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SINGE VERT N°5 LES JEUNES DE BANLIEUE

COLLIGNON Singe Vert n° 5 LES JEUNES DE BANLIEUE 5 – 22

n° 5 paru sous le titre « Le sexe des banlieues » aux éditions Parallèles,

21 rue du Crinchon, 62000 ARRAS

 

 

Qu'est-ce que je pourrais bien dire de définitif sur ? Qu'il faudrait attaquer les cités avec des bataillons de mille CRS, coffrer les dealers et fauteurs de troubles, disperser toute cette racaille dans les petites communes de 550 habitants ( un par commune) - et puis on leur donnerait des livres et une fourche, et tu verrais s'ils ne se calmeraient pas un peu... Ça me tente vachement ce plan. Maintenant je ne veux personne de là-bas chez moi. Ni de jeune fille bien élevée de Neuilly-sur-Seine. Pour l'excellente raison que je n'aime personne de toute façon, alors... Moi j'aime bien ce qu'il dit, le Gros Porc. J'appliquerais bien son programme. Mais pas avec lui. Avec Chevènement par exemple : "Il est né le divin enfant - Chantons tous son Chevènement." Non je plaisante.

Et puis si tu arrêtes un dealer, c'est le frère ou le cousin qui va s'y mettre, et tu ne résous rien. ...Quelque chose de bien fort, là, de bien haineux : "Sales petits cons qui traînent dans les cages d'escalier, toujours le mollard à la bouche" - où ai-je vu ça ? nulle part. Franchement nulle part. Moi j'étais dans une banlieue bien tranquille, prof très inquiet. "J'entendais dire" que... Au Val Fourré de Mantes, les récrés avaient été interdites parce qu'il y avait des détenteurs de spray au gaz lacrymogène, et les filles allaient par quatre aux chiottes pour ne pas se faire violer. Si les femmes cédaient un peu plus souvent, il n'y aurait plus de viols. Quoique... Je me suis fait insulter, il faut dire que je suis un prof spécial, vachement provo.

Et si je leur parlais en pote, ils m'aimaient bien. Mais il faut les nerfs, c'est certain. Je me suis fait traiter de gros pédé ; j'ai gueulé : "Je ne suis pas gros!" - ça faisait rire tout le monde. A leur niveau, quoi. Et quand une jeune fille bien élevée m'a sorti "Je vous emmerde", et que j'ai répondu "Torchez-vous mon amie, torchez-vous" ? tout le monde s'est foutu de sa gueule, à elle. Beau renversement, n'est-il pas ? Ô cruel souvenir de ma gloire passée... Je me sens mou sur le sujet. Je n'ai pas la forme - pas la haine, quoi... C'est vrai, quoi, ces jeunes-là, tu leur donnes un bouquin ils te le balancent à la gueule. Ils ne veulent rien savoir, ils savent déjà tout, ce sont déjà des petits vieux. Tu sais ce qu'ils disent tous, les analphabètes : "Ouais ah que j'ai pas besoin de bouquins pour savoir..." On vient de brûler une bibliothèque – je l'avais bien dit – eu...

Bon ! Ducon mou du cervelet, qu'est-ce que tu proposes pour les banlieues ? Du concret, du qui marche ? Moi je n'y crois pas, à ce qui marche. Tu leur donnes des centres de loisir, ils te le saccagent et ils te le crament. Parce que ça va les intégrer, n'est-ce pas, ils vont perdre leurs repères culturels (le "tchac-boum", tu sais ?) Je vais te raconter une histoire drôle : lors de la première attaque du Paris-Mantes (parfaitement, à coups de pierres), les journalistes ont fait poser le Maire de Chanteloup au milieu d'une bande de jeunes sympas, sympas ! et souriants; tout sourire ! Eh bien tout le monde savait parfaitement qui avait lancé quelle pierre sur le conducteur, et ils étaient tous là, avec leur bouche en cœur autour du Maire...

Et ça ne vous est jamais venu à l'idée que les lycéens qui défilent depuis leur Seine-Saint-Denis pour réclamer des profs et des moyens sont les mêmes qui insultent le prof en classe et

empêchent, à la lettre, le cours d'avoir lieu ? Comme les Corses qui défilent pour rompre la loi du silence, et qui se taisent rentrés chez eux... Bizarre, non ? Et l'attaque du Collège de Machin, plusieurs centaines d'élèves à coups de pierres et de vociférations contre les grilles? On n'en a pas parlé dans les journaux télévisés, faut pas exciter la haine du brave citoyen. Maintenant il paraît que c'est faux, d'après "Marianne". N'empêche, on ne m'ôtera pas de l'idée : ceux qui manifestent pour donner plus d'argent à leur collège s'imaginent sûrement quelque part que ce fric atterrira dans leurs poches pour se renouveler les Naïkes... Et là je reprends un éditorial du Figaro, vous croyez que je suis fier de moi de reprendre un éditorial du Figaro ? Vous faites quoi comme métier, les journalistes ? Agitateurs de cons ? Fossoyeurs de quoi, au juste ?

Je ne crois pas aux trucs "qui marchent". Je ne crois pas à l'efficacité, parce que je ne crois pas à la responsabilité, ni même à la relation de cause à effet. Je crois au changement de discours, car l'homme est une drôle de petite bébête bien faible et bien attendrissante, à moins qu'on n'aille jusqu'au mépris. "Y a qu'à" cesser de dire du mal des valeurs du travail, de la culture et de la littérature. Moi je n'irai plus leur dire... Mais il y a des mecs sincères qui y vont. Et qui transforment les cours en discussions libres. On appelle ça des éducateurs, ils prennent les choses là où elles en sont, ils font faire de la boxe, du basket, du théâtre, et ça marche, et on n'en parle jamais, surtout pas dans le Figaro, mais ce n'est pas encore Hugo ni Vivaldi. Nous ne marchons, nous autres les humains, qu'à la représentation.

Tout se passe au niveau du tout petit, tout petit - pendant les Grandes Invasions et les calamités du Moyen Age, sous l'Occupation, il y avait toujours une infinité fourmillante de braves gens qui donnaient du pain aux pauvres, qui soignaient des malades et qui sauvaient des Juifs - mais ça n'a pas empêché les Grandes Invasions, la Grande Peste ou la Shoah, et c'et cela qui reste dans les livres d'histoire, dans les mémoires. Le dévouement efficace des petites fourmis bûcheuses, ça ne permet malheureusement pas la littérature, ça ne facilite pas les grandes envolées lyriques et haineuses, la bave aux dents, bonjour Jean-Marie. C'est bête, non ? Moi je voulais me défouler, clamer ma grosse détestation, et puis je me suis rendu compte avant de commencer que j'allais apporter de l'eau au moulin, de la merde au moulin de qui vous savez.

Je te jure, quand je suis allé enseigner dans un lycée bien calmos, j'ai eu l'impression d'avoir déserté. Pour me justifier je me dis que j'ai assez donné, et "place aux jeunes, qu'ils aillent se casser les dents à leur tour." - j'étais utile aussi là où j'étais, mais vous vous en foutez - bon alors, cette banlieue ? "Tu crois que t'es en sécurité, quand tu croises ces bandes de bronzés ?" - ce n'est pas leur bronzage qui me gêne, c'est leur jeunesse. Déjà, je regardais bien s'il y avait une gonzesse parmi eux. Si oui, je pouvais continuer droit devant. Sinon, ben merde je préférais changer de trottoir. C'est du racisme anti-jeunes, anti-mecs. Pas clair, non ? Tu veux que je raconte comment on s'est promenés à Lodève (Hérault), bobonne et moi ? tous les ivrognes qui sortaient des couloirs de maisons pour se répandre dans la rue, en parlant fort, en rotant, en crachant à ton niveau mais de l'autre côté ? Tous de la même ethnie, tu vois ce que je veux dire ? Putain on serrait les fesses bobonne et moi, on marchait bien droit les yeux devant sans se parler, on a regagné l'hôtel dare-dare... Plus tard nous apprîmes que la bande de Lodève s'était cognée avec la bande de je ne sais plus où en Camargue, d'une ethnie différente tu vois ce que... - un mort au nuntchaku ? Qu'est-ce que tu as lu dans "Marianne", là, que tu le répètes, perroquet de mes deux ? que si tu "leur" dis bonjour ils t'insultent parce que tu n'es pas du même milieu, et que si tu ne "leur" dis rien, ils t'insultent parce que tu les bêches ? Alors tu dis quoi, là ? que ta fille ne sortait pas entre les immeubles passé une certaine heure, parce qu'elle se faisait emmerder même avec son bébé qu'on prenait pour son petit frère ? ...que j'ai dû ouvrir une fenêtre pour dégager une fille de 18 ans qui se faisait suivre par six morpions, elle appelait au hasard "Maman!" tournée vers les rangées de fenêtres, et que les morveux se sont enfuis en me voyant ? Qu'est-ce que je veux démontrer, là ?

Pourquoi est-ce que je ne dis pas la honte qui m'a étreint de marchandise, quand j'ai vu trente marins poursuivre une fille rue Ste-Catherine en réclamant un baiser, pour la charrier ? des marins bien blancs, bien Français de souche... C'est sympa, les marins ! mais je ne me suis pas levé de ma chaise de terrasse... « Les autres non plus. - Elève un peu le débat, veux-tu ? - N'empêche que dans certains quartiers... - tu vois, là, j'ai vachement envie, mes souvenirs renaissants, de remettre sur le tapis les agressions, subies ou "entendu parler", je les accumulerais et ça me ferait remonter le bouillon, seulement la vérité dans tout ça ? Parce que moi j'ai souvent entendu parler, mais jamais je n'ai eu peur dans le métro à minuit et demie.

Pourtant celui qui me sondait par téléphone, au nom de l'UDF, il insistait bien lourdement : "Mais enfin, vous ne vous sentez pas inquiet ? ...vous ne trouvez pas que la délinquance augmente ? - ...Non. Je ne vois pas, non, franchement... » Il écumait, le brave UDF de Mantes ou de Conflans... Tiens, tous ceux qui rigolaient (en France, tout le monde rigole) - à propos de la loi interdisant la présence dehors de jeunes mineurs après minuit... Je me souviens d'un dessin que l'auteur devait trouver vachement drôle, un landau de bébé cerné par les flics avec armes au poing : « Rendez-vous ! » - c'est des gosses en poussette, peut-être, qui traînent la nuit ? Alors voilà qu'on redéterre l'article 277 sur les peines de prison à infliger à tous ceux qui abandonnent leurs enfants moralement, les mettant en danger de mal tourner ? *

Mes parents me disaient bien que si je faisais l'imbécile, ce seraient eux qui iraient en prison. Et moi, je les avais crus... Ma foi oui que je te leur collerais des amendes, aux parents ! pauvres ou non ! Attends, je te raconte : une famille de cinq enfants - quelle idée... mais enfin... - qui élève le cinquième comme les autre autres, sévèrement et justement et tout, et qui voit le petit dernier côtoyer la délinquance, et en danger, avec besoin d'une surveillance ? Les Barbares sont là mon pauvre Monsieur, parmi nous, non pas venus de l'extérieur mais surgissant comme Alien... C'est carrément Jean Raspail dans Sept cavaliers ou dans Sire - je l'ai reçu dans mon collège, il paraîtrait qu'il s'est tiré de France à la fin de la guerre, même tout jeune, parce qu'il avait bien aimé la Milice... C'est chiant qu'il écrive bien, ce type... Pas si bien que Céline, même loin derrière, mais enfin...

Qu'est-ce que je disais... "J'ai peur, j'ai peur..." Ecoutez arrêtez de faire des gosses, merde, on est au siècle du clonage, en plus ça élimine les mecs toujours ça de gagné, vive la parthénogénèse, de toute façon les meufs elles sauront toujours mieux se faire reluire et jouir entre elles ou toutes seules qu'avec un mec qui pue de la bite et qu'a tout de suite fini, bientôt on fera les hommes dans des bocaux perfectionnés comme dans "Le Meilleur des mondes", on ne va pas se faire chier à être enceintes. Ne faites plus de gosses ! Je m'en fous que tout le monde devienne vieux, moi, on nous renouvellera organe après organe, les progrès sur la maladie d'Alzheimer sont foudroyants, la dégénérescence des cellules du cerveau sera enrayée, on nous greffera la tête sur un corps de femme, ce pied ! ou de brebis pour les amateurs d'expériences fortes, nous serons éternellement jeunes et intelligents, ça ne me fait pas peur, mais pourquoi s'acharner à se reproduire avec des procédés vachement archaïques, pour les petits cons que ça risque de donner ? Parce que j'ai peur du risque, moi, parfaitement. « Tu ne risques plus rien Pépé, t'es déjà con. » Oui c'est facile. "Les jeunes de banlieue". Déjà ce collectif ça ne vaut rien.

Et puis il faut enlever les filles. A 9,5 sur 10. Elles sont bien élevées, elles, pas pour les mecs de la téci. Ceux-là ils cherchent des femmes bien soumises comme leurs mères, qui font la vaisselle et tout. Malheureusement ils en trouvent toujours. Y en a en pagaille des femmes esclaves et fières de l'être, parce que ça fait plus féminin, et qui te méprisent si tu ne sais pas les remettre à leur place (je les cite, là ; c'étaient des Européennes, dans les années 60...) Tu les vois : ils sont tous ensemble à se faire chier. Moi aussi dans le temps j'étais tout seul à me faire chier. Eh bien je lisais. Je ne peux pas comprendre, vous voyez bien. Retenez bien ça : rien ne naît de grand sans la polémique et la mauvaise foi.

Je fais de mon mieux poil au vieux. Mais qu'on ne vienne pas me dire que les jeunes des técis c'est l'avenir de l'humanité. En fait je vais vous dire : je n'en ai rien à foutre moi de la Cour des Miracles, tant que je n'en vois plus devant moi ; et ils n'en ont rien à foutre de moi ; moi je n'ai rien à dire sur eux ; il y en a eu depuis que le monde est monde, ils servent d'épouvantails aux fascistes, et je ne serai pas le premier ni le dernier à n'avoir rien à dire mais à le délayer. Ca fait cinquante ans qu'on me dit que tout va craquer, "la jeunesse elle est brimée elle peut plus supporter" - et qu'est-ce

qu'ils sont donc devenus, les fameux sales jeunes qui foutaient leur zone dans les années 80 ? Comment se fait-il qu'ils ne soient pas tous devenus des gibiers de potence et des malfrats ? Ils doivent avoir dans les 40, 45 ans : c'est curieux, ils ont tout l'air de s'être rangés des voitures, peut-être même qu'ils sont devenus comme tout le monde - putain c'est bizarre, non ?

Est-ce qu'on ne nous bourrerait pas le mou une fois de plus, par hasard ?

 

Qu'est-ce que je pourrais bien dire de définitif ? « Attaquez les cités flics en tête, coffrez les dealers et fouteurs de merde, dispersez la caillera dans les petites communes de 550 habitants ( un par bled) - et puis on leur donnera des livres et une fourche, et tu verras s'ils ne se calment pas un peu... » Ça me tente vachement ce plan. Maintenant je n'en veux pas un chez moi de ces lascars. Finalement j'aime bien ce qu'il dit, le Gros Porc. J'appliquerais bien son programme. Mais pas avec lui. Avec Jospin, par exemple. Ou Chevènement. "Il est né le divin enfant - Chantons tous son Chevènement." Non je plaisante. Qu'est-ce que je pourrais bien dire de bien fort, là, de bien haineux - "sales petits cons qui traînent dans les cages d'escalier, toujours le mollard à la bouche" - où j'ai vu ça ? ben nulle part.

Moi j'habitais une banlieue pénarde. "J'entendais dire"... Au Val Fourré les récrés interdites because les sprays lacrymogènes, les filles qui allaient par paquets de quatre aux chiottes pour ne pas se faire violer – disons tripoter, allez... Je me suis fait insulter, il faut dire que je suis spécial comme prof, trivial, provoc et tout. Ils m'aimaient bien. Mais faut les nerfs, c'est clair : je me suis fait traiter de gros pédé ; j'ai gueulé : "Je ne suis pas gros!" - le genre, tu vois, tout le monde rigole. Leur niveau, quoi. Et la fille bien élevée qui m'a sorti "Je vous emmerde", je lui ai répondu "Torchez-vous mon amie, torchez-vous". Tout le monde s'est foutu de sa gueule. Ô souvenir glorieux de ma gloire passée ! Ce matin, pas la forme - pas la haine.

Tu leur donnes un bouquin ils te le balancent à la chetron. Veulent rien savoir, savent déjà tout, ces petits vieux. « Ah que j'ai pas besoin de bouquins pour savoir..." Bon ! Ducon, qu'est-ce que tu proposes pour les banlieues ? Du concret, du qui marche ? Des centres de loisirs ? ils te les crament. Parce que ça va les intégrer, n'est-ce pas, ils perdent leurs repères. Je te raconte une histoire drôle : lors de la première attaque du Paris-Mantes (parfaitement, à coups de pierres), les journalistes ont fait poser le maire de Chanteloup au milieu d'une bande de jeunes sympa, sympa ! et souriants ; tout sourire ! Eh bien tout le monde savait parfaitement qui avait lancé quelle pierre, et ils étaient tous là, avec la bouche en cœur autour de Monsieur le Maire...

Qu’est-ce qu'ils sont donc devenus, les fameux sales jeunes qui foutaient leur zone dans les années 80 ? Ça ne vous est jamais venu à l'idée que les lycéens qui défilent depuis leur neuf-trois ou leur six-neuf pour réclamer des profs sont les mêmes qui insultent les profs, et qui empêchent carrément, à la lettre, le cours d'avoir lieu ? Et l'attaque du Collège Machin, plusieurs centaines d'élèves à coups de pierres et de vociférations contre les grilles? On n'en a pas jacté dans le poste, faut pas exciter la haine du brave citoyen. Maintenant il paraît que c'est faux, d'après "Marianne" ? tu es raiment sûr que les bagnoles qui brûlaient, on les photographiait automatiquement en gros plan, contre-plongée ? Vous faites quoi comme métier, les journalistes ? ...fossoyeurs de quoi, au juste ? ...Je ne crois pas aux trucs "qui marchent". Je ne crois pas à l'efficacité, parce que je ne crois pas à la responsabilité, ni même à la relation de cause à effet. Je crois au changement de discours, car l'homme est une drôle de petite bébête bien faible et bien attendrissante - jusqu'au mépris, parfois... Ma Solution à Moi qu'elle est superbonne : Y a qu'à cesser de dire du mal du travail, de la culture et de la littérature.

Et il y a plein d'hommes et de femmes qui s'y donnent quand même, en cours, et qui en font une discussion libre. On appelle ça des éducateurs, boxe, basket, théâtre, et ça marche, et on n'en parle jamais, tantôt Marivaux, tantôt Vivaldi putain on dirait mon portable ! Eh non c'est ton portable qui reprend Vivaldi, deumer... Partir de ce qu'ils sont De leur niveau. Pendant les Grandes Invasions, les Huns, tout ça, les Grande Calamités du Moyen Age, sous l'occupation turque en Grèce - toujours on a passé la bougie, c'est la culture, faites passer. Toujours eu des braves curés des laïcs pour donner du pain, soigner les malades, planquer des juifs - ça n'empêche pas les invasions, la peste noire ou la Shoah, c'est ça qui reste dans les mémoires sinon dans l'histoire.

Et parfois donc le dévouement des petites fourmis suffit. Moi je voulais seulement me défouler, clamer ma grosse détestation, et puis oui mais finalement non. Maintenant j'enseigne dans un lycée calmos, j'ai déserté. Je dis comme ça que j'ai assez donné, je dis "place aux débutants, qu'ils aillent se faire casser c'est leur tour." Comme ça, ils deviendront ces vieux profs bien durs à cuire en face des classes difficiles ; autrement, ils ne le deviendraient jamais. Là où je suis, je reste utile aussi. Les bandes de bronzés" : ce n'est pas leur bronzage qui me gêne, c'est leur jeunesse. Déjà aux Mureaux je regardais bien s'il y avait une gonzesse dans le groupe. Si oui je passais droit devant. Sinon ben merde je changeais de trottoir. C'est du racisme anti-jeunes, anti-mecs. Tu veux peut-être que je te raconte comment on s'est promenés à Lodève (Hérault), mon honorable épouse

et moi ? tous ces ivrognes qui sortaient des couloirs de maisons pour se répandre dans la rue, en parlant fort, en rotant, en crachant à ton niveau mais de l'autre côté ? tous norvégiens ? On serrait les fesses bobonne et moi, on marchait bien droit les yeux devant sans se parler, on a regagné l'hôtel dare-dare... Plus tard nous apprîmes (apprenâmes ?) que la bande de Lodève s'était cogné une autre bande en Camargue, contre les Suédois, un mort au nunchaku.

C'est vrai qu'en banlieue si tu "leur" dis bonjour ils t'insultent parce que tu n'es pas du même milieu, si tu ne "leur" dis rien, ils t'insultent aussi parce que tu les bêches ? C'est vrai qu'il ne faut plus sortir le soir ? que ma fille ne se promenait pas entre les immeubles passé une certaine heure, se faisant draguer même avec son bébé qu'on prenait pour son petit frère ? ...que j'ai dû ouvrir une fenêtre pour dégager une fille de 18 ans suivie par six merdeux, elle appelait au hasard "Maman !" tournée vers les rangées de fenêtres, et que les petits cons se sont enfuis en me voyant ? J''invente, peut-être ? Alors qu'en pleines années 70 paraît-il si sympa si flower power en plein centre ville d'étudiants poil aux dents j'ai vu trente marins poursuivre une fille rue Ste-Catherine en réclamant un baiser, pour la charrier ? des marins bien blancs bien Français de souche mais personne ne s'est levé – JE ne me suis pas soulevé de mon tabouret de bar tu crois que j'ai honte ?

Tu crois que de me rappeler de m'inventer de me coller toutes les agressions, les avanies subies par ouï-dire ça me ferait remonter le bouilli, tous les échecs sur le dos de Rachid ? mais moi je lui disais au sondeur qui me sondait par téléphone Jamais eu peur dans le métro à minuit trente jamais il insistait bien lourdement "pas même inquiet, la délinquance, la recrudescence » -  non je ne vois pas, franchement, il écumait au bout du fil le brave encarté de Mantes ou de Conflans... A contrario question la loi coffrant les jeunes mineurs dehors après minuit, vous vous souvenez de ce dessin vachement drôle dis donc un landau cerné par les flics  Rendez-vous !  - c'est des gosses en poussette peut-être qui traînent la nuit ?

Et comment que je te leur collerais des amendes, aux parents article tant sur l'abandon moral, il me le disait couramment le vieux que si je faisais le con ce serait lui qui se ferait gauler moi je le croyais. De l'autre côté qu'est-ce que je fais de la famille qui élève le petit cinquième comme les autres, sévèrement et tout, et qui le voit comme ils disent sombrer dans la délinquance ? les barbares parmi nous, non pas venus de l'extérieur mais surgissant direct du ventre comme Alien ? j'ai peur j'ai peur putain le sujet m'échappe arrêtez de faire des gosses merde, au siècle du clonage rien qu'entre filles toujours ça de gagné, bientôt on se fabriquera dans des bocaux LE SINGE VERT - LES JEUNES DE BANLIEUE 5 – 29

n° 5 paru sous le titre « Le sexe des banlieues » aux éditions Parallèles,

21 rue du Crinchon, 62000 ARRAS

perfectionnés comme dans le Meilleur des mondes plus de grossesses plus de gosses ! Je m'en fous que tout le monde devienne vieux on nous renouvellera tout, carrément Houellebecque, la dégénérescence du cerveau enrayée, ma tête sur un corps de femme ou de brebis pour les expériences fortes, tous jeunes et intelligents, au lieu de se reproduire n'importe comment sous forme de petits crétins - parce que je crains le risque moi parfaitement - devenir con par exemple - « tu risques plus rien Pépé, t'es déjà con » - "Les jeunes de banlieue" : déjà le pluriel

ça ne vaut rien sans compter les filles déjà y en a pas. Ou presque. Elles étudient, elles sont comme tout le monde, bien élevées pas pour les mecs de la téci. Ceux-là ils cherchent des connasses qui font la vaisselle et tout. Y en a une chiée de femmes esclaves et fières de l'être et qui te méprisent si tu ne sais pas les « remettre à leur place » (je cite, là : des Européennes années 60...) Tu les vois là tous ensemble à se faire chier les djeunnz. Moi aussi dans le temps j'étais tout seul à me faire chier. Y avait une conne à table qui me disait « Qu'est-ce que vous voulez qu'ils fassent d'autre que de taper sur les flics ? » je voyais pas le rapport, moi quand je m'emmerdais je lisais.

Je ne peux pas comprendre qu'on ne lise pas, je ne peux pas comprendre du tout - qu'on ne vienne pas me dire que les jeunes des cités c'est l'avenir de l'humanité je n'en ai rien à foutre moi de la Cour des Miracles, il y en a eu des comme ça depuis que le monde est monde, ils servent d'épouvantails aux fachos et et je ne serai ni le premier ni le dernier à n'avoir rien à dire mais à le dire. Ça fait cinquante ans qu'on me bassine que tout va craquer, "la jeunesse elle est brimée elle peut plus supporter" - et qu'est-ce qu'ils sont donc devenus, les fameux sales jeunes qui foutaient leur zone dans les années 80 ? comment, pas tous gibiers de potence et malfrats ? Ils doivent avoir dans les trente-cinq, quarante ans, ils ont dû se ranger des voitures, peut-être même qu'ils sont devenus comme tout le monde - est-ce qu'on ne nous bourrerait pas le mou une fois de plus, par hasard ?

 

 

 

 

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