PAGES LIBRES V
COLLIGNON PAGES LIBRES T. V 36 02 26 / 46 10 23 1
MADAME 2036 02 26
Étrange façon de signer son nom – désir de respectabilité ? glissando-aspirando : mère jusqu’aux
entrailles. Frisée, surtout : langage excessif, réaction brusque à piqûres mineures, neutre, indésirable, nœuds-nœuds « boulette » unie à ce mufle au ventre lourd comme une étrave. Respectueuse des principes, des égards, attentionnée – faisant cuisine.
Bureau garni dans le plus déplaisant mauvais goût : « La noce des citrouilles » avec les parents en légumes, filles d’honneur en radis, viol, sexe, prostituées poussées contre les murs de briques, mâle pour fruits mûrs. Madame fraîche et fade, mesquine, têtue, soumise, un cœur sur la main, voyant l’avenir comme un gueuleton, dans un quotidien de fonctionnaires et d’amour. Racle-coquillage et gravier, les grandes machines me désarçonnent, j’ai trop rêvé avant mon lever.
J’ai trop pensé aux soumissions, chez vous volontaires, n’avez-vous jamais connu ces angoisses, qui suis-je ? dans votre chemise à dentelles, « et si j’allais mourir ? » Vous avez prié mollement, mollement vous avez prié, petite fille fraîche qu’on ne viole pas. Se venger sur l’assassin aussi absurde que de pulvériser le verglas qui tua mon père – des films qui finissent bien : « Tous les services que vous voulez, monsieur Tell. »
NON 2036 02 17
...À LA CONNERIE Soyons théâtraux. Pique en l’air, bonnet dessus. Foules. Depuis une heure je ne dors pas. Ce que je lâche n’est que bribes. Homme d’Occident sois fier, que toutes tes voix s’élèvent, que l’exemple survive, que Dieu soit si grand pour ta pauvre tête, tu ne tueras pas tu t’es tout entier dressé à te taire qu’attendez-vous ? Que les radios s’effondrent sous les bombes ?
Occident lourd et lent
Tu ne tueras pas mais tu expulseras la mort
Tu soulèveras ton peuple contre l’Est
Histrions de la foi même combat
quoi, des fonctionnaires en mal d’augmentation rassembleront plus de manifestants que nos défenseurs
Vieux Léviathan
pétant jadis fer et feu
soulève tes pattes
qui ne soient pas souffrantes
FRISSON 2036 03 19
Le frisson des femmes sitôt qu’on les touche,
frisson de répulsion du fond des âges
viol éventration l’homme est contre-nature et si c’était vous qui vous faisiez violer non pas non pas ce serait double déshonneur par un homme
entre elles pas de problèmes
cités universitaires entières de filles frottées par couples cuisse à cuisse après couvre-feu
si naturel de trouver dans sa peau comme soi l’effacement des violeurs
de se panser sa propre plaie jusqu’au moment ô mon Dieu sans faire exprès
l’homme pénètre et blesse mon amour
violé par omission nulle femme d’aucun regard suivi
corps d’homme dans le sable sec femme qui recule
gros corps de cochon
abîmes animaux, modération
Si nous en disons trop c’est que tous ignorent
les pages dans les gares dans les rues tendues mais il faut que je crie
Suffirait de monter un nouveau thermostat c’est facile
rien de plus facile
je suis du métier je maîtrise méprise
vos mains malhabiles aux mouvements mal adaptés
au réel au rabot à la scie à la lime
et Mallarmé vous tomberait des mains
Prétention de l’esclave qui veut tout ramener
tout renclencher à des combinaisons d’écrous et de boulons
j’ai besoin d’eux ils n’ont pas besoin de moi
Tenant tous dans le creux de leurs mains
le cœur battant du monde