Du Dantzig, du Drieu
On n'a trop souvent pour guide, malheureusement, que son intime conviction. « Par le même « raisonnement » que les corrompus qui ont renoncé à la littérature pour le pouvoir » (Malraux ?) « il meurt avec la certitude qu'« il n'y aura plus de littérature française après cette guerre » (18 mai 1940) et que la France est morte. La France est là, et ses écrivains. » Arrête, Dantzig, je bande. « Ses écrivains dont moi », Dantzig ? Hé hé, ça n'est pas passé » loin. Citons Drieu à l'intérieur de la citation, le symbole imprimé du livre ouvert nous y invite : « Suprême notion sociale qui semble le bien propre des femmes, car au fond, la société n'existe que par elles, ce sont leurs travaux qui la renouent sans fin, elles en sont les ouvrières et les reines, les gardiennes acharnées ; sans elles, les hommes, qui sont des anges pris au piège, seraient depuis longtemps montés au ciel » - heureusement que Maman fait le ménage. Dès que j'ai lu « femmes » au pluriel, je me suis dit « gare la connerie », nous sommes comblés... Suit la mention « Posth.(ume), 1951. » (pour la remarquable citation ?) - et une liste d'œuvres où ne figurent ni Gilles, ni Le Feu Follet : quelle mouche de non-conformisme a encore piqué Dantzig ? « Pierre Drieu La Rochelle (1893-1945): Etat civil : 1921 ; Mesure de la France : 1922 ; L'Homme couvert de femmes : 1925 ; Genève ou Moscou : 1928 ; Une femme à sa fenêtre : 1930 ; » Dantzig l'estime bâclé, ce livre-là ; il est vrai que les opinions de Drieu sur « les femmes » valent bien les miennes, passons : « Socialisme fasciste : 1934 ; » - eh oui, on voit bien « national-socialisme» !
Ça pue, hein, Drieu, parfois ; prenez vos pincettes et vos masques à gaz... « Histoires déplaisantes : post.(hume, 1963 ; Journal (1935-1945) : post.(hume) 1992. » Bien ! Sans aller jusqu'aux accès couillus du haineux Bégaudeau, je n'irai pas jusqu'à proclamer l'urgence de lire Drieu. Pour Dantzig, vous pouvez vous y risquer, j'y ai pris beaucoup de plaisir, pour l'irrévérence générale de l'ouvrage. Il n'est pas fait bien entendu pour l'assentiment universel. Comme disait l'autre inculte : « On ne peut pas plaire à tout le monde », mais l'auteur du Dictionnaire égoïste de la littérature française, lui, est érudit. Parfois con, mais érudit. Son article suivant est un coup de griffe contre les « REDECOUVERTES » - en effet, comme disait l'autre, « à force de découvrir Dieu, ils vont finir par lui faire prendre froid ».
Lisons : « Le mot redécouverte est généralement employé » (qui est-ce qui écrit mal déjà, Monsieur Dantzig ?) « à l'occasion de la réédition d'un écrivain que tout le monde connaissait très bien. Il existe des écrivains redécouverts tous les quinze ans, comme Paul-Jean Toulet » - toujours pas lu. « On le réimprime, ou en parle comme d'une redécouverte, on l'empêche d'accéder à la grande notoriété » - pas du tout, pas du tout ; c'est un excellent écrivain de second rang, et rrrrran... « Si on le redécouvre, c'est qu'on l'avait découvert, si on l'avait oublié, c'est qu'il y avait de l'oubliable ? » - ah pas mal... Je dis « pas mal » parce que ça me ressemble, évidemment. Mais 'Tout homme qui se méprise se sait quelque gré de ce mépris » (Nietzsche). Autre cible : « REEL : Le réel ! Le réel ! Le réel est ce que les grincheux opposent à toute fiction qui leur déplaît politiquement. » - et encore un coup de patte à la gauche mon pote, ben voyons. « Ils vous reprochent de ne pas voir le réel quand ce n'est pas leur côté que vous regardez » - aussi bien à la droite, finalement. « Leur raisonnement : « Vous avez esthétiquement tort parce que vous êtes quantitativement minoritaires . » C'est curieux, d'ailleurs, parce que, de droite ou de gauche, ils n'ont jamais réussi à se faire élire. » - ma foi si, même qu'ils ferment les hôpitaux, et ce, au nom du réalisme.
Notre auteur est un rigolo. Mais il a du brio. Du brio La Rochelle. Haha.