LE PETIT LIVRE DES GRANDES FETES RELIGIEUSES editions du BORD DE L'EAU
SOUCCOT (ou Fêtes des cabanes (des tabernacles)(tentes), “fête des fruits”, “fête de la moisson “ (dans “L'Exode”) ; “époque du réjouissement” (dans les prières)
HISTORIQUE
Cette fête commémore les quarante années d'errance où le peuple d'Israël, échappé d'Egypte, dut se préparer, dans le désert, à entrer en Terre Sainte : “Vous habiterez dans des cabanes pendant sept jours, afin que toutes vos générations sachent que J'ai fait habiter dans les cabanes les fils d'Israël, quand Je les ai faits sortir d'Egypte” (Lévitique, 32, 42-43). Souccot signifie donc “les cabanes”, ou “les tabernacles” (ce sont des sanctuaires itinérants). Mais nous pouvons nous reporter aussi à ce passage de la Bible, relative à la réconciliation d'Esaü et de Jacob : Genèse (33;12) : « Il [Esaü] dit: "Partons et marchons ensemble; je me conformerai à ton pas." Il [Jacob] lui répondit: "Mon seigneur sait que ces enfants sont délicats, que ce menu et ce gros bétail qui allaitent exigent mes soins; si on les surmène un seul jour, tout le jeune bétail périra. Que mon seigneur veuille passer devant son serviteur; moi, je cheminerai à ma commodité, selon le pas de la suite qui m'accompagne et selon le pas des enfants, jusqu'à ce que je rejoigne mon seigneur à Séir." Ésaü dit: "Je veux alors te faire escorter par une partie de mes hommes." II répondit: "A quoi bon? Je voudrais trouver grâce aux yeux de mon seigneur!" Ce jour même, Ésaü reprit le chemin de Séir. Quant à Jacob, il se dirigea vers Soukkoth; il s'y bâtit une demeure et pour son bétail il fit des enclos: c'est pourquoi l'on appela cet endroit Soukkoth. » C'est la fête la plus fréquemment évoquée dans la Bible.
DATE
Cette fête se déroule le 15 du mois de tichri, mais un huitième jour (“chmini atsérèt” ou “jour de conclusion”) et un neuvième (“la joie de la Torah”) prolongent les festivités – en Israël, ils se fondent en une seule journée. Le premier et le huitième jour de cette fête sont fériés, les autres “mi-fériés”, c'est-à-dire qu'il est préférable de ne pas s'y livrer à des activités trop prenantes.
Le 7e jour est appelé “Hochana Raba” (ce qui signifie à peu près “de grâce sauve-nous”) à cause des nombreuses et longues prières que chacun récite pour son salut : c'est le jour du retour vers Dieu où ce dernier vous “scelle dans le livre de la vie” ; avec Roch Hachana et Yom Kippour, c'est le jour où “Dieu est le plus proche du peuple d'Israël”.
“Chmini atsérèt”, le 8e jour, Dieu “retient” les fidèles un jour de plus, à l'occasion du pèlerinage à Jérusalem ; mais le soir, les fidèles rentrent chez eux.
Le lendemain, Sim'hat Torah, est la fête de la “Joie de la Torah”.
RITES
LA CABANE
Pendant huit jours, il faut prendre ses repas dans une cabane (la soucca) construite dans le jardin ou sur le balcon. Sa construction s'est faite dès la fin de Yom Kippour ; ainsi l'expiation est-elle immédiatement suivie d'une obligation (“mitsva”). La cabane en question doit conserver un aspect de provisoire et de fragile. Son toit, en particulier, doit être garni de feuillages. Trois parois en présenteront une certaine solidité – quoiqu'il soit obligatoire de tout reconstruire chaque année. Les branches, le bambou sous toutes ses formes, et les palmes, sont les matériaux les plus utilisés. Il doit s'y trouver plus d'ombre que de lumière, et l'on doit pouvoir apercevoir quelques étoiles, afin de rester sous le regard de Dieu. Pourtant certains tolèrent qu'une simple caravane tienne lieu de Soukka.
On prend ses repas dans la cabane, et, théoriquement, on y dort (ou on y somnole...) Mais les hassidim, traditionalistes, même s'ils les y prennent parfois, n'auraient garde d'y dormir, crainte, disent-ils, de “porter attteinte à la sainteté du lieu”. Au moins, dire le kidoush (la bénédiction) et manger un petit peu du repas du premier soir de la fête dans la soukka est obligatoire. Le fidèle y passera le plus de temps possible, comme dans sa propre maison, y compris avec des meubles. Et l'on y étudie la Torah.
S'il pleut ou s'il fait trop froid, mieux vaudra toujours sacrifier le rituel aux obligations de santé ; ce qui est toujours le cas dans la religion juive : les malades sont dispensés de dormir dans la soucca. Inutile d'ailleurs de s'y forcer : Dieu ne nous en aura aucune reconnaisance supplémentaire !
LE LOULAV
C'est une branche de palmier-dattier, donnant son nom à un faisceau que l'on tient dans sa main, comprenant donc, outre cette branche, une autre de cédrat “étrog” (proche du citronnier) tenu celui-là dans la main gauche, trois de myrte “hadass” et deux tiges de saule de torrent ou “arava” (Lévitique, 23, 40). Tous les jours, ces végétaux seront agités en direction des quatre points cardinaux,vers tous les coins de la soucca, ou à la synagogue, autour de laquelle se déroulent des processions. Puis vers le haut, vers le bas, en récitant des prières qui demandent à Dieu l'abondance et la prospérité.
LECTURES ET BENEDICTIONS
Le chabbat de la semaine du Souccot, on procède à la lecture du Livre de l'Ecclésiaste (Vanité des vanités...).
Avant d'entrer dans la soucca, on dit : “Je suis prêt et invité à accomplir la mitsva (“obligation”) de la soucca, comme me l'a ordonné le Créateur, haréni moukhane ou mézoumane lekayème mitsvate soucca kaachèr tsivani baboré...” Et en y pénétrant, on invite Abraham, Isaac, Jacob, Moïse, Aaron, Joseph ou David (chacun a droit à une journée particulière). Puis il faut réciter le verset : ba souccote téchvou chivéâte yamim, “dans les cabanes séjournez sept jours”.
Le rituel complet, si l'on veut s'y soumettre, est long et très minutieux. Pour finir on boit le vin ; on fait au moins la bénédiction (“motsi”) sur un morceau de pain, et après l'avoir mangé, on récite le “birkat hamazone” (action de grâces).
Chaque soir, après avoir récité le “Shema Israel », on demande à Dieu d’étendre “la soucca de sa paix sur son peuple.”
SIM'HAT TORAH
Ce jour-là, les croyants sortent solennellement les rouleaux de la Loi (Sifre Torah) ; il est procédé à la lecture des derniers versets de la Torah, puis on la recommence dès le début : “Béréchit... Au commencement (Dieu fit le ciel et la terre)” Puis on danse dans la synagogue
même, en processionnant autour de la bimah (autel), tenant les rouleaux de la Torah dans les bras. Même les enfants sont autorisés à danser autour des rouleaux de la Torah, sous un grand voile au-dessus de leur tête “pour les inclure dans la communauté festive”. C'est la Torah elle-même qui danse avec ceux qui la respectent, tout enveloppée car c'est le temps non pas de l'étude, mais de la réjouissance, comme l'étreinte de la communauté avec son propre corps...
SIGNIFICATION DE SOUCCOTH
La cabane en plein air symbolise évidemment la protection divine qui s'exerce jusque dans le dénuement et sous la menace des intempéries. Et justement, la fête de souccoth intervient au moment où le temps très souvent se couvre, tandis que les autres ont tendance à rentrer chez eux pur s'abriter...
FETE DES RECOLTES
Dt 16, 13 : « Quant à la fête des Tentes (hag ha-Soukkot), tu la célébreras pendant sept jours lorsque tu auras rentré tout ce qui vient de ton aire et de ton pressoir.” Donc à l'origine, la joie que procurait aux paysans d'Israël la fête de Souccot était surtout provoquée par la période des récoltes. Comme dans tous les pays, ces travaux relatifs à l'agriculture, en particulier la cueillette des fruits, s'accompagnaient de festivités. Cependant, pour éviter que celles-ci ne devinssent l'occasion de débauches, le texte biblique nous met en garde : même en cas de récoltes abondantes, c'est “devant [n]otre Dieu” que “[n]ous [n]ous réjouir[ons]”, certains allant même jusqu'à affirmer que de tels excès, justement, provoquèrent la destruction des deux temples d'Israël.
C'est pourquoi les prêtres ont chargé cette fête d'une
SIGNIFICATION RELIGIEUSE
Tous les rites, d'abord, rappelleront la vie au désert des ancêtres hébraïques. Les quatre espèces végétales prescrites dans la Bible peuvent s'interpréter comme un symbole des différentes classes sociales du peuple d'Israël, qui manifestent ainsi leur unité en cette occasion. Il y a d'autres interprétations populaires : le palmier, c'est le corps de l'homme ; le cédrat, son cœur (lieu de l'intellect, pour la Bible) ; le myrte, ce sont ses yeux, et le saule, ses lèvres - “tout ce qui pourrait induire l'homme à pécher”. Ou bien, ce seront quatre caractères : le cédrat évoque le juste ; le palmier sera le juif qui se borne à la lettre de la Torah, le myrte l'homme qui agit sans la connaître –
et le saule, sans fruit, sans parfum, symbolise l'ignorant... “Que ces quatre espèces d'hommes se rassemblent et que chacun fasse expiation pour l'autre. »
Mais la joie doit régner ! C'est même une mitsva, une obligation : “Tu te réjouiras pendant la fête”, Deut. 16, 14 – afin de célébrer la protection divine. Celui se prend au sérieux (“ces choses-là ne sont pas de mon rang”) sera blâmé. Car "le roi David lui-même saute et fait des pirouettes devant Dieu".»
La cabane présente dans le toit des ouvertures, afin de nous mettre plus évidemment encore sous le regard de la divinité. Le caractère provisoire de cette construction nous enseigne aussi à ne nous attacher à rien de matériel, car notre existence à nous aussi est provisoire ; la vie terrestre n'est qu'un épisode - d'où la lecture du livre de l'Ecclésiaste... C'est Dieu qui est notre seul abri. Notre maison de briques et de pierre ? Elle aussi périra. Tel est le sort commun bien sûr de toute l'humanité, mais plus particulièrement du peuple juif, qui a souvent dû, au cours de son histoire, déménager en catastrophe, mener une vie errante et dépourvue de sécurité matérielle. Or seuls Dieu et la Foi sont éternels – ce qui doit nous rassurer sur notre sort. Les croyants voient dans le caractère provisoire et incessamment renouvelé de cet habitat, symbole de la perpétuelle diaspora du peuple juif, une occasion de se réjouir de l'immortalité du peuple élu, qui résiste à tout.
Se trouve conséquemment sollicité le sentiment de fraternité à l'égard de tous les errants de la terre, et de tous ses passagers. Tout hôte doit être traité avec bienveillance. Le non-juif est le bienvenu. La fraternisation juive implique un rapprochement avec les autres nations. Lorsque le temple était débout, l'on sacrifiait 70 taureaux, symbole des “70 nations”. Et cependant, Souccot est peut-être la seule fête qui n'a pas été récupérée par le monde chrétien. (Pessah fut rapproché de Pâques, Chavouot de la Pentecôte, Pourim du Mardi Gras, et même Hanouka de Noël. Mais la fête de Souccot reste à la fois fraternelle et spécifiquement juive.)
Sur le plan personnel, il s'agit de se ramener soi-même progressivement dans un sentiment d'amour et de reconnaissances universelles ; progressivement en effet, car nous devons considérer nos faiblesses et ne pas nous désespérer de n'être pas des saints. Il ne s'agit donc pas d'une illumination surnaturelle qui nous transporterait dans un état extatique : “Un juif admet les épreuves d'une vie fragile et il continue” - l'amour de Dieu lui aussi “sait attendre”.
Le temps de Souccoth doit être mis à profit pour retrouver le chemin de notre intériorité, dans le calme, et le sentiment de cette présence divine en chacun de nous. BERNARD
PESSAH
“le passage” (par-dessus)(anglais : passover”) (français : la Pâque juive)
-zmann hérouténou, “le temps de notre libération”.
hag ha matzot “fête des azymes”
GENERALITES
Les fêtes de la Pessah sont également célébrées durant huit jours, à partir du 15 du mois de nissan. C'était également une fête “de pèlerinage” (à Jérusalem). Il s'agissait de fêter le printemps, au moment de récolter l'orge.
Historiquement (même si l'Histoire demeure à ce sujet dubitative) et religieusement, Pessah commémore la sortie, pour le peuple hébreu, de son esclavage d'Egypte.
DATES
Le calcul de la date de Pessah reste primordial, car c'est d'après elle que l'on fixe la célébration de plusieurs fêtes.
En “galout” (terre d'exil), on célèbre cette fête avec une particulière intensité les deux premiers jours.
LITURGIE
A partir du second séder, on commence à compter sept semaines, à l'issue desquelles se célébrera la Pentecôte juive ou “Chavouoth”. On se rend quotidiennement à la synagogue, pour remercier Dieu de la libération accordée au peuple juif. L'assistance récite le hallel (“la louange”) : les Psaumes 113 à 118, le 114 évoquant en termes explicites la sortie d'Egypte, il y a environ 3500 ans. De plus en plus d'historiens remettent en cause l'existence réelle de cet épisode ; nous répondrons que depuis le temps qu'Israël célèbre Pessah, elle lui a en quelque sorte conféré une réalité interne, à tout le moins symbolique. Les dogmes de toutes les religions sont susceptibles d'interprétations variées. “Etre
juif”, dit à peu près le philosophe Memmi, “c'est aussi partager en commun un certain imaginaire”, une certaine culture.
Le Cantique des Cantiques fait également l'objet d'une lecture solennelle en raison de la célébration du printemps qui y figure. Dans les synagogues ashkénazes, le “yizkor, ou “office de commémoration », se lit en public le dernier jour de la fête.
COUTUMES, FESTIVITES
La Haggada (ensemble des textes rabbiniques, surtout palestiniens, fondés sur la Torah) rapporte les exégèses et les interprétations homilétiques des rabbins de l'Antiquité. C'est l'origine même de la vie littéraire juive. Elle relate cette miraculeuse délivrance ; c'est le manuscrit le plus abondamment recopié, reproduit à travers les âges. Ce récit constitue en effet le fondement de la conscience juive. C'est une fête familiale, autour d'une table abondamment servie ; tous les convives tient à disposer d'un texte sacré bien à lui, afin de participer activement au rite.
Afin que le repas du séder soit préparé de façon rituelle, chaque membre de la famille se livre à une minutieuse recherche à travers la maison ou l'appartement : il ne doit pas y subsister la moindre parcelle de levain, d'où un nettoyage complet (certains dissimulent les miettes dans dix sachets de papier – que les enfants doivent retrouver !) Ces débris peuvent être détruits, voire fictivement vendus à un non-juif... Il est parfaitement permis de consommer du riz, quoique les juifs marocains, traditionnellement, s'en abstiennent. Les ustensiles de cuisine en contact avec le haméts devront être “cachérisés” - par l'eau bouillante ou par le feu. Pour les resquilleurs : il ne suffit pas d'aller habiter pendant la fête à l'hôtel ou chez des non-croyants... Les obligations de Pessah ne sont levées que si l'on est absent de chez soi depuis au moins trente jours !
La famille dispose au milieu de la table une coupe de vin, sur laquelle on récite la bénédiction du kiddouch ; elle est appelée “coupe d'Elie”, le prophète, précurseur du Messie, étant censé venir participer à cette purification de la maison. Personne ne verrouille la porte, pour accueillir celui qui se présentera : “Celui qui a faim”, disait-on en Tunisie, “qu'il vienne”. Tout un scénario immuable pourra alors se dérouler, en quinze étapes ou “montées”, scandées par quinze psaumes. Comme il est particulièrement détaillé, mieux vaut se procurer un exemplaire du Choul'hane aroukh (“la table dressée”), qui résume l'ensemble des prescriptions, que l'on trouve dans toutes les librairies juives.
Toute nourriture comportant du levain est appelée “hamets” (pain, gâteaux, pâtes alimentaires) ; en effet, le soir de l'Exode, aucune famille n'avait eu le temps de faire lever le pain
que chacune se cuisait personnellement, mais emporta la préparation telle quelle, sans adjonction de levain. On ne doit donc pas en consommer durant les huit jours de Pessah.
Noter que les fils aînés, ainsi que tous ceux qui veulent les rejoindre dans cette coutume, doivent jeûner en souvenir de la tristesse provoquée par la mort des premiers-nés d'Egypte, dernière des plaies du même nom, après laquelle Pharaon autorisa, bien malgré lui, les Hébreux à quitter leur terre d'exil.
Le soir du repas de séder (qui signifie “ordre”, à savoir celui du déroulement de la cérémonie familiale, au premier soir de Pessah), tout le monde consommera de la matsa, c'est-à-dire du pain sans levain, ce qui est le contraire du hamets. Il faut en manger au moins trente grammes. Quelques produits alimentaires sont aussi consommés : fruits et légumes frais, poissons, eau minérale naturelle. On boit aussi quatre coupes de vin (ou de jus de raisin casher), à différentes étapes de la célébration, pour indiquer les quatre étapes de la libération du peuple juif (Ex. 6, 6-7) – à moins qu'il ne s'agisse là encore d'un rappel du sang versé des nouveaux-nés d'Egypte.
Le Maggid est le Récit de la libération. Le plus jeune des enfants pose “les quatre questions” : “En quoi cette nuit est-elle différente de toutes les autres nuits ? Pourquoi cette nuit ne mange-t-on que des azymes ? Pourquoi cette nuit ne mange-t-on que des herbes amères ? Pourquoi cette nuit, alors que toutes les autres nous mangeons soit asssis soit couchés, sommes-nous accoudés pour manger ?” (sur le coude gauche, comme des hommes libres...) Alors, le père de famille répond aux questions, en rappelant les circonstances de la sortie d'Egypte : par exemple si l'on mange du maror (de la laitue, du chèvrefeuille, de la chicorée), c'est en souvenir de l'amertume de l'esclavage – mais le harosset (rappelant le mortier d'où l'on tirait les briques) en atténue l'amertume : on trempe les herbes dans une pâte de fruits ou une compote ; en Orient, le harosset se compose d'amandes, de dattes ou de figues – en Europe, de pommes et de noix – chez les Portugais, d'amandes, de pommes, de raisins, d'épices et de vin. Les judéo-espagnols ajoutent du raisin sec trempé dans le vin ; au Surinam, on ajoute même de la noix de coco !
On mange aussi parfois un œuf dur, commémorant le deuil de la destruction du temple. Autrefois, le commandement essentiel était de faire le sacrifice de l'agneau pascal, le 14 (Pleine Lune) du mois de Nissan, et de le consommer le soir-même ; un os grillé d'agneau figure sur la table du séder. Le père de famille rappelle ensuite le sacrifice de Pessah en souvenir du “saut”, du “passage” que l'ange de la mort accomplit au-dessus des maisons juives (au jeu, on dit : “je passe !”) - dont les premiers-nés, eux, furent épargnés. Après le repas, qui fait partie intégrante de la cérémonie, le séder se conclut autour de chants symboliques. Chacun loue l'Eternel “qui nous a sortis de l'esclavage d'Egypte, nous a donné la Torah et nous a offert la terre d'Israël”, et l'on prononce la formule immémoriale “L'an prochain à Jérusalem” - la chana ha baa bi Yérouchalaïm – en Israël on ajoute ha benouhay, “qui a été reconstruite”.
Notons que d'après les Évangiles, c'est pendant la commémoration de cette fête juive par Jésus et ses disciples (la Cène ressemble fortement au premier soir du Séder) qu'eurent lieu la mort et la résurrection de Jésus. L'agneau, le sang associé au vin, le pain, l'Eucharistie, figurent au centre des célébrations chrétiennes.
En 2006, pour la première fois, les juifs marocains de Paris ont célébré la mimouna (peut-être que ce mot provient du mot arabe “mimoun”, “la chance) : c'est la permission de faire cuire du pain avec levain, lorsque la semaine de Pessah est terminée. Parfois, c'étaient les musulmans qui apportaient leur propre pain dans la maison de leurs amis juifs. A l'origine, on célébrait la fin des pèlerinages par un grand repas. Et c'est à partir du XVIIIe siècle de notre ère que les communautés juives d'Afrique du Nord l'ont célébrée. Le couscous, défendu en temps de Pessah bien entendu, retrouve la place d'honneur, ainsi que la pâte appelée “moufleta”. Ajoutons à cela un poisson (symbolisant la fertilité), du lait, du miel, de la farine, des épis de blé – et des billets de banque ou des pièces de monnaie. En Algérie, parfois, la famille se rend au cimetière, ou en forêt.
SIGNIFICATION DE PESSAH
Pessah signifie “le passage”, au double sens du terme : d'une part, lorsque les Hébreux s'enfuirent d'Egypte, le “passage” leur aurait été accordé par le retrait de la mer Rouge. C'est “le temps de notre libération”, “zémane hérouténou”. Mais il s'agissait aussi à l'origine de célébrer le retour du printemps : on sacrifiait un agneau, dont le sang recouvrait le pourtour des portes de la tente ou de la cabane afin de protéger les familles. Or, ce sacrifice n'est plus possible depuis la destruction du temple par l'empereur Titus, en 70. La fête du pain azyme, déjà mentionnée par Aaron frère de Moïse, renvoie non plus au nomadisme, mais au sédentarisme, nécessaire afin de récolter une moisson. Et ce n'est que par la suite que ces fêtes auraient célébré l'exode, la délivrance du peuple hébreu. Une partie de ce peuple en effet, nous dit la Bible, vivait en esclavage en Egypte. Dieu annonce la dixième et dernière plaie d'Egypte, la plus terrible : “Le sang vous servira de signe, sur
les maisons où vous serez. Je verrai le sang, je passerai par-dessus vous, et le fléau destructeur ne vous atteindra pas, quand je frapperai le pays d'Egypte. Ce jour-là vous servira de mémorial.” (Exode 12, 13). Tous les premiers-nés furent tués par l'ange de la mort, Azraël, à l'exception des premiers-nés d'Israël- tel est donc le second sens du terme “ passage” : l'ange avait “passé”, “sauté” les portes signalées par un badigeon de sang sur leur linteau.
La Pâque représente donc la célébration du “passage” de l'esclavage à la liberté, le printemps du peuple sauvé, la renaissance de la nation hébraïque, par la survie, justement, de ses premiers-nés. Pessah, comme Roch Hachana, est donc l'occasion de fêter un recommencement, une remise en ordre (le “séder”) : l'homme n'est pas l'esclave de l'homme, mais le serviteur de Dieu, libérateur des opprimés. Libération politique et sociale, certes, mais aussi « réembrayement » du monde, remise en état de la dimension juive – en terre d'Israël, selon les derniers mots du séder. Car il a été mis fin à un grand désordre. " Chaque génération doit se considérer comme sortie d'Egypte" – la marche ne sera jamais achevée, c'est à la nouvelle génération, à nous-mêmes, de poursuivre l'immortelle aventure du peuple d'Israël, qui se poursuit à travers nous, incarnation même de l'identité juive.
Revenons en effet sur l'assimilation du peuple juif, qu'il ait été ou non historiquement dans une condition d'esclavage : il semble qu'une partie du peuple se soit laissé entraîné à une brillante collaboration avec l'aristocratie pharaonique : Moïse avait accès au Pharaon, et les juifs purent même emprunter des vases précieux avant de fuir dans le désert. Il fut assurément difficile, pour ceux qui n'étaient pas esclaves, de s'arracher à ces liens, et les films d'Hollywood pèchent assurément par excès de simplification ! Et nous aussi, à notre époque, nous avons vécu l'impossibilité d'une assimilation pourtant estimée profonde des citoyens juifs, aussi bien d'ailleurs qu'un rejet profond, allant jusqu'aux meurtres, et ce dans un laps de temps très court... Qui peut se dire totalement assimilé, même après des siècles ? Et c'est alors que nous devons nous émerveiller de ce sursaut de foi qui a conduit jadis le peuple hébreu dans le désert, à la recherche non pas d'une perfection, mais de racines, de valeurs ataviques, d'une fidélité, d'un choix, du désir de sans fin transmettre le flambeau – sursaut qui se poursuit jusqu'à nos jours de façon parfois irrépressible. Certains n'hésitent pas à affirmer qu'il n'y a qu'une seule chose à faire pour être pleinement juif : rejoindre la terre d'Israël promise par Dieu.
Sur un plan plus métaphorique, mais non moins puissant, Pessah nous délivre de toutes nos entraves matérielles et spirituelles, de tous nos malheurs, de tous nos conformismes successifs, que nous devons détruire pour aller de l'avant, monter encore ; et, si nous tombons cent fois, de nous relever cent une fois. Plus généralement, Pessah rappelle à tout Juif son identité, son devoir de transmission et de “passage” du relais à travers les vicissitudes passées ou à venir.
CHAVOUOTH
“Semaines”
GENERALITES
Pessa'h, Chavouot et Souccot sont des Atseret (assemblées solennelles), à l'occasion desquelles se tenait un pèlerinage au Temple de Jérusalem. Chavouoth intervient cinquante jours après Pessah, de même que la Pentecôte (“Cinquantième”) après les Pâques chrétiennes. Ce qui n'est pas une raison pour appeler “Chavouot” la “Pentecôte juive”, contresens total. Chavouoth, c'est la fête de la moisson, Hag ha-katsir, “fête de la récolte”, mais c'est aussi la commémoration de la réception de la Torah et des Dix Commandements, de la main même de Moïse, qui la tenait de Dieu en personne.
HISTORIQUE
C'était en l'an 2448 (1313 av. è.c. [“ère chrétienne” ou “ère commune”]. Au sortir d'Egypte, le peuple juif fut guidé dans le désert jusqu'au mont Sinaï. “Pendant leur marche dans le désert, les Hébreux ont été guidés par la shékinah (colonne de nuée), qui s'est immobilisée au pied du Sinaï. Là, Moïse, comprenant que Dieu leur ordonnait de s'arrêter, donna l'ordre de dresser les tentes. Le tonnerre se fit entendre, des éclairs sillonnèrent le ciel, le peuple fut saisi d'épouvante. La montagne du Sinaï était toute en fumée et tremblait avec violence, car Dieu y était descendu au milieu du feu (Exode, 19, 18). Et la voix de l'Eternel se fit entendre, solennelle, et prononça les paroles de la Torah : “Je suis l'Eternel, ton Dieu ; tu n'auras pas d'autres dieux devant la face” (Exode, 19, 18. ) Moïse reçut les Tables de la Loi, et cela se passait sept semaines après le départ d'Egypte, d'où le nom de Chavouoth (“les semaines).
Il est cependant à noter que nulle part, la Torah n'évoque ce jour en tant que “Mattane Torah”, “jour de la Révélation”.
LE “ÔMER”
Ômer : ce mot signifie “gerbe” et désigne l'offrande d'orge nouveau présentée au temple au soir du premier jour des festivités de Pessah, au coucher du soleil. Ce mot désormais désigne à compter les cinquante jours qui séparent Pessah, moment de la liberté, de Chavouoth, fête de la
réception de la Torah (cette période séparant les deux fêtes, du deuxième au trente-troisième jour, peut se considérer comme un demi-deuil : une épidémie a tué ces jours-là 24 000 disciples du rabbin Aqiva au deuxième siècle de notre ère ; le 33e jour, marquant la fin de cette épidémie, est un jour de fête).
RITES
A l'époque du temple, on sacrifiait un taureau. On présentait donc la première gerbe d'orge de la communauté, soit les “prémices” de la récolte. Puis on lisait une action de grâces. On pouvait aussi offrir les sept produits agricoles mentionnés à Deutéronome, 8, 8 : froment, raisin, figue, grenade, olive, miel et dattes. Ces prémices étaient distribuées aux prêtres de service ce jour-là.
La veille au soir, les femmes et les jeunes filles allument les bougies. L'office du soir a lieu,
Pour commémorer le don de la Torah, certains fidèles veillent toute la nuit au sein de la synagogue pour étudier les textes, certains même, dit-on, dans l'espoir de voir le ciel s'entrouvrir !
Le lendemain, hommes, femmes et enfants se rendent à la synagogue afin d'écouter le Décalogue, ou les Dix Commandements. Mais il n'y a pas de rituel à proprement parler. On lit également le livre de Ruth, arrière-grand-mère de David, et morte ce jour, car une grande partie de ce livre se déroule à l'époque des moissons : souvenons-nous du poème de Victor Hugo “Booz endormi” - “il [Booz] lui offrit [à Ruth] du pain grillé, elle mangea, se rassasia et en laissa.“ Les grains grillés, pris directement des gerbes, étaient la nourriture principale des moissonneurs.
La journée, c'est au tour des Psaumes d'être lus, car Chavouoth est aussi l'anniversaire de la mort de David, auteur de nombreux psaumes. Or, dans le Nouveau Testament chrétien, Actes 2,1, les croyants juifs étaient en pleine fête de Chavouoth quand l'Esprit Saint serait descendu sur les disciples de Jésus...
QUELQUES COUTUMES
En Israël, la fête des moissons est célébrée avec une ampleur particulière, surtout dans la région d'Haïfa et dans les kibboutz ; mais ces derniers n'existent plus beaucoup dans les formes qu'ils avaient à l'origine...
C'est le début de la moisson des blés, on chante le Hava naguila connu dans le monde entier : Translittération Texte Hébreu Traduction française
Hava naguila הבה נגילה Réjouissons-nous
Hava naguila הבה נגילה Réjouissons-nous
Hava naguila venis'mekha הבה נגילה ונשמחה Réjouissons-nous et soyons heureux
(répéter une fois)
Hava neranenah הבה נרננה Chantons !
Hava neranenah הבה נרננה Chantons !
Hava neranenah venis'mekha הבה נרננה ונשמחה Chantons et soyons heureux
(répéter une fois)
Ourou, ourou akhim ! !עורו, עורו אחים Réveillez-vous, réveillez-vous, frères!
Ourou akhim b'lev sameakh עורו אחים בלב שמח Réveillez-vous frères avec le cœur allègre
(répéter cette ligne trois fois)
Ourou akhim, ourou akhim! !עורו אחים, עורו אחים Réveillez-vous, frères, réveillez-vous, frères!
B'lev sameakh בלב שמח Avec le cœur allègre – c'est au point que certains considèrent ce texte comme l'hymne même des juifs...
C'est non seulement la fête des moissons, mais aussi celle du fromage, que l'on déguste sous toutes ses formes. Le matin, on prend un repas à base de lait. Certains versent de l'eau sur les passants, selon la coutume marocaine. En Tunisie, on préparait la kléya : mélange de grains secs grillés “dans un torréfacteur au feu de bois qu'on tournait à la manivelle” : de l'orge, du lin, des pois chiches, des cacahuètes, des amandes... Les enfants consommaient des biscuits de formes variées : les tables de la Loi, une échelle qui a dû permettre à Moïse d'escalader le Sinaï, un cône (le Sinaï lui-même), la main qui écrivit la Torah, une corbeille symbolisant l'offrande de prémices, etc. Il est d'usage aussi pour Chavouoth de décorer sa maison avec des fleurs.
SIGNIFICATION DE CHAVOUOTH
Chavouoth signifie “semaines” parce que durant 7 semaines le peuple juif s'est recueilli afin de recevoir la Torah – mais le Veau d'Or ??? On peut dire aussi que les moissons duraient sept semaines, au milieu de grandes réjouissances (Jérémie 5,24) – le don des fruits de Chanaan symbolisant la générosité de Dieu, tant sur le plan matériel que sur le plan spirituel. Cela signifie aussi “les serments” : c'est par le don de la Torah que le peuple juif devient véritablement le peuple juif, témoin du message de Dieu devant les autres nations (de même, la Pentecôte représente la véritable naissance de l'Eglise chrétienne)(nous pourrions même établir un parallèle avec l'institution de la charia musulmane). Les dix commandemants (les dix “paroles”, d'où “Décalogue”) se composent de cinq “dévarim” traitant de la foi juive dans ses aspects spirituels (“Tu n'auras pas d'autres dieux devant ma face”), les cinq derniers correspondant à des lois morales et civiques (“Tu ne commettras point d'assassinat - Tu ne commettras point d'adultère”, etc.) : ainsi se trouvent reliés les choses d'en haut à celles d'en bas. Il s'agit donc du jour de l'insertion du terrestre dans le divin, et par conséquent de celle du politique dans le religieux.
Tout est prévu par la Torah, l'intégralité de la vie de chaque juif : il est facile en effet de l'interpréter dans un sens intégraliste. Pour l'érudit, c'est aussi une somme historique, poétique, voire prophétique, d'où rien ne se peut isoler - une conception d'ensemble de l'existence juive : “Tout est Torah”. D'ailleurs, “gravé”, “harout”, se lit également “‘hérout”, la liberté : “Ne lis point ‘harout, dit le Talmud, mais plutôt ‘hérout, car n’est vraiment libre que celui qui se consacre à la Torah.” Or, Chavouoth est la fête la moins célébrée de la communauté juive ; aucun rituel particulier ne se déroule à la synagogue. Et pourtant, sans Chavouoth, aucune autre fête n'aurait lieu d'être célébrée, aucun fondement de la religion n'aurait été institué ! Certains rabbins nous démontrent que cette réception de la Loi, transmise oralement de génération en génération (Moïse reçut à la fois les Dix Paroles, puis la totalité de la Torah, sous forme d'abord écrite puis orale) – réception enrichie par les commentaires des exégètes (le midrasch) se passe à tout moment et en tout lieu, hors de toute délimitation spatiale ou temporelle – ce serait pourquoi nulle réunion particulière ne se déroulerait à la synagogue proprement dite.
Certains vont même jusqu'à affirmer que la Torah est antérieure à la création du monde, puisque c'est l'expression de la volonté de Dieu : “[Il] regarda dans la Torah et créa le monde”.
Ce sont les actions des croyants qui représentent réellement et matériellement la volonté
de Dieu : “Chaque juif reçoit ensuite la Torah selon sa propre manière et selon son propre rythme” disait le Rabbi de Kotzk.
Simplement, ce jour-là, méditons sur la nature de Dieu, de sa Révélation et du Contrat de mariage en quelque sorte, de fidélité, que nous avons avec lui : “Naassé vénichma” - "Observons, puis ( ou “en même temps”) essayons de comprendre", ou encore : “ce qui nous fera comprendre" – comme le dit le chrétien Pascal : “Agenouillez-vous, et vous croirez...” Le mystère de l'Incarnation chrétienne, justement, n'est pas autre chose lui non plus que ce reflet de la terre dans le ciel, et du ciel sur la terre, que les religions, mono- ou polythéistes, ont toutes découvert. Ce ne sont pas seulement les lois humaines qui se trouvent corroborées, originées dans les prescriptions divines, mais bien la structuration du monde lui-même, voire son essence. Nous assistons ainsi à un décalque, à une équivalence, à un emboîtement de la loi humaine, de la loi divine et la la loi des Univers eux-mêmes.
Ainsi donc ce qui semblait différencier les religions n'est plus qu'une affaire d'éclairage, de circonstanciel : ici le Christ, là Moïse, là encore Mahomet inspiré par Gabriel, ne font plus que figurer sous une forme plus ou moins mythique le sens même de l'appartenance à la communauté humaine : un rassemblement de “poussières d'étoiles” conscientes de leur rattachement à quelque entité supérieure...
Ce qui navrera certains fidèles de telle ou telle religion réjouira ceux qui ne veulent voir dans les phénomènes religieux que les variations d'une même intuition universellement partagée...
HANOUCCAH
HISTOIRE
Aucune source biblique ne mentionne l'origine de cette fête.
Le roi grec de Syrie, Antiochus IV Epiphane (“le Splendide”) (-175 / -164) occupe la Judée. Avec le soutien de certains juifs (les sadducéens, qui remettent en question la brit mila elle-même (la circoncision) et l'observance du shabbat), il veut helléniser par la force la vie quotidienne de l'ensemble du peuple juif (ce qui est contraire à tout l'esprit grec, même envers les “barbares”...). On finit par le surnommer l' “Épimane (l'Insensé). Il installe un autel du dieu Baal Shamen dans le temple de Jérusalem, ordonnant même d'offrir des porcs en holocauste ! Eléazar, docteur de la Loi, âgé dit-on de 99 ans, est mis à mort, ainsi qu'Hannah et ses sept fils, martyrisés. (Vers l'an – 800, dix tribus d'Israël avaient été déportées en Babylonie, où elles s'assimilent rapidement ; en – 670, Nabuchodonosor détruit Jérusalem et son temple ; les Juifs sont à nouveau déportés, mais peuvent respecter leurs coutumes religieuses (plus tard Cyrus, roi de Perse, a permis que les Juifs rejoignissent leur pays pour y reconstruire leur temple) - ce n'était donc pas la première fois que le peuple juif avait dû affronter des ennemis beaucoup plus puissants, mais la lutte n'avait jusque là jamais pris un tel caractère ; un jour de shabat donc, , Antiochus Epiphane entra dans le temple de Jérusalem, “tua tous les Juifs fidèles à leur Dieu. Il mit à sac tous les objets sacrés ainsi que le trésor qui contenait les dons du peuple. Puis la statue de Zeus fut placée dans le Temple, et les Juifs contraints de prendre part, avec les prêtres hellénistes, aux sacrifices idolâtres en l'honneur de Zeus”. (Nous ne pouvons cependant nous empêcher de considérer avec une certaine stupéfaction un Hellène se comportant de façon si opposée à ce qui a toujours constitué le génie proprement grec, celui de la tolérance et de l'ouverture d'esprit).
Toujours est-il que dans le petit village de Modin, Matathias, de la famille sacerdotale des Hasmodéens, donne le signal de la révolte en tuant un collaborateur qui acceptait de sacrifier à sa place. Les combats furent acharnés. L'armée comprenait en particulier tous les membres de la
famille des Macchabées (leur nom signifie “marteau” ; leur drapeau portait la phrase suivante : Mi Khamokha Baélim Adonaï : "Qui est comme toi parmi les dieux, Eternel ?" ...Les “Helléniques” furent vaincus, malgré les fameux stratèges grecs Nikanor et Gorgias. Les Juifs alors détruisirent la statue de Zeus, purifièrent le temple de toute la graisse des sacrifices idolâtres, et rallumèrent les lumières du sanctuaire.
Se produisit alors ce que l'on appelle « Miracle de la fiole d'huile » : bien qu'il ne restât que pour une journée d'huile, cette quantité suffit à maintenir la flamme durant huit jours entiers dans le luminaire sacré, le temps d'en préparer d'autre. Ce n'est pas tant la victoire militaire qui importe, mais ce miracle de l’huile. C’est pourquoi la mitsva, l' “obligation” de cette fête est l’allumage des lumières de Hannouca. Hélas, une guerre fratricide naquit entre les partisans de l'ancien ordre et ceux de la nouveauté. Certains n'ayant rien trouvé de mieux que d'en appeler aux armées romaines pour arbitrer le conflit, ces dernières conquirent la Judée, d'où une nouvelle destruction du temple et un second exil des Juifs...
RITE ET LITURGIE
Dans la amida (“prière debout”) des trois offices quotidiens (élément central de tous les offices juifs, “la prière par excellence”), et pendant les prières de grâce à la fin des repas, on rajoute la prière Al hanissim (“Pour les miracles”). Pendant l'office du matin, on rajoute le Hallel, qui sont des actions de grâce, tirées des Psaumes 113 à 118. Et chaque jour, on récite à la synagogue un passage particulier de la Torah. Le soir, les Ashkénazes, après avoir allumé les bougies de Hanouccah, entonnent le “Maoz tsour”, “Puissant rocher”, cantique populaire composé en Allemagne au XIIIe siècle (« Forteresse rocher de mon salut,
vers Toi il convient de louer.
restaure la Maison de ma prière
et là, le sacrifice d'action de remerciement nous sacrifierons.” ; d'autres récitent le Psaume 30.
COUTUMES
Chaque famille expose à sa fenêtre un chandelier à huit branches , la ménora de hanoucca ou “hanoukia”. Le premier jour (soit bien sûr la veille au soir), allumage de la première bougie, à l'aide d'une neuvième bougie, appelée “chammach”, 'lumière auxiliaire”); et ainsi de suite, tout au long de la première semaine. Les familles disposaient jadis cette lumière non pas à l'intérieur d'une synagogue, mais à l'extérieur de leur domicile, sur le pas de la porte, dès la tombée de la nuit, et “jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de passant dans les rues”. Que les fidèles, au moins, demeurent auprès d'elle pendant une demi-heure...
Certaines communautés consacrent le sixième jour aux femmes, en l'honneur de la mère des Macchabées, Hannah, qui fut martyrisée après ses fils ; les juives de Salonique en particulier préparaient des plats sucrés et se réunissaient, sans les hommes ! afin de régler les éventuels différends survenus entre elles au cours de l'année... La coutume, en tout cas, est d'offrir à tous des beignets à la confiture. Les enfants ashkénazes recevront volontiers une petite somme d'argent, le Hanouccah Guelt... qu'il est interdit de compter à la lueur des bougies... Autre cadeau : des toupies
angulaires, sur les faces desquelles sont inscrites les premières lettres des mots “Un grand miracle est arrivé là-bas”, en yiddich. C'est le jeu du sévivon. On mise de l'argent, ou des bonbons. Le noun signifie nicht : "rien": Le guimel, gants : "tout". Le hey, halb : "moitié". Le shin signifie shtelen, "miser"...
SIGNIFICATION DE HANOUCCAH
Cette fête, de la “re-dédication” (du temple), symbolise la victoire sur les ténèbres. Mais elle a trop souvent tendance, aux yeux des traditionalistes, à se substituer à celle de Noël, pour les enfants qui vivent dans un milieu chrétien. C'est aussi en raison de cette proximité dans le calendrier qu'elle est bien plus célébrée qu'autrefois... Cependant les familles hésitent à s'afficher comme juives en exposant la “hanoukia” sur le pas de leurs portes...
Hanouccah est donc historiquement la première confrontation à une réelle menace d'absorption, d'assimilation d'ordre culturel. Ce n'est pas ici l'extermination, mais l'assimilation qui menaçait déjà en effet en ces époques antiques l'identité juive. Les Juifs s'étaient approprié tout un mode de vie exclusivement hellénique, afin de se faire accepter. La culture hellénique était le
modèle dominant. Athènes célébrait la puissance du génie humain, la splendeur du corps, le plaisir des yeux, mais aussi la corruption. Si la famille sacerdotale des Macchabées ne s'était pas révoltée, incitant à prendre les armes, le judaïsme eût été en grand péril de disparaître.
Aussi les petites lumières de la hanoukiah, dans leur isolement, symbolisent la communauté juive unie dans l'obscurité, au-delà des conflits, pour tenir tête à l'adversaire commun. Le Hallel (“chant de grâce”) manifeste la joie du peuple juif et sa reconnaissance envers les miracles de Dieu. Les Juifs n'auraient garde d'omettre, tous les ans, la célébration de Hanouccah. En effet, les docteurs de la Loi ont dit : “Si toutes les fêtes sont supprimées un jour, la fête de Hanouccah continuera à être célébrée avec joie dans nos maisons et nos cœurs seront illuminés par ses lumières.” Tandis que la ménorah s'allume à l’intérieur, et de jour, la hanoukia s'allume vers l'extérieur, et de nuit, depuis notre monde intérieur et spirituel vers le monde extérieur et matériel. Les flammes de Hanouccah évoquent la valeur morale, les sentiments nobles et constants que l'âme juive puise au sein de la Torah.
C'est ainsi que depuis 165 avant l'ère commune, cette fête rend régulièrement hommage aux héroïques martyrs de la foi et de la culture juives : fête de la lutte contre l'assimilation, question toujours essentielle dans la conscience de la judéité : harmonie ou identité ? Dernièrement encore, les autorités éducatives d'Israël ont très mal pris l'initiative de certains lycéens, qui voulurent fêter Hanouccah en utilisant nombre de symboles chrétiens, pour faire plaisir à leurs camarades chrétiens. Aux États-Unis, certaines familles "mixtes" ou assimilées garnissent des Hanukkah bushes (buissons de Hanoukkah, bien proches des arbres de Noël...) et s'échangent des “happy choliday” avec le “het” de “hanouccah”, voire des “chrismukkah ») – aimons-nous tous, “Dieu reconnaîtra les siens...”
P O U R I M (“les sorts”, “les hasards”)
GENERALITES
Cette désignation commémore le lancer de dés qu'effectua Haman, afin de connaître la date la plus favorable à l'extermination des Juifs de Perse. Il descendait de la tribu d’Amalek, réputée pour son hostilité aux juifs. Le premier, il médita une “solution finale” : une extermination. Et pour que cela ne lui portât pas malchance, il tira au(x) sort(s) (“Pourim”) le jour le plus favorable : ce fut le 13 Adar. Or Esther convainquit le roi Assuérus de bannir son mauvais conseiller. Comme Hanouccah, la fête de Pourim est classée parmi les moins importantes de celles qui sont prévues dans la Torah. Mais elle demeure très populaire.
DATES
La célébration annuelle de la fête par les juifs, “jour du festoiement et de la joie”, a lieu le 14 ou le 15 adar du calendrier hébraïque (février ou mars selon les années). Voici les dates où les juifs célébreront Pourim :
Certaines années, il y a deux mois de adar. On choisit alors le second, tandis que pendant le premier prend place le « Pourim Katan », « Petit Pourim ».
HISTOIRE
Cyrus autorisa les juifs à retourner à Jérusalem. Il restait cependant une forte population juive en Perse, en particulier à Suse, la capitale. Or Assuérus (485 à 465 avant l'ère courante), petit-fils de Cyrus, répudie son épouse Vashti. Ce souverain est identifié à Xerxès Ier, le "grand Roi" de Perse. Pourim fête la victoire d'Esther (“la Secrète”) sur la cruauté du souverain.
Haman, mauvais et puissant conseiller, intervint auprès de lui pour faire massacrer tous les Juifs de Perse, afin de se venger d'un certain Mardochée C'était un important serviteur du palais, qui avait révélé un complot d'eunuques visant à assassiner le roi. Or la cousine de ce Mardochée, Hadassah “Esther”, devait épouser Assuérus, qui avait répudié sa femme précédente (Bat Avigaïl) en découvrant son origine juive. Mordékhaï (Mardochée) persuade Esther de parler au roi sans qu'il le lui ait demandé, crime de lèse-majesté puni de mort ; Esther pria et jeûna trois journées, en demandant aux Juifs de l'imiter. Pendant ce temps, Mardochée parcourt la capitale, Suse, couvert de cendres, afin d'avertir le peuple élu de sa dispatition prochaine et de l'inciter à la révolte.
Esther ne fut pas exécutée, mais c'est Haman qui sera pendu à la potence originellement préparée pour Mardochée...
RITE ET LITURGIE
Il n'est pas obligatoire, mais simplement recommandé de ne pas travailler à l'occasion de cette fête. Le rite le plus intangible consiste à lire ce jour-là le Livre d'Esther en entier : on déroule la méguillah (le rouleau) qui y correspond. L'assemblée récite à haute voix, avec le lecteur, l'origine et l'ascension de Mardochée. Les femmes entendent obligatoirement cette lecture parce qu'« elles aussi furent impliquées dans ce miracle. » Mais la plupart des communautés orthodoxes, y compris orthodoxes modernes, n'autorisent cependant pas les femmes à lire la Meguila, sauf cas rares : devant des femmes.
Ces prières ont lieu dans une atmosphère de grande liesse. L'assistance à la synagogue en effet ne reste pas nécessairement silencieuse et recueillie. Il est même courant que tous agitent d'énormes crécelles et poussent des huées sitôt qu'on entend le nom de Haman, le mauvais ministre. Ce jour-là on se déguise, mais il ne faut pas pour autant négliger la vénération dont on entoure l'héroïne du jour, Esther : un jeûne est recommandé la veille, en souvenir de celui qu'avaient observé Esther, avant de se présenter devant le roi, .et ses servantes, ainsi que tout le peuple juif. Mais sans téchouva, sans “retour à Dieu”, le jeûne est évidemment absurde.
Pourim est enfin à l'origine de beaucoup de compositions religieuses, dont certaines ont été incorporées à la liturgie, ainsi que d'un grand nombre d'hymnes chantés durant le service public.
COUTUMES ET TRADITIONS
Le Livre d'Esther recommande “l'envoi de cadeaux les uns aux autres, et de dons aux pauvres”. Les juifs doivent envoyer des cadeaux comestibles à au moins trois amis. A la synagogue, on fait des quêtes pour les nécessiteux, même les non-juifs. Au repas, on prépare des gâteaux de formes spéciales ; ainsi les juifs d'Allemagne mangent des “Hamantaschen” et des “Hamanohren” (“poches” et “oreilles” de Haman) (en Italie, “orecchi d'Aman”), etc. Le Talmud invite à boire pendant Pourim jusqu'à ce qu'on ne puisse plus distinguer “maudit soit Haman” de “béni soit Mardochée” (“Arour Haman”, “Baroukh Mordekhaï”) ; “il ne s'agit pas de rouler sous la table, mais d'atteindre un niveau qui fait comprendre des notions au-delà de leur simple énonciation” - bénie soit la souplesse de la casuistique !
En Italie, les enfants se battaient en se lançant des noix, Dès le cinquième siècle on brûlait sur l'échafaud un pantin à l'effigie d'Haman, en sonnant de la trompette. D'où la colère des chrétiens, qui voyaient là une façon détournée de ridiculiser Jésus et la croix. Les rabbins essayèrent d'abolir ces coutumes, sans grand succès, même avec le concours des autorités locales, à Londres, en 1783...
Au XIIe siècle, on écrivit les noms de Haman et de son ancêtre Amaleq sur deux pierres, afin de frotter ces dernières l'une contre l'autre jusqu'à effacement des deux noms maudits.
Comme nous le disions plus haut, des drames, des jeux (“Purimspiele”) furent composés, représentés au cours des siècles, en hébreu et en d'autres langues, avec le dessein d'édifier par le rire. Mais ce ne fut bientôt qu'un prétexte, et donna plus tard naissance à la comédie yiddische. Ces satires étaient jugées inappropriées pour les synagogues. Cependant les hassidim de Bobov n'ont jamais cessé de jouer leurs Pourimspieln, tous les ans, à minuit, dans les synagogues de Brooklyn.
LE DEGUISEMENT
“Pendant Pourim tout est permis”. Cependant on évitera les blagues salaces, afin de respecter la “tsénioute” (“la pudeur”) ; de même, “une femme ne portera pas d'habillements d'hommes, et un homme ne mettra point de vêtements de femmes ; car quiconque fait ces choses est en abomination à l'Eternel, ton Dieu” - or le travestissement est attesté à Venise en 1508, et il existait sans doute quelque temps auparavant. Pourquoi ces déguisements ? ...les méprises et quiproquos ont joué un grand rôle dans le Livre d'Esther : Esther cache au roi, elle aussi, ses origines judéennes; Mardochée
connaît en secret certaines langues étrangères, comprenant ainsi Bigtan et Teresh évoquant ouvertement leur complot. Enfin, Haman suggère au roi comment rendre gloire à la personne que le roi veut honorer… il pense à lui-même, et ce fut Mardochée que l'on honora, Haman que l'on pendit... : "venahafo’h hou", “et le contraire se passa”...
Cependant, en Orient, on ne se déguise pas. De nos jours, les villes israéliennes organisent des défilés de Pourim.
SENS DE POURIM
L'épisode d'Esther est le seul où le nom de Dieu n'est jamais mentionné ; mais il est toujours présent, soit sous la figure du roi, soit dissimulé, lui aussi, dans l'enseignement de la vie quotidienne. Les évènements eux-mêmes traduisent l'aide miraculeuse et il n'y a pas de prodige merveilleux et non naturel : D.ieu mène tout le cours des événements. Quant au magicien Amane, détenteur par conséquent de la plus grande influence à la cour de Perse, il prétend détenir la vérité universelle, un peu l'équivalent de nos grands politiques actuels... Pourim nous apprend à ne pas les craindre. Esther “la cachée” symbolise l'impuissance apparente des forces du bien, menacé, mais qui finit par triompher, avec ses propres armes, contre la médisance (lachone ha râ), et le regard mal intentionné (le âyine ha râ). Obstinons-nous dans la confiance en Dieu, et croyons en nos amis...
Le déguisement : n'oublions pas que le choix d'un masque en dit souvent bien long sur la personnalité de celui qui le choisit...
Bien sûr, il ne manquera pas d'exégètes pour appliquer à la situation contemporaine des sujets de réflexions se rapportant à Pourim : le conflit israélien ne fait qu'instrumentaliser les rivalités entre puissances ennemies ; nous avons lu des vœux pieux : “que ce Pourim soit aussi une libération intérieure pour l'Iran ; et qu'ils ressentent l'émotion qui est passée entre le roi de Perse et la reine Esther.” Mais ce qui touchera toujours les exilés de tout bord, c'est ce serment solennel qui fut composé à l'occasion de la déportation du peuple juif après la conquête babylonienne : « Si je t'oublie Jérusalem, que ma droite me refuse son service; que ma langue se colle à mon palais si je ne place Jérusalem au faîte de ma joie » (Psaume 137, 5-6).
C'est pourquoi, chaque fois que la communauté juive s'estima tirée de justesse d'un mauvais pas,
elle institua un certain nombre de POURIM PARTICULIERS. Car les dangers auxquels les juifs ont échappé sont aussi divers que les lieux qu'ils ont occupés en galoutt, en exil.
Rappelons quelques-unes de ces circonstances :
POURIM DE NARBONNE
Un juif ayant tué un chrétien lors d'une grave dispute, les chrétiens de Narbonne voulurent se venger sur l'ensemble de la communauté. Elle ne dut son salut qu'à l'intervention de Dom Aymeric, gouverneur de la cité, à la tête des autorités municipales... et d'une bonne troupe de soldats...
POURIM D'ALGER
Après l'expulsion des juifs d'Espagne en 1492, et, plus tard, du Portugal, nombre de juifs trouvèrent refuge en pays musulman, où ils n'étaient pas persécutés. En 1541, les armées espagnoles de Charles-Quint s'emparèrent de Tunis et massacrèrent 70 000 habitants, parmi lesquels de nombreux juifs. Cette même année, ce souverain met le siège devant Alger. La population juive, terrorisée, envahit les synagogues pour se livrer à) la prière. Or le 23 octobre, une tempête détruit la flotte assaillante, qui doit se retirer. On célébra longtemps ce pourim dans la ville d'Alger.
POURIM D'AVIGNON
Les circonstances de l'établissement du pourim d'Avignon sont extrêmement révélatrices de tout un état d'esprit, en plein siècle des Lumières, soit le 17 février 1757. C'est l'histoire d'un Avignonnais qui rentre chez lui de nuit, sans éclairage nocturne, en traversant le quartier juif. Or il tombe la tête la première dans un puits ; par chance il se bloque, et parvient, en se retournant, à la force des bras, à sortir de là sain et sauf. Et savez-vous pourquoi la communauté juive célébra cet heureux évènement ? Parce que si l'homme était mort, la population n'aurait pas manqué ce prétexte de se retourner vers la population juive, rendue collectivement responsable, pour se livrer à l'un de ces massacres dont notre histoire est si coutumière. Imaginons la terreur sourde et permanente où devaient vivre de telles communautés.
POURIM DE FOSSSANO
A Fossano, c'est encore à un massacre que les juifs échappèrent en 1796, lorsque les habitants les rendirent responsables du siège et de l'attaque de leur ville : ne se réjouissaient-ils pas tous lors de la fête de Pessah, qui tombait ces jours-là ? Toute une multitude, en proie à la plus vive fureur, se rendit à la synagogue, lorsqu'une bombe s'abattit sur ladite synagogue, sans faire de victimes – la peur changea de camp, et les prétendus chrétiens s'enfuirent... en abandonnant le butin subtilisé dans leur traversée du ghetto ! Ce fut le jour du “miracle de la bombe ».
D'autres pourim célébrèrent des faits similriares : pourim des chrétiens à Ceuta, Tétouan et Tanger, l'armée portugaise ayant été mise en déroute, en 1578, à la Bataille des Trois Rois, pourim d'Oran en 1830. Signalons enfin le pourim de neige, où le quartier juif (le hara) de Tunis fut épargné par les fortes chutes de neige ayant occasionné de forts dégâts dans les autres parties de la ville...
POURIM FRIMER (du nom de son fondateur)
Le dernier “pourim” est d'ordre privé. Il fut instauré par le rabbin Frimer, à New York, 33 ans après la Shoah. La famille Frimer voulut ainsi remercier Dieu de l'avoir épargnée lors d'une prise d'otages, à l'occasion d'une rencontre entre Itzhak Rabin et du président Jimmy Carter. Le commando disposait d'armes blanches et d'armes à feu. Un journaliste fut tué. Des menaces de mort furent proférées. Les otages furent regroupés au huitième étage, pieds et poings liés. Après 39 heures, ce ne furent pas moins de 130 otages qu'on libéra, sains et saufs. Un conseil de famille adopta l'instauration d'un pourim, qui fut célébré pour la première fois en 1978 ; c'était le premier à se relier à l'histoire des Etats-Unis. Le rabbin Frimer mourut en 1993 à l'âge de 77 ans.
POURIM CONTEMPORAIN ?
Certains voient la Première guerre d'Irak et la victoire américaine comme un signe de Dieu : la force aérienne de Saddam Hussein fut anéantie, et aucun Israëlien ne mourut malgré la chute de 39 missiles. Ce serait le Pourim d'Eréts Israel... qui pendant la guerre précédente, opposant l'imam Khomeïny à l'Irak, avait livré secrètement des armes à l'Iran...
QUESTIONS
Les historiens ont bien du mal à trouver une preuve de l'histoire de Pourim, qui ressemble, jusque dans les noms propres, aux légendes d'Ishtar et Mardoukh, divinités babyloniennes. Ne s'agirait-il pas plutôt d'un sentiment persistant d'insécurité, d'anéantissement, ayant accompagné le peuple juif tout au long de son existence, et qui trouve dans ce mythe une façon de l'exorciser ?
...L'essentiel, en dehors de toute préoccupation mystique, restant de célébrer du mieux que l'on peut, dans une atmosphère festive, la survie du peuple juif à travers toutes les vicissitudes d'une histoire tourmentée...