Proullaud296

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AUF REISE NACH BELGIEN

C O L L I G N O N

 

A U F R E I S E N A C H B E L G I E N

 

LE V O Y A G E E N B E L G I Q U E

 

Auteurs de Merde

 

 

J’écris couché sur un chemin.

Je suppose que c’est interdit

 

BERGERAC – ARGENTON

D’abord la voix du Père.

Il est curieux de retrouver ainsi la voix de son père, dans cette allée de St-Florent-le-Jeune. Sa voix. Je ne la reconnais pas (sauf à certaines inflexions) (rauques).

Je reconnais aussi ces scrupules d’instituteur, qui détache les syllabes, qui estime indispensable de lire à haute voix un « mode d’emploi » en tête de bande magnétique.

Un enfant comprendrait cela en cinq minutes.

La voix restitue toute une ambiance.

Je par-le dis-tinc-te-ment devant le micro.

Il s’est modelé sur la prononciation de « L’allemand sans peine ».

Il refuse toute connaissance, même élémentaire, de la langue britannique.

« Start » prononcé « star »

« Rewind » prononcé « revinnd ».

 

Je conserve ce document.

 

Plus loin :

Mon père a cru tout effacer mais l’on entend le bruit du moteur, et Sonia, à travers sa main à lui.

Comme un cœur.

Je n’entend ma petite Sonia qu’à travers ce moulinage forcené.

 

Les premiers mots prononcés par ma voix, après celle de mon père :

« Je n’ai rien à dire ».

(sur la bande j’entends ma mère : ses savates qui traînent). La veille au soir j’ai vu ma vie : un volumineux album de bandes dessinées.

Tout ce que j’ai pensé, tout ce que je dirai, dans des petites bulles, et que je peux lire.

Les pages de l’avenir s’imprimeront au fur et à mesure.

Que se passera-t-il si je consulte le volume à l’heure même où je suis ?

Ou si reviens me lire juste après l’action, pour vérifier à chaud ce que j’ai pensé ?

 

Je me souviens des choses effacées.

Elles disent, à peu près – que je vais survivre.

 

Je suis celui qui fait l’album.

Les uns sont immortels, les autres non.

 

*

 

Pouvoir thérapeutique du voyage ? - plutôt ce profond malaise, ce broiement sourd

du moteur en marche au sein duquel reposent les mots enregistrés.

L’homme aux semelles de vent – modeste aux semelles de pneus -

Grégarité : ceux qui s’installent dans le champ, juste et précisément dans mon allée Notre envoyé spécial au Tour de France – il n’y a plus de thérapie au numéro que vous avez demandé c’est toi-même que tu fuis etc.

 

Un vagabond (à cheveux longs) viendrait chez nous, se prendrait pour nous d’une affection subite et débordante, puis ils s’installeront, demandent à garder l’enfant, à parler

le-dia-logue ! Le-dia-logue !

Plus avare de dialogue que de fric

Je préfère le vrai voleur, le franc voleur qui ne parle pas.

Lorsque je rends visite, je pars à l’heure prédite, à la minute près, quand je baise je garde ma montre.

Le vagabond vient à dix heures, à 18h30 il est toujours là je vous éviterai toujours

Pour l’amour venez dans mon antre de telle à telle heure aucune femme ne viendrait elle à qui quatre doigts suffisent Le vagabond dit sous son bec-de-lièvre

« Si je dérange tu préviens

- Tu es le cinquième de ce mois

Mon épouse et moi sommes des bourgeois.

 

"

Dès que possible je m’arrête. Qu’il pleuve ou en rase campagne. Je travaillerai sans sortir. Le voyageur extrait ses documents, consulte son Emploi du Temps, il vit selon lui. Ses lectures le mènent chez Saint-John P.

- Je maudis Saint-John Perse. « Parole de vivant ! » disait ce riche. « Balayez tous les livres ! » - auteur, auteur, le livre est plus sacré que le sang et la peau. Le Voyageur du Temps gifle à toute volée le primitif de l’an Dix Mille qui lui montre, sur une étagère, quatre livres en lambeaux.

Il le gifle.

Autre exemple :

Soit un manœuvre. Il a roulé tout le matin des câbles sur un gros tambour. Il a en lui le vide des brutes.Il se plaint à midi du repas trop long, commente son dernier rouleau, évoque la manière dont il poussera le prochain : angle d’attaque,économie des forces…

Il s’est fait expliquer Racine sur les marches du Muséum. Il éprouvait comme un reproche son absence de diplôme. J’aimais sa tête dure, sa façon de se mettre en boule, son aboiement perpétuel, sa corrosion, son rire.

Il écrivait mal. Il cessa. Sa femme lui disait C’est l’écriture ou moi !

C’est la condition humaine que tu nies ô femme de B., manœuvre. Et je lui disais moi, au manœuvre :

« Un jour nous manifesterons contre la mort A BAS LA MORT sur les banderoles » et l’ouvrier B. riait avec moi de ceux qui patiemment comme lui-même empilaient les mots et les virgules : « Du haut de ces littératures... »

Ou bien :

« Le vent jette à la mer les vains feuillets de l’homme » - non, Saint-John le Riche, car Pharaon revit sitôt que tu redis son nom. Bibliothèques niches en étagères vos hypogées exigent l’attentat supplient après le viol : "Versez, versez le sang aux ombres d'Odysseus. Dieu ne reviendra pas juger les vivants et les morts je suis fier de faire partie de ce canular.

Je lance en plein jour des appels de phare - pas de flics - faire l'important "Une nuit me rejoignit la fille de l'hôtelier" - depuis combien de temps ? ...passé à "Charriéras" où nous lirions l'histoire d'un homme qui porterait ce nom...

 

*

 

Eviter de montrer de la reconnaissance. Les dons des autres ne sont qu'une contrepartie à l'emmerdement qu'ils dégagent. Variante au Contrat social : chacun voyant avec horreur l'existence d'autrui conçut par là celle qu'il inspirait lui-même, et voulut s'en racheter par des offrandes : du pain, du lait. En retour il obtint du beurre, des fruits, de la viande. Ou de l'affection. De la guerre. Ainsi, et non autrement, naquirent les rapports sociaux.

...La tête qu'ils feront, les Autres, un jour, en se découvrant !

Un jour nous flemmarderons en attendant la mort.

Déplaisante intuition en lisant Rousseau : sitôt que l'on a reconnu ses torts, quelle fête pour les autres de vous accabler !...

 

*

 

Un jour, le sexe gisant sous toute chose se fit débusquer, nu, sans démonerie, et le beau Verbe vagabond reparut comme le feu qui couve. L'homme dit : Je reproche à la femme (...) - ses onanismes, dont nous la sauverions avec condescendance, et npsu n'éprouverions aucun plaisir, et comme un homme me suivait de près, j'ai décroché de mon tableau de bord un micro, afin qu'il se laissât distancer. Le magnétophone enregistre tous nos écarts, nous lui décrivons, faute de les transmettre, les parfums que nous sentons, "et le cul de cerFF blanc d’un chien haut sur pattes au galop ».

Beauté sauvage des jeunes hommes à cyclomoteur.

De St-Jean à Thiviers par St-Jory. Swann et Guermantes. Ma voix déplorable : « dans quelle mesure une attitude consciente est-elle une attitude vraie ? » La réponse est : « une attitude ».

Masturbation intellectuelle.

« Il se masturbe au volant : un mort » - « il se branle au volant et meurt » - j’hésite. Sans repère ici. Personne. Pas d’auto-stoppeur. Auto-stoppeuse ? tout faussé ; exemple :

« Je vous prends à bord. Sinon vous feriez de mauvaises rencontres » - elle, dubitative.

Variante : « Je n’avais pas vu que vous étiez une femme - au revoir  - (un soir je descendais le cours de l’Intendance, suivant une silhouette à longs cheveux blonds – merde une femme – je l’ai sorti ainsi devant elle après l’avoir doublée – son rengorgement digne m’occupe encore. Je dis :

« Les auto-stoppeuses méprisent ceux qui les acceptent, car elle sont bien décidées à ne rien accepter » - un médecin peu soigner un désargenté, mais à celle qui peut payer, qui ne veut rien donner, il doit refuser ». Le cul des femmes est leur monnaie. Délire. Évaluer les villes en fonction des capacités bordelières. Limoges. Ou la main seule, comme elles font toutes. Cosi fan tutte. « Hôtel du Commerce et des Voyageurs » à Thiviers, pas de putes, les cloches au matin, l’ « impasse de Tombouctou ».

 

* * * * * * * *

 

Plaisir simple glisser dans l’ombre à petite vitesse, sans autre pensée que roues et jeux de bielles. Trajet somnambule. Branches. Ne pas aimer. Rester naturel. Ce dix juillet 1976, joué de l’harmonium à Oradour-sur-Vayres. Transporté l’enregistrement ers le nord, aux environs de Béthune parmi les chaumes, sur fond d’autoroute au soleil couché ; entre les arbres au ras de l’horizon, ultime éclat du ciel formant soucoupe, très effilée.

Notre-Dame de… :

« Je vous demande de vivre en état de perpétuelle exaltation. D’aimer, de trouver toutes mes actions extraordinaires, sans prétention de contrepartie. Que ce vœu soit exaucé ».

Notre-Dame de la Perpétuelle Exaltation…

*

Oradour-sur-Glane n’est signalé que 10km à l’avance.

Le guide pleure dans sa casquette : « Dans toute l’histoire de l’humanité... » - cherche bien, guide : cathédrale d’Urfa, Noël 1895 : mille deux cents Kurdes…

Inscription sur un volet (photographie d’époque) : Fünfzig Mann – invariable, pour « cinquante hommes de troupe » ; il est donc inexact d’écrire que les bourreaux, dans leur mauvaise conscience, ont oublié de former le pluriel Männer. Apprenez l’allemand. Je ne défends aucune barbarie, je dis : « apprenez l’allemand ».

Je me sens mal à l’aise. Mon corps se voûte. Mes coins de bouche s’abaissent. J’entends : « C’en est un, regarde, c’est un Allemand. »

Soleil trop lumineux, trop propre. C’est les vacances. Les ressuscités se promènent. « Recueillez-vous » - « Recueillez-vous ». Au cimetière, je fais les calculs : morts d’Avant, morts d’Après.

Quatre-vingt dix ans après sa naissance :

MANIERAS dit SIMON né à Oradour le 10-7-1877

époux de Marie Gautier, Léonie Baudif

Ancien conseiller municipal d’O./Glane

Ancien garde-chasse et pêche, régisseur pendant vingt ans, assermenté

A reçu trois actes de probité pour avoir trouvé de fortes sommes.

À l’âge de 67 ans a pris un engagement dans la milice patriotique comme caporal.

Il a été bon père et bon époux, a su garder l’estime de tous, passant priez pour nous,

au revoir à tous et merci, c’est Maniéras dit Simon qui vous cause.

« Milice » ?

À part les enfants vivants, je vois parfois de belles têtes d’idiots. Les photos des morts rongées par le temps finissent par ressembler à des crânes.

Au mémorial souterrain, je me laisse émouvoir par les encriers de l’école. Ici, une résonance particulière donne aux voix le ton d’une prière ou d’un gémissement. Je sens les pieds, la sueur (des autres…).

Des Noirs pètent.

*

Bellac. Panneaux « Paris ». Pauvres cons. (Près de Créon (Gironde) cet autre panneau « Espagne ! Pyrénées ! »)

Celui qui a institué les congés payés aurait dû les assortir d’une interdiction de partir en vacances.

Je fais du tourisme.

Je t’en foutrais du bonheur pour tous.

Du tourisme…

Non mais.

*

Visage crispé.

Les gens se paient ma tête.

Se foutent de ma gueule.

C’est plus commode.

J’ai cinquante ans d’âme.

...Arrivée à Bellac.

Je ne prie pas à la Collégiale. Je ne veux prier que moi. Bellac ressemble à ses prospectus. Même la libraire se fout de ma gueule. Même quand je souris. Plus loin :

« Mon Dieu, que fait votre main dans ma culotte ?

- Ça te changera de la tienne.

*

Tous les petits chemins possèdent une personnalité, une Belle au Bois qui n’attendait que vos pieds – comme à Monmadalès – sentier détrempé.

J’écrase un papillon.

Occidental au torse halé que je croise, qui te pousse, qui te force ? ...des moules et pis des frites et du vin de Moselle… nous habitons plus haut, les Belges sont des ventres d’égotisme, grand-maman de mon père – du belge dans mon sang.

*

Sur bande magnétique, je prends des poses. J’imagine que je parle, qu’on m’interroge, avec mon accent belge, je me récoute encore, enfant je me croyais coupable outre mesure et demandais pardon le soir à mes parents à travers le mur, ils me l’accordaient, dans une gêne extrême.

Bien fait.

Mon père :

« La paix ! Je veux la paix. »

Le canal de l’Édipe est bordé de bouleaux bien droits. Recherche d’un hôtel. Mon physique se dégrade de kilomètre en kilomètre. Ils ne m’accepteront plus. Demain, à Milly, se recueillir sur la dalle de Jean Cocteau. Son âme jadis m’a parlé, par le pinceau du phare à Cap-Ferrat, voici dix ans.

Nom de Dieu dix ans.

Nom de Dieu vingt ans.

Il se prend des poses. Il demande ses routes. Les vieux croient qu’on se moque d’eux. Bien maîtriser ses expressions. Ses sourires sont mielleux car il se met à la portée des incultes. Cependant ne pas effrayer les gens simples.

.La conscience de sa culture est la pire des incultures.

Croisant un automobiliste, il fait blublublubb en tournant ses deux pouces sur les tempes.

Conne de pucelle qui se branle sur sa selle à vélo.

Les vieux entre deux cuites, les filles entre deux branles et un clocher casqué comme un archer godon, deux meurtrières aux yeux très rapprochés à la racine : St-Georges-des-Landes.

Au bal d’Argenton-sur-Creuse

J’ai rencontré un’ femme soûle

Je l’ai fort bien consoûlée

Lui ai fait la charité

J’approche des frontières du Berry : je retiens mon souffle.

Myope au point de klaxonner au milieu de la route une merde,pour la faire envoler.

Voici la frontière entre 87 et Indre. Mon cœur bat. Instant dédié à tous ceux qui passent la frontière grecque en disant passe-moi le saucisson. Et cette haine passionnée des jeunes filles. Elle le font toutes. Au moins quatre fois par semaine,

« Douze » rectifie-t-elle.

 

Onze juillet 2023 Nouveau Style – ARGENTON-SUR-CREUSE / PRÈS PUISEAUX

 

L’ennui sédimenté. Même en voyage. L’imprévu catalogué. Dès le matin. Parfois l’hôtel parfois la belle étoile : quelle aventure ! à l’hôtel on peut lire le soir.

La route est républicaine.

La route est égalitaire.

Le cloporte aussi a le droit de voyager.

Sur sa route il rencontre son infinité d’humains.

Il jalouse les femmes qui ne baisent guère ou pas. Il engueule les hommes si ternes, stupides et sans espoir – vitres remontées.

La route est un long ruban

Qui défile qui défile

Et se perd à l’infini

Loin des villes loin des villes francis lemarque

Et en forêt de Châteauroux PROPRIÉTÉ PRIVÉE de dessert vengeance vengeance

une route où rien ne passe où rien ne se passe entre les haies, marcher marchons sans nous mouvoir sur le tapis roulant station Les Halles Plaine de Krasnodarsk puis une ferme au bout d’un champ d’éteules terre d’une pièce comme au Nord, qui monte, monte

Demi-tour ALLÉE PRIVÉE

Un papillon se bourre aux senteurs de foin

Des prunelles me sèchent la bouche siccativo-buccales

Je n’irai pas dans ton allée

Qui mieux que moi respecte la loi

Au moindre aboi de chien tu trembles

Si un jour fusil au poing un assassines

L’HUMILIATION SURTOUT L’HUMILIATION

Fait-divers j’épargne sous mon pied le scarabée je fais parler le Châtelain

Mon ami je vous ai engagé garde-chasse

Gardez que nul ne pénètre céans

Nous nous verrons pour instructions à prime sonnée

Que ce soit tout

Nous prendrons les distances ne pas oublier:Toute pensée qui vagabonde est un instant de travaillais

La route rebondit sur ce toit barrant l’horizonjeune homme doré court en short, il est souple je double une foison de Mobylettes et si c’était mon frère nous transpirerions ensemble, comment, Monsieur de Montherlant était-on jeune en VINGT-QUATRE en TRENTE soyons sérieux cela ne se peut pas vous êtes tous devenus vieux je resterai jeune je n’ai jamais été jeunesse Voici des ombres Voici des oiseaux Tout paysage en état d’imminence (une route, une tête, toujours il doit s’y passer quelque chose – il ne s’y passe jamais rien – les souvenirs un jour monteront à l’assaut avec leur densité de choses je crée dans mon futur passé je croise un hobereau à tête noire rasée.

Parfois seulement la rambarde s’incurve, départ de sentier, Propriété Privée plus on en tue plus il en pousse Que de promiscuité Châteauroux Arrivée Ville Fleurie

 

X

 

Bientôt le voyage n’agira plus. Terrible maladie de tête vide quand on ne lit plus, la faim, les fourmis.

« Privé » - « Privé » - « Chasse » - « Chiens » - « Gibier »

Je lis sur le dos le ciel entre les branches. Ikor est un auteur naïf. Le petit bois miteux. Les orties brûlées de sécheresse.

« L’herbe dans le sous-bois ressemble à du fumier »

(Hugo)

(« ...mais où le promeneur cherche en vain le purin »

Jour après jour je m’allonge, et c’est un baume, un chaos gris, des chips, le champ de maïs. Ne croyez pas les physiciens nous employons le tout de nos cerveaux pourquoi sinon tant de crétins pour un génie ? n’est-on que ce que l’on vous dit de faire merde les vaches ont trouvé le chocolat mais j’ai toujours de quoi lire ! écrire mais rien ne vaut le petit bureau La Mort du Loup Maine-Girault

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