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C O L L I G N O N 1
A R T I C L E S
É D I T I O N S D U T I R O I R
Semper clausus
LES ÉGRÉGORES - LE MAÎTRE DU JOUIR
Remarquable contrepied conceptuel dans l'utilisation du matériau théâtral : les Ègrégores, dans Le maître du jouir, représenté pour Sigma en fac de Lettres à Talence, se sont livrés à une démonstration particulièrement convaincante de leur capacité à inverser leur projet scénique.
Alors que dans Jules César de Shakespeare ils avaient servi avec générosité un texte aussi luxuriant dans sa problématique explicative que dans son foisonnement poétique, La Maison du jouir (c'était celle de Gauguin aux Marquises) met en scène une dramaturgie d'où la phrase et le mot ont été aussi délibérément éliminé que dans le cinéma muet.
Vêtu d'un improbable costume de marin-explorateur fin de siècle à la Francis Garnier, le protagoniste, rompu à la pratique des arts martiaux, construit dans son espace une relation au corps particuiièrement expressive, dans un effarement permanent. Or cet espace est celui d'une Asie fantasmée, avec ses femmes européennes ou indigènes aux faces resserrées dans des bas de soie remaquillés, son étincelant dragon au corps intérieur hérissé de perches, ses béquillards clopinant qui défilent devant la providentielle pharmacie de campagne de l'Homme Blanc – ses marionnettes géantes ou phalliques.
Qu'il s'agisse ou non de Victor Segalen importe peu, dans la mesure où nous autres Longs-Nez reconnaissons nos fascinations pour l'incompréhensible Asie, nos attirantes frayeurs : l'Asie est une femme qui s'offre et se refuse, une pelote griffue qui s'agrippe et qu'on viole, entre fumerie d'opium et cimetière au sol trop vert, trop fluo, et ineffablement spongieux.
Nous assistons de l'intérieur, de notre intérieur, au déploiement inévitable et envahissant de notre quincaillerie sexuelle occidentale, sans pouvoir échapper à nos délicieuses terreurs, hétéro- ou homosexuelles, imbibés que nous sommes par les délices du pays de Chine tout autant que pollueurs par le fait même de nos imaginaires projetés comme un venin délétère.
Ce qui constitue l'originalité de ce spectacle consiste en un remarquable travail d'expression corporelle, à un niveau qui s'apparente à la chorégraphie : ce que l'on appelle "construire un masque", ou une "figure" : chacun maîtrise un répertoire à la fois précis et variable à l 'infini à partir de schémas soigneusement caractérisés.
Utilisation parfaitement pertinente aussi dans le décor des couleurs flashantes – enfin omniprésence inséparable, consusbstantielle, d'une bande musicale et parlée transportant l'auditeur dans une Asie refantasmée jusque par l'oreille – La maison du jouir présentée par la troupe des Égrégores a su démontrer dans l'irrévérencieuse continuité de son inspiration la capacité de surprendre et de captiver un auditoire, qui exprima in fine sa très vive reconnaissance.
HARDT VANDEKEEN PARA-CONSPUATION 2043
Conspuation : beau titre. L'hiatus en [üa] figure si bien le mouvement des lèvres pouor "sputer", pour mollarder, que l'on se prend à regretter la bonne vieille langue des huées : "Cons-puez Tar-dieu ! Cons-puez Tar-dieu !" - dans Les Thibault, je suppose ?
Beau titre. Mais ensu-ite, bien des choses se gâtent ou s'approfondissent. Les maux sont bien vus, les causes à mon sens mal dégagées.
Qu'il soit bien vrai que la littérature se meure est à démontrer : la chose se dit depuis qu'il y a des littératures, et Voltaire et Goncourt s'en sont plaints à leur tour et à leur époque ; cependant j'y inclinerais davantage, considérant l'abandon de la lecture, qui n'est pas, comme les commentateurs en chipotent, un phénomène de mode, mais de masse, et sans qu'il soir besoin d'attendre sur x décennies les données de Dieu sait quelle extrapolation statisticienne...
Rappelont tout de même que Diderot tirait à 700 exemplaires dans un pays d'illettrés... Moi aussi j'ai crue morte la littérature, tant que je n'étais pas publié ; à présent que je le suis, elle me semble se porter beaucoup mieux. Quoique...
Le fléchissement des mœurs littéraires (et non de la quantité des publications) semble procéder, comme dit Christophe Manon, d'un excès de commentaires ; la littérature étouffe sous la glose. Mais il ne s'agit là que d'un phénomène universitaire ! Quel texte n'a pas été, dès l'origine, glosé ? J'aimerais bien qu'on me glosât... Tout crève plutôt de ce que le critique est aussi, pour sa part, un littérateur – ce qui ne serait encore que moindre mal, si ne venait se greffer là-dessus un jeu de renvois d'ascenseurs...
Ce qui semble bien plus grave, déjà relevé par Loyen dans La littérature latine tardive, c'est que désormais des professeurs écrivent pour des étudiants et vice-versa, reconstituant le cercle infernal non seulement de la basse latinité, mais de toute la littérature en latin du Moyen Âge. Nous sommes un futur Moyen Âge. Ne l'oublions jamais.
Le drame est que le peuple, par essence, ne saurait s'intéresser à la littérature. Et qu'il n'existe pas de bon vieux temps – sauf peut-être dans l'Athènes classique. Que celui qui a des yeux, lise, et après nous le Déluge.
Qu'il nous soit permis pour finir de soigneusement distinguer, chez BHL et chez Sollers, ce qui ressortit au masque médiatique et ce qui relève de la littérature. Que BHL fasse le clown à Sarajevo n'enlève rien à l'excellence de son style oral – Les derniers jours de Baudelaire, sauf le chapitre trois, où la patte du nègre est bien visible, forme un pénible contraste avec les embrouillaminis de je ne sais quoi "à visage humain" et de la Défense des intellectuels. Bizarre, non ? Même observation chez Sollers, bien qu'il crache dans la soupe, c'est-à-dire sur les femmes – quelle platitude... Il n'aurait plus manqué que Duras, pour parfaire la trilogie des Cibles Obligées. Mais ces trois-là ôtés, qui reste-t-il ?
Car s'il fallait vraiment taper sur les masques médiatiques de Breton, de Sartre ou de Malraux,une bibliothèque n'y suffirait pas...
C'est tout pour aujourd'hui, Manon, Yann Houry, mais nous aurions tant de choses à nous dire... Poursuivons au marteau-piqueur, pas toujours au même endroit, mais hardi, bicepsons, bicepsons...
ÉCRIRE ET ÉDITER Février-Mars 2049 LE SINGE VERT ,
FAIT DU PUBLIPOSTAGE 6
Le Singe Vert est envoyé 1) aux amis, 2) aux grosses huiles, 3) aux illustres inconnus dont je pêche les augustes patronymes dans l'inépuisable vivier d'É&É justement.
Les amis, ça passe – mais ils n'ont strictement aucune importance, vous pensez... Les grosses huiles, elles n'en ont rien à b. Mais alors les petits péteux, ceux-là, qu'est-ce qu'ils se croivent ! L'un d'eux : "Pourquoi m'envoyez-vous ça à Moâ, comment pouvez-vous vous permettre de me contacter, comment avez-vous eu "mes coordonnées", quel rapport y a-t-il entre votre connerie à ma Haute intelligence ?" - Putain ! encore un peu il ferait donner les Mounties, ce con ! Du coup je n'écris plus qu'à titre personnel, fini le chef ou le vice-sous-chef-adjoint-auxiliaire-en-stage de ceci ou cela, sinon les voilà tous sur leurs grands chevaux comme si j'avais mollardé dans leur assiette !
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C'est que attention coco, ce n'est plus l'individu qui a le droit de s'exprimer, on communique entre "Hantrreprrises", qui prennent des risques financiers ! (que l'auteur prenne le risque de virer dingue dans son écriture, ils n'en ont strictement rien à foutre, ils sont là, eux, les éditeurs, les publicateurs de revues, pour prendre le train en marche et se faire du pognon, un point c'est tout) (ou en perdre, mais que d'histoires !)
Il y en a même un, dessinateur "humoristique" belge (un cumulard) qui se demande non seulement air connu pourquoi je lui écris "à lui", mais qui me conseille (quime conseille, le con ! À moi, 56 balais) "de trouver une revue qui veuille m'éditer" (ça ne te ferait rien de t'apercevoir, connard, que je suis une revue ? - sans blague, me soumettre à un comité de lecture ! est-ce que par hasard le Singe Vert prendrait des airs de cabot pleurnichard qui remue la queue pour être publié ?), et qui se demande, le dessinateur, "en quoi [il] pourrai[t] bien [m'] être utile" !
Mais mon pauvre con, tu lis ou tu ne lis pas, moi je t'envoie ma revue comme tous ceusses qui te bourrent ta boîte aux lettres de pub, tu lis ou tu jettes, qu'est-ce que c'est que cet univers pourri où l'on n'imagine plus s'envoyer quoi que ce soit autrement que pour en retirer une "utilité" ?
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Exemples. J'envoie un manuscrit à un petit éditeur ; il me retourne son catalogue - qu'est-ce quej'en ai à foutre de son catalogue ? Je réponds aussi sec : "Monsieur, vous ne m'avez pas demandé mon manuscrit, vous me le renvoyez : c'est logique. Je ne vous avais pas demandé votre catalogue non plus ; je vous le renvoie aussi : c'est logique.
Et la Françoise Verny : "Monsieur, votre manuscrit n'apporte pas grand-chose et ce n'est pas très intéressant." Comment est-ce que je te l'ai envoyée dans les cordes, la Verny ! "Madame, j'envoie mes manuscrits comme on joue au loto. Je ne vois pas le directeur de la Française des jeux m'annoncer que j'ai perdu, en me précisant que les numéros que j'ai joués "n'apportent pas grand-chose" et "ne sont pas intéressants". - Comment peut-on à ce point entasser le mépris sur l'arrogance ? Cétait sans doute une immense faveur que de lire les éminents commentaires de Mme Françooise Verny Elle-Même en Personne ?
Et telle autre qui se croit obligée de préciser qu'elle ne m'a pas lu", n'est-ce pas, "parce qu'elle se consacre exclusivement à Son Œuvre ? -- Allez, je dis le nom : Florence Chapsal.
Qui d'autre se consacre essentiellement à son Écriture ? Et ne se prend pas non plus pour de la merde ?
Le Singe Veert.
ÉCRIRE ET ÉDITER Décembre- Janvier 2049 LE SINGE VERT,
FAIT LE BOUFFON
Un Bel Éditeur un jour me confia une commande : à partir d'une vie de papa, fallait se fendre
ÉCRIRE ET ÉDITER Février-Mars 2049 LE SINGE VERT , BRÛLE LES PLANCHES 5
Monsieur Grybouxe,
Vous me demandez à quel titre vous recevez le Singe vert. Air connu. Je pourrais vous répondre que c'est comme ça, publicitaire. Mais ici vous êtes personnellement visé, mon cher. Vous êtes en effet auteur dramatique. Et franchement, regardez-moi bien dans les yeux, sans rougir : vous ne vous sentez pas un peu, un tantinet gêné, juste un peu à peine, de lire parmi la foule en délire la belle banderole du Théâtre Bordel, l'affiche de la saison de l'année ?
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"Euripide, Claudel, Grybouxe- Corneille et Beckett" ? Ça ne vous choque pas quelque part ? Vous pouvez toujours mettre un pied devant l'autre, avec vos chevilles enflées jusqu'aux couilles ? "M.Grybouxe, hauteur dramatique". Moi non plus, certes ! , je ne me prends pas pour de la Scheiße, mais franchement, là j'aurais ressenti comme une insulte. Qui pourrait penser que je m'estimasse suffisamment niais, sufisamment retors, suffisamment pucelle, pour tolérer que mon nom figurât LÀ, en si prestigieuse compagnie ? Ou alors (car j'ai ma bonne dose d'hypocrisie moi aussi) en petits caractères en bas à droite, pour que ça se détache mieux, que ça fasse bien ressortir mon ignominie minuscule ?
Et que ça se permet en plus de faire une petite conférence modestissime sur "Grybouxe réunira ses amis et ceux qui l'apprécient sans le connaître, son œuvre et son – attention ne pétez pas s'il vous plaît – son UNIVERS ? Et moi alors, je n'en ai pas un non plus peut-être d'Univers avec mes 30 volumes dans le placard ? Et ça laisse répandre sur son nom qu'"il est la modestie et la gentillesse incarnées " ? Et cet autre qui laisse imprimer dans sa préface qu'il est modeste ? Mais j'ai
le sens du ridicule Môssieu, j'ai la dignité de mon ridicule, moi, et si quelque thuriféraire poisseux venait à préfacer Mon Œuvre en faisant allusion à ma modestie, je l'attaquerais en diffamation (si j'avais le pognon) mais je ne tolérerais pas qu'un ami me foute le pavé de l'ours à la gueule ( - C'est quoi, le pavé de l'ours ? - Ta gueule, va faire du rap).
Et que je t'intrigue dans le torchon local, et que je te dégomme une interview dans Bordel-Chieronde, et que cet autre encore fasse sa conférence (encore) sur le thème de l'exclusion et de l'exil, parce que le mot exclusion figure à la page 44 et que tout écrivain vit métaphoriquement en exil... Je vous le répète, il n'y a que les intrigants, que dis-je, les adaptés en société, les gens
normaux, les gens comme tout le monde qui se font éditer et connaître. Il vendraient des frites ou des capotes en argile (en glaise, waf waf !) que ce serait idem.
ÉCRIRE ET ÉDITER Février-Mars 2049 LE SINGE VERT , BRÛLE LES PLANCHES 6
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Mort aux faibles, on vous dit. Bien sûr que j'aimerais aussi faire des ronds de jambe sans me casser la gueule, ou bien simplement civilisé en Société, le beurre et l'argent du beurre, mais la logique je l'emmerde, dès que je l'ouvre c'est pour dire une connerie, on me l'dit depuis tout petit ! (remarquez, certains ont l'air con sans même ouvrir la bouche...).
Marius, le grand général romain ( - C'est qui, ce con ? - Ta gueule, va faire du reggae) n'ayant pu se faire accepter par la noblesse se tourna vers le côté populaire. Le Singe Vert pareil. Putain tu viens encore de fausser la glace...
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ÉCRIRE ET ÉDITER Août – Septembre 2049 LE SINGE VERT ET LE BON DIEU PASSE 7
Pour faire une bonne dame patronesse... chantait Jacques Brel. Et pour faire un bon écrivain à succès, que faut-il ? Caleçon les bons ingrédients ? Je vais vous le dire : il faut être Dieu. Carrément, c'est-à-dire comme chacun sait (il me le disait encore l'autre jour) le point d'intersection où les contraires se résolvent, s'annulent.
Tout à la fois être superbon et superdégueulasse. Non pas travailler avec acharnement dans son coin, comme essayent de nous le faire croire tous ceux qui veulent engluer les éternels puceaux que nous sommes – "Dix conseils pour éditer", c'est de qui cette rubrique à la con ? Ni "avoir de la chance", ce qui est une explication de mes couilles (le Singe Vert, c'est comme Bigard : c'est pas drôle mais le seul procédé comique consiste à se demander quand est-ce qu'il va enfin lâcher ses couilles ; à ce moment-là toutes les mémés rigolent et c'est parti) du style pourquoi le pavot fait-il dormir – parce qu'il a une vertu dormitive... voilà ce qu'on enseignait en faculté au Moyen Âge, lecteur : la vertu dormitive du pavot – beau titre, d'ailleurs...
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Non. Il faut pour réussir aimer les gens, passionnément, se fendre en épanchements (ça c'est du Joseph Prudhomme), larmoyer sur l'extraordinaire nature humaine, aimer la vie, les femmes, les cacahuètes et remercier Dieu tous les jours d'exister, le cœur sur la main et la main dans le portefeuille. Et puis constituer autour de soi une petite camarilla. Dire toujours du bien de soi, comme le conseillait Marcel Achard, parce qu'après ça vous revient et qu'on ne sait plus de qui c'est parti.
Et un petit peu de La Bruyère tant qu'on y est : "Le talent, la vertu, le mérite ? Bah ! soyez d'une coterie." On peut la fabriquer soi-même avec plusieurs spécialistes d'ascenseur. Signature à Paris (le pied-à-terre à Paris est ri-gou-reu-se-ment indispensable) : Oh bonjour Michtroume, comment ça boume ? J'ai lu ta fable, c'est formidable ! Salut Dubreuil, j'ai lu ton recueil, c'est formideuil ! Ave Troudük, j'au lu ton truc, c'est majuscule ! - à grand renfort de moulinets de bras.
Et par derrière, mon vieux, il faut coucher utile, politiquer utile, se faire des relations utiles ET sincères, perversion suprême exactement semblable à celle des putes qui se mélangent tellement les pinceaux, les pauvres, qu'elles s'imaginent être aimées à proportion de l'argent qu'elles reçoivent...
Et balancer impitoyablement les gêneurs, les anciennes connaissances, bien leur faire
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ÉCRIRE ET ÉDITER Août – Septembre 2049 LE SINGE VERT ET LE BON DIEU PASSE 8
comprendre qu'un tel "ne correspond plus à l'esprit de la boîte", mais sans lui dire pourquoi surtout, de sorte qu'il se ronge bien jusqu'à l'os d'autocritique, façon Inquisition, façon Staline : mais qu'est-ce que j'ai bien pu foutre ? Bref, tu dois être un parfait ami de l'homme, à t'embuer lesyeux devant la moindre salade de fruits jolie-jolie-jolie, "une si merveilleuse sensibilité humaine !" et, EN MÊME TEMPS, le plus sincèrement, le plus innocemment, le plus inconsciemment du monde, être le plus parfait des salauds froids.
C'est pourquoi, en vérité, je vous le dis, pour devenir écrivain (peintre, musicien) à succès, il faut retenir et résoudre à la fois en soi tous les contradictoires, c'est-à-dire être marqué du Signe de Dieu, du Signe Prédestiné de la Gloire de Dieu, ÊTRE Dieu. Sous ce signe tu vaincras. Amen.
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ÉCRIRE ET ÉDITER Octobre-Novembre 2049
LE SINGE VERT POSTULE À L'ACA
Je soussigné Singevert, né dans la douleur le 20.10.98 déclare par la présente présenter ma candidature à l'Acadmie Sans-Fraises (avec fraises pour ceux qui les sucrent). D'abord et d'une, je le porte déjà, l'habit vert.
Ensuite, comme nasillait Hans Dort-Moisson, recevant Madame Marguerite Yourcenar, "nous acceptons par minou une femme, car les règles de l'Académie, comme celles de la grammaire, sont faites pour être violées" - femmes, règles, violées, amis de la vieille galanterie, bonsouaiaiaiaiaire – pas trop dur de ne pas fourcher de la langue, M. le Secrétaire Perpétuel ? surtout sur Yourcenar – bref !
Eh bien, le Singe Vert hausse son ambition jusqu'aux fonctions de bouffon. L'Acacacadémie française (Godot !) malgré ses appas rances, manque de bouffon. Non pas d'un bouffon métaphorique, ou allégorique, mais d'un véritable bouffon, qui rote qui pète et que rien n'arrête, comme c'est marqué sur la casquette.
À l'heure bénie où Mike Jagger dit Papy Stones, après avoir roulé, rebondi, vessé sur toutes les scènes de London ou d'ailleurs, symbole flamboyant de la contestècheun of the establishment, accepte avec recconnaissance l'anoblissement à lu conféré par Her Gracious Majesty – Lord Mike Jagger ! ; - les Beatles ayant jadis reçu l'ordre de Dieu sait quelle Jarretière ou Bain de la même Queen pouor "services rendus à l'État (ce qui provoqua aussitôt une vague de renvois – de décorations... - de la part de valeureux guerriers qui l'avaient méritée, eux, sur les champs de bataille ) ; sans oublier Sheila et autres valeureux défenseurs de la culture française pourvus de la Légion d'honneur – le Singe Vert, parfaitement, postule.
Lui aussi lutte vaillamment pour la Défense de la Langue Française, contre ceux qui proposent une "simplification" de la langue; futel ortografic, et qui s'indigneraient qu'on déplaçât la moindre griffure sur un idéogramme chinois. Conseillez donc plutôt à votre nouvelle recrur, M. Chen, d'orthographier son nom à la française, avec un T : Tcheng, comme Djamel, car il n'y a nulle raison pour nous de transcrire les langus à caractères étrangers en suivant, de ce côté-ci de la Manche, cette indigne graphie anglo-saxonne ; et par pitié, rendez-nos édipe, l'ésophage et les édèmes, carà présent nul ne sait plus s'il faut prononcer Cœlio Seulio ou Queulio, pauvre Musset ! puisque Monsieur Teurzieuff lui-même a cédé aus sirènes d'Eueueudipe.
Et pour en revenir aux règles (confer supra) – ne comptez pas sur moi pour les visites de sollicitation.
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ÉCRIRE ET ÉDITER FÉVRIER – MARS 2050
LE SINGE VERT ET LE BORDEAUX AMBIANT
Il était une fois au bord de la Garonne (si c’était le Rhône on dirait au bord de lui, pour la Garonne ce sera le bord d’elle, bref, la scène est à Bordeaux) une succession de hangars vétustes, régulièrement à détruire, delenda sunt hangara. Cela coupait la ville de son fleuve, c’éait moche et ça puait. Tout juste bon à y placer le Salon du livre, qui recevait des invités, Hangar Quatorze très précisément. Une des dernières fois, les écrivains du Maroc (tiens, ils ont des écrivains dans ces pays-là ?) repartirent mortifiés par un accueil plutôt frais voire méprisant, en notre beau Sud-Ouest où le magret s’attirera toujours plus de considération que le Maghreb.
Et le salon marchait Abel-Caha, de visite de Juppé en alerte à la bombe, jusqu’au jour où un trait deplume décida de sa déportation (du salon) vers les zones paludéennes de Bordeaux-Lac. Pour finalement se faire remplacer par un très judicieux éclatement nommé “Carrefour des littératures”, en plusieurs endroits de la CUB (Communauté Urbaine de Bordeaux, ça fait mieux) mais surtout pas au Hangar Quatorze, promis à l’ignomigneuse destruction par Juppé Quatorze, le Roi Soleil.
Déjà étaient passés à la trappe le Mai musical (ballet classique, musique classique, opéra classique), qui faisaient le délice des rosières et des rombières, l’un n’empêchant pas l’autre, et Sigma, défunt festival des Contestataires off off aussi institutionnalisé il faut bien le dire que le parti révolutionnaire du même nom au Mexique (j’ai déjà vu un Mexicain, mais jamais un mec si con, c’est de l’incontinence, pardon). Bref ! les dépenses à Bordeaux, c’estle tramway, ou train de vay, comme disait monsieur Fenouillard.
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ÉCRIRE ET ÉDITER AVRIL-MAI 2050 “LE SINGE VERT FAIT SON NUMÉRO” 9
Il était une fois une petite revue ridicule, banale et inutile (c’est fou ce qu’on peut encourager les nouveaux talents) qui aurait bien voulu obtenir son ISSN (International Standard Serial Number) comme tout le monde, comme les grandes. Facile, pensa le dirlo-rédac-chef : puisque c’est obligatoire ! Il demanda donc conseil à un directeur de revue, bien connaisseur, bien docte, qui lui dit doctement qu’[il] ne l‘aura[it] jamais,son ISSN, parce que (moue condescendante, air de s’en foutre, suggestion de s’en foutre également pour soi, tout cela a si peu d’importance, les grands hommes vont chier comme tout le monde) la no
uvelle revue coûtait zéro balle donc valait peau de balle, traitant de conneries sans rapport avec l’actualité – par exemple les Phâmes, l’Enseignement, le Moyen-Orient, thèmes ringards qui comme chacun sait n’ont aucun, mais alors absolument aucun rapport avec ladite actualité – alors que la Khommission d’Hâttribution n’est-ce pas se montrait très, très, très sévère pour accorder ladite immatriculation.
* * * * *
Moi, impressionné, je gambergeais, me disant qu’il était tout de même bizarre qu’un numéro obligatoire fût si difficile à obtenir ; mon interlocuteur m’exhibait donc TRÈS, TRÈS négligemment des papiers TRÈS, TRÈS sérieux, avec une en-tête sur plusieurs lignes bien bien serrées, pour montrer que lui, n’est-ce pas, Directeur d’une Revue Très Sérieuse (DRTS) n’avait pas obtenu son numéro, de telle sorte que moi, avec ma feuille de chou minable (« mais qui veux-tu que ça intéresse, Toi parlant de Toi, ppfff... »), je ne pouvais tout de même pas envisager d’avoir l’immonde toupet de prétendre à une distinction si abracadabrantesquement honorifique.
Jusqu’à ce que je consultasse l’Excellent ouvrage de Jean-Jacques (pas Rousseau, l’autre) appelé La Revue mode d’emploi, qui m’apprit que le numéro était effectivement attribué au-to-ma-ti-que-ment, quel que fût son tirage, son intérêt et surtout – ah!surtout ! - l’Hinvestissement Phynancier du Kréateur (je suis lourd, mais je vous emmerde). De fait, en écrivant directement à la Bibliothèque Nationale, tedeguenezdéguévoudougoubiendinguin, j’ai obtenu enfin, au n°49, mon ISSN, de haute lutte par retour du courrier, après avoir croupi quatre ans dans l’illégalité la plus ordurière. Comment se fait-ce comme on dit au club ? Eh bien tout simplement parce que mon interlocuteur m’avait parlé de CPPAP rue St-Dominique, me faisant confondre l’un avec l’autre, pour que je ne reçusse pas l’estampillage.
Nous appellerons cela de la rétention d’information, ni plus ni moins que dans ces entreprises à la mords-moi l’nœud fustigées par *** - au demeurant le meilleur ami du monde, on s’est encore fait une bouffe dernièrement.
Ce que je ne suis jamais arrivé à savoir, en revanche, c’est la raison pour laquelle Ma revue (tombons le masque) doit obligatoirement fournir 2 (deux) exemplaires à Môssieur le Procureur de la République et 1 (un) à la Préfecture – avec sec rappel à l’ordre si je m’abstiens – tandis que la Revue de l’Autre n’a jamais eu besoin de ça, pfff… Sans doute y a-t-il d’un côté des revues qui savent se débrouiller, et de l’autre les revues qui ne savent pas se débrouiller – du moins sans le Calcre - « tous des cons ». Mais ça fait longtemps que la France est le pays du « deux poids deux mesures ».
Le Singe Vert, ISSN : 1638-2625, et toc.
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ÉCRIRE ET ÉDITER JUIN-SEPT. 2003« LE SINGE VERT A SES TÊTES DE TURC » 12
Traduttore, traditore. Il n’y a pas que les traducteurs pour être des traîtres, comme le dit ce proverbe italien aussi connu qu’intraduisible. Mais aussi les éditeurs (tenez, l’Atelier du Loup, rue du Général Mollard à Luxembourg – bien sûr j’ai tout transformé, eh, pelure!) ici visés en la personne de Mme Vrai-T’as-Faux - « qui se sent morveux qu’il se mouche » (j’adore les vieux proverbes). Vous me direz que les tuiles, je les collectionne. Parfaitement. Tête de con, c’est tout un art, c’est pas tout le monde qui peut se le permettre.
N’oubliez jamais, éternels blackboulés, que les Aûûûtres, vous savez, ceux dont tous les médias vous disent le plus grand bien – jusqu’à l’excellent Cyrulnik (hélas!) qui vient vendre sa soupe à Tout le monde en parle – les Aûûûtres savent vous jurer leurs grands dieux que vous affabulez. Le parano, c’est toujours vous. Con, baratineur, ridicule… Et aussitôt après, sans s’embarrasser de la contradiction, les Aûûûtres vous avisent que c’est vous (la victime) qui avez tout fait pour que ça arrive, et que franchement, hein, vous avez le plus grand tort de vous plaindre. Mais les Aûûûtres sont des cons. Les éditeurs de textes étrangers en l’occurrence (devise de la môme Vrai-T’as-Faux).
*
Bon j’explique. Je confie un texte sur Tchipitoglou Mamatiki (c’est une poétesse turque – eh oui, le Singe Vert, quelque temps résident au bord du Bosphore, a appris le turc). Son nom signifie « confiture dans le vagin », c’est dire le niveau lyrique et loukoum des textes. Je l’ai connue personnellement mais pas bibliquement (y a des limites). Nous échangeâmes six ans (six ans!) de correspondance de retour d’exil (quoique pour moi l’exil fût plutôt de rentrer en France), durant lesquels elle me conseillait sur telle nuance, nous discutions tel sous-entendu, telle ineffable subtilité. Et pas question de traduire « une mer de blé » même de mot à mot, à cause du mot merde si souvent ouï de mes oreilles incrédules place Saint-Sulpice (et en anaphore par-dessus le marché : «Mer de ceci, mer de cela... »).
Le français est une langue délicate, bande de cuistres sorbonnicoles. Traduire un poème, Grosbœufs, c’est impossible. Ce n’est pas une question de grammerde. Mais de feeling.
Adonques! J’envoie mon texte. Et, ça vous étonne ? un autre est publié ! Pas pire que moi, mais pas meilleur ! Attends, c’est pas fini ! Je reçois, incroyable mais vrai, un prospectus de lancement ! Avec le prix ! Il faut que je paye l’achat de mon concurrent ! Attends, c’est pas tout ! Avec l’exquise délicatesse qui la caractérise, la Vrai-T’as-Faux m’invite à la petite soirée ! J’espère que tu viendras ! Ben, tu peux te la brosser, ma vieille.
Tu sais pourquoi tu as publié l’autre ? Parce qu’il porte un costume cravate. Parce qu’il arrive dans les bagages de l’InsTiTuTurk de France. Parce que le monsieur sait téléphoner aux bonnes personnes au bon moment. Parce qu’il ne se laisse pas oublier, lui, il sait maintenir le suivi relationnel. C’est à de semblables expressions que l’on se sent envahi du sentiment sublime d’avoir enfin franchi la Très Sublime Porte de la Khommunication humaine : le « suivi relationnel » !
J’aime pas les gens. Vous aimez les gens, vous ? « Rats-Porcs-Humains » , franchement…
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ÉCRIRE ET ÉDITER Décembre-Janvier 2051 PRÉFÈRE LE SPLEEN À L'IDÉAL 6
Il n'y a pas (y a-t-il ?) de sottes lectures ? Le cadre professionnel d'une constante remise à jour – la lecture perpétuelle étant à l 'enseignement (mon métier defainéant) ce que la barre est à la danse – m'amène à découvrir un texte de Sartre sur Baudelaire. Un peu tard "dira quelque sage cervelle" (La Fontaine) mais "la chair est triste, hélas ! Et j[e n]'ai [pas] lu tous les livres".
J'en profite, tirant tous azimuts, pour clore la gueule à ce ponte qui me prédisait les pires remords sur mon lit d'agonie pour ne m'être occupé, ma vie dupont, que du passé, alors que SKISFÈMAINTENANT a tellement plus d'importance...
Le passé n'est pas mort... Et j'en apprends bien plus sur le monde actuel en relisant mes vieilles bibles sur la Chute du Monde Romain qu'en oyant les dépêches de FoxTV.
Bref : Sartre sur Baudelaire, ça te concerne encore, et pour toujours, si tu n'es pas dans le casting de Nice People. Sartre, comme d'hab, se gargarise de sa petite philosophie pour classes de terminales selon laquelle chacun de nous est exactement libre et responsable de son destin : "Nous chercherions en vain une circonstance dont [Baudelaire] ne soit pleinement et lucidement responsable."
Sur l'excellence poétique, pas un mot. D'ailleurs Flaubert lui aussi n'était qu'un sale bourgeois profiteur qui n'a pu écrire ses petites merdes démodées qu'en se faisant entretenir par sa nièce. Ho Mais ! C'est futé, Jean-Paul, c'est de goche, et sans accent circonflexe. C'est toujours le vieil air ranci, des gauchistes les plus besancenotto-puceautiers aux vieux droitiers les plus goitreux : c'est la faute à çui qui se plaint, c'est la faute à la victime. C'est la faute à Bauelaire si sa mère s'est remariée illico, syphilitique, opiomane (pas tant que ça) ; tourmenté, torturé, bafoué par les bourgeois, spleenétique, et traîné dans la boue pour immoralité (la même année que Flaubert, pour sa Bovary ; encore un qui l'avait fait exprès, pour se faire plaindre). Tout fait pour.
Sa faute onvous dit, entièremetn sa faute ! Si les juifs etc., ils l'ont bien cherché ! Et allez donc ! "Il a (Baudelaire) refusé l'expérience, rien n'est venu du dehors le changer et il n'a rien appris" – vas-y mon pote !
Parce que d'après Sartre et les sartrillons, votre expérience vous forme, tas de cons ! Vous recevez un choc C, vous devez avoir une réaction R, et plus vite que ça ! Ta femme te trompe, donc tu ne l'aimes plus ! Tu te goures, donc tu laisses tomber ! Évident !
Enfin ! C'est quand même pas sorcier d'être libre ! Gros malin : "[l]a vérité [que] le choix libre de l’homme fait de soi-même s’identifie absolument avec ce qu’on appelle sa destinée” ! Par-dessus bord Œdipe, par-dessus bord, l’ambiguïté, par-dessus bord, l’impuissance, par-dessus bord, la différence des tempéraments ! Il faut réagir, c’est jeune, c’est obligatoire, c’est moderne, c’est tendance.
Ça ne t’est jamais arrivé d’être paralysé, pauvre péteux, de savoir très exactement ce que tu aurais dû faire. “Je vois où est le bien, et je ne peux pas m’empêcher de faire le mal”, je ne me souviens plus si c’est Diderot qui l’aurait piqué à saint Augustin, le fils de sainte Monique, trois qui la tiennent, pour devenir un homme libre. Devenir Jean-Paul Sartre par exemple, et tout à fait par hasard ! Sartre a donc démasqué ce planqué de Baudelaire ! Alleluiah ! Il a piétiné son cadavre pour le faire entrer dans son petit cercueil à ses petites mesures philosophiques du Havre à lui, dans son lit de Procuste ! - t’occupe, va faire du rap…
Baudelaire n’a pas su évoluer, ah le con ! Ben, si vous en connaissez beaucoup, des cons comme Baudelaire, vous m’en remettrez une tonne, je suis preneur.
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ÉCRIRE ET ÉDITER FÉVRIER-MARS 2051 LE SINGE VERT SE BROUILLE L’ÉCOUTE 8
Pour se promouvoir coco, il ne faut rien négliger : la radio, justement. Tu repères une émission littéraire et tu lui envoies un CD de derrière les fagots, où tu réponds aux questions de ta gentille dadame qu’est ta copine mais que tu vouvoies pour faire sérieux. C’est moi que j’ai recevu le disque, avec le petit laïus introducteur sur « les petits jeunes qu’il faut pousser ». Déjà moi, c’est les vieux que je promeus. Courageux mais pas téméraire, je parle de Molière et du Corps de Roland.
Imaginons un instant avoir les archives filmées d’un Céline ou d’un Proust interviewés jeunes : mais c’est fini ce temps-là mon pote ! Des Proust et des Céline y en a des paquets, ils encombrent les quais de gare de province. On fait le pari que certains d’entre eux entreront plus tard dans le panthéon des grands écrivains – ce serait dans le pantalon, encore… Mais y en a plus de grands écrivains, et ceux que tu me présentes, plus ils sont raplapla et comme tout le monde, plus ils s’en vantent !
Et que je te découvre à l’audition une de ces petites paires de prétentieux, tout péteux tout modestes, l’air d’avoir déjà à trente ans passés passé sa courte existence devant les micros, et que je te disserte sur « mon œuvre », et que je m’étale avec énormité : Ma vie ce n’est pas d’écrire ; je mène une vie comme tout le monde, il faut sortir, voir des gens, c’est ça qui l’emporte sur écrire. Cette rage qu’ils ont tous, les homos comme les originaux, d’être à tout pris « comme tout le monde », au cas où la supériorité ferait de l’ombre à Monsieur Dugloupf.
Si c’est pour être comme tout le monde, je ne vois pas la nécessité d’écrire. Attends, autre perle : si je devais souffrir pour écrire, je cesserais d’écrire. Youkaïdi haïdi haïda. C’est aui ces guignols ? Je les ai écoutés tous les deux : parole, ils ont la même voix, les mêmes intonations de premiers de la classe, mêmes protestations de modestie et de conformisme.
Déjà et d’une ils ont édité chez Galligrasseuil, chez Flammedefion ou chez Juju. Quant tu en es arrivé là, tu peux te reposer, il paraît que non, en tout cas ce n’est pas moi qui vais promouvoir ces intrigants de salon. Tous ceux qui savent vivre, aimer, converser, se trouver à 30 piges un copain cinéaste pour reprendre leurs écrits, je les emmerde.
Ils aiment leurs éditeurs qui leur dit ce qui correspond à eux-mêmes et ce qui n’y correspond pas, c’est du sous-sartrisme ma parole, les autres vous connaissent mieux que vous-mêmes ; je n’ai jamais pu suivre le quart du huitième du moindre conseil, souple comme un verre de lampe, trop peur de me renier, il faut que ça vienne de moi-même autrement va te faire keuneu, je ne comprends COLLIGNON ARTICLES
ÉCRIRE ET ÉDITER FÉVRIER-MARS 2051 LE SINGE VERT SE BROUILLE L’ÉCOUTE 9
pas comment on peut obéir à des injonctions, même amicales, venant d’un éditeur avec une calculette à budget à la place du cervelet.
Me casser la gueule soit, mais de haut. Et puis je n’aime pas ce qui bouge, ce qui est jeune, ce qui est vivant. Je n’aime que les vieux, les déjà morts, la poussière, et la petite couronne de gloire là-haut dans les cieux. Ridicule. Prétentieux. Original. Narcisse et répulsif. Tant mieux. Moi je ne trouve jamais quoi leur dire aux autres. Au bout de dix minutes je regarde ma montre, c’est quand que tu dégages ?
Le pire c’est qu’ils écrivent bien, qu’ils parlent bien, ces petits gonzes interchangeables et propres sur eux, sûreté de soi, lucidité, maturité, compétence, c’est quoi ces zozos ? Ces préformatés ? Qui ont appris « leur métier »? Alors écrivain c’est un métier comme un autre ? Et les complexés ils font quoi eux ? Ils prennent du Prozac ? Du Viagra ? Quoi les petits nouveaux ? Toujours jeunes et déjà quinqua ? Toutes les cartes en main alors ? Y en a même un qui chante ! Avec une copine qui joue de la guitare! Voulez-vous me cacher cet amour de la vie, avec son bout de queue qui dépasse ?
Allez les petits jeunes, et bonne galère quand même ! Agagah…
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ÉCRIRE ET ÉDITER Février-Mars-Avril 2052 JUSTICE PARTOUT, JUSTICE NULLE PART 9
C'est facile je vous jure de couler n'importe qui sous n'importe quel prétexte : un prof, un sauvageon, une petite entreprise fraîche et joyeuse. Vous faites valoir que les réunions se font par téléphone, vous montez en épingle les rapports tronqués avec bénéfices quasi nuls, alors que vous savez pertinemment (c'est l'éditeur lui-même qui vous le jubile) que la boîboite sort trois books par mois ; et que vous avez placé une brique dans le capital pouor que ça vous rapporte paraît-il au prorata des bénefs, pour vous ça fera zéro zloty zéro groszy fautilovski vous l'envelopper ?
...Sans oublier que le pauvre éditeur vachement à plaindre vous a soigneusement niqué la diffusion sans oublier de promouvoir celle des autres sans un centime de droits d'auteurs (les sept cents premiers exemplaires pour que dalle vous connaissez la chanson) TOUT EN s'offrant des voyages professionnels à Paris ou Verdun "payés par la maison" – je ne suis jamais arrivé à piger comment on peut être à la fois personnellement fauché avec une société prospère yop'là boum – faut croire qu'il y a d'étranges phénomènes de porosité tout de même, malgré les HURLEMENTS vertueux des gestionnaires – tiens t'en v'là du pognon miraculeusement surgi pour les stands au Salon du livre, pour loger les écrivains à l'hôtel – les droits d'auteur que dalle et peau de balle on t'a dit t'es sourdingue ? C'est tout de même un peu fort et si je peu me permettre – un brin mystérieux.
Je vais t'en couler des boîtes moi, par paquets de dis. Là-dessus interviendra un baveux (avocat...) qui vous démontrera que non seulement vous n'y connaissez rien, mais que vous avez eu tort de poser la question, encore heureux si vous y coupez de la diffamation (en vérité s'il y a une partie des programmes de français dont je me torche, c'est bien leur putain d' "art de convaincre" ; il n'y a si absurde affirmation qui ne puisse se démontrer avec des arguments parfaitement valables, on peut même vous démontrer en agitant les manches que les Juifs ont tué Dieu ou qu'une ligne courbe est droite (il suffit de la considérer point par point, ou vue de haut, ou considérée par rapport à la curvité : elle est courbe par rapport à la curvité, donc elle est droite – tout se démontre.)
Total c'est la Cour qui se juge, chiche qu'on voie (vers Drancy, ouaf ! L'humour) Papon plaider un de ces quatre devant la Cour des droits de l'Homme, et il se trouve même des pros pour s'apitoyer sur les gencives de Saddam. Et d'ici peu si mon Blair a une tête de nœud et que je ne porte pas de cache-sexe allez hop, attentat à la pudeur, j'ai regardé une meuf avec con-cu-pis-cence : harcèlement, je l'ai bousculée dans le métro sans lui mettre : délit de promesse non tenue ou tentative de viol (à pile ou face) – amis amphibologues bonsoir.
En Angleterre c'est carrément l'allule suce-pecte qui vous envoie en taule, j'ai intérêt à porter le voile. Je vais vous en foutre, moi, du droit. Justice partout, justice nulle part. Tenez, je connais une boulangerie qui marche du feu de Dieu, elle s'appelle "Le Four". Mais elle est "Rue de la Juiverie" : antisémitisme et incitation àlahaine raciale, vingt mecs dehors dont cinq juifs toujours ça de pris.
Le dédain, la déconsidération, l'écœurement, ça m'écœure moi-même. C'est malsain, le mépris : ça vous laisse la langue fielleuse et le rectum mélancolique. On a l'impression de se salir. Un peu du même ordre que le sursaut de fierté à considérer les culs d'ours qui ardissonnent avec leurs nègres et leurs euros, alprs qu'on est en train de trimer dans le mépris des autres. On se secoue la merde mais on a marché dedans quand même. Un petie Chateaubriand pour la route : Le mépris est une denrée rare à n'utiliser qu'avec parcimonie, vu le grand nombre de nécessiteux.
Sans oublier les crocos qui l'avaient bien dit, qui l'avaient bien prévu, qu'il ne fallait pas employer "ce mec" mecki, bizarre ! bizarre ! ...quelques années auparavant disaient pis que pendre de not' fine équipe, nous traitant de cons, comme quoi on excitait les féroces auteurs contre les gentils éditeurs, alors que ces derniers n'est-ce pas prenaient des risques financiers, et que si ma foi telle revue suivez mon regard disparaissait du paysage ce ne serait fin finale pas si mal – dis donc mon p'tit saint ce ne serait pas toi par hasard – "je leur avais bien dit" – qui aurait tiré les ficelles ?
Allez on m'appelle pour la bouffe, mieux vaut sonner la soupe que soupe sonner, c'et vieux comme Hérode – M'sieur ! Y m'a traité de vieux comérode ! - quand est-ce qu'on crève – mais non Ménon, survivons, gnaquons, cautérisons les décollations d'hydres, ne finissons pas, jamais, ce serait trop répugnant, trop hideux, trop dégoulinant, trop mollardier, trop sanieux, trop charognard, trop dégueulatif, dans un aussi saut caveau (arf...)
COLLIGNON ARTICLES "CRÈVE, LANGUE FRANÇAISE, CRÈVE"
date imprécise, début 2052
Plus moyen de lire une copie de seconde sans être assailli de fautes énormes : c'est long ou on c'est le plus battu ("là où l'on c'est", traduction), pygane pour pyjama. Ma dernière (vous n'allez pas me croire) c'est "ils est" pour "ils sont", parole d'honneur, dans le contexte ce ne pouvait être que "ils sont", même plus l'orthographe ou la grammaire, carrément la destructuration, même plus de la conjugaison, mais de l'esprit, de la pensée. J'exagère, j'invente. Toutes proportions gardées, on refusait de croire les rescapés des camps, "allez voir un psychiatre" disaient les médecins, je connais tous vos trucs par cœur, braves couillons.
Alors nous aussi, on se tait, on n'ose plus vous les dire à l'antenne ces perles-là, parce que ça faitmarrer tout le monde, et nous passons pour des vieux cons, des Professeurs Nimbus qui marchent dans la merde parce qu'ils oublient de regarder le trottoir, vous savez, là où se passe "la vraie vie". De toute façon dès qu'on sexe-prime vous pensez bien c'est un journalisse qui intervient, qui interrompt très vite, hilare, il est au courant lui le journalisse, il a tout compris le journalisse, il va tout vous espliqué le journalisse, il fait la pluie et le beau temps, il se croit à la foire aux cancres. Ha ha les profs toujours aussi cons, même qu'on n'a pas le sens de l'humour hein mon con, rigolez, rigolez, ce n'est pas grave, c'est folklorique, rigolez, rigolez, journalistes bourrés de diplômes et prétendant qu'il n'en faut pas.
Ignorance des journalistes, le pathétique Drevet ne sachant même pas localiser Nevers ni Limoges sur une carte de France. La tête à claque de Patrick Pujadas, qui sait toujours tellement tout mieux que tout le monde, et qui pense qu'il suffit d'avoir l'air con et suffisant pour prouver son "esprit d'indépendance" et sa "salutaire insolence" ("c'est moi que je suis le journaliste
et sans moi t'existerait même pas ") en agitant de part et d'autre son rictus de Pierrot crevard, même que c'est pas la peine de l'entarter vu le kilo de fard qu'il se trimballe sur la gueule, j'ai été obligé d'admirer Sarkozy RIEN QUE pour ça je crève de honte.
Rigole Pivot rigole, qui se marre parce qu'une convocation en anglais à une série de conférences en France en anglais mentionne la charmante locaité de "Gif upon Yvette", Pivot qui se fait vertement engueuler par la môme Bombardier du Québec sous la pression constante de l'anglo-saxon là-bas dans sa colonie, voilà-t-il pas que Le Monde publie des extraits du Daily Mail, j'exige le "Frankfurer Beobachter" et "El País", merde alors, shit, Scheisse, stik, même mon distributeur de billets de banque qui m'annonce que ma transaction is being processed, et si t'es macaroni vaffanculo è chiaro. On les aura bande de parents d'élève, c'est bien la Chrichtine Ockrent qui déplorait que la langue française ne soit pas assez rapide par rapport à l'anglais, tu n'as qu'à te faire engager à NBC, avec ta gueule de French Native no executive woman tu vas te faire virer eh Martienne.
Et il y a même des salopards qui font leur entretien d'embauche en anglais, c'est interdit, interdit, verboten, verstanden ? Vousne saviez donc pas qu'en Hollande les films anglo-saxons passaient désormais sans sous-titres ? Comment dit-on "T'as qu'à savoir l'anglais connard" en néerlandais ? Les langues c'est pas fait pour communiquer, c'est fait pour refléter l'âme du monde en autant de langues qu'il faut, et moins il y a de langues moins il y a d'âme. Ce pas pour rien si le prof de français c'est la catégorie qu'Allègre blaire le moins, parce que c'est eux qui font réféchir bien plus que les profs de maths je suis désolé. Seulement quand je lis "bien qu'ils eurent disparu" dans la Nouvelle Revue Pédagogique, "j'aimerais mieux des cendres sous la terre" dans un manuel de Sixième, je fais quoi ? ("Oh il exagère ! franchement ! du moment qu'on se comprend ! " mais je les connais par cœur vos conneries je vous dis vos conneries !) - parce que ça gagne les manuels maintenant forcément imprimés par des hommes faut pas demander, ça commence toujours par le sexe faible, celui qui croit comme disait Simone de Beauvoir que le vide de son cerveau lui meuble les couilles. Vous savez les ouvriers qui manipulent les bouquins sur des gros chariots dans les sous-sols de Gallimard "ah non moi hein j'ouv' jamais un liv', on va pas sferchier j'en vois toute la sainte journée des bouquins alors le soir pff merde alors vous allez pas me faire la morale".
Quand tu vois ce que sont devenues les consignes pour faire un cours de français tu te tape la tête against tht walls, c'est un jargon pas possible, quand tu lis que les interrogations de bac ne doivent pas avoir de "dimension psychologique" autrement dit on ne parle plus de la psychologie des personnages et de ce que ça nous apprend sur la nôtre propre, c'est des histoires de grand-papa ça ne se fait plus, mais que tout doit être considéré sous l'angle technique, tu fais quoi ? "l'espace intersticiel de liberté" pour "cour de récréation", "le référentiel bondissant aléatoire" pour un ballon de rugby, connards ! "devoir tabulaire" pour "devoir sur table" ! Connards ! C'est dans un SKETCH de Guy Bedos, dont je persiste à répéter qu'il est super-excellent : "Les cours de français sont au plaisir de lire ce que la gynécologie est à l'érotisme".
Mais "du moment qu'on se fait comprendre" et quand je te nique du doigt t'as même pas besoin de savoir le kurde. La fameuse question du niveau de langage, "ils correspondent en texto mais savent retrouver le vrai langage français en situation", ouais ben je recopie peut-être le "dictionnaire du français précieux" mais au train où ça va ils ne le sauront peut-être plus très longtemps le français le vrai. Déjà que j'ai corrigé au bac un candidat qui prétendait que le français ça ne servait à rien ("servir ! servir !" disent-ils, du latin "servus", l'esclave), "vu qu'on s'apprend la langue les uns aux autres et que ça sert à rien d'écrire des textes qui prennent la tête et que personne y comprend" – j'ai failli mettre "connard" en marge mais au bac on n'a pas le droit, j'ai juste mis "apologie de l'inculture" et j'ai foutu deux, par chance le mec était entièrement hors sujet parce que sinon j'aurais pu me faire emmerder.
Tenez une fois au brevet des crétins pardon "des collèges" il y en a un autre qui me raconte une histoire d'imagination pleine de rebondissements et tout et tout, mais truffée de "il arrivit", "je m'aperceva", "nous concluâmes" et "il repartut" ; eh bien il y avait pourtant des collègues pour mettre la moyenne à cette merde en raison de l'imagination.Mais bande de nazes tout le monde il en a, de l'imagination, SAUF Pujadas, d'accord pour l'imagination mais pas en grammaire, désolé, je suis un vieux con et j'assume. Comme disait un peintre "je ne vais tout de même pas expliquer chaque travaux" hein j'ai failli dire hein comme on pousse pour chier mais je suis poli, je connais même un éditeur qui m'a traité de puriste et qui trouve qu'après tout c'est logique, bien sûr toute faute a sa logique : "les vachent , broutes" il y a la marque du pluriel donc pas de faute, confusion entre les noms et les verbes on ne va pas se faire chier pour si peu, ça n'a pas d'importance, quand on ne comprendra plus la langue écrite il va pouvoir s'en écrire des conneries sur les tracts tiens donc... Les cours en langues, de géographie, de maths, directement en anglais bien sûr, en allemand, en espagnol, ils vont être chouettes nos élèves, bientôt au point de Pénitzientadgité dans Le nom de la Rose qui a su tellement de langues qu'il n'en sait plus aucune. Babel, et pas Bab-el-Oued hélas. Sans oublier les langues régionales, moi je veux bien qu'elles soient enseignées, mais si l'on supprime l'article de la Constitution précisant que la langue française est la langue de la république, vous ne voyez donc pas bande de péquenots que c'est l'anglais qui va s'engouffrer là-dedans comme dans une brèche hollandaise ?
Le français c'est trop compliqué, parole d'élève. "Ton corps aussi c'est bien compliqié t'as qu'à te couper les bras et les jambes comme ça ce sera plus simple" – il a été cloué l'élève il a fermé sa gueule j'espère qu'il s'en souviendra jusqu'à la fin de sa vie, quand il ne pourra même plus comprendre son petit-fils - déjà que tu ne les comprends plus au téléphone, ah ne faites plus de gosses, j'ai peur, j'ai peur, je vais crever et c'est tout, mais ma langue, ma belle langue, merde, pourquoi est-ce qu'elle doit crever avec moi, moi je veux bien crever, mais ma langue pourquoi ma langue ? C'est ça le comble de l'injustice vous voyez, et de la pourriture la plus dégueulasse.
Mon royaume et ma vie, ma vie pour un imparfait du subjonctif !
C O L L I G N O N 1
A R T I C L E S
É D I T I O N S D U T I R O I R
Semper clausus
LES ÉGRÉGORES - LE MAÎTRE DU JOUIR
Remarquable contrepied conceptuel dans l'utilisation du matériau théâtral : les Ègrégores, dans Le maître du jouir, représenté pour Sigma en fac de Lettres à Talence, se sont livrés à une démonstration particulièrement convaincante de leur capacité à inverser leur projet scénique.
Alors que dans Jules César de Shakespeare ils avaient servi avec générosité un texte aussi luxuriant dans sa problématique explicative que dans son foisonnement poétique, La Maison du jouir (c'était celle de Gauguin aux Marquises) met en scène une dramaturgie d'où la phrase et le mot ont été aussi délibérément éliminé que dans le cinéma muet.
Vêtu d'un improbable costume de marin-explorateur fin de siècle à la Francis Garnier, le protagoniste, rompu à la pratique des arts martiaux, construit dans son espace une relation au corps particuiièrement expressive, dans un effarement permanent. Or cet espace est celui d'une Asie fantasmée, avec ses femmes européennes ou indigènes aux faces resserrées dans des bas de soie remaquillés, son étincelant dragon au corps intérieur hérissé de perches, ses béquillards clopinant qui défilent devant la providentielle pharmacie de campagne de l'Homme Blanc – ses marionnettes géantes ou phalliques.
Qu'il s'agisse ou non de Victor Segalen importe peu, dans la mesure où nous autres Longs-Nez reconnaissons nos fascinations pour l'incompréhensible Asie, nos attirantes frayeurs : l'Asie est une femme qui s'offre et se refuse, une pelote griffue qui s'agrippe et qu'on viole, entre fumerie d'opium et cimetière au sol trop vert, trop fluo, et ineffablement spongieux.
Nous assistons de l'intérieur, de notre intérieur, au déploiement inévitable et envahissant de notre quincaillerie sexuelle occidentale, sans pouvoir échapper à nos délicieuses terreurs, hétéro- ou homosexuelles, imbibés que nous sommes par les délices du pays de Chine tout autant que pollueurs par le fait même de nos imaginaires projetés comme un venin délétère.
Ce qui constitue l'originalité de ce spectacle consiste en un remarquable travail d'expression corporelle, à un niveau qui s'apparente à la chorégraphie : ce que l'on appelle "construire un masque", ou une "figure" : chacun maîtrise un répertoire à la fois précis et variable à l 'infini à partir de schémas soigneusement caractérisés.
Utilisation parfaitement pertinente aussi dans le décor des couleurs flashantes – enfin omniprésence inséparable, consusbstantielle, d'une bande musicale et parlée transportant l'auditeur dans une Asie refantasmée jusque par l'oreille – La maison du jouir présentée par la troupe des Égrégores a su démontrer dans l'irrévérencieuse continuité de son inspiration la capacité de surprendre et de captiver un auditoire, qui exprima in fine sa très vive reconnaissance.
HARDT VANDEKEEN PARA-CONSPUATION 2043
Conspuation : beau titre. L'hiatus en [üa] figure si bien le mouvement des lèvres pouor "sputer", pour mollarder, que l'on se prend à regretter la bonne vieille langue des huées : "Cons-puez Tar-dieu ! Cons-puez Tar-dieu !" - dans Les Thibault, je suppose ?
Beau titre. Mais ensu-ite, bien des choses se gâtent ou s'approfondissent. Les maux sont bien vus, les causes à mon sens mal dégagées.
Qu'il soit bien vrai que la littérature se meure est à démontrer : la chose se dit depuis qu'il y a des littératures, et Voltaire et Goncourt s'en sont plaints à leur tour et à leur époque ; cependant j'y inclinerais davantage, considérant l'abandon de la lecture, qui n'est pas, comme les commentateurs en chipotent, un phénomène de mode, mais de masse, et sans qu'il soir besoin d'attendre sur x décennies les données de Dieu sait quelle extrapolation statisticienne...
Rappelont tout de même que Diderot tirait à 700 exemplaires dans un pays d'illettrés... Moi aussi j'ai crue morte la littérature, tant que je n'étais pas publié ; à présent que je le suis, elle me semble se porter beaucoup mieux. Quoique...
Le fléchissement des mœurs littéraires (et non de la quantité des publications) semble procéder, comme dit Christophe Manon, d'un excès de commentaires ; la littérature étouffe sous la glose. Mais il ne s'agit là que d'un phénomène universitaire ! Quel texte n'a pas été, dès l'origine, glosé ? J'aimerais bien qu'on me glosât... Tout crève plutôt de ce que le critique est aussi, pour sa part, un littérateur – ce qui ne serait encore que moindre mal, si ne venait se greffer là-dessus un jeu de renvois d'ascenseurs...
Ce qui semble bien plus grave, déjà relevé par Loyen dans La littérature latine tardive, c'est que désormais des professeurs écrivent pour des étudiants et vice-versa, reconstituant le cercle infernal non seulement de la basse latinité, mais de toute la littérature en latin du Moyen Âge. Nous sommes un futur Moyen Âge. Ne l'oublions jamais.
Le drame est que le peuple, par essence, ne saurait s'intéresser à la littérature. Et qu'il n'existe pas de bon vieux temps – sauf peut-être dans l'Athènes classique. Que celui qui a des yeux, lise, et après nous le Déluge.
Qu'il nous soit permis pour finir de soigneusement distinguer, chez BHL et chez Sollers, ce qui ressortit au masque médiatique et ce qui relève de la littérature. Que BHL fasse le clown à Sarajevo n'enlève rien à l'excellence de son style oral – Les derniers jours de Baudelaire, sauf le chapitre trois, où la patte du nègre est bien visible, forme un pénible contraste avec les embrouillaminis de je ne sais quoi "à visage humain" et de la Défense des intellectuels. Bizarre, non ? Même observation chez Sollers, bien qu'il crache dans la soupe, c'est-à-dire sur les femmes – quelle platitude... Il n'aurait plus manqué que Duras, pour parfaire la trilogie des Cibles Obligées. Mais ces trois-là ôtés, qui reste-t-il ?
Car s'il fallait vraiment taper sur les masques médiatiques de Breton, de Sartre ou de Malraux,une bibliothèque n'y suffirait pas...
C'est tout pour aujourd'hui, Manon, Yann Houry, mais nous aurions tant de choses à nous dire... Poursuivons au marteau-piqueur, pas toujours au même endroit, mais hardi, bicepsons, bicepsons...
ÉCRIRE ET ÉDITER Février-Mars 2049 LE SINGE VERT ,
FAIT DU PUBLIPOSTAGE 6
Le Singe Vert est envoyé 1) aux amis, 2) aux grosses huiles, 3) aux illustres inconnus dont je pêche les augustes patronymes dans l'inépuisable vivier d'É&É justement.
Les amis, ça passe – mais ils n'ont strictement aucune importance, vous pensez... Les grosses huiles, elles n'en ont rien à b. Mais alors les petits péteux, ceux-là, qu'est-ce qu'ils se croivent ! L'un d'eux : "Pourquoi m'envoyez-vous ça à Moâ, comment pouvez-vous vous permettre de me contacter, comment avez-vous eu "mes coordonnées", quel rapport y a-t-il entre votre connerie à ma Haute intelligence ?" - Putain ! encore un peu il ferait donner les Mounties, ce con ! Du coup je n'écris plus qu'à titre personnel, fini le chef ou le vice-sous-chef-adjoint-auxiliaire-en-stage de ceci ou cela, sinon les voilà tous sur leurs grands chevaux comme si j'avais mollardé dans leur assiette !
* * * *
C'est que attention coco, ce n'est plus l'individu qui a le droit de s'exprimer, on communique entre "Hantrreprrises", qui prennent des risques financiers ! (que l'auteur prenne le risque de virer dingue dans son écriture, ils n'en ont strictement rien à foutre, ils sont là, eux, les éditeurs, les publicateurs de revues, pour prendre le train en marche et se faire du pognon, un point c'est tout) (ou en perdre, mais que d'histoires !)
Il y en a même un, dessinateur "humoristique" belge (un cumulard) qui se demande non seulement air connu pourquoi je lui écris "à lui", mais qui me conseille (quime conseille, le con ! À moi, 56 balais) "de trouver une revue qui veuille m'éditer" (ça ne te ferait rien de t'apercevoir, connard, que je suis une revue ? - sans blague, me soumettre à un comité de lecture ! est-ce que par hasard le Singe Vert prendrait des airs de cabot pleurnichard qui remue la queue pour être publié ?), et qui se demande, le dessinateur, "en quoi [il] pourrai[t] bien [m'] être utile" !
Mais mon pauvre con, tu lis ou tu ne lis pas, moi je t'envoie ma revue comme tous ceusses qui te bourrent ta boîte aux lettres de pub, tu lis ou tu jettes, qu'est-ce que c'est que cet univers pourri où l'on n'imagine plus s'envoyer quoi que ce soit autrement que pour en retirer une "utilité" ?
* * * *
Exemples. J'envoie un manuscrit à un petit éditeur ; il me retourne son catalogue - qu'est-ce quej'en ai à foutre de son catalogue ? Je réponds aussi sec : "Monsieur, vous ne m'avez pas demandé mon manuscrit, vous me le renvoyez : c'est logique. Je ne vous avais pas demandé votre catalogue non plus ; je vous le renvoie aussi : c'est logique.
Et la Françoise Verny : "Monsieur, votre manuscrit n'apporte pas grand-chose et ce n'est pas très intéressant." Comment est-ce que je te l'ai envoyée dans les cordes, la Verny ! "Madame, j'envoie mes manuscrits comme on joue au loto. Je ne vois pas le directeur de la Française des jeux m'annoncer que j'ai perdu, en me précisant que les numéros que j'ai joués "n'apportent pas grand-chose" et "ne sont pas intéressants". - Comment peut-on à ce point entasser le mépris sur l'arrogance ? Cétait sans doute une immense faveur que de lire les éminents commentaires de Mme Françooise Verny Elle-Même en Personne ?
Et telle autre qui se croit obligée de préciser qu'elle ne m'a pas lu", n'est-ce pas, "parce qu'elle se consacre exclusivement à Son Œuvre ? -- Allez, je dis le nom : Florence Chapsal.
Qui d'autre se consacre essentiellement à son Écriture ? Et ne se prend pas non plus pour de la merde ?
Le Singe Veert.
ÉCRIRE ET ÉDITER Décembre- Janvier 2049 LE SINGE VERT,
FAIT LE BOUFFON
Un Bel Éditeur un jour me confia une commande : à partir d'une vie de papa, fallait se fendre
ÉCRIRE ET ÉDITER Février-Mars 2049 LE SINGE VERT , BRÛLE LES PLANCHES 5
Monsieur Grybouxe,
Vous me demandez à quel titre vous recevez le Singe vert. Air connu. Je pourrais vous répondre que c'est comme ça, publicitaire. Mais ici vous êtes personnellement visé, mon cher. Vous êtes en effet auteur dramatique. Et franchement, regardez-moi bien dans les yeux, sans rougir : vous ne vous sentez pas un peu, un tantinet gêné, juste un peu à peine, de lire parmi la foule en délire la belle banderole du Théâtre Bordel, l'affiche de la saison de l'année ?
* * *
"Euripide, Claudel, Grybouxe- Corneille et Beckett" ? Ça ne vous choque pas quelque part ? Vous pouvez toujours mettre un pied devant l'autre, avec vos chevilles enflées jusqu'aux couilles ? "M.Grybouxe, hauteur dramatique". Moi non plus, certes ! , je ne me prends pas pour de la Scheiße, mais franchement, là j'aurais ressenti comme une insulte. Qui pourrait penser que je m'estimasse suffisamment niais, sufisamment retors, suffisamment pucelle, pour tolérer que mon nom figurât LÀ, en si prestigieuse compagnie ? Ou alors (car j'ai ma bonne dose d'hypocrisie moi aussi) en petits caractères en bas à droite, pour que ça se détache mieux, que ça fasse bien ressortir mon ignominie minuscule ?
Et que ça se permet en plus de faire une petite conférence modestissime sur "Grybouxe réunira ses amis et ceux qui l'apprécient sans le connaître, son œuvre et son – attention ne pétez pas s'il vous plaît – son UNIVERS ? Et moi alors, je n'en ai pas un non plus peut-être d'Univers avec mes 30 volumes dans le placard ? Et ça laisse répandre sur son nom qu'"il est la modestie et la gentillesse incarnées " ? Et cet autre qui laisse imprimer dans sa préface qu'il est modeste ? Mais j'ai
le sens du ridicule Môssieu, j'ai la dignité de mon ridicule, moi, et si quelque thuriféraire poisseux venait à préfacer Mon Œuvre en faisant allusion à ma modestie, je l'attaquerais en diffamation (si j'avais le pognon) mais je ne tolérerais pas qu'un ami me foute le pavé de l'ours à la gueule ( - C'est quoi, le pavé de l'ours ? - Ta gueule, va faire du rap).
Et que je t'intrigue dans le torchon local, et que je te dégomme une interview dans Bordel-Chieronde, et que cet autre encore fasse sa conférence (encore) sur le thème de l'exclusion et de l'exil, parce que le mot exclusion figure à la page 44 et que tout écrivain vit métaphoriquement en exil... Je vous le répète, il n'y a que les intrigants, que dis-je, les adaptés en société, les gens
normaux, les gens comme tout le monde qui se font éditer et connaître. Il vendraient des frites ou des capotes en argile (en glaise, waf waf !) que ce serait idem.
ÉCRIRE ET ÉDITER Février-Mars 2049 LE SINGE VERT , BRÛLE LES PLANCHES 6
* * *
Mort aux faibles, on vous dit. Bien sûr que j'aimerais aussi faire des ronds de jambe sans me casser la gueule, ou bien simplement civilisé en Société, le beurre et l'argent du beurre, mais la logique je l'emmerde, dès que je l'ouvre c'est pour dire une connerie, on me l'dit depuis tout petit ! (remarquez, certains ont l'air con sans même ouvrir la bouche...).
Marius, le grand général romain ( - C'est qui, ce con ? - Ta gueule, va faire du reggae) n'ayant pu se faire accepter par la noblesse se tourna vers le côté populaire. Le Singe Vert pareil. Putain tu viens encore de fausser la glace...
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ÉCRIRE ET ÉDITER Août – Septembre 2049 LE SINGE VERT ET LE BON DIEU PASSE 7
Pour faire une bonne dame patronesse... chantait Jacques Brel. Et pour faire un bon écrivain à succès, que faut-il ? Caleçon les bons ingrédients ? Je vais vous le dire : il faut être Dieu. Carrément, c'est-à-dire comme chacun sait (il me le disait encore l'autre jour) le point d'intersection où les contraires se résolvent, s'annulent.
Tout à la fois être superbon et superdégueulasse. Non pas travailler avec acharnement dans son coin, comme essayent de nous le faire croire tous ceux qui veulent engluer les éternels puceaux que nous sommes – "Dix conseils pour éditer", c'est de qui cette rubrique à la con ? Ni "avoir de la chance", ce qui est une explication de mes couilles (le Singe Vert, c'est comme Bigard : c'est pas drôle mais le seul procédé comique consiste à se demander quand est-ce qu'il va enfin lâcher ses couilles ; à ce moment-là toutes les mémés rigolent et c'est parti) du style pourquoi le pavot fait-il dormir – parce qu'il a une vertu dormitive... voilà ce qu'on enseignait en faculté au Moyen Âge, lecteur : la vertu dormitive du pavot – beau titre, d'ailleurs...
X
Non. Il faut pour réussir aimer les gens, passionnément, se fendre en épanchements (ça c'est du Joseph Prudhomme), larmoyer sur l'extraordinaire nature humaine, aimer la vie, les femmes, les cacahuètes et remercier Dieu tous les jours d'exister, le cœur sur la main et la main dans le portefeuille. Et puis constituer autour de soi une petite camarilla. Dire toujours du bien de soi, comme le conseillait Marcel Achard, parce qu'après ça vous revient et qu'on ne sait plus de qui c'est parti.
Et un petit peu de La Bruyère tant qu'on y est : "Le talent, la vertu, le mérite ? Bah ! soyez d'une coterie." On peut la fabriquer soi-même avec plusieurs spécialistes d'ascenseur. Signature à Paris (le pied-à-terre à Paris est ri-gou-reu-se-ment indispensable) : Oh bonjour Michtroume, comment ça boume ? J'ai lu ta fable, c'est formidable ! Salut Dubreuil, j'ai lu ton recueil, c'est formideuil ! Ave Troudük, j'au lu ton truc, c'est majuscule ! - à grand renfort de moulinets de bras.
Et par derrière, mon vieux, il faut coucher utile, politiquer utile, se faire des relations utiles ET sincères, perversion suprême exactement semblable à celle des putes qui se mélangent tellement les pinceaux, les pauvres, qu'elles s'imaginent être aimées à proportion de l'argent qu'elles reçoivent...
Et balancer impitoyablement les gêneurs, les anciennes connaissances, bien leur faire
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ÉCRIRE ET ÉDITER Août – Septembre 2049 LE SINGE VERT ET LE BON DIEU PASSE 8
comprendre qu'un tel "ne correspond plus à l'esprit de la boîte", mais sans lui dire pourquoi surtout, de sorte qu'il se ronge bien jusqu'à l'os d'autocritique, façon Inquisition, façon Staline : mais qu'est-ce que j'ai bien pu foutre ? Bref, tu dois être un parfait ami de l'homme, à t'embuer lesyeux devant la moindre salade de fruits jolie-jolie-jolie, "une si merveilleuse sensibilité humaine !" et, EN MÊME TEMPS, le plus sincèrement, le plus innocemment, le plus inconsciemment du monde, être le plus parfait des salauds froids.
C'est pourquoi, en vérité, je vous le dis, pour devenir écrivain (peintre, musicien) à succès, il faut retenir et résoudre à la fois en soi tous les contradictoires, c'est-à-dire être marqué du Signe de Dieu, du Signe Prédestiné de la Gloire de Dieu, ÊTRE Dieu. Sous ce signe tu vaincras. Amen.
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ÉCRIRE ET ÉDITER Octobre-Novembre 2049
LE SINGE VERT POSTULE À L'ACA
Je soussigné Singevert, né dans la douleur le 20.10.98 déclare par la présente présenter ma candidature à l'Acadmie Sans-Fraises (avec fraises pour ceux qui les sucrent). D'abord et d'une, je le porte déjà, l'habit vert.
Ensuite, comme nasillait Hans Dort-Moisson, recevant Madame Marguerite Yourcenar, "nous acceptons par minou une femme, car les règles de l'Académie, comme celles de la grammaire, sont faites pour être violées" - femmes, règles, violées, amis de la vieille galanterie, bonsouaiaiaiaiaire – pas trop dur de ne pas fourcher de la langue, M. le Secrétaire Perpétuel ? surtout sur Yourcenar – bref !
Eh bien, le Singe Vert hausse son ambition jusqu'aux fonctions de bouffon. L'Acacacadémie française (Godot !) malgré ses appas rances, manque de bouffon. Non pas d'un bouffon métaphorique, ou allégorique, mais d'un véritable bouffon, qui rote qui pète et que rien n'arrête, comme c'est marqué sur la casquette.
À l'heure bénie où Mike Jagger dit Papy Stones, après avoir roulé, rebondi, vessé sur toutes les scènes de London ou d'ailleurs, symbole flamboyant de la contestècheun of the establishment, accepte avec recconnaissance l'anoblissement à lu conféré par Her Gracious Majesty – Lord Mike Jagger ! ; - les Beatles ayant jadis reçu l'ordre de Dieu sait quelle Jarretière ou Bain de la même Queen pouor "services rendus à l'État (ce qui provoqua aussitôt une vague de renvois – de décorations... - de la part de valeureux guerriers qui l'avaient méritée, eux, sur les champs de bataille ) ; sans oublier Sheila et autres valeureux défenseurs de la culture française pourvus de la Légion d'honneur – le Singe Vert, parfaitement, postule.
Lui aussi lutte vaillamment pour la Défense de la Langue Française, contre ceux qui proposent une "simplification" de la langue; futel ortografic, et qui s'indigneraient qu'on déplaçât la moindre griffure sur un idéogramme chinois. Conseillez donc plutôt à votre nouvelle recrur, M. Chen, d'orthographier son nom à la française, avec un T : Tcheng, comme Djamel, car il n'y a nulle raison pour nous de transcrire les langus à caractères étrangers en suivant, de ce côté-ci de la Manche, cette indigne graphie anglo-saxonne ; et par pitié, rendez-nos édipe, l'ésophage et les édèmes, carà présent nul ne sait plus s'il faut prononcer Cœlio Seulio ou Queulio, pauvre Musset ! puisque Monsieur Teurzieuff lui-même a cédé aus sirènes d'Eueueudipe.
Et pour en revenir aux règles (confer supra) – ne comptez pas sur moi pour les visites de sollicitation.
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ÉCRIRE ET ÉDITER FÉVRIER – MARS 2050
LE SINGE VERT ET LE BORDEAUX AMBIANT
Il était une fois au bord de la Garonne (si c’était le Rhône on dirait au bord de lui, pour la Garonne ce sera le bord d’elle, bref, la scène est à Bordeaux) une succession de hangars vétustes, régulièrement à détruire, delenda sunt hangara. Cela coupait la ville de son fleuve, c’éait moche et ça puait. Tout juste bon à y placer le Salon du livre, qui recevait des invités, Hangar Quatorze très précisément. Une des dernières fois, les écrivains du Maroc (tiens, ils ont des écrivains dans ces pays-là ?) repartirent mortifiés par un accueil plutôt frais voire méprisant, en notre beau Sud-Ouest où le magret s’attirera toujours plus de considération que le Maghreb.
Et le salon marchait Abel-Caha, de visite de Juppé en alerte à la bombe, jusqu’au jour où un trait deplume décida de sa déportation (du salon) vers les zones paludéennes de Bordeaux-Lac. Pour finalement se faire remplacer par un très judicieux éclatement nommé “Carrefour des littératures”, en plusieurs endroits de la CUB (Communauté Urbaine de Bordeaux, ça fait mieux) mais surtout pas au Hangar Quatorze, promis à l’ignomigneuse destruction par Juppé Quatorze, le Roi Soleil.
Déjà étaient passés à la trappe le Mai musical (ballet classique, musique classique, opéra classique), qui faisaient le délice des rosières et des rombières, l’un n’empêchant pas l’autre, et Sigma, défunt festival des Contestataires off off aussi institutionnalisé il faut bien le dire que le parti révolutionnaire du même nom au Mexique (j’ai déjà vu un Mexicain, mais jamais un mec si con, c’est de l’incontinence, pardon). Bref ! les dépenses à Bordeaux, c’estle tramway, ou train de vay, comme disait monsieur Fenouillard.
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ÉCRIRE ET ÉDITER AVRIL-MAI 2050 “LE SINGE VERT FAIT SON NUMÉRO” 9
Il était une fois une petite revue ridicule, banale et inutile (c’est fou ce qu’on peut encourager les nouveaux talents) qui aurait bien voulu obtenir son ISSN (International Standard Serial Number) comme tout le monde, comme les grandes. Facile, pensa le dirlo-rédac-chef : puisque c’est obligatoire ! Il demanda donc conseil à un directeur de revue, bien connaisseur, bien docte, qui lui dit doctement qu’[il] ne l‘aura[it] jamais,son ISSN, parce que (moue condescendante, air de s’en foutre, suggestion de s’en foutre également pour soi, tout cela a si peu d’importance, les grands hommes vont chier comme tout le monde) la no
uvelle revue coûtait zéro balle donc valait peau de balle, traitant de conneries sans rapport avec l’actualité – par exemple les Phâmes, l’Enseignement, le Moyen-Orient, thèmes ringards qui comme chacun sait n’ont aucun, mais alors absolument aucun rapport avec ladite actualité – alors que la Khommission d’Hâttribution n’est-ce pas se montrait très, très, très sévère pour accorder ladite immatriculation.
* * * * *
Moi, impressionné, je gambergeais, me disant qu’il était tout de même bizarre qu’un numéro obligatoire fût si difficile à obtenir ; mon interlocuteur m’exhibait donc TRÈS, TRÈS négligemment des papiers TRÈS, TRÈS sérieux, avec une en-tête sur plusieurs lignes bien bien serrées, pour montrer que lui, n’est-ce pas, Directeur d’une Revue Très Sérieuse (DRTS) n’avait pas obtenu son numéro, de telle sorte que moi, avec ma feuille de chou minable (« mais qui veux-tu que ça intéresse, Toi parlant de Toi, ppfff... »), je ne pouvais tout de même pas envisager d’avoir l’immonde toupet de prétendre à une distinction si abracadabrantesquement honorifique.
Jusqu’à ce que je consultasse l’Excellent ouvrage de Jean-Jacques (pas Rousseau, l’autre) appelé La Revue mode d’emploi, qui m’apprit que le numéro était effectivement attribué au-to-ma-ti-que-ment, quel que fût son tirage, son intérêt et surtout – ah!surtout ! - l’Hinvestissement Phynancier du Kréateur (je suis lourd, mais je vous emmerde). De fait, en écrivant directement à la Bibliothèque Nationale, tedeguenezdéguévoudougoubiendinguin, j’ai obtenu enfin, au n°49, mon ISSN, de haute lutte par retour du courrier, après avoir croupi quatre ans dans l’illégalité la plus ordurière. Comment se fait-ce comme on dit au club ? Eh bien tout simplement parce que mon interlocuteur m’avait parlé de CPPAP rue St-Dominique, me faisant confondre l’un avec l’autre, pour que je ne reçusse pas l’estampillage.
Nous appellerons cela de la rétention d’information, ni plus ni moins que dans ces entreprises à la mords-moi l’nœud fustigées par *** - au demeurant le meilleur ami du monde, on s’est encore fait une bouffe dernièrement.
Ce que je ne suis jamais arrivé à savoir, en revanche, c’est la raison pour laquelle Ma revue (tombons le masque) doit obligatoirement fournir 2 (deux) exemplaires à Môssieur le Procureur de la République et 1 (un) à la Préfecture – avec sec rappel à l’ordre si je m’abstiens – tandis que la Revue de l’Autre n’a jamais eu besoin de ça, pfff… Sans doute y a-t-il d’un côté des revues qui savent se débrouiller, et de l’autre les revues qui ne savent pas se débrouiller – du moins sans le Calcre - « tous des cons ». Mais ça fait longtemps que la France est le pays du « deux poids deux mesures ».
Le Singe Vert, ISSN : 1638-2625, et toc.
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ÉCRIRE ET ÉDITER JUIN-SEPT. 2003« LE SINGE VERT A SES TÊTES DE TURC » 12
Traduttore, traditore. Il n’y a pas que les traducteurs pour être des traîtres, comme le dit ce proverbe italien aussi connu qu’intraduisible. Mais aussi les éditeurs (tenez, l’Atelier du Loup, rue du Général Mollard à Luxembourg – bien sûr j’ai tout transformé, eh, pelure!) ici visés en la personne de Mme Vrai-T’as-Faux - « qui se sent morveux qu’il se mouche » (j’adore les vieux proverbes). Vous me direz que les tuiles, je les collectionne. Parfaitement. Tête de con, c’est tout un art, c’est pas tout le monde qui peut se le permettre.
N’oubliez jamais, éternels blackboulés, que les Aûûûtres, vous savez, ceux dont tous les médias vous disent le plus grand bien – jusqu’à l’excellent Cyrulnik (hélas!) qui vient vendre sa soupe à Tout le monde en parle – les Aûûûtres savent vous jurer leurs grands dieux que vous affabulez. Le parano, c’est toujours vous. Con, baratineur, ridicule… Et aussitôt après, sans s’embarrasser de la contradiction, les Aûûûtres vous avisent que c’est vous (la victime) qui avez tout fait pour que ça arrive, et que franchement, hein, vous avez le plus grand tort de vous plaindre. Mais les Aûûûtres sont des cons. Les éditeurs de textes étrangers en l’occurrence (devise de la môme Vrai-T’as-Faux).
*
Bon j’explique. Je confie un texte sur Tchipitoglou Mamatiki (c’est une poétesse turque – eh oui, le Singe Vert, quelque temps résident au bord du Bosphore, a appris le turc). Son nom signifie « confiture dans le vagin », c’est dire le niveau lyrique et loukoum des textes. Je l’ai connue personnellement mais pas bibliquement (y a des limites). Nous échangeâmes six ans (six ans!) de correspondance de retour d’exil (quoique pour moi l’exil fût plutôt de rentrer en France), durant lesquels elle me conseillait sur telle nuance, nous discutions tel sous-entendu, telle ineffable subtilité. Et pas question de traduire « une mer de blé » même de mot à mot, à cause du mot merde si souvent ouï de mes oreilles incrédules place Saint-Sulpice (et en anaphore par-dessus le marché : «Mer de ceci, mer de cela... »).
Le français est une langue délicate, bande de cuistres sorbonnicoles. Traduire un poème, Grosbœufs, c’est impossible. Ce n’est pas une question de grammerde. Mais de feeling.
Adonques! J’envoie mon texte. Et, ça vous étonne ? un autre est publié ! Pas pire que moi, mais pas meilleur ! Attends, c’est pas fini ! Je reçois, incroyable mais vrai, un prospectus de lancement ! Avec le prix ! Il faut que je paye l’achat de mon concurrent ! Attends, c’est pas tout ! Avec l’exquise délicatesse qui la caractérise, la Vrai-T’as-Faux m’invite à la petite soirée ! J’espère que tu viendras ! Ben, tu peux te la brosser, ma vieille.
Tu sais pourquoi tu as publié l’autre ? Parce qu’il porte un costume cravate. Parce qu’il arrive dans les bagages de l’InsTiTuTurk de France. Parce que le monsieur sait téléphoner aux bonnes personnes au bon moment. Parce qu’il ne se laisse pas oublier, lui, il sait maintenir le suivi relationnel. C’est à de semblables expressions que l’on se sent envahi du sentiment sublime d’avoir enfin franchi la Très Sublime Porte de la Khommunication humaine : le « suivi relationnel » !
J’aime pas les gens. Vous aimez les gens, vous ? « Rats-Porcs-Humains » , franchement…
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ÉCRIRE ET ÉDITER Décembre-Janvier 2051 PRÉFÈRE LE SPLEEN À L'IDÉAL 6
Il n'y a pas (y a-t-il ?) de sottes lectures ? Le cadre professionnel d'une constante remise à jour – la lecture perpétuelle étant à l 'enseignement (mon métier defainéant) ce que la barre est à la danse – m'amène à découvrir un texte de Sartre sur Baudelaire. Un peu tard "dira quelque sage cervelle" (La Fontaine) mais "la chair est triste, hélas ! Et j[e n]'ai [pas] lu tous les livres".
J'en profite, tirant tous azimuts, pour clore la gueule à ce ponte qui me prédisait les pires remords sur mon lit d'agonie pour ne m'être occupé, ma vie dupont, que du passé, alors que SKISFÈMAINTENANT a tellement plus d'importance...
Le passé n'est pas mort... Et j'en apprends bien plus sur le monde actuel en relisant mes vieilles bibles sur la Chute du Monde Romain qu'en oyant les dépêches de FoxTV.
Bref : Sartre sur Baudelaire, ça te concerne encore, et pour toujours, si tu n'es pas dans le casting de Nice People. Sartre, comme d'hab, se gargarise de sa petite philosophie pour classes de terminales selon laquelle chacun de nous est exactement libre et responsable de son destin : "Nous chercherions en vain une circonstance dont [Baudelaire] ne soit pleinement et lucidement responsable."
Sur l'excellence poétique, pas un mot. D'ailleurs Flaubert lui aussi n'était qu'un sale bourgeois profiteur qui n'a pu écrire ses petites merdes démodées qu'en se faisant entretenir par sa nièce. Ho Mais ! C'est futé, Jean-Paul, c'est de goche, et sans accent circonflexe. C'est toujours le vieil air ranci, des gauchistes les plus besancenotto-puceautiers aux vieux droitiers les plus goitreux : c'est la faute à çui qui se plaint, c'est la faute à la victime. C'est la faute à Bauelaire si sa mère s'est remariée illico, syphilitique, opiomane (pas tant que ça) ; tourmenté, torturé, bafoué par les bourgeois, spleenétique, et traîné dans la boue pour immoralité (la même année que Flaubert, pour sa Bovary ; encore un qui l'avait fait exprès, pour se faire plaindre). Tout fait pour.
Sa faute onvous dit, entièremetn sa faute ! Si les juifs etc., ils l'ont bien cherché ! Et allez donc ! "Il a (Baudelaire) refusé l'expérience, rien n'est venu du dehors le changer et il n'a rien appris" – vas-y mon pote !
Parce que d'après Sartre et les sartrillons, votre expérience vous forme, tas de cons ! Vous recevez un choc C, vous devez avoir une réaction R, et plus vite que ça ! Ta femme te trompe, donc tu ne l'aimes plus ! Tu te goures, donc tu laisses tomber ! Évident !
Enfin ! C'est quand même pas sorcier d'être libre ! Gros malin : "[l]a vérité [que] le choix libre de l’homme fait de soi-même s’identifie absolument avec ce qu’on appelle sa destinée” ! Par-dessus bord Œdipe, par-dessus bord, l’ambiguïté, par-dessus bord, l’impuissance, par-dessus bord, la différence des tempéraments ! Il faut réagir, c’est jeune, c’est obligatoire, c’est moderne, c’est tendance.
Ça ne t’est jamais arrivé d’être paralysé, pauvre péteux, de savoir très exactement ce que tu aurais dû faire. “Je vois où est le bien, et je ne peux pas m’empêcher de faire le mal”, je ne me souviens plus si c’est Diderot qui l’aurait piqué à saint Augustin, le fils de sainte Monique, trois qui la tiennent, pour devenir un homme libre. Devenir Jean-Paul Sartre par exemple, et tout à fait par hasard ! Sartre a donc démasqué ce planqué de Baudelaire ! Alleluiah ! Il a piétiné son cadavre pour le faire entrer dans son petit cercueil à ses petites mesures philosophiques du Havre à lui, dans son lit de Procuste ! - t’occupe, va faire du rap…
Baudelaire n’a pas su évoluer, ah le con ! Ben, si vous en connaissez beaucoup, des cons comme Baudelaire, vous m’en remettrez une tonne, je suis preneur.
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ÉCRIRE ET ÉDITER FÉVRIER-MARS 2051 LE SINGE VERT SE BROUILLE L’ÉCOUTE 8
Pour se promouvoir coco, il ne faut rien négliger : la radio, justement. Tu repères une émission littéraire et tu lui envoies un CD de derrière les fagots, où tu réponds aux questions de ta gentille dadame qu’est ta copine mais que tu vouvoies pour faire sérieux. C’est moi que j’ai recevu le disque, avec le petit laïus introducteur sur « les petits jeunes qu’il faut pousser ». Déjà moi, c’est les vieux que je promeus. Courageux mais pas téméraire, je parle de Molière et du Corps de Roland.
Imaginons un instant avoir les archives filmées d’un Céline ou d’un Proust interviewés jeunes : mais c’est fini ce temps-là mon pote ! Des Proust et des Céline y en a des paquets, ils encombrent les quais de gare de province. On fait le pari que certains d’entre eux entreront plus tard dans le panthéon des grands écrivains – ce serait dans le pantalon, encore… Mais y en a plus de grands écrivains, et ceux que tu me présentes, plus ils sont raplapla et comme tout le monde, plus ils s’en vantent !
Et que je te découvre à l’audition une de ces petites paires de prétentieux, tout péteux tout modestes, l’air d’avoir déjà à trente ans passés passé sa courte existence devant les micros, et que je te disserte sur « mon œuvre », et que je m’étale avec énormité : Ma vie ce n’est pas d’écrire ; je mène une vie comme tout le monde, il faut sortir, voir des gens, c’est ça qui l’emporte sur écrire. Cette rage qu’ils ont tous, les homos comme les originaux, d’être à tout pris « comme tout le monde », au cas où la supériorité ferait de l’ombre à Monsieur Dugloupf.
Si c’est pour être comme tout le monde, je ne vois pas la nécessité d’écrire. Attends, autre perle : si je devais souffrir pour écrire, je cesserais d’écrire. Youkaïdi haïdi haïda. C’est aui ces guignols ? Je les ai écoutés tous les deux : parole, ils ont la même voix, les mêmes intonations de premiers de la classe, mêmes protestations de modestie et de conformisme.
Déjà et d’une ils ont édité chez Galligrasseuil, chez Flammedefion ou chez Juju. Quant tu en es arrivé là, tu peux te reposer, il paraît que non, en tout cas ce n’est pas moi qui vais promouvoir ces intrigants de salon. Tous ceux qui savent vivre, aimer, converser, se trouver à 30 piges un copain cinéaste pour reprendre leurs écrits, je les emmerde.
Ils aiment leurs éditeurs qui leur dit ce qui correspond à eux-mêmes et ce qui n’y correspond pas, c’est du sous-sartrisme ma parole, les autres vous connaissent mieux que vous-mêmes ; je n’ai jamais pu suivre le quart du huitième du moindre conseil, souple comme un verre de lampe, trop peur de me renier, il faut que ça vienne de moi-même autrement va te faire keuneu, je ne comprends COLLIGNON ARTICLES
ÉCRIRE ET ÉDITER FÉVRIER-MARS 2051 LE SINGE VERT SE BROUILLE L’ÉCOUTE 9
pas comment on peut obéir à des injonctions, même amicales, venant d’un éditeur avec une calculette à budget à la place du cervelet.
Me casser la gueule soit, mais de haut. Et puis je n’aime pas ce qui bouge, ce qui est jeune, ce qui est vivant. Je n’aime que les vieux, les déjà morts, la poussière, et la petite couronne de gloire là-haut dans les cieux. Ridicule. Prétentieux. Original. Narcisse et répulsif. Tant mieux. Moi je ne trouve jamais quoi leur dire aux autres. Au bout de dix minutes je regarde ma montre, c’est quand que tu dégages ?
Le pire c’est qu’ils écrivent bien, qu’ils parlent bien, ces petits gonzes interchangeables et propres sur eux, sûreté de soi, lucidité, maturité, compétence, c’est quoi ces zozos ? Ces préformatés ? Qui ont appris « leur métier »? Alors écrivain c’est un métier comme un autre ? Et les complexés ils font quoi eux ? Ils prennent du Prozac ? Du Viagra ? Quoi les petits nouveaux ? Toujours jeunes et déjà quinqua ? Toutes les cartes en main alors ? Y en a même un qui chante ! Avec une copine qui joue de la guitare! Voulez-vous me cacher cet amour de la vie, avec son bout de queue qui dépasse ?
Allez les petits jeunes, et bonne galère quand même ! Agagah…
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ÉCRIRE ET ÉDITER Février-Mars-Avril 2052 JUSTICE PARTOUT, JUSTICE NULLE PART 9
C'est facile je vous jure de couler n'importe qui sous n'importe quel prétexte : un prof, un sauvageon, une petite entreprise fraîche et joyeuse. Vous faites valoir que les réunions se font par téléphone, vous montez en épingle les rapports tronqués avec bénéfices quasi nuls, alors que vous savez pertinemment (c'est l'éditeur lui-même qui vous le jubile) que la boîboite sort trois books par mois ; et que vous avez placé une brique dans le capital pouor que ça vous rapporte paraît-il au prorata des bénefs, pour vous ça fera zéro zloty zéro groszy fautilovski vous l'envelopper ?
...Sans oublier que le pauvre éditeur vachement à plaindre vous a soigneusement niqué la diffusion sans oublier de promouvoir celle des autres sans un centime de droits d'auteurs (les sept cents premiers exemplaires pour que dalle vous connaissez la chanson) TOUT EN s'offrant des voyages professionnels à Paris ou Verdun "payés par la maison" – je ne suis jamais arrivé à piger comment on peut être à la fois personnellement fauché avec une société prospère yop'là boum – faut croire qu'il y a d'étranges phénomènes de porosité tout de même, malgré les HURLEMENTS vertueux des gestionnaires – tiens t'en v'là du pognon miraculeusement surgi pour les stands au Salon du livre, pour loger les écrivains à l'hôtel – les droits d'auteur que dalle et peau de balle on t'a dit t'es sourdingue ? C'est tout de même un peu fort et si je peu me permettre – un brin mystérieux.
Je vais t'en couler des boîtes moi, par paquets de dis. Là-dessus interviendra un baveux (avocat...) qui vous démontrera que non seulement vous n'y connaissez rien, mais que vous avez eu tort de poser la question, encore heureux si vous y coupez de la diffamation (en vérité s'il y a une partie des programmes de français dont je me torche, c'est bien leur putain d' "art de convaincre" ; il n'y a si absurde affirmation qui ne puisse se démontrer avec des arguments parfaitement valables, on peut même vous démontrer en agitant les manches que les Juifs ont tué Dieu ou qu'une ligne courbe est droite (il suffit de la considérer point par point, ou vue de haut, ou considérée par rapport à la curvité : elle est courbe par rapport à la curvité, donc elle est droite – tout se démontre.)
Total c'est la Cour qui se juge, chiche qu'on voie (vers Drancy, ouaf ! L'humour) Papon plaider un de ces quatre devant la Cour des droits de l'Homme, et il se trouve même des pros pour s'apitoyer sur les gencives de Saddam. Et d'ici peu si mon Blair a une tête de nœud et que je ne porte pas de cache-sexe allez hop, attentat à la pudeur, j'ai regardé une meuf avec con-cu-pis-cence : harcèlement, je l'ai bousculée dans le métro sans lui mettre : délit de promesse non tenue ou tentative de viol (à pile ou face) – amis amphibologues bonsoir.
En Angleterre c'est carrément l'allule suce-pecte qui vous envoie en taule, j'ai intérêt à porter le voile. Je vais vous en foutre, moi, du droit. Justice partout, justice nulle part. Tenez, je connais une boulangerie qui marche du feu de Dieu, elle s'appelle "Le Four". Mais elle est "Rue de la Juiverie" : antisémitisme et incitation àlahaine raciale, vingt mecs dehors dont cinq juifs toujours ça de pris.
Le dédain, la déconsidération, l'écœurement, ça m'écœure moi-même. C'est malsain, le mépris : ça vous laisse la langue fielleuse et le rectum mélancolique. On a l'impression de se salir. Un peu du même ordre que le sursaut de fierté à considérer les culs d'ours qui ardissonnent avec leurs nègres et leurs euros, alprs qu'on est en train de trimer dans le mépris des autres. On se secoue la merde mais on a marché dedans quand même. Un petie Chateaubriand pour la route : Le mépris est une denrée rare à n'utiliser qu'avec parcimonie, vu le grand nombre de nécessiteux.
Sans oublier les crocos qui l'avaient bien dit, qui l'avaient bien prévu, qu'il ne fallait pas employer "ce mec" mecki, bizarre ! bizarre ! ...quelques années auparavant disaient pis que pendre de not' fine équipe, nous traitant de cons, comme quoi on excitait les féroces auteurs contre les gentils éditeurs, alors que ces derniers n'est-ce pas prenaient des risques financiers, et que si ma foi telle revue suivez mon regard disparaissait du paysage ce ne serait fin finale pas si mal – dis donc mon p'tit saint ce ne serait pas toi par hasard – "je leur avais bien dit" – qui aurait tiré les ficelles ?
Allez on m'appelle pour la bouffe, mieux vaut sonner la soupe que soupe sonner, c'et vieux comme Hérode – M'sieur ! Y m'a traité de vieux comérode ! - quand est-ce qu'on crève – mais non Ménon, survivons, gnaquons, cautérisons les décollations d'hydres, ne finissons pas, jamais, ce serait trop répugnant, trop hideux, trop dégoulinant, trop mollardier, trop sanieux, trop charognard, trop dégueulatif, dans un aussi saut caveau (arf...)
COLLIGNON ARTICLES "CRÈVE, LANGUE FRANÇAISE, CRÈVE"
date imprécise, début 2052
Plus moyen de lire une copie de seconde sans être assailli de fautes énormes : c'est long ou on c'est le plus battu ("là où l'on c'est", traduction), pygane pour pyjama. Ma dernière (vous n'allez pas me croire) c'est "ils est" pour "ils sont", parole d'honneur, dans le contexte ce ne pouvait être que "ils sont", même plus l'orthographe ou la grammaire, carrément la destructuration, même plus de la conjugaison, mais de l'esprit, de la pensée. J'exagère, j'invente. Toutes proportions gardées, on refusait de croire les rescapés des camps, "allez voir un psychiatre" disaient les médecins, je connais tous vos trucs par cœur, braves couillons.
Alors nous aussi, on se tait, on n'ose plus vous les dire à l'antenne ces perles-là, parce que ça faitmarrer tout le monde, et nous passons pour des vieux cons, des Professeurs Nimbus qui marchent dans la merde parce qu'ils oublient de regarder le trottoir, vous savez, là où se passe "la vraie vie". De toute façon dès qu'on sexe-prime vous pensez bien c'est un journalisse qui intervient, qui interrompt très vite, hilare, il est au courant lui le journalisse, il a tout compris le journalisse, il va tout vous espliqué le journalisse, il fait la pluie et le beau temps, il se croit à la foire aux cancres. Ha ha les profs toujours aussi cons, même qu'on n'a pas le sens de l'humour hein mon con, rigolez, rigolez, ce n'est pas grave, c'est folklorique, rigolez, rigolez, journalistes bourrés de diplômes et prétendant qu'il n'en faut pas.
Ignorance des journalistes, le pathétique Drevet ne sachant même pas localiser Nevers ni Limoges sur une carte de France. La tête à claque de Patrick Pujadas, qui sait toujours tellement tout mieux que tout le monde, et qui pense qu'il suffit d'avoir l'air con et suffisant pour prouver son "esprit d'indépendance" et sa "salutaire insolence" ("c'est moi que je suis le journaliste
et sans moi t'existerait même pas ") en agitant de part et d'autre son rictus de Pierrot crevard, même que c'est pas la peine de l'entarter vu le kilo de fard qu'il se trimballe sur la gueule, j'ai été obligé d'admirer Sarkozy RIEN QUE pour ça je crève de honte.
Rigole Pivot rigole, qui se marre parce qu'une convocation en anglais à une série de conférences en France en anglais mentionne la charmante locaité de "Gif upon Yvette", Pivot qui se fait vertement engueuler par la môme Bombardier du Québec sous la pression constante de l'anglo-saxon là-bas dans sa colonie, voilà-t-il pas que Le Monde publie des extraits du Daily Mail, j'exige le "Frankfurer Beobachter" et "El País", merde alors, shit, Scheisse, stik, même mon distributeur de billets de banque qui m'annonce que ma transaction is being processed, et si t'es macaroni vaffanculo è chiaro. On les aura bande de parents d'élève, c'est bien la Chrichtine Ockrent qui déplorait que la langue française ne soit pas assez rapide par rapport à l'anglais, tu n'as qu'à te faire engager à NBC, avec ta gueule de French Native no executive woman tu vas te faire virer eh Martienne.
Et il y a même des salopards qui font leur entretien d'embauche en anglais, c'est interdit, interdit, verboten, verstanden ? Vousne saviez donc pas qu'en Hollande les films anglo-saxons passaient désormais sans sous-titres ? Comment dit-on "T'as qu'à savoir l'anglais connard" en néerlandais ? Les langues c'est pas fait pour communiquer, c'est fait pour refléter l'âme du monde en autant de langues qu'il faut, et moins il y a de langues moins il y a d'âme. Ce pas pour rien si le prof de français c'est la catégorie qu'Allègre blaire le moins, parce que c'est eux qui font réféchir bien plus que les profs de maths je suis désolé. Seulement quand je lis "bien qu'ils eurent disparu" dans la Nouvelle Revue Pédagogique, "j'aimerais mieux des cendres sous la terre" dans un manuel de Sixième, je fais quoi ? ("Oh il exagère ! franchement ! du moment qu'on se comprend ! " mais je les connais par cœur vos conneries je vous dis vos conneries !) - parce que ça gagne les manuels maintenant forcément imprimés par des hommes faut pas demander, ça commence toujours par le sexe faible, celui qui croit comme disait Simone de Beauvoir que le vide de son cerveau lui meuble les couilles. Vous savez les ouvriers qui manipulent les bouquins sur des gros chariots dans les sous-sols de Gallimard "ah non moi hein j'ouv' jamais un liv', on va pas sferchier j'en vois toute la sainte journée des bouquins alors le soir pff merde alors vous allez pas me faire la morale".
Quand tu vois ce que sont devenues les consignes pour faire un cours de français tu te tape la tête against tht walls, c'est un jargon pas possible, quand tu lis que les interrogations de bac ne doivent pas avoir de "dimension psychologique" autrement dit on ne parle plus de la psychologie des personnages et de ce que ça nous apprend sur la nôtre propre, c'est des histoires de grand-papa ça ne se fait plus, mais que tout doit être considéré sous l'angle technique, tu fais quoi ? "l'espace intersticiel de liberté" pour "cour de récréation", "le référentiel bondissant aléatoire" pour un ballon de rugby, connards ! "devoir tabulaire" pour "devoir sur table" ! Connards ! C'est dans un SKETCH de Guy Bedos, dont je persiste à répéter qu'il est super-excellent : "Les cours de français sont au plaisir de lire ce que la gynécologie est à l'érotisme".
Mais "du moment qu'on se fait comprendre" et quand je te nique du doigt t'as même pas besoin de savoir le kurde. La fameuse question du niveau de langage, "ils correspondent en texto mais savent retrouver le vrai langage français en situation", ouais ben je recopie peut-être le "dictionnaire du français précieux" mais au train où ça va ils ne le sauront peut-être plus très longtemps le français le vrai. Déjà que j'ai corrigé au bac un candidat qui prétendait que le français ça ne servait à rien ("servir ! servir !" disent-ils, du latin "servus", l'esclave), "vu qu'on s'apprend la langue les uns aux autres et que ça sert à rien d'écrire des textes qui prennent la tête et que personne y comprend" – j'ai failli mettre "connard" en marge mais au bac on n'a pas le droit, j'ai juste mis "apologie de l'inculture" et j'ai foutu deux, par chance le mec était entièrement hors sujet parce que sinon j'aurais pu me faire emmerder.
Tenez une fois au brevet des crétins pardon "des collèges" il y en a un autre qui me raconte une histoire d'imagination pleine de rebondissements et tout et tout, mais truffée de "il arrivit", "je m'aperceva", "nous concluâmes" et "il repartut" ; eh bien il y avait pourtant des collègues pour mettre la moyenne à cette merde en raison de l'imagination.Mais bande de nazes tout le monde il en a, de l'imagination, SAUF Pujadas, d'accord pour l'imagination mais pas en grammaire, désolé, je suis un vieux con et j'assume. Comme disait un peintre "je ne vais tout de même pas expliquer chaque travaux" hein j'ai failli dire hein comme on pousse pour chier mais je suis poli, je connais même un éditeur qui m'a traité de puriste et qui trouve qu'après tout c'est logique, bien sûr toute faute a sa logique : "les vachent , broutes" il y a la marque du pluriel donc pas de faute, confusion entre les noms et les verbes on ne va pas se faire chier pour si peu, ça n'a pas d'importance, quand on ne comprendra plus la langue écrite il va pouvoir s'en écrire des conneries sur les tracts tiens donc... Les cours en langues, de géographie, de maths, directement en anglais bien sûr, en allemand, en espagnol, ils vont être chouettes nos élèves, bientôt au point de Pénitzientadgité dans Le nom de la Rose qui a su tellement de langues qu'il n'en sait plus aucune. Babel, et pas Bab-el-Oued hélas. Sans oublier les langues régionales, moi je veux bien qu'elles soient enseignées, mais si l'on supprime l'article de la Constitution précisant que la langue française est la langue de la république, vous ne voyez donc pas bande de péquenots que c'est l'anglais qui va s'engouffrer là-dedans comme dans une brèche hollandaise ?
Le français c'est trop compliqué, parole d'élève. "Ton corps aussi c'est bien compliqié t'as qu'à te couper les bras et les jambes comme ça ce sera plus simple" – il a été cloué l'élève il a fermé sa gueule j'espère qu'il s'en souviendra jusqu'à la fin de sa vie, quand il ne pourra même plus comprendre son petit-fils - déjà que tu ne les comprends plus au téléphone, ah ne faites plus de gosses, j'ai peur, j'ai peur, je vais crever et c'est tout, mais ma langue, ma belle langue, merde, pourquoi est-ce qu'elle doit crever avec moi, moi je veux bien crever, mais ma langue pourquoi ma langue ? C'est ça le comble de l'injustice vous voyez, et de la pourriture la plus dégueulasse.
Mon royaume et ma vie, ma vie pour un imparfait du subjonctif !