Ange, Térence, Vivette et les autres...
Assis en rond comme des yacks contre les vents. Vivette ne dira pas qu'elle est enceinte ; Ange ferait un mauvais père : trop de ventre.Les cirés qui frissonnent. Quelques touristes mieux couverts qui passent en faisant des signes amicaux. Albertine enfile deux sandwichs. “Au point où tu en es” dit Ange. Térence fait le boute-en-train. Tous excursionnent ventre plein au sommet des falaises. Des exclamations sont poussées sur la vue, sur les bateaux anglais qu'on voit. Térence dit “Les convois qu'on voit.” Il soutient Vivette dans les montées, Joëlle est aux prises avec la grosse Albertine qu'elle ne connaissait pas la veille, Magdaléna empêche le pourceau de tomber, c'est Ange. “Nous sommes les premiers” dit Térence à la sœur de sa femme (Vivette ; il faut suivre). “Vois-tu l'Angleterre ?
- Pas de si loin, Térence ! - Tu as souri, tu as dit mon nom. -Tu n'es pas le père, tonton.. Fous-moi la paix. - Qui va s'occuper de toi si le gros porc... - N'insulte personne.” Ils se rejoignent autour de la table d'orientation, se désignent les points de repère - “Tu es de bien bonne humeur Térence” observe Albertine en soufflant “Je me défends” dit-il, “je me défends”. - Dango, dit Vivette. Une fois redescendu tout le monde embarque sur le Trois-Couillons, des Frères Croche, affables, qui trimballent les touristes et leur enfilent des casquettes et des gants. Temps frais, noroît soutenu hors-saison. La bôme fauche au-dessus des têtes baissées parce qu'on remonte face au vent, les frères Croche se mettent à chanter, on ne se dit plus que des conneries ou on s'isole avec un air profond, sur cris de vagues et sous l'embrun. Le Croche-barreur dit “Bizarre, le vent tombe”... “...Mais ce n'est rien M'sieurs-Dames” ajoute le frère. “On voit moins loin que tout à l'heure”, “La mer est grise”, “Redresse au vent””Quel vent ?”. La voile faseye” -“bat au vent” - Takapétéddan dit le cousin, bien atteint. “Nous avons fait les Glénans, dit le barreur. Mesdemoiselles, ne craignez rien.” “ce ne serait pas du brouillard qui tombe, là ?” observe Térence. “Bien sûr Monsieur, rien de plus normal par ici.” “A cette heure-ci ?” “A toute heure Monsieur ; Joël, va écouter le poste.” “Moi?” “Je parlais à mon frère, Mademoiselle” “Madame”.
Albertine éclate de rire. Le cousin Ange se tait, mais il lui semble soit qu'on tourne en rond, soit qu'on dérive. Albertine soupire “Mon Dieu mon Dieu”. On entend un grondement “Les rouleaux Madame, c'est la mer qui descend. Oùsommes-nous ? En mer.” “Dement” dit Ange. “Ça se gagne” dit Vivette. Le frère barreur : “Calmez-vous, on en a vu d'autres, ceux qui paniquent vont dans la cambuse”. Vivette descend dans la cambuse. Quand elle s'est cognée trois quatre fois aux parois elle remonte sur le pont, l'avenir, c'est la vague suivante. Ange dit “Elles sont courtes mais bonnes”, toujours ce genre de jeux de mots, Térence ferme sa gueule.
Cependant le barreur aborda en pleine mer la Police Maritime, qui avait l'œil : “On vous suivait. Bouées de sauvetage... ? Trois en tout et pour tout ?” Térence : Qu'est-ce qu'elle leur a mis, la police ! Et puis (suite du récit), tout le monde s'était bien rendu compte que Vivette avait quelque chose dans le ventre, quand elle avait sauté lourdement sur la vedette des flics ; même qu'elle avait vomi en écartant les jambes ; Ange racontait pour sa part que tout le monde l'avait laissé sur la barque à voiles, aucun bras secoureur ne l'avait “euh... secouru ; et si j'étais tombé entre les deux bordages ? Ça se frottait, ça montait, ça descendait !
- Tais-toi, grand douillet de vaurien de merde, dis-moi plutôt de qui ta cousine est enceinte. - Je ne sais pas Maman. - Tu crois que c'est Térence ?” Ce dernier suffoque d'indignation. La scène se passe dans un salon, à Morlaix. Une belle promenade en mer en vérité, fort instructive. “Joëlle, tu ne peux pas croire cet abruti !” (disons qu'ils sont revenus de l'expédition bretonne ; disons qu'ils se retrouvent dans le studio de photographie, où le professionnel de la profession les a regardés s'ébattre, avec des yeux de veau, en échange du studio lui-même, pour toute la nuit. - Pour une fois le studio pour nous tout seuls ! - Térence, Vivette est enceinte, c'est de toi, oui ou non ? tu me promets que tu n'y es pour rien ?” Le torchon brûle sous les sunlights. “Que faisions-nous avec eux ? si tu savais ce que je me suis fait chier... J'ai voulu te présenter. On ne présente pas une passade ! ...tout le monde me dévisageait ! Sau f Magdalena ma femme . C'est ce qui m'a le plus gênée. Jamais je n'ai autant regardé le paysage. Est-ce que je sais moi ? Il s'emporte d'un coup. Térence dit-elle, je trouve cela très laid cette grossesse de Vivette à ma place C'est la meilleure (s'étouffe Térence) Tu veux être enceinte ?
OK dit-elle on commence – qui va élever l'enfant-de-la-sœur-de-ta-femme? le poussah, “Ange” ? T'as vraiment la famille de blaireaux. Magdaléna déteste sa sœur tu entends- ? elle la hait, elle l'a complètement abandonnée après la mort de leur mère C'est ce que Vivette m'a dit en voiture Je l'élèverai comme un fils Fais-en donc un, avec ta bourge, avec moi – plus tard (c'est l'été) dialogue : “Tu m'aimes pour faire joli. - Je te désire dit T. - Fais-moi l'amour derrière les troènes – En pleine circulation ?” Ils le font. La caravane de Joëlle est un monde complet : cassettes, CD, revues de photos, dans un renfoncement la TV peinte en rouge “Mes parents” dit-elle “n'entrent pas ici”.
Par un soir étouffant Térence étend ses membres nus et suants sur la couchette et comme ils n'ont pas encore bougé d'un poil c'est la télé qui se déclenche “Chaos à Moscou”, une brochette de vieux cons en casquettes militaires annonçant la destitution de Gorbatchev “popur raison de santé”, Térence couine d'indignation sous la petite coquille de plastique et Joëlle impassible se tourne pour mieux voir et dans la touffeur de la caravane ils baisent devant les généraux morts. “Térence tu penses à autre chose, Térence nous n'avons jamais qu'une heure au pifomètre devant nous, Térence la tolérance de ta femme me soûle – Térence ta femme d'occasion se fait chier. Marre de tes coups d'œil à ta montre, de baiser sur un quai de gare Je me demande pourquoi tu t'obstines à jouir Maintenant Térence tu dégages.
Commentaires
Et quand on dérive sans le moindre souffle de vent, que faut-il faire ? La réponse est : tout l'équipage à quatre pattes, et on pète dans les voiles.