Les terribles hémorroïdes d'Otto Weininger
C O L L I G N O N
LES EFFROYABLES HÉMORROÏDES
D’ O T T O W E I N I N G E R
« Chef-d’œuvre d’inexactitude et de mauvais goût »
« ...dans le grouillant faisandage de la Vienne 1900, où se décompose le compost le plus putréfié de ce que la conscience européenne a généré de plus putride, s’épanouissent aussi bien les efflorescences les plus prestigieuses que les moisissures les plus pestilentielles : Adolf, Musil, Schnitzler, von Teleff. Or ce cadavre gonflé comme une outre devait également, tel le ventripotent Guillaume le Conquérant qui explosa dans son cercueil en un certain mois d’août 1075, inondant de sanie les assistants épouvantés – ensevelir l’Europe sous les débris de son Empire, en un non moins certain mois d’août 1914. Mais la pétarade la plus plate de cette charogne avant qu’elle n’explosât fut le coup de pistolet tiré dans cet immeuble de la Schwarzspanierstrasse le 13 octobre 1903 et dans le cœur du plus illustre (et du plus oublié) représentant de la faisanderie viennoise, OTTO WEININGER.
« Cette obscénité propulsa le brûlot le plus nauséabond de nos bibliothèque, loin devant Mein Kampf. Cela s’intitulait Au cul les bonnes femmes (Réf. ACLBF). Ce qui se joue à Bourignac avec JÉRÔME LADOUILLE, autant qu’avec OTTO à Vienne, c’est, mutatis mutandis (et non pas « mutate mutande »), cet instant précis, cet horrible instant où le bébé, en équilibre sur la planche à bascule, va dégringoler dans son bain, ou son bac à merde, et s’y engloutir : encore immobile, mais déjà son centre de gravité s’est imperceptiblement, irrévocablement décalé. Or, la masse d’insanités entassées par Jérôme Ladouille en sli peu d’années d’existence n’a d’égale que le prodigieux fatras
de connaissances ingurgitées, à la même vitesse, par OTTO WEININGER.
D’où une bouleversante similitude de pensée :
« Les bonnes femmes, c’est toutes des truies quand a sont vieilles, et des limaces quand a sont jeunes. Les unes qu’a puent de la gueule, les autres qu’a puent du cul. Faudrait que tous ces trous y soyent bouchés », à rapprocher d’OTTO WEININGER :
« ...les femmes – tantôt des hyènes : les mères, tantôt des soit-disant chatons : les filles. Les unes sont laides, les aures portent des jupes serrées aux fesses. Est-ce que toi aussi cette partie dela femme ne te dégoûte pas ? La nature a incarné là l’impudicité même ».
(Lettre à Gerber du 17-08-1902) (Traduction Jacques Le Rider, Juriste).
(Nous ne possédons pour l’instant aucun document précis concernant la santé d’Otto Weininger ; en revanche, un certificat médical nous révèle fort opportunément, sur Jérôme L., ce qui suit :
« Au repos, 3cm ; en activité [sic] 5 1/2 cm. Testicules : Ø = 1cm ».
Loin de nous l’idée d’exploiter ce document à des fins démonstratives…
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! !
...Voici le moment de prendre en compte, enfin, trop tard sans doute, les indignations de la lectrice (les hommes ne lisent plus : ils « étudient » l’informatique) : « Pourquoi diable » (s’écrierait-elle) vous appesantissez-vous, fille de plombier juif ! sur ces deux personnages rebutants ? » (misogynie, antisémitisme, démangeaisons crurales) – sans oublier leur disparate : un bourgeois raffiné, un inculte parlant cul. Expliquons :
Par un sombre après-midi de janvier, égaré loin des bibliothécaires en blouse, j’ai découvert dans une crypte un couple de volumes étroitement maintenus par un ruban de tissu gras. Je les empruntai pour quelque temps (deux ans ne sont rien dans la vie d’un livre), et les ayant parcourus, puis lus attentivement, je fus saisie par les rapprochements de ces biographies : c’était en vérité un seul homme en deux formes : ou l’Ancien et le Nouveau Testament. C’étaient des correspondances d’oppositions si indissolublement suturées : aisance du premier, fausse aisance du second ; culture crasseuse de l’un, encyclopédique ignorance de l’autre ; entregent d’Otto, irrémédiable enfouissement de Jérôme. Pourtant, même délires, semblables haines, suicide précoce pour les deux (Weininger avec succès, sombrant dans le ridicule pour le sieur Ladouille). C’était au point qu’on pouvait légitimement se demander si le plus misérable n’avait pas délibérément décalqué dans sa vie obscure les félicités dont le plus avantagé fut comblé, sans toutefois parvenir à ces dernières, faute d’extraction…
« En relisant, je trouvai toutes les raisons de confirmer et d’affiner cette improbable théorie. Si improbable que cela puisse paraître, il semblait de plus en plus plausible que la biographie d’Otto Weininger fût tombée entre les mains de Jérôme Ladouille, que ce dernier l’eût déchiffré ou se la fût fait lire. Constatant alors leur folie commune, assaisonnée de coïncidences anecdotiques stupéfiantes, il avait résolu de poursuivre de son propre chef ce que le sort avait agencé jusqu’ici, allant même jusqu’à pressentir, du fond de sa boue, l’éventuelle réincarnation de Deux en Un.
« Ma voie se trouvait tracée : féministe, et femme, ce qui ne gâche rien, je me sentis le devoir de plonger, justement, au sein même de la misogynie, tel un vidangeur dans son scaphandre, afin de racheter ces mâles en inspirant à fond l’épaisseur de leurs miasmes. Pourquoi étions-nous tant haïes ? À quoi bon nous être époumonées à extirper de nous tout le bien-être de la féminité ? l’Ancienne et la Nouvelle Ève se retrouvaient de toute façon traînées dans la même ordure…
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Des parents de Ladouille, père et mère, nulle autre mention que l’alcool, et pour le père, le Bordel, comme nous le verrons. Les gens de cette espèces ne laissent en tradition que des grommellements interchangeables dans l’obscur.
Nous nous dispenserons (pour les deux familles) des assommants préliminaires généalogo-gynécologiques prétendument éclaircissants dont nous abreuvent les universitaires du commun, ne nous faisant grâce d’aucun protêt devant notaire.
Les études de Ladouille (Jérôme) se bornèrent à leur plus simple expression. Otto en revanche, excella dans les matières littéraires : les maths et les sciences provoquèrent chez lui d’épouvantables migraines. Hélas, fasciné par la Catastrophe, il devait plus tard s’en servir pour étayer de façon grotesque ses délires de pré-nazillon.
Fils de bonne bourgeoisie, il posséda le fric et l’entregent de sa classe : sans labeur extérieur, il lui est tout loisible d’accumuler des connaissances, dans la double acception, scientifique et sociale, du terme. Beau cursus en vérité.
Nous béâmes.
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Jérôme, à l’opposé, profitait des rondeurs populaires d’un prolo frotté de gros esprit. Au cours de l’année 1964 (Da-dou ron-ron) il affirme sa position sociale et son éducation en participant au défrichage de 3 (trois) champs de pommes de terre.
Sans vouloir passer sous le joug universitaire de l’établissement des sources et influences, nous avons établi cependant que Ladouille fut successivement employé chez Graubier, Moulineuf et Compagnargues-Souzibousses.
En décembre intervint une déchirante révision de perspectives socio-professionnelles : au terme de vingt longues minutes d’angoisse, il abandonne la pommedeterriculture pour le triage des œufs.
Son patron, Émile Grangeamouches, se félicite de sa ponctualité, de son ardeur pour un travail auquel rien, dans sa formation universitaire, ne l’avait préparé, tant il est vrai que l’intelligence prédestinée sait s’adapter aux circonstances, quand elle ne les provoque pas pour l’enrichissement personnel et protéinique.
Pour Albert Fudefioul (Mémoires d’un casseur d’œufs p. 28) Jérôme Ladouille est un « brave mec », appréciation louangeuse autant que laconique.
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Le choix des œufs forme une une transition tout indiquée vers l’essentiel de ce qui unit et préoccupe nos deux héros : la Misogynie. D’aucuns veulent en trouver l’origine dans telle ou telle attitude désastreuse de la mère. Les génitrices de Jérôme LADOUILLE et d’Otto Weininger peuvent se couvrir très exactement, coïncidence qui ne prouve rien : le propre cousin de JÉRÔME LADOUILLE eût pu contresigner ces lignes révélatrices de Richard, frère d’Otto :
« Ma mère consacra toute sa vie aux tâches de maîtresse de maison. Elle faisait la cuisine et s’occupait des enfants, malgré sa santé le plus souvent défaillante (…) Mon père la considérait uniquement comme la gardienne du foyer. Mes parents n’avaient pas une vie conjugale intime. Ma mère n’avait ni le temps ni l’envie de mener une activité créatrice ou artistique hors du foyer » - bien sûr, est-il besoin de le rappeler, la merde l’un faisait traîner la serpillière, tandis que la merde l’autre la traînait elle-même… Cela dit, que les Mères ne se mettent pas martel en tête : quoi qu’elles fassent, douces ou rêches, actives ou paillassonnes, elles auront engendré un misogyne ; donc, la misogynie est un instinct, et par là même entièrement justifiée.
Je laisse à mes lectrices le soin de déterminer le degré auquel je m’exprime. Certains esprits profonds (les mêmes) ne manqueront pas d’objecter que la misogynie provient d’un manque de succès avec les femmes (sous-entendu : « faut vraiment être con »), sans s’apercevoir d’une évidence qui crève les yeux : c’est la misogynie qui empêche le manque de succès.
ÉTAIT-IL BEAU ?
« Stéfan Zweig conserve de Weininger une image peu flatteuse :
« Il avait toujours l’air de quelqu’un qui vient de passer trente heures dans un train, sale, fatigué, les vêtements froissés ; sa démarche était mal assurée, il déambulait le dos voûté, rasant pour ainsi dire un mur invisible, la bouche tordue sous sa fine moustache par une sorte de grimace douloureuse. » - cité et traduit par Jacques LE RIDER, in Le cas Otto Weininger, P.U.F.
ÉTAIT-IL LAID ?
Lisons le témoignage de Jean Dugond-Grinçault sur Jérôme LADOUILLE :
« Sa silhouette trapue était pleine de fausse aisance. Son béret bloqué sur les oreilles, ses pantalons à chier dedans, ne le distinguait pas des indigènes. On le voyait aligner les pas de canard, les joues tournées au ciel, ou se vautrer comme un phoque devant les trois vitrines.
Il avait le front bas et des yeux de cochon.
Il était on ne peut plus laid. Son rire était d’une connerie mozartienne. »
(cité et traduit du parisien par B. KOHN-LILIOM in Les effroyables hémorroïdes d’OTTO Weininger, que vous avez d’ailleurs entre les mains.
...qui poursuit :
« ...Il avait toujours l’air de quelqu’un qui vient de se rouler trois quarts d’heure dans le fumier le plus gluant. « Puisqu’on ne m’aime pas » m’avait-il dit, J’ferai chier tout le monde ». Et déjà son père ne pouvait pas le saquer. Un jour ils se sont rencontrés au bordel. Jérôme LADOUILLE en tira un poème, que voici en exclusivité de la Rue du Cule :
Salut papa
Commenksava [sic]
Tu tires ton coup
Cht’aime pu beaucoup
Vu qu’cé la même
Que toi que j’aime
La prochaine fois
J’rai aux chiottes »
Vers émouvants et combien prometteurs, en dépit de l’imperceptible manquement à la rime finale. Déjà cependant son dernier instite, Pierre Caporal, l’accuse de plagiat. On reconnaît en effet
Ô lac, suspends ton viol
Et vous, heures pro-pisse…
Le thème invoqué par LADOUILLE ne manque pas non plus de certaines affinités verlainiennes.
Nous prions instamment nos lecteurs (et trices) de bien vouloir nous pardonner l’effort élitiste, fasciste et pédophile requis par notre ouvrage, dans lequel, faute de savoir s’il faut rire à vagin déployé ou se monter du col, nombre d’entre vous risquent fort le collapsus hystérocérébral. Mais la vérité vaut bien quelques nausées. Considérons à présent, je vous en conjure, les aspects les plus déplaisants du dénommé OTTO WEININGER ; Nous nous inspirerons largement du volume de LE RIDER Le cas Otto Weininger, P.U.F., 1982, bis.
...Otto Weininger vivait seul, et de ce fait eût dû selon le cas nous disons bien selon le cas
1) se masturber un peu moins
ou bien
2) se masturber davantage ( à noter que s’il eût été une femme, seul le premier point eût été envisageable ; certains records sont en effet mécaniquement insurpassables).
Cependant, chez un homme, si rien ne baise, tout pèse. Le coinçage de la gent féminine d’époque (la nôtre aussi bien) ne permet pas d’autre perspective que le bordel aux premières giclées de purée :
« Regardez-moi raser anxieusement les murs, le dos voûté, le pas mal assuré, épier jambes et gorges, au mépris de tout commandement moral » - cité et traduit pas Jacques LE RIDER, opere citato.
...Hélas, OTTO WEININGER, notre héros à toutes, hélas ! comme nous le pressentions, s’est fourvoyé : Baudrillard assène d’emblée l’axiome de la laideur des organes génitaux. Il est hors de doute que notre auguste Rémois n’ait pris en pleine tronche la fulgurante révélation du Message (inexprimé pourtant !) de l’universel Jérôme LADOUILLE, dont le silence est d’autant plus éloquent : la répugnance du génie pour le coït, « acte animal, répugnant et sale ».
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Après avoir subi sans broncher leur destin biologique XY, où ils se sont tous deux heurtés à la théorie du doigt pardon du choix féminin, nos héros vont à présent se mesurer à l’Acte Volontaire.
Tout acte volontaire s’accomplit en fonction d’une conséquence, voire d’un retentissement.
Nous verrons ensemble comment le Poids Sociologique écrabouille l’étincelle, en fonction du milieu d’où elle jaillit. Moi aussi, anch’io, je règle mes compte. Malgré tous ses efforts pour grenouiller au sommet de la pyramide, mon indigne personne retombe à son rang, éternellement, ontologiquement médiocre ; la « coalition », la « conjuration » des hommes n’explique pas tout. Il manque à l’autrice de ces lignes l’aptitude aux rapports sociaux, le salonnisme, mais pis encore ce pognon et ce réseau de relations huppées trouvées toutes cuites dans le berceau des nantis. J’éprouve une profonde pitié pour ce misérable, condamné, sans motif, à pourrir dans sa bourgade périgourdine.
Il me faut, à moi seule, venger le bas peuple. Mëme si Dieu a besoin de ce dernier pour faire croire au génie. Or ce peuple, je ne l’aime pas. Les hommes, je ne les aime pas. Problème insoluble : sauver l’humanité, par la culture, la littérature, le paradis ? ...la résorption de la Masse en Dieu ? Mais avant d’en arriver là – pouâh ! - tout remuer, tout agiter, surtout s’abstenir de toute solution. Démolir, exalter. Cracher sur les Riches, les Supérieurs, qu’ils disent, de tout mon jet de bave, en Haute Jacquerie. Car il serait tout de même temps de se rendre compte – que tout finit dans le même trou. Or, il se trouve que notre nazillon spermeux se tourmente sur le génie. Le génie ? c’est le Travail.
Et certes il a travaillé le petit Weininger. L’infirmière aussi travaille. Le manœuvre aussi travaille. Mais le Génie, le seul, le vrai, celui qui réussit, il n’a pas de famille pour le faire chier, ni de gosses pour le faire chier, ni de boulot pour le faire chier. Mais de préférence chez Otto une bonniche pour éplucher les légumes, on la retourne on l’encule, ne pas se tromper - pon ! - un petit coup de surhomme de Nietzsche, un petit coup de Schopenhauer : Chacun trouve en soi cette volonté en laquelle consiste l’ordre du monde (…) - or ce qui m’intéresse, voyez-vous, ce n’est pas le Génie c’est la Recette. Les hommes à qui d’emblée tout fut donné, fric et puissance de travail, les Génies de naissance, si je peux oser ce pléonasme, ne m’en imposent pas. Peut me chaut de connaître la structure anatomique des ailes de l’oiseau, né avec ses ailes, le gros porc ; ce que j’aimerais, ce serait qu’on m’apprenne à voler, à moi qui n’en ai pas, d’ailes. (Subsidiairement, qu’on ne vienne pas, sous prétexte que chacun peut s’élever au génie, me rebattre les oreilles du « génie immanent des masses ». Schopenhauer a dit « chacun », il n’a pas dit « tous ».) Ce qui nous mène tout droit à la question de base, angoissante – die beängstige Frage : Jérôme Ladouille était-il un génie ? Ou bien : aurait-il pu, ou aurait-il dû, le devenir ?
Ou encore : existe-t-il un génie de la connerie ?
Qu’est-ce qu’un génie méconnu ?
C’est un génie sans fric.
« Mais ne te monte pas comme ça, mon vieux. Otto Weininger n’était pas un génie. Cette notion est d’ailleurs totalement dépassée, dérisoire même. Otto a publié, voilà tout ! ...qu’est-ce qu’un auteur non publié ? C’est un auteur sans fric !
Je dirai même plus :
« Qu’est-ce qu’un être nul ?
- Allô ? Docteur Lévy, psychiatre à Bergerac ? Allô ?…
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Pour Jérôme Ladouille, ce 26 fébriembre, c’est la catastrophe : de retour du marché, où les ventes ont baissé de 0, 54 % (Statistiques commerciales de Bourignac, 1965, t. XIV), Jérôme Ladouille, exaspéré, tire de sa camionnette un panier d’œufs frais, et bombarde, l’inconscient ! une troupe de six femmes largement quinquagénaires devisant sur le trottoir construit à cet effet. Il accompagne son geste insensé d’une apostrophe, restée aussi glorieuse que celle de Bonaparte au pied des Pyramides : « Les bonnes femmes, je les ai au cul ! » (Les Échos du Sarladais semi-septentrional, n° 1204 du 18-4-1965). Malgré sa formulation quelque peu outrancière, déplorée par la rapiéceuse du curé, Madeleine Aubeaufrère, le fond de la pensée reçoit – enfin la glaire ! - l’approbation vigoureuse de Marcel, gérant du « Sarlat-Tapetting-Club », et les félicitations flatteuses – quoique teintées d’une certaine réserve, du second adjoint au Maire, Florian Foutilot, témoin de la scène. « Ça, c’est parlé ! » se serait-il exclamé.
Certains, et non des moindres, comme Charbon, cantonnier-chef de Pézérac-en-Bauques, affirmèrent avoir entendu ça, c’est tapé. Julien Baisençon, secrétaire de mairie, propose la version à ça, c’est envoyé ! en référence à l’ « envoi » effectif d’œufs (plus ou moins) frais sur les caracos des personnes du sexe. Mais si la deuxième formule porte plutôt l’emprunte d’une vulgarité paysanne assez éloignée de l’univers communicationnel du Sieur adjoint, la troisième, par son amphibologie amphigourique, renchérit de façon outrancière sur les capacités subtiles du locuteur. Nous nous en tiendrons à la formule number one : « Ça, c’est parlé ». Les lectrices dont ces problèmes terminologiques suscitent l’intérêt pourront toujours se reporter à la TCE (Thèse Collective d’État) L’a-t-il dit ? Ne l’a-t-il pas dit ? par A.K. Kreuzenstein, Olybrius Judenmacher et F. U. Kyoushtarbé, quoique certains paragraphes laissent à désirer par leurs aspects un tantinet polémiques.
Pour JÉRÔME LADOUILLE, c’est la gloire : le maçon Pédemouille l’invite à boire au café des Deux Gonds, 26 rue Burtechouque. Il y consomme un Jus de Fruit.
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Hélas, la Parque Lakhésis déroule avec célérité le fil de notre héros. Déjà se profile à l’horizon la douloureuse perspective du Verdebière de JÉRÔME LADOUILLE ;
Pour échapper à l’équivoque (et imméritée) réputation que lui vaut désormais l’inconditionnelle approbation de l’immortel animateur du Tapetting Club, JÉRÔME LADOUILLE entreprend un long périple en terre ferme, puisant dans les réserves de son salaire : on le voit à Barbac, on l’aperçoit aux Peaubazines-de-Bradeaux, et jusqu’à Souillac, où il découvre les bords de la Borrèze universellement chantés.
« Ces connards n’ont rien capté » note-t-il dans son journal (dont nous francisons l’orthographe). « À côté de la teub que je trimballe, j’ai deux glaouis, trois autres que tu connais pas » (rapprocher de la lettre d’O.W. du 5 août 1902 à Gerber (Guerbeur, évidemment) :
À côté de la vie que tu connais, j’en ai deux autres, trois autres que tu ne connais pas (Trad. Jacques Le Rider).
D’aucuns prétendent qu’une crevaison du pneu avant (dit « pneu moteur »), jointe à l’épuisement rapide de ses liquidités (il payait cash) l’empêcha de pousser jusqu’à Bouyssougnougues. En fait, il s’y serait rendu à pied, aggripé au plongeur-guidon, mais ne parvint pas à contacter Ludwig Trompagnac, le fameux Savetier Fasciste, parti aux bains de mer. Il revint par Trebzac et Calonquevie-les-Bourcradelles. La dépression fut son inséparable compagne de voyage.
Ainsi Weininger voyagea-t-il également, mais à travers l’Europe – on a du pèze ou on n’en a pas – de Munich à Christiania via Berlin et Stralsund. Le facho, c’était Knut Hamsun. Hélas, la conjonction n’eut pas lieu. Le voyage fut morne : « Je traverse une très mauvaise période, la pire que j’aie connue » (Le Rider, Le cas Otto Weininger).
Cantat JÉRÔME LADOUILLE , il revint de son équipée dans les sauvages contrées du Lot Boréal dans un état de complet délabrement. Quel changement à son retour ! Plus le moindre salut, plus une allusion à la glorieuse Journée des Œufs.