
CARLOS
Répartissons les tâches : les Hintzelstein, ou aubergistes, fournissent lessive, peintures, brosses et seaux.
SOPHIE
Et les pinceaux…
CARLOS lui lance aussi un regard terrible.
2. INT. JOUR
CARLOS s’empare du meilleur pinceau, de la plus large cuvette ; on voit les autres, et spédialement PASCAL, se contenter de rogatons avcc des mines de dépit.
3. P. E.
Musique.
Tout le monde au boulot, gueulantes devinées de CARLOS en train de morigéner tout le monde, il n’y a que lui visiblement qui saurait bien mieux faire que tous les autres.
4. P. R. sur PASCAL