Proullaud296

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Clavier

 

 

Falaises d'Angoulême.JPGC'est une tâche bien ingrate. Simone de Beauvoir s'y est exercée parfois dans un bistrot de St-Germain, puis y a renoncé comme perte de temps, stérile. Ma personne dont la vie n'est que perte de temps (et "n'intéresse personne") s'occupera d'en perdre encore en décrivant l'objet qui me sert de compagnie tout au long de mes écritures : le clavier de la machine à écrire. Il supplantera bientôt l'écriture manuelle, comme ces fous d'Américains l'ont déjà entériné dans ce qu'ils appellent leurs écoles primaires, Grade Schools. C'est un grand rectangle sévère, revêtu de sa housse jusqu'à ce qu'elle tombe en ruine, déchirure après déchirure. Pour l'instant, seuls le"x" et la portion de touche dévolue aux majuscules présentent un trou palpable.

 

Le reste est recouvert d'une enveloppe transparente et grise, sous laquelle se dissimule un noir de jais. Mais il ne faut pas l'enlever, pour que le dessous reste neuf : ainsi ma mère voulait-elle me convertir au port d'une imperméable sur ma gabardine poru ne pas la mouiller, ainsi les Alexandrins et les Marocains portent-ils sur leurs beaux vêtements leur pyjama le plus soigné, afin de les conserver neufs, ce qui fait qu'en définitive, on ne les voit pas. Mon clavier est français : AZERTY, et non QWERTY. Parfois, sans que l'on sache pourquoi, il vire à l'américain : fausse manœuvre sans doute ; il suffit de revenir en arrière dans la programmation, et tout s'arrange. Autrement, le m, le point, le point virgule, entre autres, demeurent introuvables, et les voyelles accentuées disparaissent. J'ai appris à dactylographier à 17 ans, sur une Olivetti verte que chacun a connu vers 61. Il y avait une tablature pour expliquer l'art et la manière de poser ses doigts, et les plus doués réussissaient à ne plus regarder le clavier : désormais j'y parviens à peu près. Mon Olivetti comportait 47 touches numérotées, mon bureau me montrait les chutes d'Iguaçu, dont une de 47 mètres (record : 90). J'avais donc imaginé que ce déversement, rapproché des manipulations du clavier, expliquaient ma peur du nombre 47, par la culpabilité due aux masturbations.

 

C'est idiot n'est-ce pas. Mais quand je l'eus découvert, ou imaginé, je cessai d'avoir peur de mourir à 47 ans. Les lettres sont en majuscules sur la machine d'aujourd'hui, "USB KEYBOARD". Leur police est de style arrondi, la housse les rend ternes. A droite un pavé numérique, à verrouiller au reste pour l'utiliser (j'aurais cru que le verrouillage en interdisait l'accès ; mais c'est le contraire). Un croissant de lune en son dernier quartier montre le moyen de le déverrouiller. La première rangée, de F1 à F12, reste mystérieuse et je préfère ne pas y recourir. Tout ce qui touche la mise en page est extrêmement aléatoire selon moi.

 

 

 

Commentaires

  • En 61, j'avais 17 ans. Ah que c'était pas le bon temps.

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