Proullaud296

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

SINGE VERT N° 7 - 8 - 9 - 10

COLLIGNON LE SINGE VERT – MON GROS RAT 7 - 38

 

 

 

 

"Der Grüne Affe" présente aujourd'hui à ses lecteurs le texte d'une nouvelle de Bernard Collignon. Il ne parle pas du tout de la situation au Kosovo.

 

MON GROS RAT

 

 

Le récit commence dans la plus pure abjection ; le personnage est un rat, avec sa casquette en arrière. Il possède un museau long, épais, comme un radis noir ; avec des moustaches dégoulinantes de débris de mouches. Face à lui, une poubelle new style, façon bouche de métro Guimard. Verte. Le couvercle bâille et répand des odeurs. Elle contient des déchets radioactifs de type foudroyant. Le rat fait le tour de la poubelle, qui suinte vachement sur le ciment. Il agite son gros museau de radis noir. La salive s'accumule entre ses dents. Ses petits yeux verts (et non rouges) s'agitent, le mouvement de ses pattes devient turbulent, son poil exprime le désespoir et l'envie. Il sent toutes sortes de bons parfums : la tomate velue de moisissure, le yaourt pourri (mêlé de Solexine), la banane fermentée, ce qui est banal.

Mais aussi : le ragoût de dentiste (avez-vous remarqué l'odeur de clou de girofle dont regorge l'amalgame ?), le missel poivré (à la vulve de bigote), divers anathèmes, et : la carotte, seule odeur fraîche. Il monte sur ses pattes arrière, gratte les cannelures de ses griffes sales, non préhensiles toutefois. Il sautille en couinant, opère un mouvement de recul, refonce pour percer la muraille de plastique (la matière dont sont faites les poubelles devient de plus en plus légère et dure). Le couvercle en équilibre bascule, tournant sur son umbo (bosse creuse du petit bouclier romain, sous laquelle se resserre le poing résolu du légionnaire). Dans le fond renversé du couvercle, Notre Rat découvre un débris de tissu qu'il avale goulûment.

Et c'est là que la dimension S.F. de l'écrit se révèle, car il s'agit d'un tissu hallucinogène, fade. Notre Rat médite. Il n'est absolument pas indispensable qu'il porte les traits de tel homme politique. Il veut changer sinon la France, ou quelque pays qui plaira, mais son propre lui. C'est sa première méditation : "Mon poil est trop rêche". Deuxième méditation : "Je suis seul. Personne ne s'intéresse à moi ni à mon gros museau velu ("G.M.V.") Je n'ai à offrir que mes couinements, qui ne valent pas un bon hurlement de thriller. Même en sautant le long des cannelures, je ne pourrais atteindre la grosse hotte débordante et, paraît-il, radioactive, donc susceptible de développer des mutations." Va-t-il céder à la tentation de la prière ?

Suspens insoute(...). Déjà qu'il se plaint, ce rat - de quoi de quoi ? n'est-il pas l'animal le plus répugnant de la cré - mais A quoi pense-t-il encore, le rat ? Rien de sérieux, Monsieur Barthes : il compte dans sa tête des pommes de terre. Pendant sa dernière séance de psychanalyse, il lui a été LE SINGE VERT – MON GROS RAT 7 - 39

 

 

 

 

rigoureusement impossible de parler d'autre chose que de table de multiplication. Et les unités, c'étaient des pommes de terre. Il se mord la queue. Lui trouve un goût de sel. Remâche son tissu fade et irradié. Pense au voyage. Interplanétaire ? Une poubelle dans l'espace ! Que de grands titres à travers le monde ! Ses glandes salivaires sécrètent avec attendrissement. Il serait un héros. On le récupérerait au bout d'un parachute, balançant sous la toile sa grosse queue annelée. Il s'injecte alors son propre venin, par morsure caudale. Sa pensée devient incohérente, bourrée de moment présent, tout à fait semblable à celle d'un rat qui ne doit avoir pour projet que de survivre et de se nourrir, Alzheimer.

Il ne faut pas devenir un rat intellectuel, HEIN, pas du tout un rat intellectuel. ...Que va trouver Notre Rat dans la poubelle ? Sous les déchets radioactifs, des tas imprécis, des rangées de boutons qu'il poussera de son gros nez avide, insulte à tout cerveau normalement constitué. Comment est-il parvenu à escalader les parois de dur plastique ? (c'est un flash-back) : il a poussé très fort sur ses petites pattes (celles du rat sont véritablement disproportionnées par rapport à la masse de son abdomen) le couvercle de la poubelle, en a introduit le rebord sous la vaste cuve, et il a fait basculer celle-ci. Pendant ce temps, sous le kiosque de St-Affrique, la chorale de Millau s'époumone. trou,troupeau,femme

C'est la nuit. Les choristes ne se doutent pas qu'à dix pas d'eux (redoutable cacophonie !) un rat soulève par effet de levier, principe de toute technique, le monde ambulant d'une poubelle ronde. Le rat ne s'est pas livré pas à ces réflexions métaphysiques d'un autre âge - rien qui se dépasse comme la métaphysique. Son but : exploration du monde immense des débris, afin d'y repérer tels ou telles substances hallucinogènes, carburants, mécanismes ; il pressent en effet dans sa science infuse de rat, dans sa confusion, que ce cylindre ouvert pourrait fonctionner comme une mécanique céleste. Qui cela peut-il bien intéresser ? assurément pas l'amateur sérieux. Mais le rat ne pense qu'à soi.

Il veut échapper aux couloirs souterrains. Non seulement il en rêve dans sa nuit de rat, mais à peine éveillé, il lui faut ramper dans les décombres pour subvenir à ses besoins. Une poubelle se présentait, vaste, abondamment pourvue en vivres, et il eût dû chipoter ? Branchant un navet sur une carotte, il déclencha la mise à feu. C'était bien là une façon méprisablement agricole de se mettre sur orbite. Bien démodée aussi étaient les procédures ultra-semblables aux mécanismes de l'aviation supersonique. A hurler de rire se fussent présentées telles formules, tels mantras, (le fameux Biloquèicheune ! de Dune, qui le hantait). ...Mantra ou pas, Notre Rat se débrouille avec sa capsule, dont le couvercle, miracle ! s'est réassujetti de la façon suivante : supposons que le couvercle soit relié au corps cylindrique par une ficelle, et que les turbulences du décollage aient instauré un mouvement circulaire désordonné permettant au couvercle... - eh bien ! Notre Rat n'en subit pas moins le mal de mer, son habitacle encombré de trognons tournant sur lui-même à des

LE SINGE VERT – MON GROS RAT 7 - 40

 

 

 

altitudes insoupçonnables. Jamais tel vent n'avait soufflé sur St-Affrique. En bas, la civilisation campagnarde augustéenne poursuit son inlassable déroulement. Le rat ne pense qu'à sa nausée, quelque agaçant que doive être ce vide pour tout lecteur soucieux de lutter contre le fascisme. Les fascistes sont des rats. De ses dents acérées, il perce un trou dans le plastique. Ca tangue, ça roule (deux mouvements que l'on confond) puis tout file droit, puis, les trous d'air provoquent tels effondrements qui projettent les passagers au plafond dans les meilleurs charters Paris-Athènes, le rat ne veut plus que dormir : le sommeil est le meilleur moyen d'engranger les informations de la journée afin de les répartir dans les casiers à fantasmes.

Moins on en écrit, mieux cela vaut : Notre Rat parvient donc à proximité de la lune. Cela se reconnaît au drapeau américain dûment immobile malgré la vitesse de rotation de notre satellite. Nous vous épargnons les comparaisons enfantines de la lune avec un gigantesque fromage de Hollande, qui eût fait saliver Notre Rat. Que voir sur la lune ? des caillasses... un volcan en activité comme chez Jules Verne, depuis longtemps voué aux gémonies. Une civilisation de petits hommes verts, avec la mer, une atmosphère que des courants magnétiques auraient concentré sur la face invisible. Notre Rat pourrait, muni d'une lunette d'approche, scruter "la surface de notre satellite" (je cite) et consigner ses notes sur la peau de la banane.

Il ressemblerait alors exactement à l'homme, à l'odeur près, quoique mon ignorance crasseuse me fasse soupçonner (à tort, je n'en doute pas) quelque forte odeur de négligé chez les astronautes au long cours. Autour de la lune il aperçoit, le rat, ce que chacun apercevrait s'il examinait sa surface à travers des trous qu'il aurait rongés par curiosité (les rats sont des animaux extrêmement curieux). J'ignore si la S. F. en est encore à se préoccuper de quelque vraisemblance technique que ce soit. Si j'en croisTénèbres il semblerait qu'elle ait désormais recours à des forces occultes. Aussi le rat vit des courants magnétiques, une mystérieuse lumière mettons pourpre, une formule mathématique longtemps cherchée tracée dans le sable, une aurore boréale sélénite, et la petite culotte de Dracula : pourquoi vouloir chercher l'originalité à tout prix ?

Il existe des diamants dont la force de réfraction, ou de réfringence, ou prismatique, ou ax + b, permet de nourrir le corps, de transmigrer, d'opérer des greffes de cerveau, de devenir invisible, d'atteindre Dieu, de se torcher de la main gauche même droitier, ou d'être reçu dans les dix premiers à Polytechnique. Pourquoi ne pas faire trouver à Notre Rat un spécimen de cette précieuse production minérale ? Qui plus est, nous le lui ferions découvrir dans la poubelle, après transmutation due à la dépressurisation (le rat résisterait à toute transformation, voire à la mort, en raison de la radioactivité du contenu de la poubelle). Ce qui prouverait d'une part que l'on ne trouve de diamant qu'à proximité de chez soi sans qu'il soit besoin de voyager, d'autre part que tout de même, il faut se transformer l'âme afin de récolter les précieuses concrétions étincelantes... qui a dit que les romans de Science-Fiction n'étaient qu'un bric-à-brac simpliste ? parce que voyez-vous,

LE SINGE VERT – MON GROS RAT 7 - 41

 

 

 

 

j'avais comme première idée de faire traverser à notre poubellonaute une queue de diamants intersidérale issue de quelque lointaine explosion, qui serait en forme de queue de rat (mais je gâche le métier), d'où s'ensuivrait maint riche développement symbolique. Et je vous en épargne. Le rat rongerait des diamants, s'appellerait Jeanmaire, se casserait une dent sur le devant, conclurait que rien ne peut le nourrir, finirait par rédiger une étude sur les reflets, les eaux, les reliefs intérieurs de ces concrétions carboniques, il deviendrait un rival de Caillois sur le plan littéraire, de van Cleef et Arpels sur le plan de la taille : rien de plus dur que ces dents de rongeur...

Mais nous devons annoncer l'Apocalypse. La S. F. en effet se caractérise par son aspect prophétique et menaçant. On dit « comminatoire ». Souvent l'action se déroule à une époque abstraite. L'aventure du Rat ne peut se terminer bien, à moins d'annoncer à l'humanité en extase une immortalité relative et des pouvoirs génétiques à la Houellebecque. Il effectua donc une fausse manœuvre : débranchant Dieu sait quelle connexion de légumes, ou reliant telles racines incompatibles, en relation sans doute avec la production de méthane dégagé par les végétaux en décomposition. Il peut aussi avoir tourné sa casquette vers l'avant, ou toute autre invention. Et ne pensez pas qu'il suffise de dénoncer sa propre puérilité pour s'en tirer.

Il se rendit compte de sa bévue à une sécrétion nouvelle qui lui encombra soudain le cerveau droit. Mais au sein de ce gras liquide épandu subsistait la Pensée : « Quelle fausse manœuvre ai-je bien commise ? en quoi diffère-t-elle de la procédure d'enclenchement satellisateur ? et n'en vais-je pas moins à vau-l'eau ? la première fausse manœuvre ne fut-elle pas de naître?" Oui, je vous le demande ? Le dénouement approchait, quand il est si agréable de ne rien faire en contemplant le paysage interplanétaire à travers les trous déchiquetés d'une poubelle. Cette dernière accélérait, adoptant une trajectoire non plus orbitale, mais tangentielle.

L'absorption du yaourt. - Le yaourt est cette matière visqueuse qui sort du gland des hommes et qui dégouline sur les visages extatiques dans les truquages porno. Procédé très facile. Mais ici, le rat s'était trouvé à l'intérieur, tout soudain, d'une marée de yaourt. Il n'avait pas atteint la Voie Lactée, mais une contrée chimérique, bourrée à mort de maléfices : n'entendait-il pas dans son délire asphyxié les ricanements de la Princesse Bavmerda ? « Tu écris des conneries, disait la Voix. Tu penses des conneries. Tu n'as rien de drôle, rien de métaphysique, ni fasciste ni antifasciste, tu n'es rien. Qu'un rat. Qui n'encombre même pas l'atmosphère. Or je suis, moi, la Princesse de la création et de la destruction" ("Kali" ?). "Ma mission est de détruire tout ce qui ne signifie rien, tout ce qui ne signifie pas. De quoi es-tu le signe, ô rat ?"

Et yaourt de couler, de s'infiltrer, de s'immiscer. Il en mangeait, mais c'était inépuisable. Il éternuait dans le yaourt, incapable de mettre en batterie une riche défense reposant pourtant sur l'inextinguible symbolique du rat à travers les cultures : petit animal industrieux, très proche de l'humain, omnivore, logeant partout, destructeur des charognes, symbole de la Mort et sachant peut-LE SINGE VERT – MON GROS RAT 7 - 42

 

 

 

 

être qu'il va mourir. Il avalait bien, son aorte donnait des signes de faiblesse. "Je suis signe de faiblesse", pensa-t-il. Mais comment se faire entendre, lui tout noir, à travers tout ce blanc ? A la vanille, soit, mais blanc. Bavmerda poursuivait dans le yaourt soyeux, dans le bourdonnement interne provoqué par l'épanchement du fluide cérébral de sa victime : « Tu n'as pas d'argent. Tu ne représentes rien. Tu ne penses qu'à toi. Tu ne tiens pas compte des Aûûûûtres" - sa voix prenait à travers les espaces un vibrato exaspérant. Le rat pensait. Il soulèverait bien à la fin cette chape blanche de produit agricole (le lait).

Il finit par se dégager, pointa le museau, et tint le discours suivant : "O Bavmerda, "ou de quelque nom qu'il te plaise être appelée", je vais délivrer un message. " La Princesse se boucha les oreilles avec ses pattes d'insecte agricole. Le rat poursuivit donc : « Les Autres, dont tu te targues, ne sont pas tes amis ; tu prétends qu'il faut les aimer sans doute, et tenir compte d'eux. Mais s'ils sont emmerdants, tu les rejettes et tu les tues. Où est, toute puissante de mon cul, ta générosité ? » Le rat dérapait. Considérablement. Comment les insultes constitueraient-elles une base de négociations ? ce n'était pas ainsi, assurément, qu'on pouvait s'adresser à la Princesse Bavmerda. Il attaqua la reine. Il sentit sous ses dents acérées craquer la carapace de chitine de la reine insectuaire, mais par-dessous, ut fit saepe, "comme il arrive souvent", le goût était dégueulasse.

Il recracha, et forma la constellation de la Bave Mort d'Asthme, par moins 25 de déclinaison à 47°28, à 1h 22. « Comment puis-je » pensa-t-il, « me faire accepter par le monde des spirites néofascistes dénonçant le fascisme ? » Il prononça la formule "abraxas tsé-tsé", mais les mouches ne tombaient pas, il se sentait environné de tout un essaim piquetant de mouchettes blanches extrêmement insinuantes. Plus il se grattait, plus elles pénétraient les narines ramifiées de son museau sensible. De la visière de sa casquette, dont il avait oublié l'usage jusque-là, il les écarta, et mourut, donc ne mourut pas, et repartit pour de nouvelles aventures : il fut une fois donc un rat, engraissé de poussières astrales, qui, luminescent et les poils du museau aimantés, tomba en arrêt érectif devant une poubelle fendue du haut en bas par un rayonnement jaune very mysterious....

Chute : le rat tomba.

 

BERNARD COLLIGNON

LE SINGE VERT NUMERO HUIT « DE L'ARIEGE ET DE L'AUDE » 8 - 43

 

 

J'ai pris la route.

Je n'ai pas claqué la porte.

Je n'ai pas brûlé mes vaisseaux.

Je suis resté fonctionnaire.

... La rentrée : telle date, telle heure. Ceux qui se révoltent ? ...aucun mérite... La révolte leur est tombé dessus. Comme ça. Juste les rails à suivre. Tu parles d'un mérite. Pas de quoi rouler des mécaniques. Pour moi pas de pistes, pas de gros cube. Pas d'Atlantique Nord et Sud-Ouest sur je ne sais quel rafiot qui porte le nom d'un sauciflard. J'ai mes petits pieds tout seuls, mon petit 43 cm3 , pantoufle au cœur, et en avant ! On a notre fierté, nous autres, les cloportes. Pas de raison. Tu ne peux plus faire un pas à c't'heure sans qu'une armada de chpétsialistes vienne t'accabler le nœud de leur catalogue de semelles, de sac-z-àdos, de raquettes à neige et de 6 cylindres en V, et que je te prépare pendant six mois et que je m'équipe au quart de poil - merde ! Je pars en vacances sur ma petite pétoire, je ne suis pas en train de monter un entreprise industrielle ! ...chier ! bientôt un spécialiste de la jambe gauche, je te jure, ou de l'index tordu, qui nous interdiront de lever la cuisse ou le doigt sans avoir lu leurs brochures de spécialistes...

Pour toucher ta bille en quoi que ce soit maintenant, bourse, chanson, poésie, peinture ou ce qu'il en reste, il te faut carrément la mentalité « chevalier d'industrie » avec conseiller technique, conseiller fiscal, conseiller en communication... Après ça, t'iras vachement croire en tous ces petits merdeux style Pagny qui viennent gueuler leur solitude et leur mal de vivre, arrête ! y a ton imprésario qui te compte les millions, pleurons, pleurez ! Sans oublier les ceusses qui s'en sont sortis par la force de la volonté - ah ! "Ma Volonté" ! - ignorant, mais alors ignorant papalement, absolument, que la volonté est une grâce – pour l'athée, un hasard. Une brusque décharge de je ne sais quelle sécrétion dans je ne sais quelle hypophyse, ou je suis tombé dedans quand j'étais tout petit, est-ce que je sais...

Tel infirme moteur, tel sidéen, qui viennent vous clamer dans les badigoinces : "Moi je m'en suis sorti ! pourquoi pas vous ! " Alors moi, le pauvre con qui ne s'en est pas sorti, je suis quoi là-dedans ? le gros minable ? la dernière des lavettes ? faut que je me flingue ? Moi je n'ai jamais supporté les champions du 400 mètres qui se paient la tête des culs-de-jatte. Même quand ils sont culs-de-jatte eux-mêmes champions de course en fauteuil ; ce serait plutôt eux, oui, qui donnent envie de se flinguer aux autres, à tous ceux qui n'ont pas eu la chance d'avoir dans la tête le bon déclic au bon moment pour s'en sortir.

Y a qu'à vouloir !

Y a qu'à tendre sa volonté !

Quelle honte...

BERNARD COLLIGNON

LE SINGE VERT « DE L'ARIEGE ET DE L'AUDE » 8 - 44

 

 

 

Ça me rappelle cette interview de Bernard Tapie, du temps de sa splendeur, qui gueulait devant le public : "Moi mon argent je l'ai gagné ! j'ai travaillé pour l'avoir, moi, ce pognon !" Je ne vous raconte pas la gueule tirée par l'infirmière assise juste à côté, et qui travaillait bien autant ma foi que Môssieur Tapie soi-même, pour 7000 balles par mois maxi à l'époque. La tronche. Moi je n'aime pas ceux qui ont réussi, tous ces vivants reproches, allez, pas de fausse honte, Cousteau, Tazieff, Béjart, Clinton ; Ieltsine, Brassens, Brel, parfaitement, tous ces braves mecs, tous ces grands noms. Il faut qu'ils s'en souviennent tous les matins dans leurs prières du matin, dans le fin fond de leur honte, que c'est une force supérieure à leur petite personne qui les a propulsés là où ils sont, qu'ils appellent "leur volonté", mes couilles, et qui n'était que la force de leur destin.

Alors tous les matins, ils font petit cul, ils se rendent compte bien à fond de leur petite connerie, et puis pour la journée ils repartent bien droits dans leurs bottes, hop hop, pour dérouler le petit ressort que Dieu ou les hormones leur ont bien bandé d'avance dans leurs petits mollets. C'est sur nos corps qu'ils sont passés, sur notre fumier qu'ils ont poussé ; et tous ces obstacles que nous avons été incapables de surmonter, eh bien ce sont eux. Ils sont les obstacles. « Personne ne vous empêche de devenir Yourcenar...- Si ! Si ! les Grands, là, dans la cour, qui ne veulent pas que je joue ! » ...tout ça pour dire que je n'ai pas dépassé l'Ariège et l'Aude, et que ma petite vie vous emmerde (deuxième degré ? troisième ? - définition : « le premier qui veut se faire passer pour le deuxième » - ça doit être ça..) - je vous indiffère ? eh bien jetez, mon ami, jetez...

Vous croyez que j'y vois clair, moi-même? ...cette honnêteté dont vous me rebattez les oreilles et que neuf fois sur dix - je suis bon - vous n'êtes même pas capables de respecter pour vous-mêmes – c'est bien ça que vous revendiquez ? que je sois confortable ? Braves gens, sensibles, écorchés vifs, alors que vous êtes tous, oui, vous m'entendez bien, tous, des chevaliers d'industrie, capables à la fois de vous déchirer et d'arracher des larmes, certes, mais dès que vous raccrochez vos oripeaux, alors pardon ! durs à cuire sur les droits d'auteur et la diffusion ! pas passer un centime ! un quart de demi-droit ! le Code Pénal sur le bout des doigts ! et combatifs ! et la hargne, et le fiel, et les canines, hagne donc ! tellement artistes... pauvres petites choses si fragiles prêtes à mordre pour one cent...

On en chialerait, tiens... Tous vos boniments me font irrésistiblement penser à ce dessin humoristique du Canard Enchaîné où l'on voit Chirac mettant le bras sur l'épaule d'un ouvrier : "...Vous avez vraiment envie de devenir riche ? ...avec tous les soucis que ça vous procurerait ?" Le BERNARD COLLIGNON

LE SINGE VERT « DE L'ARIEGE ET DE L'AUDE » 8 - 45

 

 

 

coup du "Savetier et du Financier" ! Mais si, que l'argent fait le bonheur... Donnez, donnez la gloire ! les paparazzi, je m'en charge. Quand un acteur se flingue, quand une chanteuse de Monoprix s'avale son tube de merde, quand un pilote se viande à Monza, je dis bien fait pour leur gueule, ce sont les risques du métier. LA REUSSITE, ÇA SE PAIE. Mais si, la gloire fait le bonheur. Les regards sur soi, c'est le bonheur. On me dit : "Mais Marylin... Mais Brigitte... - je m'en fous ! elles auront vécu, au moins, ce qui s'appelle vécu. Moi je croupis, et si je me flingue, personne ne le saura.

Croyez-en mon inexpérience: il est plus valorisant de porter des lunettes noires et de faire le coup de poing contre les photographes que de lutter comme un malade dans la désolation de la merde obscure ; et la mort qui guette avec sa grosse gueule dans l'ombre. Définitive. Après ça, si je vous dis que j'aime la bicyclette, vous n'allez pas me croire - c'est qu'il serait drôle, ce petit vieux, de temps en temps. Ou plus exactement : qu'est-ce qu'on en a à foutre. C'est vrai, vous n'en avez pas à foutre de grand-chose, vous les Aûûûûtres. Hypocrites pourris fumiers. "Il faut s'intégrer, il y a des règles à respecter. » Tous ceux qui les piétinent, et qui trônent, ils vous ressortent le coup des « règles à respecter ». Assassins. Assassins. Il est à moi, ce titre-là. L'autre, là, le Djian, qui ne réagit même pas quand on prononce mon auguste nom, il me l'a chipé ce titre-là. C'est très exactement le titre de ma Haine Universelle. Comme on parle du titre d'une bague.

Autrefois je faisais de la bicyclette. Et tout seul. Je ne faisais pas partie des Joyeux Dérailleurs du Périgord Noir, ni du Club Cyclo-Pédalique des Comptes Chèques Postaux. Je ne suivais pas l'entraînement collectif intensif d'équipe, le nez au cul du précédent, soufflant comme un malade en me forgeant des mollets d'acier. Pas question de discipline de groupe. Pas question de faire place nette à la vedette pour la victoire d'étape. Pas de casquette à visière, pas de godasses à 3000 F la paire ni de culotte qui rentre dans le cul à pisser accroupi sur le bas-côté. Moi je roulais tranquillement à 15 km/h, pied à terre dès la première pente, et je freinais dans les descentes. Je regardais autour de moi, je pique-niquais dans l'herbe et je m'allongeais, ou je me promenais, hérétiquement, à pied, je chantonnais en pédalant sans trop ouvrir la bouche à cause des mouches à bouses, amis Vendéens, bonsoir.

Et à la nuit tombante, je me trouvais un bon petit hôtel à 10 F avec eau froide et pipi dans le lavabo, je m'étirais sur le lit en attendant le dîner, mes mollets tressaillaient tout seuls comme une machine qui se refroidit, et je me sentais bien fatigué, Messieurs les Champions. Après ça, un bon BERNARD COLLIGNON

LE SINGE VERT « DE L'ARIEGE ET DE L'AUDE » 8 - 46

 

 

 

steak-haricots verts et la cuite de rigueur, il ne fallait pas me bercer. Je repartais à l'aube. Enfin si l'hôtelier était levé. Longtemps, j'ai fait du vélo de bonne heure. Plus tard j'ai trahi pour l'auto. J''ai ressenti les mêmes étonnements proustiens devant le raccourcissement des distances. Mais : une heure de route, une heure de marche à pied. Je ne me suis jamais tapé Narbonne-Anvers en onze heures. Simplement des petits chemins d'herbe : l'Indre, la Vienne (chef-lieu Poitiers), les environs d'Angoulême, à proportion de mon budget de fonctionnaire voleur des entreprises. J'emportais un magnétophone ou un appareil photo (c'était le bon temps où les appareils marchaient tout seuls) et je notais sur bande mes impressions poétiques ou je prenais des clichés de prairies avec une haie au premier plan, comme on m'avait appris.

La plupart du temps, vu que je ne vois pas de l'œil gauche ou si peu, les photographies se trouvaient décalées vers la droite, ce qui ne manque pas de charme - une coquetterie dans l'objectif... Une fois j'ai fait écouter mes bandes d'harmonium à des vaches ; elles avançaient vers les barbelés en remuant les oreilles, et accroissaient leur production de lait ; il paraît que c'est vrai (au fait, pour la traversée à pied du Makhatch-Kala, voir Lanzmann : un homme, un vrai.) (je me rappelle ces pignoufs qui se plaignaient : "On n'a pas pu trouver de places dans le vol pour la Réunion ; alors on a dû se rabattre sur la Côte d'Ivoire.Se rabattre ! Moi je leur ai dit que j'avais été visiter la forêt d'Orléans dans le Loiret, et que ce n'était pas mal non plus.

Il paraît qu'ils ont dit "C'est qui ce taré ? complètement j'té ! " - bon vent connards ; dans ma petite vie donc, j'ai connu une brève période, septembre 70 - juillet 72, où moi-même et ma femme, pas encore enceinte, nous avons pratiqué la Mobylette - le nom est devenu commun. Des 43 cm3 exactement. Laure montait la Mobylette orange, et moi la blanche. Il y avait une petite tête ronde devant moi, qui roulait, roulait, toute noire au sommet d'un grand triangle de tissu vert - Laure tassée de dos sur la selle - une petite tête noire posée au sommet - cette petite tête "fin de race" où naquit et mourut tout un monde. Je la faisais rouler devant moi, pour mieux la surveiller, la contempler – fragile – aurais-je pu la laisser tomber derrière moi, sous les roues d'un autre que moi? Et quand nous nous lancions l'un après l'autre, le bruit mêlé de nos moteurs était un bruit d'haleines, et c'était comme si nous croisions nos souffles, comme si nous faisions l'amour ; j'en chialerais ; puis elle prenait sa distance, et nous roulions, au bout d'un fil. Nous avions établi un code : un coup d'avertisseur, "accélère" ; deux coups : "je double" ; plusieurs petits coups successifs : "arrête-toi". Et son bras tendu sur son corps vacillant me montrait haut sur un mont BERNARD COLLIGNON

LE SINGE VERT « DE L'ARIEGE ET DE L'AUDE » 8 - 47

 

 

 

quelque château, un cheval, que je voyais aussi bien qu'elle. Et devant moi la frêle mécanique tremblait. Il y eut l'Ariège et l'Aude, au long du fil tracé par son bras vacillant. Foix, Roquefixade, Montségur, Puivert. Peyrepertuse et Quéribus, et j'oubliais Lagarde, et puis Paziols, Embres-et-Castelmaure, la Franqui-Port-la-Nouvelle, Narbonne et La Canourgue, sous nos roues incessantes...

Roquefixade . Claquant dans le vent, roche fixée sur roche. La route qui feint de fuir. Et soudain dépassé, dans le dos, le long pédoncule blanc d'un chemin de village qui n'en finit pas de revenir se fondre à l'asphalte... "Le village mène", dit le guide, "une existence raréfiée". Vivent les existences raréfiées, autour d'une place "trop vaste", si défoncée, si déserte ! Les villages se dépeuplent, dit-on : tant mieux. Ils ne seront jamais assez dépeuplés pour moi ; puisse Roquefixade mettre cent ans à mourir, plutôt que d'y voir jamais pousser une station-service, et des marchands sur la pente du mont. Plutôt que d'y découvrir, comme à Peyrepertuse, d'outrecuidants troupeaux qui saucissonnent dans les pas de saint Louis.

Qu'il ne reste donc plus à Roquefixade qu'un de ces vieux hautains, vautours du pied des monts, immobiles, friables et durant comme les ruines - tel celui qui se tenait au milieu de la place, diaphane, inébranlable, inséré. Qui s'avançait vers nous tremblant sur sa canne tripode. "J'ai fondé le Musée", disait-il. Ces mots prenaient l'éternité d'une épitaphe. Anxieux, fier, il prenait sur nous la mesure de sa grandeur, de son néant. « Est-ce tant, ou si peu, que ce que j'ai fait là ?" Il nous expliqua longuement, tendant le bras, le départ du "Chemin des Parfaits", entre une étable et un fumier. Il reprenait ses explications, rituellement les reprenait, comme voulant nous faire éprouver, imprimé sous la plante de ses pieds, le poids, scellé en lui, du temps où lui-même, berger, montait là-haut.

Il demeura jusqu'au bout, nous regardant partir : d'abord une draille à moutons, caillouteuse, crottinée ; une odeur de suint, des bêlements niais, humains ; sur le mur, une plaque citron à lettres bleues, Gambetta ? ou bien Thiers ? - un champ couleur paille lépré de pierres plates, rochers à mi-pente. Soleil bête. Puis dans un raz-de-marée de broussailles le véritable roc se porte au-devant de nous, étrangle le sentier. Une voûte sous la pierre. Puis l'éperon qui reflue sur la droite, et s'élevant jusqu'au ciel deux versants symétriques et sombres : nous voici deux grains d'encens offerts par la terre au ciel, sur une gigantesque pale. Les brumes courent sur le vallon, vivantes,obscures, et tout en haut le regard bute sur une sorte de buffet d'orgues crevassé, échancré par-dessous une faille ; et par-dessus cette faille, un mur bâti de main d'homme, arqué comme un œil éventré, vomissant BERNARD COLLIGNON

LE SINGE VERT « DE L'ARIEGE ET DE L'AUDE » 8 - 48

 

 

 

jusqu'à nous mille blocs de pierre tombés de son orbite : cette traîne, cet éboulis de calculs géants constitue à proprement parler l'accès direct au château. Si nous tentons cette voie - si nous plaçons nos corps sous cet engrenage - sous ces dents ébranlées qui se mettraient en marche - nous serions concassés, rebondissant sans fin parmi cette mortelle avalanche. Reste le sol. La voie sans gloire. Où nous nous engageons, sur une sente mal tracée parmi les herbes, louvoyant, perdue dans les creux d'eau qu'on ne voit pas, comme le fil d'un procès ou d'une vie : à dix pas, tout est neutre. Sur les pistes entrecroisées, sur les losanges gris de l'herbe toujours dépeignés par le vent, l'ombre des nuages projetant un second filet mouvant.

Mon pied pour seul repère ; pilant la boue sous l'herbe il s'exhausse pourtant, pierre à pierre à demi enfouie – molaires dans l'argile - nous nous sommes retournés, sur ces deux versants enfin franchis, sous les brouillards mouvants. Le vent jette alors sur nos jambes ses chiens de brume. L'eau se met sur nos poitrines,foularde nos torses. "Je suis dit-elle dans l'air que tu respires, à tes pieds qui me foulent, dans ces nuées que tu vas guéant" - le rythme de nos pas semble ébranler un vaste récipient – tandis qu'autour de nos épaules cependant l'air désormais tressaille à mesure que nous nous élevons. Des nuages à présent se creusent de part et d'autre en vastes conques, par bancs, par lourds surplombs.

La pente se tend. Parfois nous appuyons nos mains sur le sol. Et les nues s'entrouvrent : des ombres passent sur la terre, des ailes, j'entends parmi le vent des chœurs errants de Walkyries. Des harpes. Des chorales d'enfants, de guerriers, qui s'éloignent, reviennent, que nous distinguons à présent, le voile rompu, dans une enfilade ainsi suspendue tout un flot de corps de gloire allant chantant processionnant, les "noces de Péreille, sire de Monségur, avec Dame Corba de Lanta, qui devait mourir dans les flammes au Prat des Crematz" (1) Par devant sont les mandoliers, les harpistes. Le lent cortège blanc et or s'élève entre les nuages, longs bliauts, visages guimpés, le bas du corps perdu dans une gloire, et des petites filles très droites sous leurs brocarts.

Parfois le vent secouait cette foule, dans une extraordinaire luminosité, au-dessus de laquelle scintillait l'éclat pâli des diadèmes : les voix, alors, les arpèges des harpes sous les voûtes mouvantes, venaient nous frapper avec intensité – où vont les blancs choreutes ? Puis d'autres accents, plus sombres, plus haut sur main droite, au pied du fort, péans, plains-chants puissants et monocordes, un trou dans le ciel, un second sortège, de trois cents hommes d'armes, casqués sur 1) Henri-Paul Eydoux, "les Châteaux Fantastiques"

BERNARD COLLIGNON

LE SINGE VERT « DE L'ARIEGE ET DE L'AUDE » 8 - 49

 

 

 

leurs hauberts, trois cents armures cliquetant sur le soleil gris ; sur les manteaux reluisent les croix brodées rouges, très haut, leurs voix torrentueuses roulent l'épithalame et le submergent, puis le courant céleste reflue, de nouveau s'égrènent les notes dorées des citharèdes, limpides alléluiahs. Un cortège se montre, puis l'autre, et tous, princesses, moines, enfants, guerriers, renvoyés par l'écho, l'un montant vers nous, l'autre s'en éloignant peut-être, leurs hymnes se mêlant et se répondant, austère et surprenante harmonie trouée de cris d'orgues, de vastes coups de trompes sous les voûtes, la vague et l'émeute, ce sont les combats sur leur aire éternelle. Soudain ce furent des cris perçants. Des trilles d'une joie d'Apocalypse - pour la troisième fois les nuées s'entrouvrirent, chevauchées par les filles même de Wotan (voiles furieux brisés sur les croupes des montures, un galop les emporta, un éperon scintillales comme un astre, les nattes cinglèrent les armures entre les omoplates, et j'entendis un dernier cri dans un roulement de sabots d'airain) – puis le vide. Le sentier parvenu sur la crête forme un brusque angle droit. Les cortèges s'évanouissent, s'effondrent l'un sur l'autre loin par-dessous nous. Juste à main droite les premiers murs dressés de Roquefixade : chicane en pente raide, par où le vent nous claque aux oreilles.

Quelques pans de pierre. Forteresse béante, lacérée, sur une plate-forme, avec des traces d'incendie. Nous nous penchâmes, fascinés : l'éboulis filait sous la voûte comme un entonnoir de concasseur – avions-nous été si bas, si misérables ? « Viens » dit-elle. Je fus entraîné sur un ressaut. Nous nous sommes allongés. Vers nous voguaient des esquifs déquillés, dévoilés, massifs ; nous revîmes les chœurs, muets, bâillonnés par les vents. Les personnages, bouches bées, roulèrent sous la bourrasque. De nos poitrines à plat sur le roc monta un choc sourd, le chant régulier de nos cœurs sur le roc, pulsation même du granit.

Un nuage nous coupa du sol. Nous fîmes l'amour. Ce fut midi. Un aigle passa sur nos têtes.

-BERNARD COLLIGNON 9 - 50

LE SINGE VERT

 

 

 

 

Tu me demandes, estimée collègue, si je n'ai jamais appris quelque chose, finalement,de mes élèves ; le paradoxe court, depuis Montaigne, affirmant que son propre livre l'a « fait » autant qu'il ne l'a fait lui-même – jusqu'à cette brave petite fille chinoise de la Révolution Culturelle, consultée comme un oracle lorsqu'il s'est agi d'envoyer au bagne nombre d'enseignants à commencer par les siens propres. Le choix de ce dernier exemple t'indique déjà, chère collègue, en quel sens penchera mon cœur, et le fiel dont il déborde. Bienheureux les optimistes, car il leur sera beaucoup accordé ; bienheureux ceux qui sourient, car leurs disciples leur souriront. Mon expérience à moi est bien différente, quoique j'aie beaucoup ri moi aussi avec mes élèves.

J'ai tenu ma joie surtout du bon usage du sarcasme libérateur, et je vois volontiers ma glorieuse carrière sous forme d'une gigantesque gorge d'enfant secouée par le rire. Et en ce sens, mes élèves m'ont beaucoup je ne dis pas « appris », mais apporté – nuance. Tout est susceptible en effet de m' « apporter » quelque chose: volcan, tableau, épisode de ma vie, de mes livres. Mais « apprendre » ressortit au champ lexical, comme dit, de la pédagogie, allant du maître vers le disciple ; jamais, à moins de paradoxe, du disciple vers le maître. Je trouve profondément néfaste ces inversions des rôles au nom du jeu de mots ; c'est bel et bien le professeur qui apprend à l'élève.

Assurément, les élèves m'ont apporté bien des satisfactions, en particulier celle de voir une petite fille toute timide se transformer en émouvante jeune fille en parfait état de marche, la marche solitaire bien entendu, sans que j'y aie été pour rien... Mais quant à ce qu'ils m'ont « appris », je serai bien plus acerbe. Le Singe Vert n'est pas la revue de la tendresse... De notre carrière d'enseignant nous aurons en effet retenu, appris, si vous y tenez, douze principes. Premier principe : les élèves étant des enfants, et vivant en groupe comme les rats, sont, par conséquent, des lâches. C'est quand vous tournez le dos qu'ils vous insultent, dans la cour. Et par groupes de trois, au moins.

Ne cherchez en aucun cas à découvrir qui, par derrière, vous a traité d'enculé. C'est du haut de leur fenêtre, au sixième étage, qu'ils déversent sur vous leurs quolibets, qu'ils se moquent de votre démarche fatiguée. Remède : le port du badge, par tous les élèves ; ce serait la fin immédiate de toutes les insultes. Deuxième principe : les élèves sont dissimulés. Ce sont les petites filles bien sages, bien blondes, avec le petit nœunœud dans les cheveux, qui vont BERNARD COLLIGNON 9 - 51

LE SINGE VERT

 

 

 

répandre partout que vous racontez des choses pas très nettes, qui vous feraient bientôt passer pour un pédophile (bien des exemples sont venus confirmer que ces demoiselles (les garçons s'ysont mis) n'hésitent pas à souiller à tout jamais la réputation d'enseignants parfaitement honorables pour se venger d'un regard de travers), alors qu'elles s'astiquent elles-mêmes plus que copieusement - mais surtout, surtout, elles le nient. De vraies petites bonnes femmes déjà, de vraies futures Amerloques, prêtes à vous faire jeter en taule, si vous les regardez plus de trois secondes, pour harcèlement sexuel ; je donne dix ans à la France, comme d'habitude, pour tomber aussi bas que les Etats-Unis sur ce point.

Remède : brutalité, cynisme. Ne jamais adopter le profil bas face aux puritains. Ne jamais baisser pavillon comme ce couilles molles de Timsit, dont je répète la salubre vanne : chez les débiles, c'est comme dans les crevettes : à part la tête, tout est bon. C'est tout de même malheureux qu'il faille céder aux cons qui se choquent. En polonais : Konkisschok. Troisième principe : les élèves sont impudents. C'est un mec, cette fois, qui m'a reproché de « ne pas avoir fait mon boulot », pour je ne sais quel retard d'ordre administratif, alors qu'il avait passé toute l'année, je dis bien toutes les minutes de toutes les heures de tous les cours de l'année, à bavarder ostensiblement avec son voisin en se foutant éperdument, avec le plus parfait mépris, du cours que je dispensais.

Il a eu sa baffe, magistrale justement, et je ne regretterai jamais cette baffe-là. C'est aussi un garçon qui s'est indigné que je le fasse redoubler, d'accord avec la totalité du conseil de classe, avec 4 de moyenne toutes matières confondues, et qui ne m'a jamais rendu un livre de 250 F (40 €) que je lui avais prêté. « Qu'est-ce que tu veux faire plus tard ? “Pilote de chasse » - avec quatre en maths, quatre en techno ? Il paraît qu'on les brime, les pauvres, qu'on les sélectionne ! L'élève au centre... Je t'en foutrais... Le savoir au centre, bande d'analphabètes ; on présente toujours l'élève comme la pauvre victime brimée qiu voudrait tant travailler... Cinq minutes, trois cents secondes, pour faire sortir son crayon – même pas un stylo – à l'un d'eux... « Tu interromps le cours et tu fais cours là-dessus » - ça ne t'est jamais venu à l'esprit, réformacul de mon theur, que la prochaine fois mon zozo va y mettre dix minutes d'horloge, et que toute la classe va dépendre des caprices du connard ?

L'élève désormais sait parfaitement que s'il tire sa flemme, ce sera la faute du prof. Que c'est à ce dernier d'intéresser l'élève. “C'est à vous de leur donner envie !” - BERNARD COLLIGNON 9 - 52

LE SINGE VERT

 

 

 

envie de l'effort, certainement. Mais il faut cet effort. Curieux pas vrai que cette chose parfaitement admise pour le football – faire des efforts – soit restée si longtemps une notion sacrilège pour tous nos pédagogues de ministères. Les élèves, c'est comme pour les ouvriers, ou les sportifs : il faut toujours être derrière, comme un con, tremaître; ou comme un nan, traîneur ; parce que si vous livrez un adolescent à lui-même, savez-vous ce qu'il va faire ? - suspense insoutenable - : rien. Histoire drôle : j'applique un jour la directive inspectoriale de faire chercher à mes élèves des textes de poésie, pour les découvrir tous en classe : ils ont repris toutes leurs poésies de fonds de tiroirs, toutes celles des classes précédentes, maternelle comprise, pour avoir la bonne note... quel amour de la poésie ! quelle merveilleuse ouverture d'esprit !

Alors, je suis devenu de plus en plus directif. Les élèves m'ont appris en effet à ne plus avoir honte de mon rôle. Quatrième : les élèves sont des flics. Ils m'ont appris la peur, avant tout celle de mon propre corps : des yeux, qui ne doivent pas rouler ; de la bouche, qui ne doit pas s'incurver vers le bas ; et la tête (alouette) qui doit rester droite, sans jamais rentrer dans les épaules. Bien maîtriser sa rétention urinaire, pour ne pas se faire surnommer à très haute voix, et dans le dos – évidemment - : “Lapisse ! Lapisse !” ; et ses pieds, à ne pas lever trop haut quand on marche. Surveiller sa tenue vestimentaire. Sa coiffure. Son naturel. Je parle ici des plus jeunes, tranche onze-quinze ans, ceux qui m'ont tué à petit feu.

En fin de carrière, j'ai enfin décroché les grandes classes, après 17 ans – dix-sept ! - de sixièmes, de cinquièmes, les plus lâches, les plus féroces.

  •  

Cinquième principe : les élèves sont des bourreaux. Je me souviens d'avoir assisté auditivement à la mise à mort d'une pionne, à travers la cloison. J'ai surgi dans la salle en gueulant pour les traiter les morveux de sadiques. Je leur ai dit qu'une pionne ce n'était pas un paillasson, mais aussi, et avant tout, un être humain. En partant, je lui ai dit : “Excuse-moi”, elle m'a remercié. Voilà une des choses encore que j'ai apprises des élèves.

Sixièmement (voir principe 1) – l'élève n'est que l'élément d'un groupe. En admettant que le maître puisse apprendre de ses élèves, ce ne peut être que par pur hasard, au cours d'un de ces rarissimes contacts humains qui peuvent s'établir ; et il ne s'établit qu'entre un individu, le professeur, et une collectivité, une classe. Les réaction d'une classe n'ont plus rien, mais alors strictement plus rien à voir avec des réaction individualisées – voire civilisées... Dynamique de groupe ! ...d'où mon

COLLIGNON 9 - 53

LE SINGE VERT

 

 

 

attitude fuyante, en définitive décevante, si je revois un ancien élève, même l'année d'après : quel embarras ! ce n'est plus qu'un humain comme un autre, comme moi ! “Comment, vous ne vous souvenez pas de moi ? - Eh non.”

Septième principe : l'élève n'est que le prolongement amibien de ses parents. Les élèves, horribles cafteurs ! ne peuvent que répéter “ce qui se passe en classe”, comme on me le répétait de façon mortifiante, sous-entendant qu'il s'en passait, des choses, qu'on n'oserait même pas préciser, n'est-ce pas, voyez le sous-entendu... Or : nul n'est MOINS apte à comprendre ce qui se passe dans une classe que des PARENTS. Se faire traiter de con dans une ambiance de rigolade, ce n'est pas du tout la même chose que dans une ambiance d'affrontement. Ça peut même être affectueux, dans le premier cas...

Les parents d'élèves sont par principe toujours prêts à vous soupçonner d'incompétence, voire pire. Ils savent toujours mieux que le prof ce qu'il aurait fallu faire, ce qu'ils auraient fait, eux ; car ils ont réussi à élever deux ou trois enfants, donc, pour une classe, ce ne doit pas être beaucoup plus difficile. Toujours disposés à croire la version de leur progéniture en cas de conflit. Toujours avec une excuse toute faite. “Madame, vous me dites que ce n'est pas votre fils, qu'il est incapable de faire un truc comme ça ; ce n'est jamais lui, mais il est toujours avec le même groupe de déconneurs... Vous ne croyez pas qu'il serait utile de surveiller ses fréquentations ? “ Toujours prêts à envisager une persécution contre leur cher rejeton, alors que franchement, on a autre chose à foutre. Toujours considérer l'élève comme susceptible de causer du tort à son professeur, avec l'appui de ses parents, neuf fois sur dix complaisants.

Huitième principe : les élèves sont la matière première de la presse populacière. Les journalistes, pourtant issus de la classe bourgeoise, témoignent à cet égard d'une populacerie véritablement gerbative. Une presse naguère encore hurlante et déchaînée contre toute forme d'esclavagisme, car c'est ainsi qu'elle appelle la liberté que nous offrons – bref tonitruant contre tout ce qui rappelle d'une façon ou d'une autre la fonction d'enseigner. C'est ainsi qu'on trouve à présent jusque dans les copies de bac – cette lamentable comédie – des assertions aussi banales que haineuses, reposant sur la notion de “ce qui sert” et “ce qui ne sert pas”, les maths par exemple (bravo l'exemple...) et de “bourrage de crâne”. Mieux vaut bien entendu se faire bourrer le crâne par les sectes et le cul par les patrons.

Neuvièmement : les élèves ont l'amour de l'esclavage, pourvu qu'ils l'aient choisi. “Travailler ! BERNARD COLLIGNON 9 - 54

LE SINGE VERT

 

 

 

gagner du Hârgent !” - allez-y donc, jeunes cons, allez vous faire exploiter... Les chefs et sous-chefs n'attendent que ça... Ils se gardent bien d'ouvrir des écoles privées où l'on apprendrait ce fameux “métier qu'on a envie de faire” : “Qu'est-ce que j'en ai à foutre de votre passé simple, moi ce que je veux c'est conduire des camions.”, voilà ce qu'on m'a sorti. Or les entreprises préfèrent rejeter la responsabilité de la mauvaise formation sur l'Education Nationale, “qui ne fait pas son boulot”.

Dixième principe : le peuple, les Français comme dit l'autre (“L'Ecole que veulent les Français”, ah elle serait belle, l'école, si on laissait faire “les gens”) - se contrefoutent de la culture. Il faut avoir vu une classe entière fermement décider à ne rien branler persécuter le pauvre élève qui veut s'en sortir, lui cachant son cartable aux chiottes, lui chiffonnant son cahier, lui souillant ses livres, pour apprécier à sa juste valeur ce que peuvent en effet enseigner les élèves à leurs professeurs... C'est dans l'exercice de ce métier, justement, que je me suis rendu compte que “le peuple” quoi qu'il faille penser de ce mot, ne veut pas de culture, qu'il n'en a, à la lettre, strictement rien à secouer ; surtout que des braves cons de plumitifs ne se privent pas, du haut de leurs monceaux de diplômes qu'ils se sont fatigués, eux les fils de bourges, à décrocher, de proclamer à grand fracas qu'il existe une “culture bourgeoise” et une “culture du peuple” - quelle “culture du peuple ? Mireille Mathieu ? Lagaf ? Pincez-moi : Mozart contre Lagaf ? qui est-ce qui méprise le peuple, là ?

Je connais une troupe théâtrale implantée dans un quartier dit ouvrier, à côté d'un bistrot bien sympa, bien d'cheux nous. Dans un premier temps les comédiens ont distribué des invitations. Vous avez bien lu : des places de théâtre gratuites. Devinez un peu pour voir le nombre d'ouvriers qui se sont pressés aux séances : zé-ro. Je me souviens d'un recueil, sans prétention, que j'avais distribué à mes camarades de radiodiffusion en région parisienne : le texte de mes émissions “littéraires” ; ils étaient tous à se le refiler comme une patate chaude : “Tu veux lire ça, toi ? - Non, et toi ? - Non non, pas moi.” etc. Navrant. Ridicule. Pathétique. Ça a fini par atterrir entre les mains du prêtre-ouvrier, qui l'a conservé, par pitié – pitié pour qui ?... - le peuple, besoin de culture ? à d'autres. Ignares, et fiers de l'être. Alors, leurs rejetons...

  • Numéro onze : de même qu'il est lâche (voir plus haut) l'élève est tricheur. C'est cela aussi que j'ai appris au contact des élèves. A ne jamais faire confiance. Jamais vous ne ferez reconnaître à un élève qu'il a pompé. Le travail collectif pour lui est quelque chose “qui va de soi”. J'ai même vu un parent d'élève venir me soutenir - il y a des gens qui ont du temps à perdre - que sa fille

  •  

  • BERNARD COLLIGNON 9 – 55

  • LE SINGE VERT

 

 

 

n'avait pas triché, alors que j'avais découvert dans son cartable l'ensemble des futures dictées de l'année – elle avait découvert le nom de mon manuel – recopiées sur ledit manuel, avec les dates, à l'avance... J'ai appris en effet ce jour-là que je devais changer de manuel. Mais si j'ai bien compris votre question, votre ricanement, c'est qu'on n'apprend que dans la douleur – pour le prof, la douleur, pour le prof. Plus il en bave plus il en apprend, n'est-ce pas, ce vieux croûton. L'élève tricheur, c'est celui qui innove, l'espoir de la Nation ; le transgresseur, c'est celui qui apporte. Les démolisseurs de cabines téléphoniques ont engendré le portatif (“portable”, c'est de l'anglais : por- tè-beul). Et celui qui me tuera m'ouvrira les portes d'un monde meilleur.

On commence à en avoir marre des mythologies à la graisse de kangourou. Avant de conclure, je tiens absolument à ôter aux lecteurs, s'il en reste, un argument facile et navrant : non, je ne suis mandaté par aucun parti politique d'extrême droite, qui me flanque la nausée ; j'en ai simplement assez que l'on brade ainsi les fonction sacrées de l'Enseignement, qui remonte à la plus haute antiquité comme dit l'autre.

  • Ce n'est pas en se mettant au niveau des abrutis qu'on fera progresser la conscience humaine ; je refuse d'enseigner Pascal ou Spinoza au moyen de bandes dessinées. Je n'ai plus qu'une chose à dire : sans vouloir rétablir les châtiments corporels, je considère que les pauvres petits nélèves qui ne réussissent pas à cause des vilains professeurs qui ne savent pas leur métier, et qui “ne peuvent pas les sentir”, sont essentiellement justiciables de la proctopodothérapie, ce qui signifie en bon attique “le coup de pied au cul”. C'est comme ça en effet qu'on avance dans la vie, moi compris : à coups de pied dans le cul, à coups de vérités, pas en pleurnichant sur le pauvre petit persécuté qui se trouvera un jour devant un patron bien féroce, lui, et peu disposé à faire des cadeaux.

  • Que si l'on m'objecte l'impossibilité de faire de l'enseignement aujourd'hui comme autrefois, vu la masse d'élèves qui se présentent aux portes des établissements, je répondrai qu'en effet une bonne partie de ces élèves n'ont rien à faire dans ces établissements. Ceux qui ne peuvent pas suivre doivent être aidés, mais ceux qui ne veulent pas suivre et qui empêchent les autres de suivre – et il y en a ! des quantités ! - sont tout simplement indignes de savoir, et doivent être dirigés vers des tâches d'exécutants, qui n'ont rien de déshonorant, car “l'humanité a besoin de tous ses fils”, s'il faut être grandiloquent. Quant à nous, les profs, nous ne sommes pas des psychiatres, chargés de savoir pourquoi ces messieurs (à 85 % ce sont des garçons) n'ont pas BERNARD COLLIGNON 9 - 56

LE SINGE VERT

 

 

 

envie de suivre – est-ce qu'on a toujours “envie” de faire notre boulot, nous autres ? nous ne sommes que des représentants, parfois cons mais pas toujours, de l'Intelligence, que nous voulons faire partager à ceux qui le veulent. Les autres, à dégager.

Avertissement

Ce numéro contient des affirmations parfaitement démentes, des cris de haine ignobles et pitoyables, et ne doit être considéré que comme un documentaire sur ce que le délire peut produire chez un détraqué. Comme le dit Molière en marge de son "Tartuffe", "C'est un scélérat qui parle". Il n'y a là nul appel au meurtre ni au viol, moi je suis un père de famille bien pépère et je ne veux pas d'emmerdes. A bon entendeur, salut.

 

 

 

 

 

LE SINGE VERT N° 10 10 - 57

PRENDS LE FEMINISME ET TORDS-LUI LE COU

 

 

 

Entendons-nous bien : je suis féministe.

Entendons-nous mieux : je suis misogyne, résolument, définitivement misogyne.

Féministe, car vigoureux partisan de la liberté de conception et d'anticonception, de l'avortement libre et gratuit, du droit absolu à toutes les formes de sexualité entre adultes consentants ; de la rigoureuse égalité des salaires, de la parité hommes/femmes dans les affaires publiques. Les femmes sont aussi capables de tout ce qu'on voudra que les hommes, bien plus souples en tout cas dans toutes les conversations où elles font preuve d'une bien plus grande ouverture d'esprit que les hommes. Rien de plus agréable en particulier pour un homme que de travailler avec des femmes, voire sous l'autorité d'une femme: car là où cette dernière use de diplomatie, vous faisant doucement comprendre ce qu'il faudrait ou aurait fallu faire, l'homme se croira tenu de mettre ses couilles sur la table et de gueuler que bordel de merde c'est lui le chef ; archi-pour l'accession des femmes aux plus hautes fonctions directoriales, politiques et religieuses - à quand une femme présidente de la république? à quand une papesse ? - ennemi farouche enfin de tout fanatisme visant à réduire la femme aux fonctions de sac à foutre qui ferme sa gueule ( ça, c'est le ton "Singe Vert" ; juste pour ferche).

Mais là n'est pas la question. Moi ce qui m'intéresse, c'est l'amour. C'est en cela que la femme - sans sectarisme.. - me concerne au premier chef (ce chef-ci est plus bandant que l'autre) ;

But - aber - je suis tout aussi inévitablement misogyne quand je lis et relis les mêmes éternels et sempiternels mensonges rabâchés par les journalistes "en mal de copie" convertis en sociologues d'un coup de braguette magique. Le credo de ces nouveaux bêlants est en effet désormais d'aller partout clamant que "la femme, ça y est, est libérée, choisit les hommes, drague, revendique son autonomie, son indépendance, et baise à tire la Rigault" (grosse cloche de Rouen : pour la mouvoir, il fallait que les sonneurs s'enivrassent bien à fond) (fausse étymologie...) " tandis que l'homme" (je poursuis), "le pauvre, complètement largué, ne parvient plus à assumer, se recroqueville, crie "maman" dès qu'on le touche et prétexte le mal de tête pour se dispenser de passer à la casserole."

Et nos sociologues d'occase de remarquer finement que la Fâme est en tête de la pointe de la flèche du progrès, alors que l'homme, ce pauvre couillon rétrograde, se "cramponne à ses privilèges" et ne sait plus à qui se vouer, partagé entre la démission, l'effémination (les putes n'ont-elles pas en effet paraît-il besoin de plus en plus de bougies dans le cul de ces Messieurs pour les faire bander, c'est le dernier scoop, très peu pour moi merci) - bref, les mâles déchus voient enfin battre en brèche leur puante suprématie. "Les étudiantes américaines", écrivait je ne sais plus quel journaleux des années 60 - des années 60 ! - "revendiquent désormais

LE SINGE VERT N° 10 10 - 58

PRENDS LE FEMINISME ET TORDS-LUI LE COU

 

 

 

ouvertement une activité sexuelle auprès de leurs compagnons, qui ne semblent plus en mesure de les satisfaire" - des étudiantes américaines ? dans les années soixante ? Mais où t'as vu ça, mec? Quand je pense qu'elles en sont encore dans les années 90 à te foutre un procès dans les pattes dès que tu les regardes en face plus de trois secondes ! ...Telles sont les conneries qu'on lit depuis plus de trente ans dans les magazines... Eh bien je vais vous dire, moi, ce que j'ai remarqué ; non pas la vérité vraie, mais ma vérité à moi qui Nom de Dieu en vaut bien une autre. Lorsque le Phphéminisme a commencé à se manifester, dans les Dix Glorieuses 68-78, j'ai eu très, très, très exactement l'impression d'entendre en boucle les jérémiades de ma mère et de ma grand-mère. Les Fâmes ne manqueront pas de me faire observer que c'est bien la preuve de la pérennité de ce sentiment d'oppression, et que "de tout temps, en tout lieu", la femme s'est sentie brimée par l'homme.

Exact. Mais voyez-vous, entendre rabâcher ces récriminations sitôt qu'on ouvre la bouche pour engager une conversation d'amour ou disons "de charme", c'est proprement refroidissant. Pour l'érotisme, c'était râpé. Ma mère et ma grand-mère considéraient l'acte sexuel comme barbare, inutile et dangereux. Je me souviendrai toujours de cette suave initiation pratiquée par ma grand-mère - qui me l'avait racontée avec fierté, comme preuve de son modernisme et de son ouverture d'esprit, à l'égard de je ne sais plus quelle petite fille :

- Et tu as déjà vu un zizi ?

- Bien sûr, celui de mon petit frère !

- Et tu sais que ça peut être dangereux le zizi, qu'il faut y faire attention, que ça peut donner des enfants ?" - quelle horreur en effet ! ça viole, ça défonce et ça féconde ! Autrefois, une femme sur trois mourait en couches à son premier enfantement. Ca ne les a pas quittées.

Dans un film de Blier, Gérard Blanc craint de se faire mettre par Gérard Depardieu. Sa femme lui dit :

- Il me le fait bien à moi !

- Oui, mais moi je suis un homme !

- Et alors ? mais c'est la même chose, mon vieux ! on se fait pénétrer ! il faut y passer, ça vient vous buter dans le fond !

Beurk. Pouah.

Autre propos fleuri, de ma grand-mère :

- Yavait les poules à rentrer, les lapins et le cochon à nourrir, le repas à préparer, et des fois à onze heures du soir la journée n'était encore pas finie !

Merci grand-mère. Et tout à l'avenant.

- Mais il n'y a pas que ta grand-mère dans la vie ! - Non, il y avait aussi ma mère, et toutes les

LE SINGE VERT N° 10 10 - 59

PRENDS LE FEMINISME ET TORDS-LUI LE COU

 

 

 

bonnes femmes qui fréquentaient ma mère, qui se ressemble s'assemble. « Et ça ne t'est jamais venu à l'idée de sortir du milieu de ta mère ? (elle est fine, celle-là)

- C'est indélébile coco, les premières impressions. Oui, j'ai entendu cela partout, partout, quelle que soit la femme, quelle que soit la fille : les hommes sont de gros dégueulasses, point. Il y en a même qui vous proposent de coucher avec vous, chère Marie-Claire, « je suis très embarrassée : je croyais pourtant que cet homme m'aimait, or, voyez ce qu'il me demande... »

Vous croyez que c'est marrant de lire des choses de ce genre dans le "courrier des lectrices" quand on a seize, dix-sept ans ?

Vous croyez que c'est remontant d'entendre à la télévision tout récemment une jeune femme déclarer, lors d'une émission littéraire s'il vous plaît, et se tournant de droite et de gauche pour quêter un acquiescement général qui ne semblait faire aucun doute : "Qu'y a-t-il de plus laid qu'un sexe masculin ? à part bien sûr celui de l'homme qu'on aime..." Là j'ai cru quand même que Sollers allait s'étouffer de rire - mais c'est grave ! c'est très grave !

Pourquoi ne pas dire alors pendant qu'on y est "Tous les juifs sont des - ceci cela - mis à part Untel qui est mon meilleur ami ? » De toute façon j'ai toujours eu l'impression que les femmes finissaient par épouser un homme parce qu'il fallait bien le faire, et pour se protéger une bonne fois pour toute de tous les autres qui sont des salauds et des violeurs sans intérêt...

Bref, le mari, c'est "le bon juif". De toute façon pour parvenir à obtenir les faveurs d'une "fille", c'est un tel parcours du combattant - elles attendent, sur la défensive, toutes griffes dehors, et elles te font évoluer, à droite, à gauche, comme un chien savant, pour voir, et attention, c'est le sans faute ou rien ! bref quelque chose de si harassant que le mec se retrouve pieds et poings liés, complètement ridiculisé avec sa tumeur au bas du ventre et à bout de souffle sous la férule de la gonzesse, qui, ben non, finalement, a changé d'avis, n'a plus envie, et préfère aller se branler. D'ailleurs vu la façon que les mecs ont encore et toujours de baiser, je la comprends.

Alors évidemment j'entends d'ici les hommes qui me disent : "Tout de même, dans les années soixante-dix, ne viens pas me dire que tu ne t'envoyais pas qui tu voulais !"

Ça va pas ? Non mais ça va pas mon vieux ? Tu ne t'en envoyais pas plus qu'avant ou après - qu'est-ce que c'est que cette légende à la graisse de couilles d'ours ? Tu avais droit à la morale, mon vieux ! à toute la satanée leçon de morale ! On n'était pas des objets ! Ça ne se passait pas du tout comme ça! On était des femmes libres, libérées, on choisissait ! - et voilà le grand mot lâché : choisir. Les femmes veulent faire l'amour, plus la fidélité, plus la sécurité, plus la bonne paye, plus le trois pièces-cuisine, plus... Alors forcément : là où les hommes quémandent un croûton de pain,

LE SINGE VERT N° 10 10 - 60

PRENDS LE FEMINISME ET TORDS-LUI LE COU

 

 

 

les femmes exigent toute la pâtisserie fine : un type qui reste avec elles, qui l'entretienne, puis qui devienne son toutou, et qu'elle puisse ronger toute sa vie en l'emmerdant jusqu'à finir par lui baiser la gueule de dix ans de longévité. On interrogeait là-dessus une centenaire: "Est-ce que ça ne vous fait rien que les hommes vivent en moyenne dix ans de moins que vous ?" Réponse :

- Moi si je me suis mariée et si j'ai pris un homme, c'est pour avoir des enfants. Le reste, ça m'est bien égal comment ils vivent, les hommes. " Et comment ils meurent, donc...

Interrogé au sujet de ses vieilles dames et de leur vitalité, le dessinateur Jacques Faizant répondit un jour en public que l'homme était en effet complètement usé, vidé, fini à soixante-dix ans (ça me rappelle une réflexion entendue dans un magasin, par une vieille femme justement : "Oh ça ne vit pas vieux un homme, allez !" - d'un ton de mépris absolument inimaginable - mais on ne gifle pas les vieilles dames) - eh bien donc ! que répondit Jacques Faizant ?

"Les femmes, voyez-vous - prenant bien son temps, tirant sur sa pipe - ont leurs soucis, n'est-ce pas..." (sous-entendez : "...que les hommes ne peuvent comprendre." (murmures d'approbation féminine dans l'assistance). Un temps : "...les hommes ont leurs soucis - plus ceux de leur femme." (hurlements de joie masculins, battements de mains).

Soyons brutaux : les bonnes femmes n'ont strictement aucun besoin de mec, je parle d'un point de vue sexuel. Je me souviendrai toujours de ce que Simone de Beauvoir a découvert très tôt lorsqu'elle était jeune fille ; elle l'a écrit dans le Deuxième sexe : que les hommes avaient besoin des femmes, mais que les femmes n'avaient pas besoin des hommes. Ça ne s'invente pas. Et s'il y a une chose et une seule que la prétendue "révolution sexuelle" a bien valorisée auprès des femmes, c'est bien la légitimisation, que j'approuve d'ailleurs sans restriction, de leur branlette ; la devise de l'Angleterre est "Dieu et mon droit", celle des femmes "Moi et mon doigt". Et les femmes se sont vite rendues compte - et comme elles ont raison ! parce que ce n'est pas avec la façon de faire des mâles, je rentre et pschitt je sors (80% des hommes de trente ans sont éjaculateurs précoces) ou bien je bourre je bourre et ratatam, que les femmes sont près de se mettre à jouir - qu'on ne prenait jamais aussi bien son pied que seule ou entre copines ("des orgasmes de plus d'une minute", c'est dans Gazon maudit).

Mais ce faisant, dit la pintade, elles ne font tout simplement, et je vous renvoie au début de ces lignes, que renouer avec tout ce qu'on peut trouver de plus conformiste chez la femme : le refus systématique de la baise. Delphine Seyrig déclarait à qui voulait l'entendre que l'homme était près à subir toutes les épreuves, toutes les humiliations du monde, voire de traverser un lac de merde, pourvu que sur l'autre rive il y ait un coup à tirer. Je lui répondrais que la femme est prête à faire très exactement la même chose, pourvu qu'elle puisse ne pas baiser ; depuis l'aube des temps, la femme n'aime pas baiser. Du moins avec un homme. Comme dit Brassens, "Quatre-vingt quinze fois sur cent / La femme s'emmerde en baisant ». Je t'ai engueulé une fois comme du poisson pourri une certaine T.C. parce qu'elle me racontait benoîtement que plusieurs jeunes filles dont elle faisait partie, devant faire les vendanges sur une île grecque, s'étaient mutuellement mises en garde : "Il faudra faire attention, avec tous ces Grecs !"

Réflexion présentée comme toute naturelle, tout innocente ! Vous croyez peut-être qu'il n'y en aurait eu ne fût-ce qu'une, pour avoir une aventure de vacances ? pas du tout ! La grande préoccupation de ces demoiselles était surtout de ne pas baiser ! Surtout, bien préserver la petite tranquillité pantouflarde de leurs petites branlettes, seules ou entre elles !

Oui, elles sont libres, toutes les femmes sont libres et nous sommes en république ; mais dans ce cas, je suis moi aussi parfaitement libre de commenter ce comportement répugnant de racisme antimasculin. Voyez-vous mesdames, quand un homme éprouve une attirance sexuelle pour une femme, il cherche au moins à se rapprocher d'elle, à entrer en contact, à se montrer tendre, je ne sais pas, chacun son petit jeu ; si par extraordinaire, j'ai bien dit par extraordinaire, une femme éprouve un désir sexuel pour un homme, elle se gardera bien de faire les premiers pas.

Elle commencera par s'enfermer soigneusement dans sa chambre, bien à l'abri, elle s'astiquera deux ou trois fois, et ça lui passera. C'est ainsi que les femmes peuvent se vanter - singulière vantardise... - de "tenir sans hommes" des mois et des années - et de nous faire la morale, la morale, la morale... Angélisme et chasteté... Tu parles ! moi aussi je peux tenir dix ans sans femmes, à trois branlettes par jour, pas de problème...

C'est la femme au contraire qui reste en arrière. Elle redécouvre le vieux fond féminin de fausse abstinence. C'est d'un archaïsme navrant et à y bien regarder redoutable : la fameuse libération sexuelle de la femme ne consiste en fait qu'à s'abstenir, et à choisir, c'est-à-dire à se choisir soi-même, nul n'étant considéré comme digne d'accéder aux inégalables faveurs de son Précieux Cul.

L'homme, pendant ce temps-là, peut toujours s'astiquer - il n'a pas le choix, lui. Parfois il est vrai, il accède, de façon infinitésimale, aux joies de l'amour ; mais le plus souvent, c'est tout pour les mêmes, qui par-dessus le marché se plaignent que les femmes sont "trop faciles", n'est-ce pas Monsieur Sollers (toujours lui) et font les dégoûtés, dont évidemment je ne fais pas partie, haha, vous croyez que je ne vous ai pas repérés avec vos gros rires papiers-gras...

Parce que je vous entends d'ici depuis longtemps, les mecs, toujours le même chœur des mâles depuis que j'ai quinze ans ce qui ne me rajeunit pas. Votre discours n'a pas varié je ne dis pas depuis les années cinquante mais carrément depuis l'Antiquité sumérienne. Vous battez les femmes en connerie, et franchement il faut le faire. Avec vous ce n'est peut-être pas la bite de bois, mais en tout cas c'est la langue de bois : "Mais mon vieux ! je ne sais pas moi ! mais c'est é-vi-dent ! Y a qu'à ! c'est toi qui ne sais pas t'y prendre !"

Hahaha (re).

...Donc à vous entendre il vous suffit d'ouvrir votre braguette pour que les femmes tombent comme des mouches. Les mouches peut-être, les femmes – non... Il est hallucinant que mes congénères se permettent de me tenir des conneries pareilles sans le moindre recul, sans la moindre variante, et quel que soit l'homme. Alors comme ça, en dépit de toutes les lois les plus mathématiques du calcul des probabilités, je suis le seul homme de France et de Navarre et de toute éternité à "ne pas savoir m'y prendre" ? Le seul ?

Vous vous foutez de ma gueule ?

Dans un premier temps je réplique, avec la plus éclatante mauvaise foi, qu'à les vois "s'y prendre", justement, c'est-à-dire s'y engluer, j'ai bien envie en effet de ne pas suivre leurs traces baveuses et de ne pas "m'y prendre". J'ajoute même qu'à considérer leurs pitoyables courbettes, pitreries et gonflettes de couilles, j'ai honte. Pour eux, et pour les femmes - car le plus écœurant, c'est que ça marche.

Vous passez pour des cons, les mecs, je vous le dis.

- Oui, mais on tire un coup.

- C'est trop cher.

"Je veux moi ET baiser ET ne pas passer pour un con.

Nietzsche disait à peu près qu'il souhaiterait que la rencontre entre l'homme et la femme se situât au plus haut niveau de l'esprit, alors qu'elle n'est hélas le plus souvent qu'une rencontre de deux bêtes qui se flairent... Donc : mes compliments Mesdames ; les hommes sont des cons, mais vous n'êtes pas en reste. C'est vraiment bien la peine de jouer les angéliques. De toute façon l'amour avec une femme se résout toujours plus ou moins à l'un de ces trois cas de figure : ou l'insensibilité de la femme, ou sa feinte, ou sa jouissance, mais dans ce cas-là comme dans les deux autres, vous êtes nécessairement, vous le mâle, en dehors du coup, puisque la femme se fait reluire en dehors de vous, et de façon tellement supérieure à la vôtre, qu'il ne vous reste plus qu'à serrer les dents en pensant à votre percepteur pour éviter de tout lâcher.

Car les hommes ont peut-être appris à ne rien reprocher aux femmes insatisfaites, les pauvres victimes (et en plus, c'est votre faute, ben voyons), mais pour ce qui est d'une défaillance de votre part, vous vous la reprendrez toujours illico, bien à chaud et sans délai sur le coin de la gueule : que voulez-vous, ce n'est tout de même pas aux femmes qu'on a appris à se montrer chevaleresques... Ce n'est pas le sens de l'humour qui m'étouffe, je sais - quoique - mais ce qui m'ôte l'envie de rire, ce qui ôte par-là même de la force à mon argumentation délirante, ce qui risque même de me faire attaquer pour incitation à la haine sexuelle pour peu qu'il y ait une femme suffisamment stupide pour ne pas distinguer tant de souffrance indissolublement liée à tant de ridicule - mais rassurez-vous, je donne dix ans à la France pour rejoindre comme d'habitude le prêt-à-penser américain, et décréter que de tels écrits tomberont désormais sous le coup de la Loi - quand je pense que les Américains préfèrent laisser une femme seule dans un ascenseur pour ne pas risquer de poursuite en harcèlement sexuel ! quand je pense que les Américaines, pis encore, se permettent d'accepter, de trouver flatteur un tel comportement comme un hommage qui leur est dû sans crever de honte !

Et elles ne crèvent pas de honte !

Quand je pense qu'il est interdit - c'est dans la Loi ! - de les regarder plus de cinq secondes de suite sans être poursuivi !

Quand je pense enfin que dans les entreprises israéliennes - encore plus fort, encore plus con qu'aux Etats-Unis - il est désormais interdit d'inviter une collègue au restaurant ou au cinéma, en raison de la connotation de drague et de sexualité que cela implique ! Et les femmes acceptent tout cela, et elles ne crèvent pas de honte !

Quand tu croises une femme, et que tu la regardes, tu vois se former sur ses lèvres le mot "ta gueule" ; ou encore, elle te regarde d'un air, d'un air ! méprisant au dernier degré, du style "Je te fais bander, connard ?"

Mais qu'on nous les coupe une bonne fois pour toutes, et qu'on n'en parle plus ! Voilà justement où je voulais en venir : j'espère, j'espère sincèrement, j'espère de tout coeur, qu'un jour les manipulations génétiques, permettant déjà la parthénogénèse, le clonage entre femelles et autres techniques merveilleuses dont j'espère bien voir avant de mourir les applications techniques étendues à l'humanité entière, permettront un androgynat généralisé, voire une suppression radicale et définitive de tout ce qui de près ou de loin pourrait rappeler un quelconque individu de sexe masculin, qui ne sait que tuer, violer, faire des guerres, massacrer des Indiens, des Arméniens ou des taureaux, parce que toutes ces ignominies, ce sont bien les hommes, et pas les femmes, qui les perpètrent, comme le dit si justement Renaud dans sa chanson sur Mme Thatcher.

Ainsi les femmes pourront-elles enfin s'envoyer en l'air toutes seules ou entre elles, comme elles le pratiquent massivement. Très éventuellement, on pourra envisager de parquer quelques mâles dans des réserves, comme les bisons, pour les quelques femelles dépravées qui apprécient les gros coups de piston barbares - encore cette mesure conservatoire même ne présenterait-elle aucun caractère de nécessité absolue, puisque les femmes pourront toujours se harnacher d'un gode, qui au moins ne débande pas en trois va-et-vient. Bien sûr, c'est l'homme qui a créé tout le progrès du monde, en matière scientifique et médicale particulièrement, et comme le disait Gramsci, "Si l'on avait attendu les femmes pour faire la révolution, on en serait encore à l'âge de pierre", mais "nous avons changé tout cela", les femmes sont parfaitement capables (voir plus haut) de mener à bien toutes les recherches possibles - mieux vaudrait de toute façon étendre le progrès tel qu'il est à toute la terre au lieu de laisser en rade les 7/8 de la population mondiale - et faites-moi confiance elles ne détourneront pas les objectifs de la recherche scientifique pour fabriquer des bombes H à destination des Etats islamistes...

En bref, je suis pour l'extinction systématique et progressive PAR VOIE NATURELLE de toute créature de sexe masculin. COMME ÇA LES FEMMES ARRETERONT DE NOUS FAIRE CHIER.

Les commentaires sont fermés.